« Que fait Ibrahima Boubacar Keita à  Paris ? Il vient à  peine de former un nouveau gouvernement et il se rend à  Paris pour marcher comme un gréviste du Texas avec son chapeau, C’’est décevant » s’égosille Aliou, coiffeur installé à  Djicoroni. La rage perceptible dans sa voix, il échange avec ses clients dans un bambana ségovien. « Les présidents sénégalais, nigérien, béninois, togolais et malien ne sont pas des syndicalistes, ils n’ont pas été élus pour battre le macadam. Des citoyens ont péri dans une explosion de magasin d’armes à  Brazzaville, des Maliens et une quinzaine de Tchadiens ont perdu la vie dans le nord du Mali récemment et pourtant les dirigeants européens n’ont pas effectué le déplacement pour venir présenter leurs condoléances à  nos peuples » explique Niangadou Alidji qui prône la réciprocité entre les Etats. Dans cette ambiance surchauffée de ce salon de coiffure o๠l’on a du mal à  bien suivre sur TV5 l’hommage au caricaturiste Cabu tué lors de l’attaque du siège de Charlie Hebdo, chacun y va de son commentaire. Un homme bien endimanché, les yeux rivés sur le téléviseur de fortune, attire notre attention. Interpellé, il affirme ne pas comprendre « la présence du président IBK à  la marche de Paris à  moins que ce soit pour remercier Hollande suite à  l’opération Serval car la vie de douze français ne vaut pas plus que celle d’un soldat malien tombé à  Nampala et en plus les assaillants de Charlie Hebdo n’ont fait qu’appliquer la Charia : ignore celui qui blasphème Dieu et tue celui qui s’attaque au prophète Mohamed ». Le quinquagénaire, catégorique dans ses positions, refuse toute explication sur la liberté d’expression et les exigences démocratiques. Le crépuscule s’installant, nous prà®mes la direction de la mosquée des turcs à  l’Aci 2000. Les fidèles approchés embouchent la même trompette. « Vous, les médias, parlez de fanatiques, d’illuminés, d’obscurantistes et d’islamistes or quand ces farfelus dessinateurs caricaturent Mohamed (PSL) vous ne dites rien. Ce qui leur est arrivé est bien » tonne Konandji Aboubacar pour qui « 4 personnes C’’est peu, Coulibaly devait tuer plus de 100 personnes avant de mourir, nul ne doit jouer avec le prophète et chaque musulman se doit de défendre l’islam ». Hamed, tunisien résidant à  Bamako, tempère « je ne suis pas d’accord avec la violence d’o๠qu’elle vienne car les chrétiens commettent les mêmes actes de barbarie. En ce siècle de croyances, les humains doivent éviter d’invectiver les religions puisque C’’est une corde trop sensible ». Sous un foulard rouge –gris, madame Farima accepte de se prononcer sur le sujet. « Je prie ici deux fois par jour et je vous assure que les attaques contre l’islam nous font tous mal d’o๠notre courroux contre la présence du président IBK en France. Il aurait dû se faire excuser. Le comble C’’est lorsqu’il dit sur TV5 Monde que le Mali a envoyé au Maroc des imams pour les former contre l’extrémisme or nous croyions que C’’était pour renforcer leurs connaissances et non les mouler dans la vision occidentale de l’islam. Si l’occident veut vivre libre, qu’il arrête les attaques contre l’islam. Nous ne soutenons pas les fanatiques mais lorsqu’ils défendent le prophète Mohamed, nous applaudissons ». La nuit s’installant, les fidèles, chapelet à  la main, retournent à  l’intérieur de la mosquée pour la dernière prière du soir avec, qui sait, le sentiment d’avoir enfin extérioriser ce qu’ils ruminaient depuis longtemps et l’envie, peut-être un jour de combattre les détracteurs de l’islam.