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Un rapport français épingle le manque d’efficacité de l’EUTM

Alors que le 19 juillet dernier, 17 Famas, trouvaient la mort dans une opération « terroriste coordonnée » contre le camp militaire…

Alors que le 19 juillet dernier, 17 Famas, trouvaient la mort dans une opération « terroriste coordonnée » contre le camp militaire de Nampala. Un rapport de la commission sénatoriale française des Affaires étrangères et des Forces armées, sur le bilan des opérations extérieurs de la France, datant du 13 juillet, pointait du doigt, le manque d’efficacité de la mission de formation de l’Union européenne au Mali (EUTM), chargée d’entraîner les forces armées maliennes.

Depuis le 18 février 2013, suite à l’adoption de la résolution 2085 du Conseil de sécurité des Nations Unies, la mission de formation de l’Union européenne au Mali (EUTM), forte d’un effectif d’environ 578 militaires (dont une douzaine de Français), apporte un soutien à la formation et à la réorganisation des forces armées maliennes afin d’améliorer leur capacité militaire dans l’objectif de rétablir puis garantir l’intégrité territoriale du Mali. Depuis le début de sa mission, sept bataillons maliens ont été formés et équipés, dont quatre ont déjà bénéficié d’un cycle de réentraînement. Un huitième est en en cours de formation. À ce jour, EUTM Mali a formé plus de 7 500 soldats.

Le rapport présenté à la commission sénatoriale française et qui fait le bilan des opérations extérieures de la France, porte une appréciation très mitigée sur l’action de formation de l’EUTM au Mali. « Engagé dans le nord du Mali à Kidal, le premier bataillon formé n’a pas été en mesure de maintenir ses positions face à des groupes armés touaregs, alors qu’il était, semble-t-il, en supériorité numérique, ce qui montre une certaine fragilité. […] Le caractère peu opérationnel des formations militaires dispensées n’a pas permis aux forces armées maliennes de reprendre leurs positions dans le nord du Mali et elles continuent de subir la pression de groupes armés dans le centre du pays », peut-on lire dans le document.

Le rapport revient sur les critiques du député européen d’origine espagnol, Javier Nart, qui dans une interview en date du 16 mai 2016, s’était ému du « caractère peu opérationnel de la formation, le manque de motivation des soldats et des officiers, un entraînement essentiellement défensif et insuffisamment offensif, un manque d’armement pour conduire les entraînements, et la faible expérience des instructeurs sur la réalité du terrain et du combat, rendant la formation purement théorique ».

Le rapport observe aussi que la volonté de rapidement restaurer les forces armées maliennes pour tenir le terrain, a mis en place des premiers bataillons formés qui n’ont pas fait preuve d’une réelle aptitude au combat, d’où l’instauration de cycle de réentraînement. Il préconise que la formation « mise désormais davantage sur la qualité que sur le nombre des combattants. Il faudra également que les unités formées puissent disposer des armements nécessaires pour suivre une formation opérationnelle et que leurs unités soient mieux équipées ».

Le rapport propose d’agir au sein des instances européennes et des États-membres « pour rendre les formations dispensées plus opérationnelles. Renforcer la coopération entre EUTM et Barkhane, permettre aux instructeurs d’EUTM de participer à des opérations de Barkhane ou à des patrouilles mixtes pour connaître la réalité du terrain et des combats et parfaire l’instruction apportée aux forces armées maliennes […] et adopter une vision régionale, en s’ouvrant aux forces armées de l’ensemble du G5 Sahel ».

Le concept de la Minusma n’est, lui aussi, pas épargné par le rapport, qui juge son action d’une « efficacité variable », il ajoute de surcroit que, « le système mis en place par les Nations unies dans les missions multidimensionnelles intégrées reste un système lourd, limité, et consommateur d’effectifs civils et militaires, pour un coût élevé […] Il faut attendre qu’elles soient sévèrement attaquées pour que le Conseil de sécurité leur donne un mandat plus offensif. » Le rapport poursuit, « Ce devrait être l’inverse, le mandat de départ devrait être robuste et l’allègement n’intervenir qu’une fois la situation sécuritaire apaisée. »

Le rapport souligne, « l’hétérogénéité de ces forces composites », qui sont, « d’importance variable […], équipés de façon disparate, ayant des modes opératoires et des niveaux de préparation opérationnelle différents, s’exprimant dans des langues différentes et maîtrisant moyennement la langue de travail de la force, ni celle du pays hôte, ce qui ne facilite pas leur intégration, ni le travail de renseignement de terrain ».

Il conclut, concernant la mission de la force onusienne au Mali, en pointant « la faiblesse de la préparation opérationnelle, l’absence d’entraînement commun préalablement à la mission, les lacunes capacitaires » qui « ne garantissent pas aux soldats engagés un niveau de protection comparable aux standards français alors que nos forces sont engagées dans les phases les plus dures »,  et rappel qu’au Mali, la MINUSMA a perdu une soixantaine de soldats quand Serval/Barkhane en a perdu 17 depuis le 11 janvier 2013.