Collectivités territoriales : une grève aux conséquences multiples

L’Intersyndicale des travailleurs des Collectivités territoriales est depuis le 8 mai en grève de 5 joursUne grève dont les conséquences sont déjà visibles.

Dans ses revendications, 11 points sont inscrits, dont la création par arrêté des corps de la Fonction publique des Collectivités territoriales et l’élargissement des Conseils d’administration du Centre de formation des Collectivités territoriales et de l’Agence nationale d’investissements des Collectivités territoriales aux travailleurs des collectivités, notamment. De la mairie du District à la mairie de la Commune IV, en passant par les services techniques, les bureaux sont fermés et des usagers désespérés en quête de documents administratifs le constatent avec amertume. Fatoumata Tembely, une étudiante vivant à Kalaban Coura, a fait le tour de plusieurs mairies avant de se rendre en Commune IV, espérant y obtenir une fiche individuelle pour passer le concours de l’École militaire inter armes (EMIA). « J’avais rendez-vous à la mairie de la Commune V le lundi. Malheureusement, c’était fermé à cause de la grève. J’ai fait le tour de plusieurs mairies sans succès. Je suis éligible pour le concours de l’EMIA, mais le dépôt des dossiers a commencé lundi et prend fin ce vendredi, soit l’intervalle de la grève ». Un désarroi que la jeune dame partage avec beaucoup d’autres personnes. Plusieurs se plaignent de ne pouvoir légaliser leurs documents ce qui les empêche de concourir à des offres. Une autre conséquence de cette grève. L’agence nationale de sécurité routière (ANASER) avait donné un ultimatum de 72 heures pour libérer le domaine public routier illégalement occupé par des commerces. Des opérations devaient être menées, mais selon des responsables de l’ANASER, des agents de la mairie sont sollicités pour mener à bien ses actions. Les syndicalistes, qui précisent que cette grève concerne principalement les agents des mairies, ajoutent qu’un accord avait été trouvé sur 9 des 11 points depuis longtemps, mais qu’il n’a pas été respecté jusqu’à ce jour « Nous allons observer la semaine, pratiquement tous les agents sont à la maison au niveau des collectivités, nous restons ouvert au dialogue avec le gouvernement jusqu’à la fin de la semaine pour voir si on peut trouver ensemble des points d’accord » explique Issa Sanogo, secrétaire général du syndicat des travailleurs des municipalités. Toutefois, à l’issue de la grève, une évaluation est prévue. Elle permettra de décider des prochaines actions. Selon certains responsables, une grève illimitée n’est pas à exclure.

Le Maire de la commune VI révoqué de ses fonctions

« Sur le rapport du ministre des Collectivités territoriales, le Conseil des Ministres a adopté un projet de décret portant révocation de Monsieur Alou COULIBALY, Maire de la Commune VI du
District de Bamako »,  peut-on lire sur le communiqué du  conseil des ministres du 2 mai 2018. Une décision dénoncée par le parti de l’Union pour la République et la Démocratie (URD), mais qui aurait pu être évitée, selon certains observateurs.

En droit malien la décision de révocation peut être envisagée  après la suspension, « lorsque la faute reprochée est estimée suffisamment grave. Les deux formes de sanctions ne s’excluent pas », explique Maître Amadou Tiéoulé Diarra, avocat au barreau du Mali et professeur de droit. Ce qui est le cas, selon le ministre des Collectivités territoriales qui s’exprimait sur la question, à l’issue du conseil des ministres. « A la suite des rapports de l’inspection de l’intérieur ( .. .) Les faits qui lui ont été reprochés non seulement étaient  vrais, mais étaient très graves. »

Bien que relevant du pouvoir discrétionnaire du conseil des ministres, la décision de révocation doit respecter les règles en la matière, note Maître Diarra. Notamment, les arguments, car « la révocation doit être motivée. » Ce qui signifie que la décision peut être attaquée devant le juge administratif qui peut l’invalider en cas « d’absence de motifs ». Une démarche que s’apprête à engager, l’URD dont les responsables ne sont  guère étonnés par cette décision. « Nous ne sommes pas étonnés, depuis la suspension, nous savions que c’était le but principal. Mais le but recherché c’est de nous divertir », affirme Monsieur Moussa Seye Diallo, secrétaire général adjoint chargé de la communication du bureau national de l’URD.

Décision politique ?

En tout cas « la démocratie n’y gagne pas », car « politiquement certains peuvent penser que le jeu n’en vaut pas la chandelle », parce que la suspension du Maire serait la conséquence de sa décision d’accorder un espace à  Monsieur Moussa Sinko Coulibaly pour son meeting , estime Maître Diarra. Ajoutant que le ministre des Collectivité territoriales « aurait pu simplement annuler les décisions prises par le Maire et cela aurait donné des leçons. »

Estimant que le Maire Alou Coulibaly a fourni suffisamment d’explications, le secrétaire général adjoint de la communication de l’URD affirme que c’est son parti qui est visé. « A l’URD nous sommes légalistes, nous restons derrière la loi, nous nous défendrons, mais nous ne nous laisserons pas distraire. »

Révoqué, le Maire perd ses fonctions d’officier de police judiciaire mais demeure membre du conseil municipal.