Politique




Wassim Nasr : « Le coup d’Etat profite aux factions djihadistes »

Le 24 mai, le Président et le Premier ministre de la Transition ont été destitués par le Vice-Président, le Colonel…

Le 24 mai, le Président et le Premier ministre de la Transition ont été destitués par le Vice-Président, le Colonel Assimi Goita, les accusant d’avoir violé la charte de la Transition. Un « coup d’Etat dans le coup d’Etat », condamné par plusieurs acteurs nationaux et l’ensemble de la communauté internationale. Dans cet entretien, qu’il nous accordé, Wassim Nasr, Journaliste à France 24, spécialiste des groupes djihadistes, livre son analyse sur les possibles conséquences de ce coup d’Etat sur le plan sécuritaire au Mali.
Quel impact  peut  avoir ce nouveau coup d’Etat sur la situation sécuritaire dans le pays ?
Du moment qu’il y a eu un coup d’Etat, que ce soit le premier ou le deuxième que je qualifie de « surcoup », cela profite aux factions djihadistes quand ceux qui sont censés les combattre, donc l’armée, et particulièrement ces officiers-là qui étaient supposés être au devant de la lutte contre les djihadistes avant le premier coup d’Etat, sont occupés par la politique à Bamako.
Cette situation socio-politique au Mali risque-t-elle d’avoir des incidences sur les autres pays du Sahel ?
Ce qui se passe au Mali n’est pas du tout déconnecté de ce qui s’est passé au Tchad avec la mort du Président Deby. Même avec le Président Bazoum, le Niger fait face à des défis djihadistes très importants. La situation dans tous ces pays y compris le Burkina Faso, est totalement connectée. L’idée de créer le G5 pour combattre les groupes djihadsites vient aussi du fait que dans la zone des 3 frontières, les djihadistes opèrent sans considération des frontières. Maintenant, quand on a une problématique politique dans un des pays de ce G5 en l’occurrence au Mali qui est plus concerné que les autres, cela crée des problèmes pour toute la structure et donne des bouffées d’air aux groupes djihadistes qui d’ailleurs ne sont pas du tout acculés. Dans cette zone des 3 frontières, comme dans le centre du Mali, la situation se complique de plus en plus et si les militaires qui sont supposés faire face à ces groupes djihadistes sont occupés à faire la politique, cela  va donner de plus en plus de marges de manœuvre à ces groupes.
Doit-on craindre une démotivation des soldats de rang  au front?
Quand les meilleurs unités et les officiers les plus formés sont occupés à faire autre chose que leur métiers des armes, évidemment que les militaires de rang vont forcément se sentir abandonnés. On sait tous les problèmes qu’a l’armée malienne et les armées africaines en général en termes de corruption, d’envoi des militaires en faction dans des zones pendant des mois sans être relevés, de sous équipements, d’exactions etc. Dans ces conditions, lorsqu’ils voient que ceux qui sont supposés mener la bataille ne sont pas à leurs côtés, cela démotive et contribue à des défaites sur le terrain.
Mohamed Kénouvi
 Cet article a été publié dans Journal du Mali l’Hebdo n°320 du 27 mai au 02 juin 2021