Le diktat du métal jaune…

Comme l'a révélé le site américain Celebrity Networth, l'homme le plus riche de tous les temps serait l'empereur Kankou Moussa,…

Comme l’a révélé le site américain Celebrity Networth, l’homme le plus riche de tous les temps serait l’empereur Kankou Moussa, qui régna sur le Mali au 14ème siècle, et dont l’empire regorgeait d’or, notamment dans les régions du Bambouk (Kayes) et du Bouré (Sikasso). Près de 700 ans après sa mort, le Mali demeure l’un des pays les plus pauvres du monde, mais l’or est toujours l’une de ses premières richesses, le plaçant au 3ème rang africain et au 11ème rang mondial avec une production relativement stable, estimée à  50 tonnes en 2014. Une position qui pourrait être contestée, les mines de Morila et Yatela arrivant en fin d’exploitation, alors qu’elles représentent à  elles deux environ 15% de la production annuelle malienne. l’espoir repose sur de nouveaux gisements à  Kofi, inaugurée en avril dernier, et Fekola qui ouvrira d’ici 2017. Ces mines pourraient compenser la fermeture des sites historiques, dont la transformation en unités agroindustrielles est en projet. Le secteur est dominé par les entreprises étrangères, canadiennes, sud-africaines et australiennes. Et pour cause, l’importance des investissements nécessaires à  l’exploration et la mise en exploitation élimine de facto les acteurs nationaux, non structurés pour lever des capitaux sur les marchés financiers, à  l’exception de Wassoul’or, détenue par Aliou Boubacar Diallo, mais qui connaà®t des difficultés. La crise survenue en 2012 n’a pourtant pas ébranlé les fondamentaux du secteur, toutes les mines étant situées dans la partie sud du pays, comme l’attestent les 3 milliards de dividendes versés à  l’à‰tat cette année-là , grâce aux participations de 18% à  20% qu’il détient dans le capital de chaque société minière. Sur le plan fiscal, la manne représentait 26% des recettes, soit 248 milliards de francs CFA. Transparence Ces chiffres sont validés et publiés annuellement dans les rapports de l’Initiative pour la transparence dans les industries extractives (ITIE), une norme mondiale lancée en 2003, qui cultive la promotion de la transparence des flux financiers dans les secteurs pétrolier, gazier et minier des pays membres. En confrontant les chiffres publiés par les sociétés et celles des gouvernements, l’ITIE s’assure ainsi que les impôts, taxes, redevances et dividendes générés par l’exploitation de minerais sont effectivement perçus par les à‰tats. « Même si cette initiative contribue à  renforcer la bonne gouvernance, elle n’a pas de mécanismes pour vérifier que la production déclarée correspond réellement à  ce qui est produit », relativise Adama Sangaré, responsable d’ONG. Le Mali a adhéré au statut de pays conforme aux normes ITIE en août 2011, et le dernier rapport, au titre de l’année 2012, a été publié en décembre 2014. Diversification attendue Cela dit, malgré les efforts de l’à‰tat, le secteur minier malien est très peu diversifié, avec une quasi « monoculture de l’or », valeur refuge dont le cours a touché son plus bas en 2015, à  environ 21 millions de francs CFA le lingot d’un kilo, soit une chute de 45% par rapport à  2011. Le sous-sol regorge pourtant de nombreux autres minerais, tels que le fer, la bauxite, ou le manganèse, mais leur exploitation à  grande échelle se heurte au manque d’infrastructures pour transporter et évacuer la production vers les principaux ports de la sous-région. D’o๠la volonté du gouvernement de réhabiliter le chemin de fer Bamako-Dakar, à  travers l’exploitation d’une mine de fer à  Tienfala, ou de lancer la construction du chemin de fer Bamako-Conakry en passant par Kankan, devant évacuer le fer de la zone de Kita. Selon Boubou Cissé, ministre des Mines, « il faut que l’exploitation minière se traduise par des investissements en termes d’infrastructures, et qu’elle permette une certaine indépendance énergétique au Mali. C’’est le principe de « la nouvelle ère minière » voulue par le Chef de l’à‰tat ». Quant à  la recherche pétrolière, qui avait été amorcée pendant le premier mandat d’Amadou Toumani Touré (ATT), notamment à  travers la promulgation d’un code pétrolier et la création de l’Autorité pour la promotion de la recherche pétrolière (AUREP) en 2004, elle a subit un coup d’arrêt depuis la crise. Alors que la quasi totalité des 27 blocs pétroliers avaient trouvé preneurs en quelques années, le gouvernement a, devant les faibles avancées constatées, annulé en octobre 2014 une dizaine de conventions de concession et de partage de production, notamment sur les bassins de Taoudéni, Gao et Nara. La société algérienne Sonatrach, toujours détentrice d’une convention, s’est engagée à  reprendre l’exploration dès que la stabilité sera de retour dans le nord du pays. Nouveaux investisseurs En attendant, le gouvernement tente de dynamiser le secteur minier à  travers une promotion agressive, et cible de nouveaux investisseurs. Par exemple, des entreprises chinoises effectuent des études de faisabilité sur les gisements de fer dans le sud du pays. Témoignage de l’intérêt de la Chine, elle a procédé à  la signature en octobre 2014 d’un contrat de partenariat pour la construction et l’équipement d’un nouveau laboratoire national moderne, et d’un accord cadre relatif à  la coopération dans le secteur. Avec le Qatar, C’’est une convention portant sur l’exploration du métal jaune sur quatre sites, dans les régions de Kayes et Sikasso, qui a été signée entre l’à‰tat malien et Qatar Mining Mali Greenfield (QMMG) en août 2015. Malgré ces avancées, la sempiternelle question des retombées économiques et sociales de l’activité minière reste posée. Certes, l’or représente l’une des premières richesses du pays, mais le secteur n’emploie formellement que 12 000 personnes. Par ailleurs, la valeur ajoutée tirée de l’or ne profite que très peu au Mali, dans la mesure o๠le métal précieux est exporté à  l’état brut, pour être raffiné à  l’étranger. D’o๠le projet, porté par le suisse Swiss Bullion de créer une raffinerie à  Bamako, du nom de Kankou Moussa, qui nécessite un investissement de 40 milliards, avec à  la clef 220 emplois directs créés. Reste à  convaincre l’à‰tat et les sociétés minières de participer au projet, qui semble avoir pris quelques retards. Outre les mines industrielles, le secteur est marqué par l’importance de la production artisanale. Chaque année, ce sont environ 4 tonnes d’or qui sont extraites par des milliers d’orpailleurs, avec son lot de conflits, parfois meurtriers, de dégradation de l’environnement, d’accidents liés au manque de savoir-faire, de travail des enfants et de propagation des maladies sexuellement transmissibles. Ce tableau noir a obligé le gouvernement à  convoquer un forum sur l’orpaillage, présidé par Ibrahim Boubacar Keà¯ta le 18 septembre 2014, afin de dégager les pistes pour mettre fin aux dysfonctionnements et mieux réglementer le secteur.