Culture




Mali 26 mars 1991 : Les photographes de l’AMAP témoignent

Alors que se joue le passage à l’ère démocratique au Mali, émaillé par des manifestations et des dizaines de victimes,…

Alors que se joue le passage à l’ère démocratique au Mali, émaillé par des manifestations et des dizaines de victimes, les photographes de l’Agence malienne de presse et de publicité (AMAP), historiens de l’instant, « font leur travail », c’est-à-dire prennent des photos. Des photos « spontanées », qui deviendront des témoignages privilégiés de l’histoire du Mali il y a 30 ans : du 26 mars 1991.

« Un regard sur le passé », c’est ainsi que s’intitule sobrement l’exposition de photographies initiée par l’AMAP. Une soixantaine de clichés chargés d’histoire qui retracent l’histoire récente, grâce à des reporters qui comme d’habitude fixent les actions. Sauf qu’avec le recul ils reconnaissent « avoir réalisé quelque chose d’important », non sans émotion et fierté, estime Aliou Sissoko, responsable de la section Photo de l’AMAP et à l’époque jeune photographe pour l’agence.

Il a juste 22 ans et travaille là depuis 2 ans lorsque surviennent les événements de mars 1991. Même si les manifestations pour réclamer l’ouverture démocratique ont commencé fin 1990, celle du 22 mars 1991 a surpris par la tournure des événements. Dans ce contexte particulièrement difficile, ces photographes se trouvaient entre le marteau de la population, qui les considérait comme « des espions », et l’enclume des forces de l’ordre, qui les voyaient comme des témoins gênants. Il fallait pourtant continuer, relève Seydou Coulibaly, un autre photographe de l’agence.

« L’objectif était de décrire ce qui se passait. Parce que lors du coup d’État de 1968, il n’y a pas eu de traces. Les photos étaient pratiquement les seuls témoins pour retracer l’histoire », ajoute M. Coulibaly.

Des images parfois violentes, comme celles de personnes poursuivies par la vindicte populaire et brûlées vives ou de cadavres portés par une foule surexcitée, qu’il fallait pourtant immortaliser pour la postérité. Des images choisies mais d’autres « censurées », parce qu’il faut ménager le public malgré tout, estime M. Sissoko.

Même s’il prend toujours des précautions, Aliou Sissoko n’a plus d’appréhension quand il aborde les évènements depuis le 26 mars 1991. C’est d’abord en reporter qu’il s’y rend, pour faire des images. Ce qui est frustrant pour lui, c’est de ne pas avoir d’images ou des images de mauvaise qualité de ce qui se passe.

Même s’il n’est plus photographe depuis près de 30 ans, Seydou Coulibaly n’oubliera jamais ces instants captés difficilement. Il souhaite que ces photos soient bien conservées, car elles  « sont partie intégrante de l’histoire du Mali ».

Fatoumata Maguiraga