Une justice escargot qui manque de moyens

Pour enclencher une procédure judiciaire, il faut plusieurs étapes. D'abord le dépôt d'une plainte auprès du procureur général. Ensuite le…

Pour enclencher une procédure judiciaire, il faut plusieurs étapes. D’abord le dépôt d’une plainte auprès du procureur général. Ensuite le juge d’instruction du tribunal compétent est saisi par le procureur, via un réquisitoire introductif, selon le jargon judiciaire. Après ces formalités, C’’est au président du tribunal de déterminer le juge d’instruction qui va superviser l’affaire, grâce à  l’audition des parties et des comparutions éventuelles. Si ces premières étapes paraissent normales, dans certains cas, elles ne suivent pas toujours cet ordre et des citoyens se retrouvent en détention préventive de longue durée, en attendant de connaà®tre leur sort. Pour Dramane Diarra, juge au tribunal de la Commune V, plusieurs facteurs expliquent cela. « Les juges d’instruction des tribunaux classiques n’ont pas de ressources, contrairement aux juges du pôle judiciaire ou du pôle économique ». s’ajoute à  cela, le nombre élevé de dossiers à  traiter. « Si la procédure dépasse les deux ans, elle va à  l’encontre de la loi, même si la loi prévoit de renouveler le mandat ». Dans certains cas, précise l’homme de loi, il peut s’agir d’une négligence de la part du juge qui peut oublier une affaire. Pour Maà®tre Abdoulaye Sidibé, avocat, « on ne peut pas dire qu’une instruction est lente car il s’agit de rechercher la vérité. Et dans cette recherche, la précipitation ne sert à  rien, sinon on parvient à  un procès bâclé, alors qu’il s’agit de libertés à  sauvegarder ou à  mettre en péril ». Afin de pallier ces lenteurs, le juge Diarra préconise de façon globale le renforcement des ressources des cabinets d’instruction, en considérant les chambres d’accusation comme des entités judiciaires à  part entière. En outre, le contrôle reste insuffisant pour obliger les agents de la justice à  accélérer les choses. Sur des affaires médiatisées comme celle de l’ex-putschiste Amadou Haya Sanogo, le juge Diarra est clair : « nous pensions que l’affaire allait être traitée lors de la dernière session des assises, mais le parquet général n’a pas réagi à  temps. Ils s‘agit selon moi d’un manque de volonté politique ». Le magistrat déplore également le fait que ce soit le ministre de la Justice qui nomme les procureurs en lieu et place d’une élection organisée par le Conseil supérieur de la magistrature. Des propos qui laissent entendre qu’une réforme en profondeur de la justice est plus qu’urgente.