Politique




Révision constitutionnelle : à la lumière du droit

Déposée sur la table de l’Assemblée nationale en mars dernier, le projet de révision de la Constitution de 1992 a…

Déposée sur la table de l’Assemblée nationale en mars dernier, le projet de révision de la Constitution de 1992 a été adopté par les élus le vendredi 2 juin dernier. Qu’en pensent les acteurs du droit ? Eléments de réponses avec le Dr Fousseyni Doumbia, professeur de droit et constitutionnaliste.

Pour le Dr Doumbia, un premier postulat doit être posé : la Constitution du Mali est l’une des plus stable au monde mais aussi une des plus dépassée. « Elle n’a pas subi la moindre réforme depuis son adoption en 1992. Mais une constitution a besoin d’évoluer, de tenir compte de la matière constituante et être adaptable aux nouvelles circonstances. Dans ce sens, elle est dépassée ». Selon le juriste, il y a beaucoup de dispositions de droit constitutionnel qui permettent à la démocratie d’être de plus en plus évoluée. Jusqu’à présent, le Mali n’a pas pu en tenir compte. « Quand on regarde sur le plan international, il y a par exemple une directive de l’UEMOA qui demande à ses états membres depuis 2000 d’instaurer une Cour des comptes. Jusqu’à présent le Mali ne l’avait pas encore fait parce que la disposition qui doit permettre la mise en place de cette cour se trouve dans la constitution. Et dans celle de 1992, il n’est question que d’une section des comptes. Il faut donc changer la constitution pour cela et à ce jour c’est seul un référendum qui peut le faire », poursuit-il, en ajoutant qu’« on ne peut pas organiser un référendum et utiliser l’argent du contribuable pour des dispositions qui ne sont pas d’une trop grande sensibilité pour la vie de la Nation ». C’est pourquoi il estime que la nouveauté dans la constitution révisée qui est de faire passer certaines modifications devant l’Assemblée nationale est un point positif.

En ce qui concerne la question du non-respect du fameux article 118 alinéa 3 de la Constitution de 1992, le Dr Doumbia estime « qu’au moment de la votation référendaire, il y aura des citoyens qui n’auront pas suffisamment de liberté pour faire un vote aussi important ». « Si le référendum ne permet qu’à une minorité de voter, il y a piège », prévient-il. Selon notre expert, « le droit constitutionnel a prévu des mécanismes d’adaptabilité à la situation d’un pays. Que l’on soit dans un état normal ou dans un pays fragile comme le Mali, il y a des solutions. On va au référendum au mois de juillet alors que la classe politique est divisée, le peuple malien n’est pas suffisamment imprégné du contenu de cette réforme et il a d’autres priorités comme la sécurité et le retour à la stabilité. Il y a des mesures particulières qui auraient pu être mises en place par rapport à la situation particulière du Mali ». Et de prendre l’exemple de pays où il y a eu des constitutions de transition qui ont régi les périodes de crise avant que ne soit votée une nouvelle constitution qui ouvre la voie à une nouvelle république.