L’eau, un bien naturel payant

Payer pour avoir de l'eau. C'’est une notion qui a du mal à  passer dans les mentalités tant les habitudes…

Payer pour avoir de l’eau. C’’est une notion qui a du mal à  passer dans les mentalités tant les habitudes ont la dent dure. En milieu rural, les pouvoirs publics et les acteurs privés luttent pour offrir une eau de qualité aux populations qui sont depuis des siècles approvisionnées par les mares, marigots et autres rivières ou fleuves qui ne garantissent guère une santé durable. Investir dans les équipements hydrauliques revient cher, mais encore aujourd’hui, nombreux sont les chefs de famille qui ne comprennent pas pourquoi ils doivent payer pour l’eau, un don de la nature. En milieu urbain, la situation est quasi pareille. La souscription auprès des sociétés distributrices n’est pas donné à  tous et des milliers de familles continuent de s’approvisionner auprès de bornes fontaines voire auprès de revendeurs privés avec des pratiques de conditionnement plus que dangereuses. Tous se plaignent de la non-disponibilité de l’eau et son coût jugé élevé alors que celle-ci est visible partout et en principe disponible en quantité. Alors pourquoi payons-nous ? l’Association Africaine de l’Eau regroupe les sociétés de distribution d’eau potable en Afrique. Son secrétaire général, Sylvain Usher, éclaire notre lanterne. « L’eau est captée dans le milieu naturel, potabilisée, transportée jusqu’au domicile de l’abonné et comptabilisée. C’’est le service qui est facturé, il s’agit d’une participation à  la pérennité de l’investissement et la couverture des charges. C’’est cela qui est payé. ». La société de distribution utilise une technologie fiable et pointue et du personnel qualifié. Cet ensemble de moyens a un coût qui, rapporté au volume d’eau distribué détermine le prix de l’eau. « On aimerait tous que le prix du service de l’eau soit le plus bas possible, mais les services techniques sont obligés de tenir compte d’un certain nombre de facteurs. Le premier est que les Etats et les gouvernements n’ont malheureusement pas les moyens d’assurer un service public de l’eau potable gratuit pour l’ensemble de la population » témoigne Thierry Helsens, Hydrogéologue installé au Mali depuis 2002 sur son célèbre blog « Toubabou à  Bamako » qui traite des questions d’accès à  l’eau au Mali. Comment est calculé le prix de l’eau ? Ce prix de l’eau est en général défini de commun accord par l’Etat et la (ou les) société de distribution. Au Mali, depuis un peu plus d’un an, la Société Malienne de Gestion de l’Eau Potable (SOMAGEP) et la Société Malienne du Patrimoine de l’Eau Potable (SOMAPEP) sont en charge respectivement de la gestion de la distribution et les infrastructures liées à  l’eau potable. La SOMAGEP facture l’eau selon un système appelé « tarification progressive du service public de l’eau », qui existe depuis des années. Elle a permis la mise en place la tranche dite « sociale » qui est un tarif relativement bas, pour partie dû à  l’absence de TVA, de 113 FCFA le m3. La seconde tranche de 20 à  40m3 par mois coute 303 FCFA le m3. Selon la loi au Mali, le prix du service de l’eau ne doit, en aucun cas, dépasser 500 FCFA le m3. Or, les calculs des experts ont démontré que pour que tout marche il fallait vendre l’eau à  700 FCFA le m3. Mais les conditions de vie déjà  difficiles de la grande majorité de la population ont poussé l’Etat a fixé un prix planché supportable par les ménages. Si les sociétés crissent des dents, tant mieux pour la population, qui attend d’ailleurs que plus d’efforts soient faits vers une tarification plus adaptée. Par exemple, la modulation en fonction du volume de la famille. « Que vous soyez célibataire ou marié avec quatre femmes et avec 15 enfants, la tranche sociale concerne les 20 premiers m3, un point, un trait » témoigne un chef de famille… Car la nuance est de taille, pourtant, puisque dans le premier cas on va à  une allocation de l’ordre de jusqu’à  650 litres par jour et par personne (une personne seule), alors que dans le second cas elle est de l’ordre de 32 litres (20 personnes). Le système de borne fontaine qui participe également de la politique sociale d’accès à  l’eau a également ses limites. Le gérant de la borne, le « fontainier » revend 500 FCFA le m3 acheté 113 FCFA à  la société d’eau. L’aspect social restant l’achat à  la demande sans recevoir une facture à  la fin du mois.