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Sidi Mohamed Ag Ichrach : « Après la Tabaski, je m’installerai définitivement à Kidal »

Sidi Mohamed Ag Ichrach, gouverneur de Kidal, a enfin foulé mercredi 23 août, le sol de la capitale du Nord pour…

Sidi Mohamed Ag Ichrach, gouverneur de Kidal, a enfin foulé mercredi 23 août, le sol de la capitale du Nord pour un séjour de 3 jours. Sa venue, peut-être considéré comme la volonté des différentes parties d’avancer sur la mise en oeuvre de l’Accord. Le gouverneur de Kidal, peu avant son départ pour Gao, a répondu aux questions du Journal du Mali, sur ce séjour qui pourrait être le point de départ vers un retour de l’administration à Kidal, qui n’a jamais été effectif depuis les événements de mai 2014.

Ce déplacement à Kidal était-il de votre initiative ?

Depuis que j’ai été nommé gouverneur, je ne suis pas arrivé à Kidal de façon satisfaisante, la dernière fois que je suis venu ça ne s’est pas bien passé. Depuis lors, j’ai essayé d’entretenir de bons rapports avec la CMA et la Plateforme pour rejoindre Kidal et rapprocher les points de vue, afin que l’on puisse avancer dans le domaine de le réconciliation et de l’Accord de paix. Il y a eu une succession d’événement qui sont intervenus et qui ont permis ma venue à Kidal. Le premier, c‘est le cessez-le-feu déclaré par la Plateforme il y a une semaine, le deuxième c’est la déclaration de Bilal Ag Chérif qui a affirmé que l’administration pouvait revenir à Kidal et parallèlement à ça, depuis deux mois, je suis en train d’échanger avec la CMA, la Plateforme et les notabilités, pour rapprocher les points de vue. Je leur ai dit que la région ne pouvait pas vivre sans administration. C’est la conjugaison de tout ces efforts qui ont rendu possible ma venue à Kidal. 

Quel bilan faites-vous de ces 3 jours à Kidal ?

Le bilan est très positif de mon point de vue. Il y avait une armoire à glace qu’il fallait bouger vis-à-vis des populations, je crois que cela a été fait. Nous nous sommes parlés, nous avons compris comment chacun est en train de se positionner pour l’avenir. Ces échanges avec la populations ont été très importants. Je ne pense pas qu’habituellement les gouverneurs entretiennent des concertations satisfaisantes avec les populations de le région de Kidal et c’est ce cadre-là que j’aimerais instaurer : toujours échanger avec les populations, le société civile, les chefferies, pour essayer d’avancer ensemble et permettre le retour progressif de l’administration. Cette première étape était très importante à franchir. Ce que j’ai aussi constaté lors de ce voyage, c’est que la population de Kidal a de grandes attentes, aussi bien vis-à-vis de l’administration que vis-à-vis des partenaires au développement, parce que la région est dans un état de délabrement avancé, les activités économiques sont arrêtées, les administrations sont délabrées. Il faudrait remettre tout ça en place pour permettre le redémarrage économique de la région. Enfin, ce qui me paraît aussi important, après mes discussions avec les populations, c’est leur désir de paix dans la région, cette préoccupation est ressortie au niveau de tous les groupes que j’ai rencontré, que ce soit la CMA, la société civile, les femmes, les jeunes, les opérateurs économiques. C’est vraiment la préoccupation essentielle des populations de Kidal. Ce sont les trois éléments que je tire de mon voyage là-bas.

Les chefs de fraction et les notabilités ont exprimé des doléances à L’imam Dicko, parmi lesquelles, le changement du gouverneur pour un autre plus «neutre», qu’en est-il aujourd’hui ?

J’ai eu des échanges avec la coordination des chefs de tribus de la région de Kidal et je peux vous dire que cette doléance semble être dépassée. Ils ont une exigence forte, c’est de disposer d’une administration impartiale et neutre entre les deux groupes. Cela cadre parfaitement avec ma vision du problème parce que je considère que dans la situation de la région de Kidal, pour bien faire les choses, vous devez observer une certaine équidistance entre les parties . Je pense donc que c’est une question dépassée.

Vous êtiez à Kidal pour préparer le retour de l’administration, y’a-t-il un chronogramme élaboré ?

Il n’y a pas de date précise pour le moment, il y a des propositions. La société civile a identifié les services qu’elle juge prioritaire comme le secteur de l’eau, de l’électricité, de l’éducation, de la santé. Ses services-là, la population en a immédiatement besoin. Nous allons essayé d’établir un chronogramme que nous allons soumettre aux autorités nationales, qui vont l’apprécier et essayer de démarrer le retour de l’administration à Kidal. Il n’y a pas pour le moment de papier écrit. Vous savez, les acteurs sur place ne voulaient même pas que je reparte, ils pensaient que j’étais venu pour rester. Ils disent qu’à chaque fois les gens viennent, ils disent qu’ils vont revenir mais ils ne reviennent pas.

Justement, quand retournerez-vous à Kidal ?

Après la Tabaski, je m’installerai définitivement à Kidal ! Pour moi c’est une installation définitive, je n’attendrais pas les protocoles et autres, le reste de l’administration me trouvera là-bas.

Le gouvernorat est vétuste et délabré, comment ferez-vous pour siéger avec votre administration ?

Vous savez, je suis de Kidal, je suis un nomade, si on me donne une paillote, j’irai habiter là-bas, il n’y a pas de souci, que le gouvernorat soit en bon état ou pas ce n’est pas un problème. L’essentiel pour moi, c’est qu’il y ait la paix à Kidal.

Une trêve de 15 jours a été signée entre le CMA et la Plateforme, mercredi 23 août, jour de votre arrivée à Kidal. Pourquoi une paix définitive n’a-t-elle pas été signée entre ces deux mouvements ?

Lorsque les groupes armés ont convenu de la trêve de 15 jours, les notables m’ont aussi demandé « mais pourquoi 15 jours et pas une paix définitive ?». Je comprends aussi les groupes armés qui ont leurs éléments à gerer, il faut pouvoir les rassembler, les sensibiliser, les ramener dans certaines positions. Mais je peux vous dire que les gens avec qui j’ai échangé sont vraiment engagés en faveur du processus de paix, c’est vraiment l’élément essentiel, tout le monde est d’accord pour dire que la situation ne peut pas perdurer et qu’il faut aller vers la paix. Donc je ne m’arrête pas vraiment à ces 15 jours. Après la fête de Tabaski, on va les pousser encore pour essayer d’aller à plus de 15 jours. La société civile à Kidal est d’ailleurs en train de discuter de ça.

Qui a assuré votre sécurité à Kidal, vous aviez refusé de vous rendre dans la capitale du Nord si la CMA s’occupait de votre sécurité sur place ?

C’est la CMA qui a assuré ma sécurité. Elle a monté le mécanisme de sécurisation avec la Minusma. Je logeais dans le ville de Kidal même. Je peux vous dire que ça s’est bien passé, il n’y aura pas de problème. Nous sommes entre nous vous savez, nous avons nos solutions.