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Universités et grandes écoles : former pour l’emploi

Depuis quelques années, de nombreuses rencontres, et notamment le forum de l’éducation en 2008, ont conduit à une réflexion pour…

Depuis quelques années, de nombreuses rencontres, et notamment le forum de l’éducation en 2008, ont conduit à une réflexion pour une restructuration vigoureuse du système d’enseignement supérieur. Malgré tous les efforts fournis, les résultats tardent à se faire sentir et l’inadéquation entre la formation universitaire et le marché de l’emploi persiste. Tous les diagnostics menés jusqu’ici s’accordent sur le déficit de gouvernance du dispositif, tant sur le plan des ressources humaines que sur celui des processus et procédures.

L’enseignement supérieur, à l’image du fondamental, est confronté à des difficultés liées à la croissance pléthorique des étudiants, à la faiblesse des capacités d’encadrement, à l’insuffisance d’infrastructures, aux lacunes dans le pilotage des institutions d’enseignement supérieur et à l’inadéquation du cadre juridique et institutionnel. Entre 2011 et 2012, 101 000 étudiants étaient inscrits dans les établissements d’enseignement supérieur public répartis en facultés, instituts et grandes écoles, alors que la capacité d’accueil était de 43 608 places, soit un ratio de 1 place pour 2,31 étudiants. Quant à l’effectif du personnel enseignant, il était de 1 181, soit un taux d’encadrement de 85,43 étudiants pour un enseignant. Ce double ratio a évolué les années suivantes, passant à 1 place pour 2,56 étudiants en 2013 tandis que le nombre d’enseignants augmentait de manière substantielle, passant à 1 385. Pour absorber les 114 498 étudiants inscrits dans les structures universitaires au titre de l’année universitaire 2014-2015, « 15 immeubles ont été loués par l’État en plus des infrastructures publiques disponibles. Sur le volet hébergement, le Centre national des œuvres universitaires (CENOU) dispose aujourd’hui de capacités d’accueil de 2 768 lits. Les infrastructures en cours de réalisation sont la cité universitaire de 4 080 places de Kabala, laquelle abrite déjà le siège de la direction générale du CENOU », explique Hamadi Ould Mohamed, chef de la division coopération au CENOU.

Gros budgets Pour faire face à la demande en éducation supérieure en constante progression, le gouvernement continue donc d’investir, en priorisant la création de nouveaux pôles universitaires dans les régions de Koulikoro (Kati et Kabala), Ségou et Sikasso. Pour financer ces infrastructures budgétivores, il fait appel à l’appui de ses partenaires. Ainsi, pour la construction des universités de Kati et Sikasso, des requêtes de financement ont été respectivement adressées à la Turquie et au Venezuela par la voie diplomatique, selon des sources proches du ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique. « Dans le cadre de l’amélioration de la qualité de la formation pour permettre au système d’enseignement supérieur d’être apte à devenir un acteur stratégique du développement durable, la mise en œuvre du Programme de promotion et de renouvellement des ressources humaines de l’Université sur la période 2007-2017 se poursuit. Il s’agit de la formation de 660 enseignants pour un coût global de 18 milliards de nos francs », souligne Abdoul Salim Cissé, directeur national de l’enseignement supérieur.

Mais l’État n’est pas le seul pour qui l’addition est salée. Financer les études supérieures d’un enfant, voire de plusieurs, est un véritable investissement que tous les parents n’ont pas les moyens de faire. Bien qu’à l’université publique, la grande partie des coûts (scolarité, fournitures, frais de survivance à travers les bourses) soit prise en charge, nombreux sont les parents qui préfèrent se serrer la ceinture et envoyer leurs enfants dans les universités et grandes écoles privées. « La scolarité de mes deux enfants varie de 900 000 à un million par an. Ça fait beaucoup mais je veux leur offrir les meilleures chances et le sacrifice vaut la peine », témoigne Mme H., mère de deux étudiants. Ces établissements, qui se comptent aujourd’hui par centaines et proposent tous types de formations, ont fleuri ces dix dernières années, variant considérablement l’offre et proposant des plus-values comme la reconnaissance du diplôme obtenu à l’international, ou encore la possibilité de poursuivre plus tard à l’étranger. Pour garder l’université publique dans la course, celle-ci a donc du rapidement se mettre aux normes avec la mise en place le système LMD (licence-master-doctorat), en vigueur dans le cadre d’une réforme au niveau de l’Union monétaire ouest africaine (UEMOA). De l’avis de Dr Abdou Malle, il s’agit d’un système performant qui permet de mettre les étudiants au centre de leur propre formation et, en même temps, de résoudre le problème d’inadéquation entre l’enseignement universitaire et les exigences du marché de l’emploi. « C’est pourquoi, en conformité avec les orientations politiques, l’accent sera mis sur l’amélioration du cadre global du dispositif national d’enseignement supérieur et de la recherche scientifique, à travers l’amélioration des capacités de gouvernance, la valorisation des conditions de vie et de travail des enseignants et des chercheurs », a-t-il ajouté.

« Ce système va échouer comme d’autres pour cause de la politisation de l’école malienne. Il y a trop de discours, mais pas de concret. Tous ces hommes qui se succèdent ne font que placer leurs militants à la tête des différentes structures », regrette Oumar Touré, étudiant en licence de géographie. La question de la fameuse Association des élèves et étudiants du Mali (AEEM), acteur incontournable de la gestion des universités depuis les années 90, reste également posée. Chaque année, les violences qui secouent les facultés, les grèves à répétition pour telle ou telle revendication, sont autant de problèmes qui s’ajoutent à ceux déjà nombreux que connait l’espace universitaire.

Former à l’emploi Car les défis demeurent et ont pour noms maîtrise des dépenses sociales en faveur des étudiants, renforcement des capacités d’accueil, et des capacités administratives et pédagogiques du personnel de l’enseignement supérieur, amélioration de la qualité des enseignements, intégration des TIC dans l’enseignement supérieur, développement de nouveaux pôles universitaires régionaux et mobilisation de financements pour la recherche. Mais le plus important reste l’adéquation de la formation dispensée avec les besoins du marché de l’emploi qui ne cesse de réclamer des ressources humaines de qualité, mais peine à absorber les milliers de jeunes diplômés. Une dynamique a été enclenchée depuis quelques années et les efforts portent des fruits qui commencent à être visibles reconnaissent les acteurs qui estiment que l’optimisme doit rester de mise. Selon Bakary Cissé (fonction à complèter), le Mali et la Banque mondiale ont signé une convention pour le financement du Projet d’appui au développement de l’enseignement supérieur (PADES) pour un montant total de 33 millions de dollars US, dont 19 millions de dons et 14 millions de crédit. L’objectif du projet est d’améliorer la gouvernance du système de l’enseignement supérieur et d’appuyer les offres de formation qui conduisent à une employabilité. Différent du Projet de développement de compétence et emploi jeunes (PROCEJ) du ministère de l’Emploi et de la Formation professionnelle, ce projet utilise les mêmes formes de synergie et concerne la même cible. « Actuellement quatre institutions d’enseignement supérieur (IES) bénéficient du financement de ce projet : deux grandes écoles (l’École nationale d’ingénieurs et l’Institut polytechnique rural de Katibougou), et deux universités (l’Université des sciences techniques et technologiques de Bamako (USTTB) et l’Université de Ségou) », explique-t-il. Autant de dynamiques et de projets qui devraient, dans un futur proche, favoriser les étudiants maliens dans leur intégration sur le marché de l’emploi.