Travail des enfants : quand le Mali déroge aux conventions internationales

Bien qu'ayant été condamnés, le travail et l'exploitation des enfants continuent dans de nombreux pays. Le Mali ne fait pas…

Bien qu’ayant été condamnés, le travail et l’exploitation des enfants continuent dans de nombreux pays. Le Mali ne fait pas exception à  la règle, en dépit de l’adoption par l’Assemblée nationale des conventions N°138 et N°182, portant respectivement sur l’âge minimum d’admission à  l’emploi et sur l’élimination des pires formes de travail des enfants. Des chiffres alarmants Les spécialistes définissent le travail des enfants comme «l’exploitation de ceux-ci par des adultes en vue de réaliser des profits rapides et de dégager un avantage comparatif déloyal ». On estime qu’environ 250 millions d’enfants, dans le monde, sont astreints au travail. Ils ont souvent entre 5 à  14 ans, et constituent la proportion la plus élevée avec 40%. Sur les 250 millions d’enfants travailleurs, l’Asie occupent la tête du classement avec 61%, suivie de l’Afrique qui enregistre un taux de 32%. s’agissant du Mali, il ressort que si le travail des enfants est une pratique très ancienne, C’’est à  partir de 1979 que le phénomène a atteint son degré le plus élevé. Aussi, il est plus fréquent en milieu rural qu’urbain. Au ministère de la promotion de la femme, de l’enfant et de la famille, on estime que 18,1% d’enfants de moins de 15 ans travaillent en milieu rural contre 6,4% en milieu urbain. De nos jours, regrettent les acteurs, on constate une forte croissance du phénomène. Car en milieu rural, le nombre est passé à  26,9% contre 14,8% en milieu urbain. Et sur l’ensemble du pays, le taux est passé de 16,7% à  25,7%, soit une croissance de 9%. En outre, et toujours selon le ministère de tutelle, le travail des enfants est plus développé dans le secteur minier que dans le secteur agricole. Ils sont 12.285 enfants (filles et garçons) qui travaillent aujourd’hui dont 1.547 dans le domaine agricole, contre 3.531 dans les sites d’orpailleurs. 3.601 petites filles travaillent en milieu urbain, tant dis que le même nombre se trouve dans le secteur informel. Un phénomène qui malheureusement n’est pas en train de régresser. 13 heures de travail par jour La véritable racine de la pratique du travail des enfants réside dans la pauvreté. Mais pour les défenseurs de la cause de l’enfance, à  celle-ci, il faut ajouter d’autres facteurs, tels que la démission ou de l’incapacité des parents, et les facteurs socio-culturels. « Ce sont les facteurs culturels relatifs aux croyances populaires, aux coutumes locales et aux traditions qui expliquent le travail des enfants », nous explique la présidente de l’Association pour la promotion de la femme et de l’enfant (APROFEM). Pour Mme Bakayoko Aminata Traoré, qui regrette que le phénomène échappe à  la vigilance des autorités, les enfants constituent des sources de revenus pour beaucoup de parents. « Le problème, C’’est la définition même du terme », constate notre interlocutrice. Qui argue que le travail des enfants est lié à  l’idée largement partagée selon laquelle ceux-ci sont censés suivre les traces de leurs parents. Il leur faut donc apprendre, puis exercer la même activité qu’eux et ce dès leur plus jeune âge. Le cas de ce jeune garçon de 14 ans en est une illustration parfaite. De l’école aux travaux champêtres, il n’y a eu qu’un pas à  franchir pour Mady Coulibaly. Fils d’agriculteur à  Kolouninko (quartier situé à  la périphérie de Bamako en commune III), le jeune Mady a vu sa scolarité écourtée dès la 3ème année au profit des travaux champêtres. Il vit avec son oncle Drissa depuis plusieurs années. A chaque hivernage, il participe à  l’exploitation de la parcelle familiale, au même titre que les adultes de la maison. Il n’est pas rare non plus de voir des enfants employés dans des petites entreprises o๠ils ne bénéficient d’aucune rémunération. C’’est le cas de Seydou, âgé de 13 ans environ. Vivant avec son grand frère (commerçant à  Bamako), il gère une des boutiques de celui-ci tous les jours de la semaine. Selon lui, il travaille de 8 heures du matin à  21 heures, et ses jours de repos sont seulement les fêtes de Ramadan ou de Tabaski. Comme Mady et Seydou, ils sont des milliers d’enfants soumis au travail à  des fins économiques. Si certains envahissent aujourd’hui les sites d’orpaillage traditionnels, d’autres (notamment des filles) sont envoyés dans les grandes villes pour être filles de ménage. Beaucoup d’entre elles terminent dans la prostitution. Face à  cette situation, les acteurs de la promotion de l’enfance ne recommandent qu’une chose : que la loi sévisse !