Tourisme : la longue nuit des hôteliers

Finies les randonnées au pays dogon, les balades en pinasses et les marchandages avec les artisans. l'occupation du Nord par…

Finies les randonnées au pays dogon, les balades en pinasses et les marchandages avec les artisans. l’occupation du Nord par les groupes armés, le coup d’Etat et ses soubresauts ont fait fuir du Mali les derniers touristes, ceux qui continuaient à  venir malgré les menaces d’enlèvements et les avertissements de leurs pays. Jusqu’au dernier moment les acteurs maliens et étrangers du tourisme ont essayé de rassurer les visiteurs potentiels. «Â Ce symbole va à  l’encontre de la généralisation du phénomène médiatique international faisant du Mali un pays ‘infréquentable’ », écrivaient en décembre 2010 les responsables du Festival au Désert, à  propos de la venue de l’ancien président Amadou Toumani Touré à  ce célèbre événement. Feu sur les conseils aux voyageurs Plusieurs hôteliers français jugeaient eux-aussi très sévèrement les conseils aux voyageurs des pays occidentaux, notamment ceux de la France. Ils y voyaient la cause de la crise du tourisme plutôt que la conséquence des risques d’enlèvements. « Si la France déconseille le Mali aux touristes, elle doit dédommager les régions touristiques. Comparativement à  la même période de l’année dernière, nous sommes à  47% de nos recettes » s’indignait en mars 2011 Dominique Lusardy de l’hôtel Doux Rêves, à  Mopti. « La position extrême de la France, liée à  la présence d’AQMI au Nord Mali, qui consiste à  décourager toute activité touristique dans la zone, y compris Mopti et le Pays Dogon, fait basculer toute la région dans un chaos économique », dénonçait en mai 2011 l’hôtel Y’a pas de problème, également à  Mopti. Quelques mois plus tard, trois touristes étaient enlevés à  Tombouctou, un quatrième y était tué et divers groupes armés s’emparaient des trois régions du Nord. Appel aux dons Le tourisme malien et les milliers de personnes qui en vivent sont désormais entrés dans une période d’inactivité sans espoir à  l’horizon. Les conséquences socio-économiques sont graves, dans un pays o๠la fréquentation touristique était en progression et o๠plusieurs régions – notamment celles de Mopti et du Nord – dépendaient des visiteurs pour se développer. Pour survivre certains établissements s’en remettent aux dons. « l’insécurité est générale et la tension permanente », écrit Amédée Régis Mulin, directeur de l’hôtel La Maison Rouge à  Mopti, en évoquant la « situation économique dramatique » de son établissement. « Garder le personnel en place signifie assurer les dépenses de 6 familles et limiter les risques de vandalisme et de pillage de l’hôtel. » A Bamako les milliers de chambres d’hôtels sont vides. Située face à  l’ORTM, cible du coup d’Etat puis de l’offensive des bérets rouge, l’hôtel de l’Amitié a été déserté. Depuis son lieu de congé, Filifin Coulibaly, chef réceptionniste, dit n’avoir jamais connu une telle situation en 15 ans de service. Certains clients avaient tenu à  rester malgré les multiples fouilles pour accéder à  l’hôtel. C’’est seulement lorsque des militaires ont occupé les toits que la direction a décidé de transférer les clients dans un autre établissement du groupe. Le personnel de l’hôtel de l’Amitié est actuellement en congés anticipés. Au Rabelais, établissement familial à  Niarela tenu par des Français, 27 employés ont été mis au chômage technique. l’hôtel Bouna qui était à  50% de ses chiffres d’affaires, enregistre seulement 10% de ces chiffres donc 40% de pertes pour le complexe. La direction commence logiquement à  réduire ses effectifs. Salariés contre patrons Si la crise est réelle la situation est parfois mal vécue par le personnel, qui estime que les patrons profitent du contexte pour se débarrasser d’eux sans ménage. «Â Les patrons doivent prendre en compte l’aspect social avant d’envoyer les employés en congés technique. Les partants, qui sont des chefs de famille, ne sont pas payés », témoigne amèrement Boubacar Doumbia, employé à  l’hôtel Bouna. Aux dires de M. Sissoko, chef du service administratif et financier du même établissement, l’Office malien du tourisme et de l’hôtellerie (Omatho)  ne remplit pas sa mission de contrôle. «Â Il est important que l’Omatho échange avec le personnel et les promoteurs des hôtels pour dissuader tout abus de la part des patrons qui ne manqueront pas de profiter de la situation pour congédier leurs employés », indique-t-il.