Réaménagement gouvernemental : la surprise du chef !

On peut sans se tromper affirmer que l'actuel locataire de Koulouba a le sens de la surprise. C'’est en effet…

On peut sans se tromper affirmer que l’actuel locataire de Koulouba a le sens de la surprise. C’’est en effet le jour de la Tabaski qu’Ibrahim Boubacar Keà¯ta (IBK) a opéré ce nouveau changement, qui ressemble d’avantage à  un réaménagement qu’à  un remaniement, tant il comporte peu de nouveautés. En effet, la quasi-totalité des ministres reste en place, à  commencer par le premier d’entre eux, Modibo Keà¯ta, qui avait lui même affirmé lors de sa nomination en janvier 2015, que son terme était de 12 mois. La véritable surprise de ce changement réside donc dans le timing d’exécution. C’’est dimanche, à  la mi-journée que les téléspectateurs de l’ORTM, stupéfaits, ont appris la nouvelle par la voix du secrétaire général de Koulouba, Mohamed Alhousseiny Touré, en habits de fête, invité sur le plateau du flash spécial. Le choix du moment est justifié par le départ dans l’après midi du président, invité à  participer à  la 70ème session de l’Assemblée générale des Nations Unies à  New York. Pourtant, ce changement d’équipe était programmé pour être annoncé avant la visite présidentielle en Algérie le 2 septembre. Sauf que les blocages liés à  la situation à  Anefis ont empêché ce calendrier, qui prévoyait l’entrée au gouvernement d’éléments des groupes armés de la Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA) et de la Plateforme. La sanction de l’insécurité C’’est donc plusieurs semaines plus tard qu’IBK et son Premier ministre ont finalement provoqué le remaniement, jugé nécessaire par les défaillances de l’appareil sécuritaire. Très décrié, le ministre Sada Samaké fait les frais de sa gestion calamiteuse de l’affaire des passeports, qui lui avait valu plusieurs interpellations à  l’Assemblée nationale, jugées peu convaincantes. l’insécurité régnante dans la capitale, avec son lot de braquages et cambriolages ont également suscité l’exaspération chez les deux têtes de l’exécutif, au point que le président jugeait en privé « Sada dépassé ». l’ancien ministre de la sécurité, qui avait perdu le portefeuille de l’administration territoriale lors du remaniement de janvier, est pourtant un fidèle depuis le temps o๠IBK était Premier ministre. Une loyauté qui lui coûta d’être limogé de son poste d’Ambassadeur à  Abidjan dans les années 2000. Le Général Samaké est remplacé par le colonel Salif Traoré, ancien gouverneur de la région de Kayes et diplômé de la prestigieuse école militaire française Saint-Cyr. à‚gé de 43 ans, le nouveau ministre qui est réputé efficace, homme de terrain et à  l’écoute, hérite sans aucun doute du portefeuille le plus sensible du moment. Une justice peu réactive Second et dernier limogé du gouvernement, Mahamadou Diarra, ministre de la Justice et Garde des sceaux, occupait ce poste depuis janvier, après avoir été ministre du logement dans l’équipe dirigée par Oumar Tatam Ly. Son éviction, parfois incomprise du grand public, tient à  la « déception » du Chef de l’à‰tat qui attendait de lui davantage d’engagement dans la lutte contre la corruption, l’un des chevaux de bataille de sa gouvernance. La lenteur dans l’aboutissement des différents dossiers transmis à  la justice par le Vérificateur général et la Cellule d’appui aux structures de contrôle de l’administration (CASCA), rattachée à  la présidence, et le peu de résultats concrets, on eu raison du ministre. Outre les affaires de corruption, sa remplaçante, le magistrat Sanogo Aminata Mallé, devra accélérer la justice transitionnelle, nécessaire à  la réconciliation nationale. Scissions et chaises musicales Une autre femme fait son entrée au gouvernement, portant leur nombre à  5 sur 31 (loin du futur quota de 30%), en la personne de Marie Madeleine Togo. l’ancienne directrice du CHU Gabriel Touré prend le département de la Santé, en remplacement d’Ousmane Koné, trésorier du parti présidentiel, qui est transféré à  l’environnement. Un choix qui peut surprendre, tant l’homme avait été unanimement salué pour sa gestion de la crise Ebola en 2014. Ce financier était toutefois déjà  programmé pour quitter la santé en janvier, au profit du directeur actuel de l’Agence nationale pour l’investissement des collectivités territoriales (ANICT), le Docteur Ag Acory, afin de prendre la tête du ministère des Finances, qui a finalement attribué à  Mamadou Igor Diarra. Autre surprise, la scission du ministère des Affaires étrangères et de la Coopération internationale, détenu par le diplomate Abdoulaye Diop, qui perd ce second volet ainsi que l’intégration africaine, récupérés par Cheikna Seydi Ahamady Diawara, transfuge du ministère du Plan. Selon des sources au sein de l’exécutif, Abdoulaye Diop se verrait en partie sanctionné pour avoir quelque peu délaissé la diplomatie au profit de la négociation de l’Accord, un dossier complexe et piégeux, qu’il n’avait pourtant pas sollicité. Ce changement souhaité par le Premier ministre risque de poser des difficultés dans l’application, car « dans un pays en développement comme le Mali, les affaires étrangères et la coopération internationale sont intimement liés, voir indissociables », témoigne un diplomate occidental. Quant à  Abdoulaye Idrissa Maiga, ministre de l’administration territoriale, il était critiqué pour son obstination à  vouloir organiser les élections communales et régionales en octobre, envers et contre tous. Il a subi un revers après la décision gouvernementale de les reporter sine die, et vient de perdre la responsabilité de la décentralisation, un portefeuille désormais dévolu à  son collègue Mohamed Ag Erlaf, qui hérite aussi de la Réforme de l’à‰tat. Un département stratégique pour ce cadre originaire de Kidal. En terrain connu pour avoir dirigé l’ANICT, il devra conduire le très sensible chantier de la régionalisation, conformément à  l’Accord de paix. En attendant le « vrai » remaniement… Si beaucoup jugent ce réaménagement insignifiant, voire « inutile », le « vrai » remaniement est annoncé pour la fin d’année, avec un probable départ du Premier ministre et l’arrivée de nouvelles figures politiques et de la société civile. Malgré tout, le Chef de l’à‰tat a une fois de plus imposé son timing et sa méthode, bougeant là  et o๠on ne l’attendait plus, en renouvelant toute sa confiance au Premier ministre Modibo Keita, que l’on disait pourtant pressé de sortir. Les équilibres politiques ont par ailleurs été maintenus, tous les membres du Rassemblement pour le Mali (RPM) sont reconduits, de même que leurs alliés de la majorité présidentielle. l’absence des ex-rebelles de la CMA est justifiée par leur décision de suspendre leur participation au Comité de suivi de l’Accord depuis le mois d’août, et donc du processus de paix, chose qui a évolué depuis la reprise des travaux dudit comité le mardi 29 septembre. A contrario, l’arrivée de Samba Bana Diallo, représentant de la Plateforme, au ministère de l’Aménagement du territoire et de la population, dénote d’une proximité de vues avec le gouvernement. Si les premiers gouvernements d’IBK faisaient une large place à  la promotion de la jeunesse, on note depuis l’arrivée de Modibo Keà¯ta un retour des hommes d’expérience, dont il est, à  73 ans, le premier des représentants. Les jeunes ministres Mamadou G. Diarra, Dr Boubou Cissé, Ndiaye Ramatoulaye Diallo, Thierno Diallo, et Housseini Amion Guindo, sont tous relégués en queue de peloton de la hiérarchie gouvernementale.