Zeïnabou A. Touré : « C’est Fouss qui a assassiné mon fils ! »

Âgée de soixante ans, Zeinabou Abdoulaye Touré fait partie des familles de victimes présentes au procès Sanogo. Aliou Boncana Maiga, son fils fait partie des 21 bérets rouges dont les corps ont été découverts en décembre 2013 à Diago. C’est dans sa chambre d’hôtel au Kaaky Palace qu’elle nous a reçu. 

Journal du Mali : Vous faites partie des familles de victimes, pouvez-vous nous raconter votre histoire ?
Zeïnabou Abdoulaye Toure : je suis la mère de Aliou Boncana Maiga, soldat béret rouge de 2ème classe. J’étais chez moi à Mayena dans le cercle de Bafoulabe du 30 au 1er mai 2012 lorsque j’ai vu à la TV mon fils aux mains d’un soldat béret Vert qui le questionnait. Je n’ai pas compris pourquoi Aliou se trouvait dans une telle situation. J’ai donc appelé immédiatement son père au téléphone pour lui demander d’allumer la télé. Le lendemain j’ai appelé ma petite sœur à Bamako chez qui Aliou vivait quand il n’était pas au camp. C’est comme ça que j’ai eu la confirmation de son arrestation. La veille Aliou avait quitté la maison de sa tante pour ses cours d’anglais. Il a été arrêté lors d’une fouille dans un Sotrama alors qu’il rentrait à la maison. Ne pouvant plus d’attendre, j’ai décidé de me rendre à Bamako. Entre temps ses frères ont visité les commissariats et gendarmeries de Bamako. L’un des frères d’Aliou, un béret vert, a été jusqu’au camp de Kati pour dire quAliou ne faisait pas partie des militaires qui ont participé au coup d’État. Malgré cela, il n’a pas été relâché. Je me suis rendu sur place. J‘ai rencontré au camp un garde du corps de Haya Sanogo. Il se faisait appeler Rougeo. J’ai demandé à rencontrer Haya. Après une altercation entre moi et Rougeo, Haya est finalement sorti de son bureau. Je lui ai fait part de l’objet de ma visite. Il ma répondu en ces termes, « maman votre fils va bien ainsi que tous les autres. Rentrez vous reposer et tranquillisez-vous ». J’ai demandé à parler à mon fils au téléphone, il a refusé. Le lendemain j’ai été à Konna ensuite à Sikasso à la recherche de mon fils. Lorsque le charnier de Diago a été découvert, j’ai rejoins le juge Yaya Karembé ainsi que d’autres familles des victimes. On a été entendu. Ensuite nous avons effectué un test ADN avec les corps des soldats morts. Aliou se trouvait parmi les 21 soldats assassinés. Depuis, je ne dors plus.

Quel genre d’homme était Aliou ?
Il avait 28 ans lors de son arrestation. Il était grand et costaud. Il a été tué alors qu’il était fiancé. Aliou a une fille. Elle a sept ans aujourd’hui. J
e n’ai appris son existence qu’après sa mort. Aliou a quatre frères et quatre sœurs. Il était le cadet des garçons. C’était un jeune homme poli, respectueux et gentil. Il n’aurait pas faire de mal a une mouche. Il a été lâchement abattu par des individus mal intentionnés.

Après l’ouverture du procès hier et sa suspension de 48 heures, quelles sont vos impressions sur le procès à ce stade ?
Les avocats de la défense ne savaient pas que le procès atteindrait un tel niveau. Le délai de 48 heures demandé par la défense signifie beaucoup pour nous car ils savent que les victimes représentés par le collectif des avocats de la partie civile sont prêts à aller jusqu’au bout. Ils n’ont pas demandé deux jours de suspension pour rien. Ils savent ce que nous avons comme preuve.

Quelles sont vos attentes dans ce procès ?
Que justice soit faite. Que les coupables soient condamnés.

Pensez-vous que l’assassin de votre fils se trouve parmi les 18 accusés ?
Je le sais et j’ai les preuves. Un soldat nous l’a dit. Je suis certaine que c’est Fousseni Diarra dit Fouss.

Si vous étiez amenée à rencontrer une fois de plus Amadou Haya Sanogo. Que lui diriez-vous ?
Je lui dirais juste que lorsqu’il m’a dit que mon fils et les autres sont en parfaite santé, ils le sont maintenant. C’est tout. Il comprendra.