SociétéÉducation, Société




L’Université de Bamako auditée par le BVG

Conformément aux dispositions de la Loi n°2012-009 l'instituant, le Vérificateur Général a effectué une mission de vérification financière portant sur…

Conformément aux dispositions de la Loi n°2012-009 l’instituant, le Vérificateur Général a effectué une mission de vérification financière portant sur les opérations de recettes et de dépenses effectuées par l’Université de Bamako (UB) pendant les exercices 2010, 2011 et 2012, avant sa scission en quatre universités distinctes. A l’issue des travaux de la séance contradictoire ayant permis la prise en compte des observations de l’UB, le rapport définitif de ladite vérification a été transmis au Président de la République, au Premier Ministre, au Président de l’Assemblée Nationale ainsi qu’au Ministre de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche Scientifique et au responsable de l’entité vérifiée. Pendant la période sous revue, l’Université de Bamako a bénéficié de la part de l’Etat d’importantes subventions totalisant 35,06 milliards de FCFA, soit une moyenne annuelle de 11,68 milliards de FCFA ; en plus des recettes propres qu’elle génère elle-même. Cependant, selon le Vérificateur Général « cet effort financier contraste avec les dysfonctionnements importants relevés en termes d’insuffisances et d’irrégularités financières, aussi bien dans le processus de contrôle interne et dans la collecte des recettes, que dans l’exécution des dépenses ». En effet, la vérification des opérations de recettes et de dépenses de l’UB a mis en évidence « l’importance et l’intérêt de la maitrise, par les organes dirigeants, des outils et instruments de gestion moderne, la valeur et la portée du contrôle hiérarchique et du contrôle a priori. Ainsi, les graves irrégularités constatées sont essentiellement frauduleuses et n’ont pu se réaliser que par l’inefficacité et l’ineffectivité du contrôle interne public, un outil de management indispensable pour s’assurer que cet établissement supérieur de formation et de recherche est dans une logique d’atteinte des résultats », a-t-il ajouté. Il a précisé que « les constatations auxquelles sont parvenus les travaux de cette vérification ont fait l’objet d’analyses approfondies par des méthodes et techniques éprouvées ». Elles restent d’autant plus inquiétantes qu’ « elles surviennent au moment o๠la gestion universitaire et post universitaire demeure au C’œur des préoccupations des pouvoirs publics, comme en témoignent les récentes concertations nationales sur l’avenir de l’enseignement supérieur » a déploré le Vérificateur Général. En guise d’illustration, sur la période 2010-2012, l’Etat a consenti à  l’UB un montant de 5,73 milliards de FCFA au titre des heures supplémentaires dont la gestion n’a été entourée d’aucun texte juridique. Au demeurant, aucune pièce justificative ne supporte l’effectivité de ces heures supplémentaires. Ainsi, un Doyen de Faculté a pu bénéficier de 56 heures supplémentaires par semaine pendant 36 semaines, soit 11 heures supplémentaires par jour, et ce, malgré ses obligations administratives quotidiennes et ses travaux de recherches. Il y a lieu de rappeler que ces frais d’heures supplémentaires sont versés aux bénéficiaires sans prélèvement de s Impôts y afférents. Outre la mauvaise gestion constatée autour des heures supplémentaires, les irrégularités révélées par cette vérification ont coûté à  l’Etat et aux contribuables des pertes financières se chiffrant à  2,40 milliards de FCFA dont 533,83 millions de FCFA au titre de la fraude. On entend par fraude des montants dus mais non perçus en raison notamment d’usage de faux, de détournement, de dépenses sans pièces justificatives, etc. A titre d’exemple, dans le cadre du paiement d’une prestation de service, l’UB a payé les frais d’aménagement du jardin de la cour de la Faculté des Sciences et Techniques avec une facturation du sac de ciment à  35 000 FCFA l’unité, malgré le rejet de l’engagement par le Contrôleur Financier. Selon le Vérificateur Général, « ces faits révèlent la forte dichotomie entre les orientations stratégiques, basées notamment sur la promotion d’un espace éducatif et formateur accessible, et les mauvaises pratiques qui s’exercent dans une sphère censée former l’élite malienne ». Pour lui, « les conclusions de cette vérification appellent à  une prise de conscience générale dans le sens o๠il n’est pas rare d’entendre la population active se plaindre du niveau de nos étudiants. Avec un tel gâchis de ressources financières, ils sont condamnés à  ne pas recevoir un enseignement de bonne qualité. Il s’agit là  d’une perte à  deux niveaux. D’une part l’Etat perd une quantité inestimable de ressources qui auraient pu servir à  renforcer d’autres secteurs de développement prioritaires, et d’autre part, l’avenir de la future génération se trouve hypothéqué par de tels comportements irresponsables dans la gestion des deniers publics. Toutefois, à  travers les entretiens réalisés pendant les travaux de vérification, il est heureux de constater que, malgré tout, certains professeurs restent en marge de ces différents écarts ». Le Vérificateur Général tient à  remercier les autorités de la République du Mali ainsi que les responsables de l’Université de Bamako et les invite à  la mise en œuvre des différentes recommandations formulées afin de contribuer, tous ensemble, au renforcement de la réforme en cours concernant l’enseignement supérieur au Mali. Il a rappelé que les responsables des cas de fraude signalés sont clairement identifiés et feront l’objet de dénonciations, par ses soins, au Procureur de la République en charge du Pôle Economique et Financier de Bamako qui appréciera les suites à  donner.