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Turquie, Russie : les implications de l’assassinat de l’ambassadeur russe

Quelles sont les conséquences de l’assassinat, le lundi 19 décembre, de l’ambassadeur russe à Ankara ? C’est la question que tous…

Quelles sont les conséquences de l’assassinat, le lundi 19 décembre, de l’ambassadeur russe à Ankara ? C’est la question que tous ou presque continuent de poser. Mais, de toute évidence, il est difficile de prédire ce qui va se passer.

Le lundi 19 décembre, l’ambassadeur russe en Turquie, Andreï Karlov, a été tué de huit balles en plein discours dans une galerie d’art par un jeune de 22 ans, Mevlüt Mert Altintas, qui a été abattu par les forces spéciales turques. La Russie et la Turquie ont décidé de coopérer pour enquêter sur le meurtre de l’ambassadeur. Mais ce que l’on sait aussi, c’est qu’avant d’être abattu, l’assaillant, policier qui plus est, a crié : « N’oubliez pas Alep, n’oubliez pas la Syrie ! ». Les autorités turques l’accusent d’être membre de la confrérie islamiste de Fethullah Gülen, accusé d’avoir orchestré le coup d’Etat manqué de juillet dernier. Une accusation rejetée par M. Gülen, que les Etats-Unis ont toujours refusé d’extrader, arguant un manque de preuve.

Selon Marc Semo, journaliste au Monde, spécialiste de la diplomatie, « ce jeune fait partie de ces islamistes qui, en Turquie, avaient soutenu la politique du gouvernement qui avait pris fait et cause pour la rébellion syrienne. La Turquie était l’un des pays qui a le plus appuyé la révolution syrienne. Mais aujourd’hui, ces islamistes sont désarçonnés par le virage du Président Recep Tayyip Erdogan qui, depuis la réconciliation avec la Russie, a décidé de tirer un trait sur Alep, en échange du fait que la Russie lui a permis de créer une petite zone de sécurité au nord de la Syrie qui lui permet à la fois d’accueillir des réfugiés et des troupes de la rébellion modérée. »

« Il y a tout une partie des islamistes qui est indignée par l’attitude du Président turc, et qui reste mobilisée contre le régime d’Assad et son grand allié, à savoir la Russie. », ajoute Marc Semo.

L’ambassadeur russe était en poste à Ankara depuis 2013, et a vécu la crise entre les deux pays commencée en novembre 2015 après que les Turcs eurent abattu un avion russe le long de la frontière syrienne. Ce qui a ravivé les tensions entre les deux pays qui étaient déjà opposés dans la guerre en Syrie, en ce sens qu’Ankara soutenait la rébellion contre le régime d’Assad qui est pourtant l’allié de la Russie. La réconciliation est intervenue le 9 août dernier.

Depuis lundi, les questions pleuvent sur les conséquences de cet assassinat. S’agit-il d’un coup monté pour détériorer les relations entre la Russie et la Turquie, comme l’ont pensé à la fois Poutine et Erdogan ? Pour Marc Semo,  cet événement, à court terme, « ne peut que renforcer les relations entre les deux pays, mais à long terme, ça peut être compliqué, parce qu’on verra exactement le niveau de complicité dont a pu bénéficier ou non ce policier. »

Mais ce qui est sûr, c’est qu’il est très difficile de prédire ce qui va se passer. « À court terme c’est un choc pour la Russie, qui se rend compte que la guerre en Syrie est un risque pour elle, un enlisement sur le terrain militaire, parce que pendant le régime d’Assad récupérait Alep, il perdait en même temps Palmyre. Donc, les Russes sont conscients que la prétention de récupérer l’intégralité du territoire syrien est impossible. », explique M. Semo.