L’armée malienne à l’école européenne

Sept cents soldats maliens face à  deux cents formateurs issus d'une vingtaine de pays de l'Union européenne. La France, qui…

Sept cents soldats maliens face à  deux cents formateurs issus d’une vingtaine de pays de l’Union européenne. La France, qui commence tout juste à  retirer ses soldats présents au Mali, fournit près de la moitié des effectifs. Le premier bataillon est arrivé dans le camp militaire de Koulikouro, à  soixante kilomètres de Bamako, le 2 avril dernier. à€ terme, ce sont plus de 2500 soldats, «près de la moitié des forces combattantes maliennes», selon un responsable du programme, qui passeront entre les mains des militaires européens. Le but: renforcer les capacités techniques mais aussi théoriques des soldats pour remettre les forces nationales à  niveau. «Le premier défaut de cette armée, c’est que les gens ne sont pas habitués à  travailler ensemble, explique le lieutenant-colonel Vieillefosse, responsable de l’entraà®nement au sein de la mission de formation. Ce qui manque, c’est la cohésion d’une unité qui fait que lorsque le chef donne un ordre tout le monde suit parce que la confiance vient du subordonné et l’ordre du supérieur.» En d’autres termes, il s’agit en premier lieu de mettre en œuvre le bon fonctionnement de la chaà®ne hiérarchique. La formation prévoit aussi des phases techniques spécifiques à  chaque métier – fantassin, artilleur ou encore cavalier – ainsi que des phases communes à  tous les soldats. C’est justement à  ce socle fondamental que sont consacrées les premières semaines de la formation. Droit humanitaire Ce matin-là , au milieu d’un terrain de football, les militaires maliens s’entraà®nent au tir. «Videz les chargeurs! Plus vite!», s’égosille un formateur lituanien dans un anglais sommaire. Dans son dos, un traducteur répète en français les instructions. «Relâchez!» hurle, en fin d’exercice, le militaire lituanien à  ses élèves en nage. «Ce n’est pas difficile, assure l’un d’eux en haletant, il suffit de suivre les instructions. On apprend beaucoup ici. Par exemple les différentes positions de tir: couché, à  genoux ou debout. On connaissait tout ça, mais on se perfectionne.» «Ce sont déjà  des soldats, rappelle un instructeur. Ils possèdent les bases, mais ont besoin de beaucoup d’exercices.» Le formateur lituanien esquisse un sourire: «Ils ne vont pas assez vite, mais ce n’est que le début!» Des cours théoriques sont également dispensés sur la stratégie ou la gestion des troupes. Et parce que certains soldats maliens se livrent, depuis le début de la reconquête du nord du Mali, à  des violences sur les civils, des modules sont également consacrés au droit humanitaire et au droit de la guerre. «Tous les samedis matin, détaille le colonel Vieillefosse, une formation directe est dispensée sur le sujet. Le but est de prévenir les risques d’exactions. Pour contrer le sentiment d’impunité, nous voulons aussi leur montrer qu’ils sont indissociables, que l’action de l’un entraà®ne le discrédit sur l’intégralité de la force.» Ces entraà®nements sont dispensés par des experts prêtés par le ministère britannique des Affaires étrangères. Interviennent également des ONG et des organisations internationales, comme le Bureau des Nations unies pour les affaires humanitaires (Ocha). Un formateur tient enfin à  rappeler, de manière anonyme, que les militaires occidentaux sont là  pour enseigner les règles de la guerre mais pas pour faire la morale. «Nous serions mal placés», juge-t-il, en citant les exemples américains de Guantanamo et d’Abou Grahib.