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Le retour en grâce des plantes médicinales

Il n'y a pas si longtemps, n'utilisaient les plantes médicinales que ceux qui n'avaient pas les moyens d'aller à  la…

Il n’y a pas si longtemps, n’utilisaient les plantes médicinales que ceux qui n’avaient pas les moyens d’aller à  la pharmacie. Moins cher et d’un usage plutôt simple, elles étaient privilégiées par les personnes âgées ou encore les quelque réfractaires à  la « modernité ». Aujourd’hui, elles sont à  la mode, et leur utilisation s’est modernisée, en offrant plusieurs produits à  des consommateurs exigeants. Dans la société traditionnelle malienne, 80 % de la population malienne consultent dans leur première intention les médecins traditionnels. La tendance s’est inversée avec l’urbanisation et l’accès facilité à  des médicaments modernes. Qu’ils soient achetés « par terre » ou en pharmacie, leur consommation a grimpé pendant les dernières décennies, faisant même de l’usage des plantes un signe de « sous-développement ». Mais, les choses changent et à  l’instar de ceux des pays occidentaux qui font la part belle dans leur santé aux plantes et à  leurs vertus, en Afrique et particulièrement au Mali, on revient également vers cette richesse séculaire.Sur les marchés, les herbes attachées en petits fagots, poudres, etc. sur les étals de vieilles dames, fines connaisseuses des choses de la nature, rivalisent désormais avec les potions et pilules de tous genres préparées, scientifiquement, à  base des mêmes herbes. Des recettes ancestrales Les plantes médicinales sont utilisées entières ou en partie (feuille, tige, racine, écorce, fruit,…). Au marché de Fadjiguila en commune du district de Bamako, Assetou Bagayoko herboriste témoigne que devant son étal, ce sont surtout les femmes qui s’arrêtent. Généralement, elles viennent acheter des plantes pour leurs enfants et pour elles mêmes. Parmi elles, « il y a des « grandes dames », ce sont les meilleures clientes, parce qu’elles connaissent les vertus de nos plantes ». Mais les bons jours sont plutôt rares, la recette souvent « ne suffit pas pour nourrir la famille », se plaint-il. A Lafiabougou, en commune V du district de Bamako, la vielle Mariam Traoré est réputée pour le traitement efficace des maladies infantiles. Les femmes viennent de tous les coins de Bamako pour acheter ses produits. « Je n’ai pas d’autre secret que mon sérieux. C’’est un héritage légué par ma mère qui aussi soignait les enfants et même les personnes adultes » confie-t-elle. Chaque jour, vingt à  trente clients viennent la voir pour recevoir ses précieux conseils. Ses produits coutent de 50 à  100Fcfa, ce qui lui permet de gagner entre 8000 et 12000FCFA par jour. C’’est loin d’être une fortune. « Certains nous font des cadeaux, quand le traitement a bien marché et qu’ils sont contents » témoigne –t-elle. Il y a aussi les « commandes spéciales » qui peuvent couter un peu plus cher, de 1000 à  2000FCFA. Du coté des consommateurs, on est satisfait. Djeneba Sissoko pense que la médecine traditionnelle est bien plus efficace pour le traitement des enfants, en plus de coûter moins cher que les produits en pharmacie. Si les femmes sont les premières clientes, les hommes aussi n’hésitent pas à  avoir recours aux plantes, pur toutes sortes de maux, allant de la fatigue à  l’infertilité en passant par les douleurs musculaire. Faire ce métier est presqu’un sacerdoce pour la vieille Mariam et ses collègues. Outre le peu de clients, trouver les plantes devient de plus en plus difficile. En cause, la déforestation et les changements climatiques. « Les bons produits se vendent d’eux-mêmes » La médecine par les plantes, on en entend beaucoup parler sur les radios locales. Les spots publicitaires, passages rémunérés et autres émissions débats se succèdent et se ressemblent. Les tradipraticiens y vantent les mérites de leurs produits qui soignent toute une panoplie de maladies, même celles réputées incurables comme les cancers ou le sida. Certains d’entre eux sont de vrais célébrités dont les services sont reconnus efficaces et sollicités à  travers le pays. Stapha Koné est le seul médecin traditionnel malien à  être présent sur la dernière édition de la FEBAK à  Bamako. Face à  la forte concurrence venue du Bénin, le vieux sikassois a fait étalage de son savoir-faire. Lui ne fait pas de publicité, mais n’en est pas moins connu, si on en croit le flux devant son stand à  la Foire. Pour Stapha Koné, les bons produits se vendent d’eux mêmes. « Cette année la période de la FEBACK a été courte par rapport aux années précédentes, malgré tout J’ai pu faire un bon marché grâce à  mes clients fideles »déclare –t-il. Le vieux Koné souligne que pendant la nuit qu’il reçoit les « gros bonnets pour d’autres choses »… Au niveau de l’organisation faitière de la médecine traditionnelle, appelé la Fédération malienne des tradithérapeutes et herboristes(FEMATH) présidé par Mohamed Fall, C’’est le problème de la difficile collaboration directe entre la médecine traditionnelle et moderne qui se pose. Il est vrai que le gouvernement a fait beaucoup d’efforts pour soutenir la médecine dite traditionnelle mais leur attente est loin d’être comblée, déplore –t-il. Au niveau du département de la médecine traditionnelle, Docteur Djibril Coulibaly responsable botanique juge qu’il s’agit surtout de mieux organiser cette médecine qui peut créer des emplois afin de répondre aux besoins de la population qui connait bien la vertu médicinale des plantes. Des recherches sont menées par sa structure qui permettent d’aider à  améliorer la qualité des produits de la médecine traditionnelle, qui pêchent souvent au niveau de leur dosage. Il n’est plus rare de voir un patient demander à  un médecin s’il peut traiter son mal avec les plantes. Les praticiens sont de plus en plus formés et informés sur les vertus des plantes endogènes et n’hésitent pas à  adresser leurs malades aux tradipraticiens, soit parce que le mal ne nécessite pas l’utilisation de médicaments modernes (lourds et pas toujours sans conséquence sur l’organisme), soit parce que la médecine moderne a montré ses limites. Aujourd’hui, les officines spécialisées dans les médicaments à  base de plantes se multiplient. La preuve que science et tradition arrivent tout de même à  faire la jonction et que la santé par les plantes a de beaux jours devant elle au Mali.