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Mali – UE : une coopération à multiples inconnues

Le refus du Mali du déploiement du contingent danois de la Force Takuba a valu au pays de se voir…

Le refus du Mali du déploiement du contingent danois de la Force Takuba a valu au pays de se voir suspendre l’aide au développement du Danemark. Plusieurs craignent de voir la France user de son influence pour mettre plus de pression sur le Mali, à travers l’Union européenne, dont elle assure la présidence.

Plus de 26 milliards de F CFA. C’est le montant moyen annuel de l’aide au développement danoise au Mali, destinée à financer des ONG et des collectivités territoriales. Copenhague a suspendu cette aide, poursuivant toutefois ses projets humanitaires et son soutien à la société civile. Résultante de la brouille diplomatique entre elle et le Mali suite au refus du déploiement du contingent danois de Takuba.

Avec le retrait annoncé de cette dernière, ainsi que de Barkhane, on craint que d’autres pays de l’UE n’emboîtent le pas, tant sur le plan financier que militaire. « La France utilise toute son influence diplomatique et militaire pour faire pression sur le Mali dans tout les sens du terme, pas seulement financier. Elle utilise ses partenaires européens mais aussi des États africains qui sont sous son influence. Cela s’explique notamment par l’engagement de certains États africains de la CEDEAO et de l’UEMOA à prendre des sanctions contre le Mali soutenues par l’Union européenne », explique le Dr. Amidou Tidiani, enseignant-chercheur à l’Université Paris-13. Le président français pourrait baliser la voie en réduisant les postes des coopérants français qui opèrent dans différents domaines au Mali. Il n’y a encore rien d’officiel, mais, dans les coulisses, la situation est étudiée et l’éventualité pas exclue.

Pour la représentante de l’UE au Sahel, Emanuela Del Re, l’Union européenne ne va pas quitter le Mali. « Takuba et Barkhane ne sont pas des opérations de l’Union européenne, mais de certains pays membres. Aujourd’hui, les autorités en place à Bamako manifestent une volonté de remettre en cause cet appui et les États membres de l’UE qui mènent des actions militaires pour combattre les groupes armés au Mali doivent en prendre acte et en tirer les conséquences », a-t-elle déclarée à un média français lors du sommet UE – UA de la semaine dernière.

Cependant, elle estime que la présence supposée de Wagner dans le pays pourrait entraîner une suspension de la mission de formation et d’entraînement de l’Union européenne (EUTM) au profit de l’armée malienne. « La coexistence de la mission de l’EUTM et des mercenaires de Wagner n’est pas acceptable. C’est une ligne rouge ». Vu les récents développements de la situation en Ukraine, il n’est pas exclu que le Mali soit embarqué dans la spirale des sanctions européennes. Notamment pour contenir l’influence russe et dissuader d’autre pays de se tourner vers le Kremlin. Déjà, certains pays européens engagés dans la MINUSMA pourraient se retirer de la force onusienne, à cause de la présence supposée de Wagner, mais aussi du retrait de Barkhane, assignée via la résolution 2584 de l’ONU à protéger la MINUSMA jusqu’en juin 2022. Ce qui est crucial, c’est l’apport financier de l’institution européenne à plusieurs projets. Les autorités de transition ont pris les devants et multiplient depuis quelques semaines les rencontres avec des ambassadeurs ou représentants de la zone.

Le 22 février dernier, une délégation de l’UE a rencontré les autorités de Bamako pour voir dans quelles mesures la coopération bilatérale pourrait se poursuivre. Des échanges que les deux parties ont jugés fructueux.

Boubacar Diallo