Le PDES, un géant aux pieds d’argile ?

Sur toutes les lèvres, dans toutes les bouches, le Parti pour le développement économique et la solidarité (PDES) aura réussi…

Sur toutes les lèvres, dans toutes les bouches, le Parti pour le développement économique et la solidarité (PDES) aura réussi son premier pari : faire parler de lui. Lancé sur les fonts baptismaux le 17 juillet, ce nouveau mouvement politique qui se réclame du président Amadou Toumani Touré (ATT), fait la une des journaux depuis 15 jours, au point que l’ensemble des observateurs s’interrogent sur son poids réel et le rôle qu’il jouera lors les prochaines échéances électorales. A nos yeux, une seule question compte : le PDES possède t-il en son sein un champion qu’il pourra porter à  Koulouba, ou sera-t-il un simple faiseur de roi pour un candidat issu d’une autre formation politique ? A la recherche du candidat gagnant Ce parti, que certains commentateurs ont qualifié d’armée mexicaine, réunit dans ses instances dirigeantes de nombreuses personnalités politiques, des cadres de l’administration, et des membres de la société civile. Dans ce secteur, la présence d’opérateurs économiques tels que Simpara Saran Traoré ou Jeamille Bittar, 1er vice-président, était censée rehausser l’image du PDES. Mais C’’est peut-être le contraire, tant leur présence renforce l’idée de collusion et de corruption entre les politiques et le monde économique, source de frustrations pour de nombreux maliens. Sans parler des conflits d’intérêts inévitables. Faut-il encore rappeler que Bittar Impression se positionne sur les marchés des cartes d’électeur ? Le PDES compte aussi une dizaine de ministres, dont son président, Hamed Diané Séméga, titulaire du portefeuille de l’équipement et des transports. Tant mieux, mais ces membres du gouvernement ont-il un réel poids politique ? Lequel d’entre eux serait-il capable de drainer des foules sans les ressources de son ministère ? Quant au Premier ministre Modibo Sidibé, il parait marginalisé, au point qu’il n’a même pas participé à  la cérémonie de lancement du parti voulu par son mentor ATT. Le problème est donc posé : le PDES ne compte pas encore en son sein une personnalité d’envergure capable de faire l’unanimité auprès de ses pairs, et de s’imposer au reste du pays face aux leaders des grands partis traditionnels. Or, la constitution d’un bureau pléthorique de plus de 120 membres qui se neutralisent tous, en dit long sur le fait qu’ATT n’a pas encore choisi son champion pour porter les couleurs du parti aux présidentielles d’avril 2012. Dix-huit mois pour convaincre Or, l’échéance approche. Pour gagner, il ne reste que 18 mois d’ici la fin 2011, le temps imparti pour et implanter le parti localement et imposer un candidat au sein du PDES. Hamed Diané Séméga en a très envie, comme le montrent ses initiatives visant à  écarter ses rivaux les plus dangereux. Son homonyme et ami Hamed Sow apparait comme un candidat crédible et capable de rassembler, qui plus est à  l’origine du Projet de développement économique et social (PDES) portant le même acronyme que le parti. Cela dit, pour s’imposer chacun des prétendants devra aller « au charbon », sur le terrain, à  la rencontre des maliens, pour prouver qu’il peut susciter une alternative crédible et apparaà®tre comme le successeur potentiel d’ATT. Sans l’émergence d’un leader incontesté, le risque pour le PDES est de s’« Adéma-iser », ou subir le même sort que l’ancien parti au pouvoir, l’ADEMA, o๠personne n’émerge vraiment. Des guerres intestines risqueraient ainsi de miner le PDES, pour finalement aboutir à  un reflux de l’engouement et des militants qui ont accompagné sa création. Les partis traditionnels en embuscade C’’est dans ce cadre que les partis traditionnels pourraient prendre leur revanche. Dans la mouvance présidentielle depuis 2007, l’ADEMA, l’URD et le CNID sont apparus comme les grands perdants de l’opération PDES. Le CNID a été amputé d’une partie de ses militants emmenés par le ministre Ndiaye Bah, nommé 2ème vice-président du nouveau parti. Quant aux deux autres, étant les principales formations représentées à  l’Assemblée nationale, accepteront-elles longtemps d’être humiliées par un PDES qui compte une dizaine de ministres au sein du gouvernement, alors qu’il ne pèse qu’une poignée de députés ? Dans le schéma initial de création du PDES, il devait absorber des pans entiers de l’URD grâce à  l’apport d’Oumar Ibrahim Touré, ministre de la santé, et de l’ADEMA, à  travers le soutien de Soumeylou Boubeye Maiga. C’’est donc un premier échec, que l’affluence au CICB ne peut cacher : le nouveau parti ne peut compter que sur ses seules forces. A moins que les dirigeants du PDES montrent qu’une alternative crédible est possible, avec un large rassemblement qui pourrait voir le jour lors du congrès de la fin 2010. En cas d’échec, le président ATT pourrait encourager ses amis à  soutenir un candidat hors du parti pour la présidentielle de 2012. Pour avoir le soutien de Koulouba, l’ADEMA, empêtrée dans sa guerre des chefs, devra d’abord afficher son unité. Quant à  l’URD, le retour sur la scène politique nationale de Soumaà¯la Cissé à  partir de mars 2011en fera sans aucun doute un parti attractif. Enfin, du côté de l’opposition, le Parena de Tiebilé Dramé, et le RPM d’Ibrahim Boubacar Keà¯ta pourraient être le réceptacle des déçus de tous bords, et recevoir l’onction d’ATT qui ne pourra miser que sur le futur gagnant. A charge pour eux de ménager le Général, tout en montrant la force de leurs réseaux et leur capacité de mobilisation sur le terrain.