Destitution de Trump: démocrates et républicains à couteaux tirés sur l’enquête

Démocrates et républicains américains se sont écharpés lundi en offrant leurs conclusions diamétralement opposées de l’enquête en destitution contre Donald Trump, illustrant les profondes divisions partisanes qui traversent les Etats-Unis.

L’opposition démocrate a présenté son dossier contre le président républicain, en amont d’un vote crucial à la Chambre des représentants sur sa mise en accusation (« impeachment »), qui pourrait intervenir avant Noël.

Et les parlementaires s’apprêtent à dévoiler dès mardi les chefs d’accusation retenus contre le milliardaire new-yorkais, qui sont selon plusieurs médias l’abus de pouvoir et l’entrave à la bonne marche du Congrès.

La cheffe des démocrates au Congrès, Nancy Pelosi, a en effet annoncé qu’une conférence de presse avec notamment le chef de la commission judiciaire, Jerry Nadler, et le président de la commission du renseignement, Adam Schiff, se déroulerait mardi pour annoncer « les prochaines étapes » du processus de destitution.

Au terme d’une audition acrimonieuse longue de près de dix heures, marquée par de vives passes d’armes, Jerry Nadler n’a en tout cas laissé aucun doute sur sa position: la conduite de Donald Trump « est à l’évidence passible d’une mise en accusation. Cette commission agira en conséquence », a-t-il déclaré.

Le milliardaire « a violé son serment envers les Américains, il a fait passer son propre intérêt avant notre sécurité nationale », a-t-il martelé. M. Trump « représente encore aujourd’hui une menace pour l’intégrité de nos élections et notre système démocratique ».

Les républicains ont tenu la ligne de défense de la Maison Blanche, dénonçant « un spectacle politique ».

Les démocrates « n’arrivent pas à se remettre du fait que Donald Trump est président » depuis sa victoire surprise en 2016, a lancé le numéro deux républicain de la commission, Doug Collins.

– « Un coup monté » –

Proclamant depuis le début de l’affaire qu’il n’a rien fait de mal, Donald Trump a confié lundi avoir regardé « un petit peu » cette audition fleuve. « C’est une honte, c’est un coup monté », a-t-il encore dit.

Forts de leur majorité à la Chambre, les démocrates ont lancé fin septembre l’enquête en destitution, après avoir appris que Donald Trump avait demandé à l’Ukraine d’enquêter sur le démocrate Joe Biden, bien placé pour l’affronter lors de la présidentielle de 2020.

L’accusant d’abus de pouvoir, ils estiment que le président a fait pression sur l’Ukraine, notamment en suspendant une importante aide militaire destinée à ce pays en guerre avec la Russie.

Les parlementaires pourraient aussi inclure le refus de la Maison Blanche de collaborer dans l’enquête en destitution, qu’elle juge « anticonstitutionnelle », dans un second chef d’accusation: l’entrave à la bonne marche du Congrès.

Compte tenu de la majorité démocrate à la Chambre, Donald Trump deviendra certainement le troisième président de l’histoire, après Andrew Johnson et Bill Clinton, mis en accusation au Congrès américain.

Lâché par ses troupes, Richard Nixon avait démissionné avant le vote en séance plénière.

Cependant, le milliardaire devrait ensuite être acquitté lors du procès au Sénat, où les républicains sont majoritaires et le soutiennent largement.

– Contre-feux –

Des semaines d’auditions et d’enquête n’y ont rien fait, au contraire: républicains et démocrates sont encore apparus fermement retranchés dans leurs positions lundi.

« Le président Trump a mené pendant des mois un complot pour solliciter une aide étrangère dans sa campagne de réélection en 2020 », a affirmé un juriste qui représentait les démocrates, Daniel Goldman.

Le juriste Steve Castor, au service des républicains, a lui jugé que les démocrates n’étaient pas parvenus à démontrer un abus de pouvoir au cours de cette enquête « précipitée ».

Il a aussi évoqué à plusieurs reprises Joe Biden et son fils.

Hunter Biden avait été nommé au conseil d’administration d’un grand groupe gazier ukrainien, Burisma, lorsque son père était vice-président de Barack Obama. Ce qui mène le président à les accuser, sans preuves, d’être corrompus.

Ces accusations font partie des nombreux contre-feux allumés par le président républicain pour délégitimer la batterie d’enquêtes qui le visent depuis son arrivée à la Maison Blanche, en janvier 2017.

Avant l’affaire ukrainienne, les plus de deux ans d’enquête sur le dossier russe n’étaient, aussi, qu’une « chasse aux sorcières » selon lui, voire une « tentative de coup d’Etat ».

Mais un rapport officiel publié lundi a largement contredit ses allégations, en établissant que le FBI n’avait pas d’arrière-pensée politique quand il a ouvert en 2016 une enquête sur de possibles liens entre l’équipe de campagne de Donald Trump et Moscou.

L’inspecteur général du ministère de la Justice Michael Horowitz souligne toutefois que certains agents ont par la suite commis des « erreurs et des omissions ».

De quoi conforter le président américain. « Ce qui s’est passé est une honte », a-t-il réagi.

Inflation, climat, communication: les chantiers de Lagarde à la BCE

La nouvelle présidente de la Banque centrale européenne, Christine Lagarde, a annoncé début décembre une vaste revue de la stratégie de politique monétaire, inchangée depuis 2003. Pourquoi ce chantier et quels points vont être discutés ?

– Dernier toilettage: 2003 –

Chargée par son mandat de garantir « la stabilité des prix » en zone euro, la BCE a précisé cet objectif en 2003 et s’efforce d’atteindre un taux d’inflation « inférieur, mais proche de 2% », niveau censé favoriser l’investissement et l’emploi.

Or ce taux croupit depuis des années autour d’1% sur fond de multiplication des emplois de services peu rémunérés et de chocs extérieurs freinant l’économie, notamment les tensions commerciales.

Par ailleurs, alors que se multiplient les appels à intégrer la protection du climat dans les politiques publiques, le moment est « idéal » pour que la nouvelle présidente de la BCE offre « un nouveau point de départ » à la politique monétaire à l’aube de ses huit ans de mandat, estime Frederik Ducrozet, stratégiste chez Pictet Wealth Management.

Cette revue d’ensemble intervient aussi alors que la politique de la BCE, faite de taux historiquement bas et de rachats de dette sur les marchés, est de plus en plus critiquée en particulier en Allemagne. On lui reproche de pénaliser les épargnants et de gonfler les prix des actifs financiers et de l’immobilier, favorisant la création de bulles.

– Objectif d’inflation ‘symétrique’ –

« L’essentiel du réexamen stratégique devrait porter sur le niveau de prix qu’on veut atteindre », résume Eric Dor, directeur des études économiques à l’IESEG.

L’idée serait de passer à un objectif d’inflation symétrique « autour de 2% »,qui peut donc être légèrement au-dessus. La BCE ferait donc sauter l’expression « inférieure à 2% », qui s’est avérée trop restrictive.

Cette évolution semble « souhaitable et plausible, ne serait-ce que pour des raisons de simplicité et de crédibilité des prévisions », selon Frederik Ducrozet.

– Verdir la politique monétaire –

Poussée encore récemment par une pétition d’associations et d’universitaires à participer à la lutte contre le changement climatique, la BCE pourrait en tenir compte dans ses décisions de politique monétaire.

Il faudrait « a minima » que les modèles macroéconomiques utilisés pour les prévisions « incorporent dans l’évaluation des risques » celui du changement climatique, a plaidé Mme Lagarde la semaine dernière devant le Parlement européen.

L’institution pourrait aussi aménager les règles de refinancement des banques à son guichet, en favorisant les établissements lui apportant comme garanties des actifs « verts », non liés aux activités les plus polluantes. Ses rachats d’actifs sur le marché, destinés à soutenir l’économie, pourraient également privilégier les obligations « vertes ».

Mais pour Gilles Moec, économiste chez Axa, le « vrai sujet » est surtout de savoir « comment la BCE va réagir face aux risques économiques liés à une politique sur le climat ». A titre d’exemple, si les prix de la tonne de carbone ne cessent de monter, pour accélérer la transition énergétique, ils pèseront sur le niveau général des prix et in fine sur la politique monétaire », prévient-il.

– Améliorer la communication –

Trop jargonneuse et pimentée de querelles entre clans opposés, la communication des gardiens de l’euro est un chantier délicat, qui engage la crédibilité de l’institution.

La BCE « pourrait passer à un processus de vote plus transparent et systématique (des membres du conseil des gouverneurs) sur les principales décisions politiques », propose Andrew Kenningham, chef économiste chez Capital Economics.

Les votes des 25 membres de l’instance qui fixe les taux à la BCE, actuellement anonymes, pourraient être comptabilisés entre voix « pour » et « contre », voir rendus nominatifs, comme d’autres grandes banques centrales le font de longue date. « Si on veut être transparent il faut y aller à fond », plaide M. Moec.

Accord de libre échange nord-américain: ultime rendez-vous à Mexico pour les négociateurs

Les principaux négociateurs du nouvel accord de libre-échange AEUMC, entre les Etats-Unis, le Mexique et le Canada, se retrouvent mardi à Mexico pour peaufiner la ratification de ce traité, un an après sa signature.

La réunion sera présidée par le chef de l’Etat mexicain, Andrés Manuel López Obrador.

« Je confirme que (…) mardi 10 décembre, à 12h00 locales (18h00 GMT) les équipes de négociateurs du Mexique, des Etats-Unis et du Canada se réuniront pour présenter les progrès réalisés sur la modernisation de l’AEUMC », une refonte de l’Accord de libre-échange nord-américain (Aléna) vieux de 25 ans, a annoncé le ministre mexicain des Affaires étrangères, Marcelo Ebrard.

Du côté du Canada, le premier ministre Justin Trudeau a indiqué s’être entretenu lundi avec le président américain Donald Trump sur les progrès réalisés en vue de la ratification de l’accord.

Les deux dirigeants ont indiqué avoir hâte de poursuivre leur collaboration et rester en contact durant les dernières étapes des négociations, a encore précisé dans un communiqué le cabinet de M. Trudeau.

Pour sa part, Donald Trump s’est aussi montré optimiste.

« Cela se passe très bien sur l’AEUMC, les syndicats et d’autres me disent que ça se présente bien », a-t-il déclaré lundi le président américain à propos de la finalisation du traité. « On me dit que ça se passe bien et que d’importants progrès ont été faits ces dernières 48 heures ».

L’AEUMC, qui modernise le traité de l’Aléna signé par Bill Clinton il y a 25 ans et qui a intimement lié les trois économies entre elles, a été signé par les trois pays fin novembre 2018, mais seul le parlement mexicain l’a pour le moment ratifié.

– « Proches d’un accord de principe » –

Les démocrates américains, qui ont la majorité à la Chambre des représentants, avaient rapidement exigé des amendements. Et le principal négociateur américain a depuis de longs mois repris langue avec son homologue mexicain pour tenter de trouver les termes d’un amendement à l’accord qui satisfasse en particulier les syndicats américains.

Les choses semblent désormais proches de leur conclusion.

Selon le Washington Post, le représentant américain au Commerce extérieur Bob Lighthizer (USTR) va se rendre dès mardi à Mexico, ainsi que le gendre et conseiller du président Trump, Jared Kushner, pour assurer la signature de l’accord. Lundi soir, les services de l’USTR, interrogés par l’AFP, n’avaient pas confirmé ce déplacement.

La vice-Première ministre du Canada, Chrystia Freeland, était aussi en route pour le Mexique lundi soir, ont indiqué ses services.

Interrogé plus tôt à Ottawa, Justin Trudeau, le Premier ministre canadien, a lancé: « Nous travaillons très dur et nous avons bon espoir d’arriver à une ratification bientôt ». Les Canadiens sont prêts mais ont toujours dit attendre que Washington ratifie le texte avant de le faire eux-mêmes.

« Un accord final pourrait être conclu dans les 24 heures, selon plusieurs sources, ouvrant la voie à la ratification », a affirmé pour sa part la chaîne d’information financière Fox Business.

Selon sa concurrente CNBC, la Maison Blanche et l’opposition démocrate sont « proches d’un accord de principe » et un vote de ratification du texte pourrait avoir lieu au Congrès le 18 décembre, si le texte est présenté d’ici le 15 décembre.

« J’espère qu’ils (les démocrates) vont le mettre au vote. S’ils le mettent au vote, ça va passer », a pronostiqué le président.

– Atténuer la concurrence –

« Nous continuons à examiner la proposition. Pas d’accord à annoncer pour le moment », avait toutefois indiqué un haut-conseiller démocrate américain à l’AFP auparavant.

Donald Trump avait dénoncé l’Aléna peu après son arrivée à la Maison Blanche, après l’avoir vilipendé pendant toute sa campagne.

Il accusait l’accord de nuire aux Etats-Unis et d’être à l’origine de la destruction de milliers d’emplois, en particulier dans le secteur manufacturier.

Aux Etats-Unis, les démocrates ont bloqué la ratification, sous l’impulsion des syndicats. Ils craignaient que rien ne permette de vérifier l’application du texte, en particulier la hausse des salaires horaires des travailleurs mexicains du secteur automobile. Cette augmentation doit permettre d’atténuer la concurrence entre les travailleurs des trois pays.

Selon Fox Business, les Mexicains ont accepté que l’application de l’accord soit supervisée par « une partie neutre », après s’y être longtemps opposés.

L’AEUMC prévoit par ailleurs pour le secteur automobile un changement important des règles dites d’origine, incitant à se fournir bien davantage en matériaux et composants de fabrication américaine.

Le Mexique a indiqué dimanche vouloir amender les termes du nouvel accord concernant l’acier et l’aluminium.

Les termes de l’AEUMC imposent à Mexico de s’approvisionner en acier – nécessaire à son industrie automobile – à 70% en Amérique du Nord. Or, Mexico se fournit également beaucoup au Brésil, au Japon et en Allemagne.

Le Mexique réclamera lors de la prochaine réunion des négociateurs du nouveau traité que l’application de la mesure ne soit pas immédiate, mais repoussée à « plus de cinq ans » après son entrée en vigueur, a souligné M. Ebrard.

Des hommes verts à Trump: cinq choses sur le conflit en Ukraine

Pour la première fois depuis trois ans, un sommet se tient lundi pour trouver une issue au conflit qui oppose l’Ukraine à des rebelles pro-russes dans l’est du pays depuis cinq ans. Cinq choses à savoir sur cette guerre.

. « Petits hommes verts »

Fin février 2014, quelques jours après la fuite en Russie du président ukrainien Viktor Ianoukovitch dans la foulée de la révolte pro-européenne du Maïdan, de mystérieux « petits hommes verts » font leur apparition en Crimée, péninsule ukrainienne.

Armés jusqu’aux dents, en treillis mais sans insignes, ils occupent le parlement, l’aéroport, d’autres bâtiments stratégiques de Simféropol, la capitale de cette péninsule ukrainienne, et encerclent les bases militaires de Kiev.

Montré du doigt, le Kremlin dément être à l’origine de la manoeuvre, Vladimir Poutine suggérant même que ces mystérieux hommes se sont équipés dans des surplus de l’armée.

Au bout du compte, la Russie ne se contente pas de reconnaître qu’il s’agissait des forces spéciales russes: elle annexera toute la péninsule.

. Mystérieux séparatistes

Au printemps 2014, peu après les évènements en Crimée, des militants séparatistes s’emparent de bâtiments administratifs de plusieurs villes de l’est de l’Ukraine, région industrielle russophone.

La plupart sont de parfait inconnus mais ils annoncent rapidement l’indépendance de deux régions, sous les noms de Républiques populaires de Donetsk (DNR) et Lougansk (LNR).

Pour Kiev et les capitales occidentales, la manoeuvre est claire: Moscou a armé et financé ces séparatismes. Et l’Ukraine réagit.

Les incidents armés dégénèrent en guerre en mai 2014. L’Ukraine remporte des victoires, puis doit reculer face à la puissance de feu des combattants séparatistes, que Moscou a pourtant toujours nié avoir armés.

A l’heure actuelle, la Russie distribue les passeport russes aux habitants de la région, l’Ukraine ne contrôlant plus qu’une partie de sa frontière.

. MH17

En juillet 2014, au plus fort de la guerre, un Boeing 777 de la Malaysia Airlines allant d’Amsterdam à Kuala Lumpur s’écrase au-dessus des territoires rebelles, tuant les 298 personnes à bord. Les corps et la carlingue s’écrasent dans le village de Grabové.

Une enquête internationale conclut que l’avion a été abattu par un missile sol-air BUK depuis une zone tenue par les séparatistes prorusses.

Plus tard, les enquêteurs concluent que le système appartenait à la 53e brigade antiaérienne russe, basée théoriquement à Koursk. Ils ont aussi identifiés quatre suspects séparatistes, dont l’une de leurs figures les plus connues, Igor Guirkine, un ancien officier des renseignements russes.

Moscou a rejeté les accusations en bloc, proposant tour à tour comme explications que le Boeing a été abattu par un avion ukrainien ou que la batterie BUK appartenait en fait aux forces ukrainiennes.

. Sanctions et contre-sanctions

Européens et Américains ont adopté plusieurs vagues de sanctions économiques contre Moscou en réplique à l’annexion de la Crimée et son soutien aux séparatistes prorusses de l’Est.

L’économie russe est durement touchée. Le Kremlin a répliqué en adoptant un embargo sur de nombreux produits occidentaux, profitant de l’occasion pour tenter de lancer les productions nationales qui lui faisaient défaut.

La Russie connaît ainsi un « boom » dans ses productions de fromages et d’autres produits alimentaires, mais elle reste à la traîne dans les hautes technologies, tandis que dans le secteur pharmaceutique, les patients se plaignent de la faible efficacité des médicaments russes.

En novembre, Vladimir Poutine a confié avoir été « assez inquiet » d’abord mais qu’il était aujourd’hui satisfait des « résultats très sérieux et probants » de sa riposte.

. Et Trump fit scandale

Depuis des mois, l’Ukraine est au coeur des vicissitudes de la politique américaine, le président Donald Trump étant suspecté d’avoir fait pression sur son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky pour qu’il lance une enquête contre un rival démocrate en vue de la présidentielle de 2020.

Au centre de ce qui est désormais une procédure de destitution, un chantage à l’aide militaire alors que Washington est censé être l’allié de l’Ukraine face à la Russie.

M. Zelensky tente lui de ne froisser ni Trump, ni ses adversaires: « Avec tout le respect qu’on doit à notre partenaire stratégique, les Etats-Unis, et avec toute notre reconnaissance pour l’aide reçue, l’Ukraine est indépendante et a d’autres problèmes prioritaires ».

Poutine et Zelensky dialoguent mais actent leurs divergences à Paris

Les présidents russe et ukrainien, Vladimir Poutine et Volodymyr Zelensky, sont convenus lors de leur première rencontre lundi à Paris d’une série de mesures pour relancer le processus de paix en Ukraine, mais ont surtout acté leur désaccord sur son volet politique, se donnant rendez-vous dans quatre mois pour tenter de le surmonter.

« Pour moi, je le dis honnêtement », le résultat de cette rencontre, « c’est très peu: je voudrais résoudre un plus grand nombre de problèmes », a résumé Volodymyr Zelensky lors d’une conférence de presse commune à l’issue d’un sommet sous les auspices du président français Emmanuel Macron et de la chancelière allemande Angela Merkel.

Le maître du Kremlin s’est voulu plus optimiste, saluant un « pas important » vers une désescalade.

Les quatre dirigeants sont au moins tombés d’accord sur un point après trois ans de paralysie dans le processus de paix: « Le fait que nous soyons côte à côte est en soit un résultat important », a assuré Emmanuel Macron. Il a qualifié de « blessure ouverte au coeur du continent européen », cette guerre entre Kiev et les séparatistes pro-russes qui a fait plus de 13.000 morts dans le Donbass, bastion industriel de l’Est ukrainien, et près de 1,5 million de déplacés depuis 2014.

« Nous avons encore beaucoup de travail à réaliser mais j’ai l’impression qu’il y a de la bonne volonté pour résoudre des questions difficiles », a estimé la chancelière allemande Angela Merkel.

Consolidation du cessez-le-feu, échange massif des prisonniers restant dans les territoires séparatistes d’ici la fin décembre, nouveau retrait de combattants de trois zones d’ici fin mars prochain… Le sommet a envoyé plusieurs signaux positifs.

– Divergences sur la frontière –

Mais le président ukrainien n’a pas pu arracher les concessions qu’il demandait pour l’organisation d’élections locales dans les territoires contrôlés par les séparatistes.

Il réclame notamment le démantèlement préalable de tous les groupes armés « illégaux » – comprendre les séparatistes pro-russes et leurs parrains russes – et le retour sous contrôle ukrainien d’une partie de sa frontière, actuellement aux mains des séparatistes et par laquelle Moscou est accusé de leur fournir des armes et troupes.

« Nous avons des divergences complètes sur la frontière », a-t-il martelé. Moscou réclame de son côté l’application des accords de Minsk qui prévoient le retour de la frontière sous contrôle ukrainien après les élections seulement.

Volodymyr Zelensky, novice en politique, est aussi sous la pression de son opinion, qui redoute de le voir faire trop de concessions face à Vladimir Poutine. Plusieurs manifestations ont eu lieu ces dernières semaines.

« L’Ukraine ne cédera jamais ses territoires » – le Donbass et la Crimée annexée par la Russie -, n’acceptera une « fédéralisation » et ne permettra à personne d' »influer son vecteur de développement » proeuropéen, a martelé M. Zelensky.

Contents de ces propos, les protestataires réunis lundi soir devant la présidence à Kiev ont estimé que le chef de l’Etat « n’a franchi aucune ligne rouge » à Paris.

– Nouveau sommet –

Pour tenter de surmonter les différends, les quatre dirigeants sont convenus de se retrouver pour un nouveau sommet « d’ici quatre mois ».

La première rencontre entre le maître du Kremlin, rompu aux rapports de force internationaux, et le jeune président ukrainien, un ancien comédien arrivé au pouvoir en mai, était très attendue.

Les deux présidents, plutôt détendus, ont d’abord pris place autour d’une table ronde, dans un salon de l’Elysée au côté d’Emmanuel Macron et Angela Merkel. Ils se sont ensuite rencontrés en bilatérale.

Volodymyr Zelensky, élu en avril sur la promesse de mettre fin au conflit, avait même fait un V des doigts de la main en arrivant au palais présidentiel français en début d’après-midi.

Durant la conférence de presse, il a longuement plaidé sa cause. Son homologue russe, arrivé en position de force à Paris, s’est montré beaucoup plus concis, le visage souvent fermé.

Ces sommets au format « Normandie », en référence à la région française où les dirigeants des quatre pays s’étaient retrouvés pour la première fois en 2014, étaient paralysés depuis trois ans.

L’Occident et l’Ukraine accusent Moscou de financer et d’armer les rebelles, ce que la Russie nie farouchement.

Les combats ont fortement baissé en intensité depuis les accords de Minsk en 2015. Mais 80.000 hommes continuent de se faire face de part et d’autre d’une ligne de front qui s’étire sur plus de 400 kilomètres. Chaque mois, des morts sont à déplorer dans des accrochages ou l’explosion de mines.

Depuis le changement de président en Ukraine, une certaine détente se fait sentir. Un échange de 70 prisonniers a pu avoir lieu en septembre. Les troupes belligérantes ont reculé dans trois petits secteurs de la ligne de front, et des navires de guerre ukrainiens saisis par la Russie ont été rendus.

vl-mp-ant-jri-leb/am

Inflation, climat, communication: les chantiers de Lagarde à la BCE

La nouvelle présidente de la Banque centrale européenne, Christine Lagarde, a annoncé début décembre une vaste revue de la stratégie de politique monétaire, inchangée depuis 2003. Pourquoi ce chantier et quels points vont être discutés ?

– Dernier toilettage: 2003 –

Chargée par son mandat de garantir « la stabilité des prix » en zone euro, la BCE a précisé cet objectif en 2003 et s’efforce d’atteindre un taux d’inflation « inférieur, mais proche de 2% », niveau censé favoriser l’investissement et l’emploi.

Or ce taux croupit depuis des années autour d’1% sur fond de multiplication des emplois de services peu rémunérés et de chocs extérieurs freinant l’économie, notamment les tensions commerciales.

Par ailleurs, alors que se multiplient les appels à intégrer la protection du climat dans les politiques publiques, le moment est « idéal » pour que la nouvelle présidente de la BCE offre « un nouveau point de départ » à la politique monétaire à l’aube de ses huit ans de mandat, estime Frederik Ducrozet, stratégiste chez Pictet Wealth Management.

Cette revue d’ensemble intervient aussi alors que la politique de la BCE, faite de taux historiquement bas et de rachats de dette sur les marchés, est de plus en plus critiquée en particulier en Allemagne. On lui reproche de pénaliser les épargnants et de gonfler les prix des actifs financiers et de l’immobilier, favorisant la création de bulles.

– Objectif d’inflation ‘symétrique’ –

« L’essentiel du réexamen stratégique devrait porter sur le niveau de prix qu’on veut atteindre », résume Eric Dor, directeur des études économiques à l’IESEG.

L’idée serait de passer à un objectif d’inflation symétrique « autour de 2% »,qui peut donc être légèrement au-dessus. La BCE ferait donc sauter l’expression « inférieure à 2% », qui s’est avérée trop restrictive.

Cette évolution semble « souhaitable et plausible, ne serait-ce que pour des raisons de simplicité et de crédibilité des prévisions », selon Frederik Ducrozet.

– Verdir la politique monétaire –

Poussée encore récemment par une pétition d’associations et d’universitaires à participer à la lutte contre le changement climatique, la BCE pourrait en tenir compte dans ses décisions de politique monétaire.

Il faudrait « a minima » que les modèles macroéconomiques utilisés pour les prévisions « incorporent dans l’évaluation des risques » celui du changement climatique, a plaidé Mme Lagarde la semaine dernière devant le Parlement européen.

L’institution pourrait aussi aménager les règles de refinancement des banques à son guichet, en favorisant les établissements lui apportant comme garanties des actifs « verts », non liés aux activités les plus polluantes. Ses rachats d’actifs sur le marché, destinés à soutenir l’économie, pourraient également privilégier les obligations « vertes ».

Mais pour Gilles Moec, économiste chez Axa, le « vrai sujet » est surtout de savoir « comment la BCE va réagir face aux risques économiques liés à une politique sur le climat ». A titre d’exemple, si les prix de la tonne de carbone ne cessent de monter, pour accélérer la transition énergétique, ils pèseront sur le niveau général des prix et in fine sur la politique monétaire », prévient-il.

– Améliorer la communication –

Trop jargonneuse et pimentée de querelles entre clans opposés, la communication des gardiens de l’euro est un chantier délicat, qui engage la crédibilité de l’institution.

La BCE « pourrait passer à un processus de vote plus transparent et systématique (des membres du conseil des gouverneurs) sur les principales décisions politiques », propose Andrew Kenningham, chef économiste chez Capital Economics.

Les votes des 25 membres de l’instance qui fixe les taux à la BCE, actuellement anonymes, pourraient être comptabilisés entre voix « pour » et « contre », voir rendus nominatifs, comme d’autres grandes banques centrales le font de longue date. « Si on veut être transparent il faut y aller à fond », plaide M. Moec.

Allemagne: le « Robin des contribuables » et une adversaire de l’extrême droite élus au SPD

Le « Robin des contribuables » et une adversaire acharnée de l’extrême droite: encore inconnus il y a quelques semaines, Norbert Walter-Borjans et Saskia Esken ont été élus samedi à la tête du parti allemand social-démocrate SPD.

. Norbert Walter-Borjans, le « Robin des contribuables »

Ancien ministre des Finances de la région Rhénanie-du-Nord-Westphalie, Norbert Walter-Borjans est surnommé « Nowabo ». Mais c’est un autre surnom qui l’a fait connaître en Allemagne, « Robin des contribuables ».

Cet économiste de 67 ans est en effet l’auteur d’une spectaculaire opération de lutte contre l’évasion fiscale: il a acheté en 2011 des données sur des fraudeurs fiscaux allemands présumés en Suisse, dont les avoirs, finalement rapatriés en Allemagne, auraient rapporté plusieurs milliards d’euros à l’Etat.

M. Walter-Borjans, issu d’une famille d’artisans, père de quatre enfants, est entré en politique en 1984 et a rapidement exercé des fonctions en Rhénanie-du-Nord-Westphalie.

De 2010 à 2017, il dirige les Finances du Land. Soutenu par les Jeunes du parti, plus à gauche que M. Scholz, il ne plaide cependant pas ouvertement pour une sortie anticipée de la coalition.

Il est par contre un dénonciateur acharné du néo-libéralisme, une « pampa dans laquelle nous nous laissons conduire par les lobbyistes et mauvais conseillers « .

. Saskia Esken, en lutte contre l’extrême droite

Membre du Bundestag depuis 2013, Mme Esken, 58 ans, engagée à la gauche du parti, a mis la lutte pour l’égalité des chances et l’accès au numérique au coeur de son engagement.

Née à Stuttgart, Mme Esken se dit inspirée par l’engagement social et politique de ses propres parents. Ancienne dactylo, elle a mené à bien un cursus d’informaticienne et de développeuse de logiciels.

Entrée en 1990 au SPD, cette mère de trois enfants a exercé diverses responsabilité dans le Bade-Wurtemberg. Elle s’est en outre engagée contre l’extrême droite, avant même l’émergence ces dernières années du parti AfD. En 2009, elle avait ainsi fondé une « Alliance contre la droite » à Calw (Bade-Wurtemberg) où le parti néonazi NPD voulait installer son siège régional.

Elle est aussi en pointe dans la lutte pour l’environnement. Mme Esken a ainsi été à l’origine d’une initiative visant à assainir les décharges allemandes. Son duo formé avec M. Walter-Borjans a d’ailleurs été soutenu dans cette élection interne par la branche allemande, très remuante, du mouvement Fridays for Future, lancée par la jeune Suédoise Greta Thunberg.

Membre de l’aile gauche du parti, elle est très critique à l’égard de la coalition Merkel et de ses « compromis » permanents.

Des hommes verts à Trump: cinq choses sur le conflit en Ukraine

Pour la première fois depuis trois ans, un sommet se tient lundi pour trouver une issue au conflit qui oppose l’Ukraine à des rebelles pro-russes dans l’est du pays depuis cinq ans. Cinq choses à savoir sur cette guerre.

. « Petits hommes verts »

Fin février 2014, quelques jours après la fuite en Russie du président ukrainien Viktor Ianoukovitch dans la foulée de la révolte pro-européenne du Maïdan, de mystérieux « petits hommes verts » font leur apparition en Crimée, péninsule ukrainienne.

Armés jusqu’aux dents, en treillis mais sans insignes, ils occupent le parlement, l’aéroport, d’autres bâtiments stratégiques de Simféropol, la capitale de cette péninsule ukrainienne, et encerclent les bases militaires de Kiev.

Montré du doigt, le Kremlin dément être à l’origine de la manoeuvre, Vladimir Poutine suggérant même que ces mystérieux hommes se sont équipés dans des surplus de l’armée.

Au bout du compte, la Russie ne se contente pas de reconnaître qu’il s’agissait des forces spéciales russes: elle annexera toute la péninsule.

. Mystérieux séparatistes

Au printemps 2014, peu après les évènements en Crimée, des militants séparatistes s’emparent de bâtiments administratifs de plusieurs villes de l’est de l’Ukraine, région industrielle russophone.

La plupart sont de parfait inconnus mais ils annoncent rapidement l’indépendance de deux régions, sous les noms de Républiques populaires de Donetsk (DNR) et Lougansk (LNR).

Pour Kiev et les capitales occidentales, la manoeuvre est claire: Moscou a armé et financé ces séparatismes. Et l’Ukraine réagit.

Les incidents armés dégénèrent en guerre en mai 2014. L’Ukraine remporte des victoires, puis doit reculer face à la puissance de feu des combattants séparatistes, que Moscou a pourtant toujours nié avoir armés.

A l’heure actuelle, la Russie distribue les passeport russes aux habitants de la région, l’Ukraine ne contrôlant plus qu’une partie de sa frontière.

. MH17

En juillet 2014, au plus fort de la guerre, un Boeing 777 de la Malaysia Airlines allant d’Amsterdam à Kuala Lumpur s’écrase au-dessus des territoires rebelles, tuant les 298 personnes à bord. Les corps et la carlingue s’écrasent dans le village de Grabové.

Une enquête internationale conclut que l’avion a été abattu par un missile sol-air BUK depuis une zone tenue par les séparatistes prorusses.

Plus tard, les enquêteurs concluent que le système appartenait à la 53e brigade antiaérienne russe, basée théoriquement à Koursk. Ils ont aussi identifiés quatre suspects séparatistes, dont l’une de leurs figures les plus connues, Igor Guirkine, un ancien officier des renseignements russes.

Moscou a rejeté les accusations en bloc, proposant tour à tour comme explications que le Boeing a été abattu par un avion ukrainien ou que la batterie BUK appartenait en fait aux forces ukrainiennes.

. Sanctions et contre-sanctions

Européens et Américains ont adopté plusieurs vagues de sanctions économiques contre Moscou en réplique à l’annexion de la Crimée et son soutien aux séparatistes prorusses de l’Est.

L’économie russe est durement touchée. Le Kremlin a répliqué en adoptant un embargo sur de nombreux produits occidentaux, profitant de l’occasion pour tenter de lancer les productions nationales qui lui faisaient défaut.

La Russie connaît ainsi un « boom » dans ses productions de fromages et d’autres produits alimentaires, mais elle reste à la traîne dans les hautes technologies, tandis que dans le secteur pharmaceutique, les patients se plaignent de la faible efficacité des médicaments russes.

En novembre, Vladimir Poutine a confié avoir été « assez inquiet » d’abord mais qu’il était aujourd’hui satisfait des « résultats très sérieux et probants » de sa riposte.

. Et Trump fit scandale

Depuis des mois, l’Ukraine est au coeur des vicissitudes de la politique américaine, le président Donald Trump étant suspecté d’avoir fait pression sur son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky pour qu’il lance une enquête contre un rival démocrate en vue de la présidentielle de 2020.

Au centre de ce qui est désormais une procédure de destitution, un chantage à l’aide militaire alors que Washington est censé être l’allié de l’Ukraine face à la Russie.

M. Zelensky tente lui de ne froisser ni Trump, ni ses adversaires: « Avec tout le respect qu’on doit à notre partenaire stratégique, les Etats-Unis, et avec toute notre reconnaissance pour l’aide reçue, l’Ukraine est indépendante et a d’autres problèmes prioritaires ».

Joseph Muscat, un politicien habile, à l’étoile ternie par l’affaire Daphne Caruana

Ambitieux et habile, Joseph Muscat, poussé vers la sortie par l’enquête sur la mort de Daphne Caruana, avait connu une ascension fulgurante à Malte, devenant Premier ministre à 39 ans en 2013 et il s’était maintenu au pouvoir en 2017, malgré des scandales de corruption touchant son entourage proche.

Blondinet naturellement souriant, M. Muscat, 45 ans, a démarré sa vie professionnelle comme journaliste de 1992 à 1997 dans des médias du Parti travailliste où il est entré tout jeune, tout en travaillant comme consultant financier.

Né le 22 janvier 1974 à Pieta, ce fils unique issu d’une famille modeste et rurale qui dit « apprécier sa propre compagnie », après des études chez les Jésuites, obtient un diplôme à l’Université de Malte en politique publique et questions européennes. Puis un doctorat en management à l’Université de Bristol au Royaume-Uni.

Il est élu député européen en 2004 lors des premières élections européennes tenues dans l’archipel, qui vient alors de rejoindre l’Union. Mais il démissionne de son mandat après avoir été propulsé chef du Parti travailliste en 2008. Il devient Premier ministre en 2013 après la victoire de son parti aux législatives, alors qu’il n’a que 39 ans.

Considéré parfois comme « trop jeune et trop sûr de lui », ce proche de l’ancien Premier ministre Alfred Sant, a réussi à conquérir la vieille garde et la jeune, en évitant de les opposer, apportant un bol d’air dans la politique maltaise, selon les journaux de l’époque. Il connaît par coeur les arcanes du Parti dont il sera nommé trésorier à 20 ans (de 1994 à 1997).

Peu marqué idéologiquement, il se positionne dans l’aile progressiste modérée, tout en se montrant « déterminé, pragmatique et doté de bon sens » quand il s’agit de changer les statuts du parti, son adjoint ou le secrétaire général de la formation, selon les éditorialistes maltais.

Très populaire, ce père de deux jumelles de 12 ans aux prénoms poétiques (Etoile Ella et Soleil Sophie) est réélu magistralement en juin 2017, surfant sur la réussite économique de l’archipel, qui a connu un taux de croissance trois fois plus élevé que la moyenne de l’Union européenne en 2018 (6,6%).

– Pari gagné en 2017 –

Pour la première fois depuis l’indépendance de la Grande-Bretagne en 1964, les travaillistes maltais gagnent deux élections consécutives. Les électeurs le plébiscitent malgré des accusations de corruption, grâce aussi au vote homosexuel, après avoir promulgué une législation autorisant les unions du même sexe.

Pourtant à l’époque la campagne électorale se focalise sur la publication des Panama Papers, la colossale enquête journalistique, qui révèle l’existence au Panama de nombreux comptes offshore ouverts par des personnalités du monde entier.

La journaliste d’investigation Daphne Caruana Galizia, tuée dans l’explosion de sa voiture piégée quelques mois plus tard (octobre 2017) creuse la partie maltaise des Panama Papers.

Le chef de cabinet de M. Muscat, Keith Schembri et l’un de ses ministres, Konrad Mizzi, sont contraints de reconnaître avoir ouvert des comptes au Panama, après les révélations contenues dans les milliers de documents du cabinet Mossack Fonseca. M. Muscat est à l’époque très critiqué parce qu’il refuse de les obliger à démissionner.

L’enquête rejaillit aussi à l’époque sur sa femme Michelle, qui est soupçonnée d’avoir ouvert un compte au Panama pour y dissimuler des pots-de-vin en provenance d’Azerbaïdjan. M. Muscat décide alors de convoquer des législatives anticipées, un an avant la fin de son mandat, dans l’espoir de retrouver une légitimité – avec succès, le Parti travailliste conserve sa majorité absolue.

Ces dernières semaines, l’affaire Daphne est revenue sur le devant de la scène après l’arrestation d’un intermédiaire du meurtre, un chauffeur de taxi et usurier. Ce dernier a obtenu une immunité en échange d’informations et dès le lendemain, les magistrats maltais ont intercepté l’homme d’affaires Yorgen Fenech, alors qu’il tentait de fuir Malte.

M. Fenech qui est considéré comme le principal suspect dans l’assassinat, était le propriétaire de la 17 Black, une société de Dubaï qui aurait versé 2 millions d’euros à l’ex-chef de cabinet de M. Muscat et à son ministre de l’Energie de l’époque Mizzi pour des services non précisés.

La RDC peine à protéger sa forêt tropicale, vitale pour le climat

La République démocratique du Congo abrite la plus grande partie de la forêt humide équatoriale en Afrique, dont la préservation est vitale dans la lutte contre le réchauffement climatique. Mais l’Etat est trop faible pour la protéger efficacement.

Les trafics du bois par les officiels eux-mêmes sont dénoncés à voix haute à Kisangani, chef-lieu de la province forestière de la Tshopo (nord-est).

« Il y a les députés et les militaires qui font le bois », affirme le président des exploitants artisanaux, Félicien Liofo. « Ils ne paient pas de taxes. C’est de la concurrence déloyale ».

Sur la route RN4 à l’entrée de la ville, un poste de contrôle vérifie les documents des exploitants forestiers, ainsi que le volume et l’origine des grumes qu’ils transportent.

« Des soldats en uniformes ouvrent parfois eux-mêmes la barrière avec les armes. Ils vous menacent de tirer », déplore l’officier de police judiciaire (OPJ) de service, qui dénonce les « trafics d’influence » des militaires, des députés et des ministres provinciaux.

« On ne peut pas les attaquer. Ils font de l’exploitation à travers des personnes interposées », soupire le coordonnateur provincial de l’environnement et du développement durable, Félicien Malu.

En théorie, sa « coordination provinciale » dispose de 1.200 agents pour toute la province (200.000 km2), afin de faire respecter les dispositions du code forestier de 2002.

Mais « les agents ne sont pas payés », affirme le coordonnateur, qui a remplacé en septembre son prédécesseur, suspendu pour « coulage des recettes » (détournement de fonds).

– Manque de moyens –

Manquent aussi les moyens matériels (bateau, motos, pick-up). « On ne peut pas organiser des missions de contrôle. Il y a beaucoup de rivières à traverser et de voies routières non réhabilitées ».

En forêt, c’est parfois la loi de la jungle. A 40 km de Kisangani, une entreprise agro-industrielle congolaise, la Scipec, a coupé 850 hectares pour planter des palmiers à huile. « En 2020, nous allons faire une extension de 650 ha », se félicite son gérant, avec le bruit d’une tronçonneuse en fond sonore.

Un exploitant forestier industriel, la CFT, affirme, carte à l’appui, que la palmeraie s’est installée sur sa propre concession, obtenue en toute légalité auprès des autorités congolaises.

Début 2019, après enquête, l’ONG Global Witness a accusé un haut-gradé de l’armée congolaise, le général Gabriel Amisi Kumba, d’avoir « contourné la loi en acquérant puis en revendant les permis forestiers ». Soit une « violation du moratoire » en vigueur depuis 2002 sur l’octroi des nouvelles concessions, selon l’ONG.

Avec ce moratoire et le code forestier de 2002 également, la RDC est pourtant sur le papier bien armée pour protéger sa forêt, qui couvre plus de la moitié de son territoire (1,5 million de km2 au total).

Sa préservation est vitale: le bassin du Congo est un « puits à carbone » qui stocke « six ans d’émission mondiale de CO2 », d’après l’Initiative pour la forêt de l’Afrique centrale (Cafi, partenariat de pays occidentaux avec la RDC, le Congo-Brazzaville, le Gabon, le Cameroun, la Centrafrique et la Guinée-Equatoriale).

Selon les chiffres officiels, à peine 8% de la surface forestière en RDC est exploitée (120.000 km2), à travers une soixantaine de concessions à des industriels et quelques communautés locales.

En contrepartie, les industriels doivent payer toute une série de taxes (abattage de déboisement, exportation…).

– Forêts « sacrées » –

Ils doivent respecter un « plan d’aménagement » qui divise leur concession en « assiettes annuelles de coupe ». A l’intérieur de ces périmètres annuels d’abattage, ils n’ont le droit de couper qu’un certain nombre d’arbres (de l’ordre d’un à l’hectare par exemple pour la CFT près de Kisangani).

Le cahier des charges prévoit enfin des oeuvres sociales pour les villages qui se trouvent dans les concessions: respect des forêts « sacrées » (le cimetière des ancêtres), construction de routes, d’écoles, de centres de santé.

L’initiative pour la forêt d’Afrique centrale (Cafi, avec la Norvège et la France en tête) indique aussi qu’elle « finance actuellement des programmes dont le but est de prévenir l’émission de 40 millions de tonnes de CO2 » en RDC.

Le Cafi s’est engagé à verser 200 millions de dollars jusqu’en 2020 à la RDC à travers un « fonds national pour la réduction des émissions liées à la déforestation et à la dégradation des forêts ».

Les autorités congolaises plaident de leur côté pour une levée du moratoire de 2002 sur les nouvelles concessions.

Cette demande « fait flipper les ONG occidentales », reconnaît Tosi Mpanu Mpanu, consultant, ambassadeur, et représentant de la RDC aux conférences climat.

Directement visée, Greenpeace s’oppose en effet à toute activité industrielle (bois, pétrole…) dans 445.000 km2 de tourbières à cheval sur les deux Congos.

En 2018, la forêt primaire tropicale a reculé en RDC comme nulle part ailleurs au monde à part au Brésil (481.248 hectares, soit 4.812 km2), d’après le rapport annuel de Global Forest Watch.

Elections britanniques: dans la « Bagel belt », la « peur » des juifs londoniens

« Les gens ont peur. » La candidate travailliste Holy Kal Weiss résume ainsi l’état d’esprit des électeurs de confession juive qu’elle rencontre en menant sa campagne dans la « Bagel belt » du nord de Londres.

Dans ce quartier ainsi surnommé en raison de son importante communauté juive, cette crainte « s’entend dans la voix » des gens, explique-t-elle à l’AFP en faisant du porte-à-porte.

Pour cette candidate travailliste de confession juive aux législatives de jeudi, la fracture entre le parti qu’elle représente et sa communauté constitue une véritable douleur.

Les accusations contre Jeremy Corbyn, qui se voit reprocher d’avoir laissé prospérer l’antisémitisme au sein du Labour, pourraient bien peser sur l’issue du scrutin.

Le Brexit et les conséquences de l’austérité sont bien sûr au coeur des débats, mais la question de savoir si le parti et son leader ont un problème avec les Juifs est revenue de manière récurrente.

Le mois dernier, le grand rabbin britannique Ephraim Mirvis s’est fendu d’une intervention sans précédent, pour dénoncer le « nouveau poison – approuvé par la direction », qui « s’est enraciné au sein du parti travailliste ». « L’âme de notre nation est en jeu », ajoutait-il, appelant les électeurs à voter « en conscience ».

– Théories du complot –

Le mouvement juif travailliste (JLM), l’un des plus anciens affilié au parti, a accusé Jeremy Corbyn lui-même d’antisémitisme.

Plus de 70 membres du Labour ont étayé les accusations au sein du parti devant une commission dédiée. L’un d’eux a recensé 22 exemples de propos lors de réunions du parti, rapportant notamment qu’on lui a dit « Hitler avait raison ».

Jeremy Corbyn et le parti s’enorgueillissent de leur histoire de lutte contre le racisme, qu’ils pensent être un fléau réservé à la droite.

Le leader travailliste a répété qu’il « exècre » l’antisémitisme. Ses partisans dénoncent des accusations visant à contrecarrer son opposition aux actions d’Israël contre les Palestiniens.

Mais selon David Hirsch, expert de la question, il existe au sein du mouvement socialiste une « longue histoire d’antisémitisme authentiquement de gauche ».

« Jeremy Corbyn, si vous lui dites +parlez-moi de l’histoire de l’antisémitisme au sein de votre mouvement+, il ne la connaît probablement pas », a-t-il affirmé.

Pour Holy Kal-Weiss, le Labour a « sous-estimé » le sentiment de peur qui a été intégré au sein de la communauté.

« Jusqu’à récemment, il y aurait eu plein d’électeurs du Labour ici. Mais il y a beaucoup d’angoisse », dit-elle en remontant dans sa voiture une froide soirée de décembre. Beaucoup de colère aussi, dirigée contre elle.

« Ce n’est pas agréable. J’ai été élevée au sein de la communauté juive dans l’idée que c’est très important de prendre soin de tout le monde », ajoute-t-elle.

– « Résilience » –

Dans une circonscription située à quelques kilomètres de là, au nord-ouest de Londres, le conservateur Mike Freer est à la tâche pour sauver son siège.

Sa principale concurrente est l’ancienne députée travailliste Luciana Berger, qui a quitté le parti à cause de l’antisémitisme pour rejoindre les libéraux-démocrates.

« Quand vous parlez à des gens de 80 ou 90 ans, ils étaient terrifiés. Les mots qui revenaient étaient +c’est comme ça que ça a commencé en Allemagne+ », dit-elle.

Sur le pas de sa porte, Brian Lacey, un électeur de 83 ans, s’adresse au candidat Freer: « J’anime un groupe d’art, qui compte beaucoup de Juifs, beaucoup d’entre eux sont bouleversés. Je vois l’histoire se répéter. C’est peut-être exagéré, mais toutes ces petites créatures maléfiques créent un mouvement ».

Mais pour ceux qui veulent s’opposer au Brexit, choisir leur candidat est particulièrement difficile, dans la mesure où le Labour représente la seule chance réaliste de l’arrêter.

« Franchement, sur le long terme, je ne sais pas qui de Corbyn ou Johnson serait le pire », a déclaré un habitant qui s’est défini comme juif laïc, préférant rester anonyme.

La perspective d’une sortie de l’Union européenne représente à ses yeux une menace pire que celle d’un gouvernement travailliste.

« Nous avons le sens de l’histoire et de comment de petites choses ont grossi », déclare le retraité. « Je n’ai pas de genre de crainte, je pense qu’il y a plus de résilience dans ce pays. Mais cette crainte, certains l’ont. »

« Biens mal acquis »: ouverture du procès de l’oncle de Bachar al-Assad à Paris

Des soupçons de « biens mal acquis » et un siège vide: le procès de Rifaat Al-Assad, oncle du président syrien, soupçonné de s’être frauduleusement bâti en France un empire immobilier d’une centaine de millions d’euros, s’est ouvert lundi à Paris en son absence.

Âgé de 82 ans, le frère cadet de l’ancien président Hafez al-Assad, résident britannique, ne s’est pas présenté devant le tribunal correctionnel.

Ses avocats ont invoqué des problèmes de santé, certificat médical à l’appui. « Ses médecins lui ont recommandé d’éviter toute situation stressante », a indiqué au tribunal l’un de ses conseils, Pierre Cornut-Gentille.

Une absence « regrettée » par Vincent Brengarth, l’avocat de l’association Sherpa, à l’origine de la procédure, partie civile.

Il s’agit du deuxième procès d’une affaire de « biens mal acquis » en France, après celui en 2017 du vice-président de Guinée équatoriale, Teodorin Obiang. Celui-ci avait fait appel de sa condamnation et, hasard du calendrier, son nouveau procès débutait également lundi à Paris.

Rifaat al-Assad sera jugé jusqu’au 18 décembre pour « blanchiment en bande organisée » de fraude fiscale aggravée et de détournements de fonds publics syriens, entre 1984 et 2016. Des accusations qu’il conteste.

Ancien pilier du régime de Damas mais contraint au départ en 1984 après un coup d’État manqué contre son frère Hafez, le père de Bachar, à la tête du pays de 1971 à 2000, il s’était installé en Suisse puis en France.

Avec ses quatre épouses, leurs enfants et une suite de quelque 200 fidèles, dont de nombreux fonctionnaires, il a amassé en Europe une fortune immobilière qui a fini par éveiller les soupçons, notamment en Espagne où plus de 500 propriétés évaluées à 691 millions d’euros ont été saisies et où il risque un procès.

Rien qu’en France, Rifaat al-Assad possède deux hôtels particuliers et une quarantaine d’appartements dans les beaux quartiers parisiens, un château et un haras dans le Val d’Oise…

Soit un patrimoine de 90 millions d’euros, auquel peuvent être ajoutés une dizaine de millions correspondant aux biens vendus. Le tout, dissimulé derrière des sociétés-écrans et adossé à des comptes en banque à Gibraltar, a été saisi.

Pour le juge Renaud Van Ruymbeke, qui a ordonné ce procès, ce patrimoine a été acquis grâce à des détournements de fonds publics syriens, lorsqu’il vivait en Syrie puis au moment de son exil, qui aurait été négocié avec son frère et financé par Damas.

Rifaat al-Assad assure pour sa part que son argent, licite, provient d’une aide financière accordée par Abdallah, prince héritier puis roi saoudien, des années 1980 à sa mort en 2015 et que celui-ci lui a donné plusieurs des propriétés.

Lundi, l’audience a été consacrée au rappel de la procédure. Deux témoins cités par le Parquet national financier (PNF) seront entendus dans la semaine: le directeur d’enquête mercredi et un géographe spécialiste de la Syrie jeudi.

Rifaat al-Assad, décoré de la Légion d’honneur en France en 1986 pour « services rendus » et qui se présente comme un opposant au régime de son neveu Bachar, sera également jugé pour le travail dissimulé d’employés de maison rémunérés en espèces.

Poutine et Zelensky: deux présidents si différents

L’un est un vétéran des manigances diplomatiques, l’autre est un néophyte, star télévisée et des réseaux sociaux. Le premier face-à-face entre les présidents russe et ukrainien s’annonce comme celui de deux opposés.

Il y aura un côté David contre Goliath, lorsque Volodymyr Zelensky se retrouvera face à Vladimir Poutine lundi à Paris pour ses premiers pourparlers sur le conflit dans l’est de l’Ukraine qui oppose depuis 2014 Kiev à des rebelles prorusses.

Le puissant président russe n’aura pas grand-chose à perdre et peut espérer que les médiateurs français et allemand, Emmanuel Macron et Angela Merkel, donnent même le signal du début d’un rapprochement.

Pour Zelensky, le défi est autre: faire un pas vers une résolution du conflit qui a fait 13.000 morts et plus d’un million de déplacés, comme il l’a promis. Mais sans donner l’impression de capituler face à Poutine.

– La cigale et la fourmi ? –

Le jeune président de 41 ans, investi en mai, n’a d’expérience politique que celle de sa campagne électorale atypique, menée tambour battant sur les réseaux sociaux. Et celle imaginaire du rôle de président ukrainien qu’il jouait dans une série télévisée.

Face à lui, un vétéran du KGB, ceinture noire de judo, qui en vingt ans au pouvoir a réimposé la puissance russe du Moyen-Orient à l’Amérique latine.

Le style des deux hommes a peu en commun. Quand le président russe aime s’afficher en dur-à-cuire lors de mises en scène millimétrées à la télévision, Zelensky lui préfère une simplicité tout aussi étudiée, comme un « vlog » (blog entièrement en vidéo) en t-shirt et jogging sur Facebook.

Sur la scène internationale, « Poutine est un poids-lourd politique, fort d’une grosse expérience de négociations avec les dirigeants de grands pays. Zelensky est (lui) un acteur et un comédien » qui n’a rencontré jusqu’ici que des alliés, résume Anatoliy Oktyssyouk, politologue au Democracy House de Kiev.

– Le loup et l’agneau ? –

Vladimir Poutine arrive aux négociations de Paris avec le poids de son influence militaire, énergétique et diplomatique, libre de toute opposition le menaçant dans son pays.

La Russie a certes souffert des sanctions imposées par l’Occident, mais le monde des affaires comme la population s’en sont accommodés au nom de la politique de puissance du chef.

Zelensky doit lui slalomer entre sa promesses de mettre fin aux hostilités dans l’est de l’Ukraine et celle de ne rien céder à Poutine. Son économie est exsangue, du fait de la guerre et de la corruption, et dépendante de l’aide internationale.

Enfin, celui qui était censé être son grand protecteur, Donald Trump, l’a entraîné dans un vaste scandale politique, le président américain étant accusé d’avoir fait du chantage à l’aide militaire à son homologue ukrainien.

A l’inverse, Vladimir Poutine est soupçonné d’avoir réussi à déstabiliser les fondements même de la démocratie de son grand adversaire géopolitique en favorisant en 2016 l’arrivée au pouvoir du milliardaire américain.

« Ca va être très tendu pour Zelensky, ces discussions avec Poutine (…) Il n’y va pas en maître de la situation », résume, Arkady Doubnov, commentateur politique basé à Moscou.

– Le lièvre et la tortue ? –

Poutine a donc l’avantage de l’expérience mais Zelensky arrive sur le ring avec l’énergie et l’ambition de l’outsider.

Sur la scène ukrainienne, il s’est imposé en mettant une raclée aux élections à son prédécesseur, un richissime homme d’affaires favori des élites, Petro Porochenko.

Depuis son arrivée au pouvoir, il a négocié un échange de prisonniers avec la Russie et le retour de navires de guerres saisis par la flotte russe. Vladimir Poutine a jugé son homologue « sympathique et sincère ».

Volodymyr Zelensky a aussi le sens de la scène, comme lorsqu’il brandit devant ses homologues, réunis en assemblée générale à l’ONU, une balle pour dénoncer « l’agression russe ». Ou lorsqu’il visite les troupes, un écusson à tête de mort sur l’épaule.

« Avec Poutine, on sait ce qu’on a », relève Mark Galeotti, du centre de réflexion londonien sur la défense et la sécurité RUSI, auteur d’un ouvrage sur le président russe: « Zelensky, on lui a vu plein de visages, mais quel sera le prochain? ».

Meurtre de la journaliste maltaise: les moments-clés de l’affaire

Voici les moments-clés de l’affaire de l’assassinat en octobre 2017 de la journaliste maltaise anticorruption Daphne Caruana Galizia:

– Un attentat sans précédent –

Le 16 octobre 2017, la journaliste blogueuse Daphne Caruana Galizia, qui enquêtait sur la corruption au plus haut niveau, est tuée par une bombe placée dans sa voiture.

Au printemps 2017, elle avait creusé la partie maltaise de l’enquête journalistique sur les Panama Papers et avait été à l’origine de révélations sur des scandales impliquant plusieurs proches du Premier ministre, Joseph Muscat.

La journaliste avait découvert des documents attestant que des sociétés panaméennes appartenant au ministre de l’Energie de l’époque, Konrad Mizzi, et au chef de cabinet de Joseph Muscat, Keith Schembri, avaient reçu environ 2 millions d’euros d’une société de Dubaï, 17 Black, pour des services non précisés.

Cet attentat, quasi inédit dans un pays de l’Union européenne, a suscité l’indignation en Europe et au-delà.

– Manifestations –

Le 16 octobre, M. Muscat, évoquant sa « plus grande adversaire », promet de retrouver ses assassins.

Le 21 octobre, le gouvernement promet un million d’euros de récompense pour toute information permettant de faire avancer l’enquête.

Le lendemain, à l’appel d’organisations de la société civile, des milliers de Maltais descendent dans les rues. Ils demandent le départ du chef de la police et du ministre de la Justice.

– Trois inculpations –

Le 4 décembre 2017, le Premier ministre travailliste annonce l’arrestation de dix personnes.

Trois hommes au casier judiciaire déjà chargé – les frères Alfred et George Degiorgio ainsi que Vince Muscat – sont inculpés le lendemain, soupçonnés de participation à une organisation criminelle et d’avoir fabriqué la bombe. Ils plaident non coupables.

– « Projet Daphne » –

En avril 2018, 18 médias internationaux ayant repris, dans le cadre du « Projet Daphne » le travail d’enquête de la journaliste sur la corruption à Malte, publient leurs conclusions qui confirment une partie de ses soupçons.

Le ministre de l’Economie, Christian Cardona, est mis en cause, notamment pour ses relations supposées avec l’un des assassins.

– Nouvelle enquête –

Le 20 septembre 2019, le gouvernement nomme un juge à la retraite, Michael Mallia, pour diriger une enquête indépendante sur la mort de la journaliste, avant l’expiration d’une mise en demeure du Conseil de l’Europe qui exigeait une telle procédure.

– Immunité –

Le 20 novembre, un homme d’affaires, Yorgen Fenech, propriétaire de la société 17 Black, est arrêté sur son yacht au large de Malte, alors qu’il tentait de fuir.

Il est officiellement considéré comme une personne disposant d’informations sur l’affaire. Certains médias et la famille de la journaliste le présentent rapidement comme un possible commanditaire du meurtre.

Son arrestation intervient au lendemain d’une promesse d’immunité donnée par le chef du gouvernement à un intermédiaire en échange d’informations sur l’affaire.

Le 23, Yorgen Fenech demande l’immunité judiciaire, se disant prêt à révéler « tout ce qu’il sait ».

– Démissions –

Le 26 novembre, le chef de cabinet de M. Muscat, Keith Schembri, mentionné dans l’enquête comme ayant reçu des pots-de-vin de Yorgen Fenech, démissionne. Il est convoqué par la police.

Konrad Mizzi, devenu ministre du Tourisme et lui aussi mis en cause par Daphne Caruana, démissionne également. Le ministre de l’Economie, Chris Cardona, mis en cause par le « projet Daphne », décide pour sa part de se « mettre en réserve pendant la durée des enquêtes ».

Dans la nuit du 28 au 29, à l’issue d’une réunion d’urgence de son gouvernement de plus de six heures, Joseph Muscat annonce que Yorgen Fenech ne bénéficiera pas de l’immunité demandée.

Selon des sources policières, M. Fenech a désigné comme étant le vrai « commanditaire » du meurtre Keith Schembri. Ce dernier est toutefois remis en liberté.

Ces annonces suscitent l’indignation de l’opposition, de la famille Caruana Galizia et de mouvements civiques qui réclament le départ du Premier ministre.

Soudan du Sud: démission du président de l’Assemblée nationale

Le président de l’Assemblée nationale sud-soudanaise a démissionné de ses fonctions, cédant à la pression des parlementaires qui l’accusaient d’entraver leur rôle dans la lutte contre la corruption et réclamaient depuis des semaines son départ, a annoncé lundi la radio d’Etat.

Anthony Lino Makana, haut responsable du Mouvement populaire de libération du Soudan (SPLM), a présenté sa démission dimanche lors d’une réunion du parti au pouvoir à Juba, a indiqué la South Sudan Broadcasting Radio (SSBC).

Tous les membres de l’Assemblée, y compris ceux de son propre parti, demandaient depuis des semaines la démission de M. Makana, le menaçant sinon de le destituer.

Il était accusé d’avoir refusé de présenter devant l’Assemblée des rapports de l’auditeur général et anti-corruption pour qu’ils soient discutés par les parlementaires.

On lui reprochait également d’avoir approuvé un prêt de 400 millions de dollars (360 millions d’euros) de la Banque africaine d’exportation et d’importation (Afreximbank) pour le gouvernement, sans que l’Assemblée ait pu se prononcer comme l’impose la loi.

Il était enfin critiqué pour avoir empêché les parlementaires de convoquer des membres du gouvernement pour qu’ils répondent devant eux de leur gestion des affaires publiques.

« La raison pour laquelle je remets ma démission est un acte de profond et sincère respect » à l’égard du SPLM, a déclaré dimanche M. Makana, selon des propos rapportés lundi par la SSBC.

« Je ne suis pas à la recherche d’un poste politique ou du pouvoir. Mon intention est de défendre la souveraineté, la sécurité nationale, la paix, la dignité et l’intégrité territoriale de notre pays », a-t-il ajouté.

C’est la première fois que le président de l’Assemblée nationale démissionne depuis que le pays est devenu indépendant du Soudan en 2011.

Le Soudan du Sud a sombré dans la guerre civile en décembre 2013. Le conflit, marqué par des atrocités et le recours au viol comme arme de guerre, a fait plus de 380.000 morts et poussé plus de quatre millions de Sud-Soudanais, soit près d’un tiers de la population, à quitter leurs foyers.

Jeremy Corbyn, rempart malgré lui contre le Brexit

Bien plus à gauche que ses prédécesseurs, le chef de l’opposition travailliste Jeremy Corbyn est critiqué pour son indécision sur le Brexit. Mais il fait un peu malgré lui figure de dernier rempart contre la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne.

Agé de 70 ans, ce militant socialiste de toujours, qui inquiète les milieux d’affaires, est radical sur tout, sauf sur le Brexit.

Eurosceptique dans un parti dont les députés sont majoritairement europhiles, il a choisi d’entretenir l’ambiguïté face au Brexit, voté par 52% des Britanniques en juin 2016.

Il promet, s’il accède au pouvoir, de négocier un nouvel accord de sortie de l’Union européenne plus favorable aux droits des travailleurs, qu’il soumettrait à un référendum avec comme alternative le maintien dans l’UE.

Soucieux de ne pas s’aliéner les eurosceptiques de son électorat populaire, il a fini pas concéder récemment qu’il serait « neutre » dans cette campagne, afin dit-il de permettre au pays de panser ses divisions depuis le référendum de 2016.

Mais face à des conservateurs résolument pro-Brexit sous Boris Johnson, il représente pour bien des électeurs le seul moyen d’empêcher le divorce avec les Européens.

Peu à l’aise sur les sujets internationaux, le mince septuagénaire qui porte court sa barbe et ses cheveux blancs est dans son élément lorsqu’il s’agit de pourfendre les ravages sociaux d’une décennie d’austérité conservatrice et de dessiner un Royaume-Uni qui serait débarrassé des inégalités et privilèges.

– Barre à gauche –

Pendant la campagne pour les législatives anticipées de jeudi, il a vu revenir avec une force renouvelée les accusations d’avoir laissé s’enraciner l’antisémitisme au sein du parti. Malmené par le redoutable intervieweur politique de la BBC Andrew Niel, il a refusé de présenter des excuses.

Selon le Daily Mail, le centre Simon Wiesenthal l’a désigné personne la plus antisémite de l’année, avertissant que le Royaume-Uni deviendrait un Etat « paria » s’il remportait les élections.

Arrivé à la tête du parti en 2015, à la surprise générale au vu de ses positions gauchisantes et minoritaires, Jeremy Corbyn a patiemment fini par faire sa place, déjouant plusieurs tentatives de le renverser de la part de députés et de caciques travaillistes encore sous l’influence de la ligne centriste de Tony Blair.

Mais ce leader sans grand charisme a pour lui la constance dans ses idées et ses engagements très à gauche, nés dans les années 70, ce qui a séduit toute une génération de jeunes militants.

Jeremy Corbyn se distingue par le grand coup de barre à gauche pour le parti par rapport à ses prédécesseurs. Il a d’ailleurs joué un rôle marginal de rebelle au sein du parti, et n’a jamais été ministre pendant les treize ans où le Labour était au pouvoir, de 1997 à 2010 sous Tony Blair puis Gordon Brown.

Né le 26 mai 1949, ce pacifiste a développé son sens de l’engagement politique auprès de ses parents, un ingénieur et une enseignante, tombés amoureux lors d’une manifestation contre la guerre civile espagnole (1936-39).

– Cycliste végétarien –

Elevé dans l’ouest de l’Angleterre, le jeune homme ne se passionne guère pour les études. Après avoir décroché son bac, il part deux ans en Jamaïque pour le compte d’une association caritative. A son retour, il s’installe à Islington, quartier du nord de Londres à l’époque coeur de la contestation gauchiste, désormais très boboïsé.

Militant syndical, il est élu depuis 1983 député de cette circonscription. Il y vit toujours dans une maison modeste, avec sa troisième épouse, une Mexicaine de 20 ans plus jeune que lui, et se conforme à un style de vie simple. Il est père de trois enfants. Végétarien, Corbyn revendique une vie « très normale », lui qui continue à se déplacer à vélo.

Après des années marquées par la ligne social-libérale imposée par Tony Blair, il a dû se battre pour imposer sa vision de gauche et affronter une partie de l’appareil travailliste refusant d’être dirigée par un rebelle. Il avait en effet voté 533 fois contre la ligne du parti depuis 1997.

Son positionnement effraie les électeurs plus modérés, et il est un véritable épouvantail pour les milieux économiques, qui voient en lui un dangereux marxiste.

Algérie: des étudiants protestant contre un cortège pro-élection dispersés

La police algérienne a dispersé de force lundi dans le centre d’Alger des étudiants et lycéens manifestant contre des partisans de la présidentielle prévue le 12 décembre, rassemblés à proximité, a constaté un journaliste de l’AFP.

Au moins dix personnes ont été interpellées, parmi les quelque 200 étudiants de la faculté centrale d’Alger, lycéens de l’établissement mitoyen et quelques passants les ayant rejoint, qui scandaient « non à l’élection » prévue jeudi.

« Nous étions rassemblés à l’intérieur de la faculté, en soutien à la grève générale qui a commencé (dimanche) et nous sommes sortis en voyant les propouvoir manifester sans problème », a déclaré Abdelkrim, 22 ans. « Nous avons voulu exprimer notre refus des élections comme eux ont exprimé leur avis », a-t-il ajouté.

L’appel à la grève générale, lancé sur les réseaux sociaux, était peu suivi à Alger, contrairement à Tizi Ouzou, grande ville de la région de Kabylie, à 100 km à l’est d’Alger, où toutes les boutiques étaient fermées.

Quelque 400 personnes s’étaient rassemblées dans la matinée, sans être inquiétées, en soutien à ce scrutin massivement rejeté, près de la Grande poste d’Alger, lieu de ralliement des manifestations massives du « Hirak », le « mouvement » de contestation populaire du régime né le 22 février.

Après avoir obtenu, en avril, la démission d’Abdelaziz Bouteflika, après 20 ans à la tête du pays, le « Hirak » exige le démantèlement du régime au pouvoir en Algérie depuis l’indépendance en 1962 et rejette cette élection, vue comme devant lui permettre de se régénérer.

Obligés par la police à libérer la chaussée, les étudiants sont retournés s’asseoir devant la faculté et ont scandé des slogans antipouvoir.

Les manifestants pro-élection scandaient « armée et peuple sont frères », en soutien au haut commandement militaire qui assume ouvertement la réalité du pouvoir depuis la démission de M. Bouteflika et « non à l’ingérence étrangère », accusée d’être derrière l’opposition au scrutin.

Ismael Barket, 59 ans, a indiqué à l’AFP être venu de Chlef (160 km au sud-ouest d’Alger), « demander à tout le monde de voter le 12 décembre pour sortir (le pays) de cette crise ».

« Nous sommes contre toute ingérence étrangère et avec l’institution militaire. Nous répondons présents à chaque fois qu’elle le demande », a ajouté cet ancien militaire.

Plusieurs manifestations, officiellement « spontanées », en faveur de l’élection ont déjà eu lieu à travers le pays, mais sont loin de rassembler les foules massives qui défilent chaque vendredi en soutien au « Hirak », rejetant la tenue du scrutin.

Comme chaque semaine depuis le début de la contestation, les étudiants prévoient de défiler mardi, à 48 heures de la présidentielle.

Un jeune travailliste d’origine iranienne défie Boris Johnson dans son fief

Jeune travailliste d’origine iranienne, Ali Milani mène campagne sans relâche pour tenter de battre un candidat pas comme les autres: le Premier ministre britannique Boris Johnson, dans son fief d’Uxbridge, à l’ouest de Londres.

Difficile de trouver deux rivaux plus antagonistes.

Ali Milani a 25 ans. Né en Iran, il est arrivé enfant au Royaume-Uni et a été élevé par une mère célibataire dans un logement social.

Plus vieux de 30 ans, Boris Johnson, instruit dans les plus prestigieux établissements, d’Eton college à Oxford, veut depuis tout petit être le « roi du monde », selon les confidences de sa sœur Rachel à son biographe, Andrew Gimson. Il a été maire de Londres et chef de la diplomatie britannique.

Les deux hommes s’affronteront lors d’élections voulues par Boris Johnson pour obtenir une majorité au Parlement et sortir de l’impasse sur le Brexit. Mais le dirigeant conservateur, aussi charismatique que clivant, affronte une fronde pour le faire tomber dans la circonscription d’Uxbridge et South Ruislip.

« Le coin a toujours été conservateur mais les gens ne sont pas contents de l’état de l’hôpital local, de la situation des jeunes », explique à l’AFP Michael Freitas, responsable informatique de 42 ans, dans le centre d’Uxbridge animé par un marché de Noël.

Depuis le début de la campagne, le candidat conservateur a été peu vu dans cette ville située au terminus d’une ligne de métro et à trente kilomètres de Westminster.

« Boris Johnson a clairement négligé les habitants », estime M. Freitas, qui votera pour le Parti travailliste ou le parti libéral démocrate, pro-européen.

– Mobilisation des jeunes –

Lors des dernières élections, en juin 2017, Boris Johnson ne l’avait remporté qu’avec une majorité de 5.000 voix, deux fois moins que lors du précédent scrutin. Et ses opposants rêvent de l’évincer de son siège, l’excluant de fait de Downing Street: depuis plus d’un siècle, tous les chefs de gouvernement sont députés.

Et jamais un Premier ministre en exercice n’a été battu lors de législatives.

« Sur le papier, renverser le Premier ministre en exercice n’est pas le défi le plus facile à surmonter », a reconnu fin novembre Ali Milani dans le quotidien de gauche The Guardian.

« Mais l’opinion se retourne contre Johnson », estime le travailliste, voyant se dessiner « un vote utile anti-Johnson » et « une mobilisation sans précédent des étudiants et des jeunes », incités à s’inscrire sur les listes électorales: « Je crois vraiment que nous sommes sur le point de remporter une victoire historique ».

Des arguments confortés par une étude du think tank de droite Onward sur les jeunes, réalisée en avril, qui jugeait « vulnérable » la circonscription d’Uxbridge et South Ruislip en raison de l’évolution démographique défavorable aux Tories.

La ville compte une importante communauté étudiante, liée à l’université locale de Brunel, où Ali Milani, ancien président d’un syndicat étudiant, a suivi son cursus.

– « Improbable mais possible » –

« Ali semble se préoccuper de ce coin. Il vient d’ici, il a le côté local », dit Catherina Knox, 35 ans.

Très remontée contre Boris Johnson et ses « mensonges », la trentenaire fait depuis peu du porte-à-porte pour le candidat travailliste. Sans y croire tout à fait: « Une victoire est improbable, mais possible ».

Car même si Boris Johnson est vu par certains comme un candidat « parachuté », les électeurs risquent d’être séduits par ses promesses de tourner la page du Brexit, un sujet qui empoisonne la vie politique depuis plus de trois ans.

« Tout le monde l’aime bien ici. Les gens ne veulent vraiment pas du Labour », estime Sharon Joyce, une institutrice de 50 ans.

Ali Milani pourrait en outre pâtir de ses tweets antisémites écrits il y a plusieurs années, et qui ont refait surface. Il a présenté ses excuses, mettant en avant sa jeunesse.

Un sondage YouGov réalisé fin novembre plaçait Boris Johnson en tête avec 50% des voix contre 37% pour Ali Milani mais la fourchette d’estimation n’exclut pas une victoire de justesse du travailliste.

Dans cette élection décidément pas tout à fait comme les autres, Boris Johnson et Ali Milani affronteront aussi deux rivaux inattendus, le comte « Face de poubelle » et Lord « Tête de seau », deux personnages déguisés de manière farfelue dont les candidatures ont été officiellement enregistrées.

Allemagne: le « Robin des contribuables » et une adversaire de l’extrême droite élus au SPD

Le « Robin des contribuables » et une adversaire acharnée de l’extrême droite: encore inconnus il y a quelques semaines, Norbert Walter-Borjans et Saskia Esken ont été élus samedi à la tête du parti allemand social-démocrate SPD.

. Norbert Walter-Borjans, le « Robin des contribuables »

Ancien ministre des Finances de la région Rhénanie-du-Nord-Westphalie, Norbert Walter-Borjans est surnommé « Nowabo ». Mais c’est un autre surnom qui l’a fait connaître en Allemagne, « Robin des contribuables ».

Cet économiste de 67 ans est en effet l’auteur d’une spectaculaire opération de lutte contre l’évasion fiscale: il a acheté en 2011 des données sur des fraudeurs fiscaux allemands présumés en Suisse, dont les avoirs, finalement rapatriés en Allemagne, auraient rapporté plusieurs milliards d’euros à l’Etat.

M. Walter-Borjans, issu d’une famille d’artisans, père de quatre enfants, est entré en politique en 1984 et a rapidement exercé des fonctions en Rhénanie-du-Nord-Westphalie.

De 2010 à 2017, il dirige les Finances du Land. Soutenu par les Jeunes du parti, plus à gauche que M. Scholz, il ne plaide cependant pas ouvertement pour une sortie anticipée de la coalition.

Il est par contre un dénonciateur acharné du néo-libéralisme, une « pampa dans laquelle nous nous laissons conduire par les lobbyistes et mauvais conseillers « .

. Saskia Esken, en lutte contre l’extrême droite

Membre du Bundestag depuis 2013, Mme Esken, 58 ans, engagée à la gauche du parti, a mis la lutte pour l’égalité des chances et l’accès au numérique au coeur de son engagement.

Née à Stuttgart, Mme Esken se dit inspirée par l’engagement social et politique de ses propres parents. Ancienne dactylo, elle a mené à bien un cursus d’informaticienne et de développeuse de logiciels.

Entrée en 1990 au SPD, cette mère de trois enfants a exercé diverses responsabilité dans le Bade-Wurtemberg. Elle s’est en outre engagée contre l’extrême droite, avant même l’émergence ces dernières années du parti AfD. En 2009, elle avait ainsi fondé une « Alliance contre la droite » à Calw (Bade-Wurtemberg) où le parti néonazi NPD voulait installer son siège régional.

Elle est aussi en pointe dans la lutte pour l’environnement. Mme Esken a ainsi été à l’origine d’une initiative visant à assainir les décharges allemandes. Son duo formé avec M. Walter-Borjans a d’ailleurs été soutenu dans cette élection interne par la branche allemande, très remuante, du mouvement Fridays for Future, lancée par la jeune Suédoise Greta Thunberg.

Membre de l’aile gauche du parti, elle est très critique à l’égard de la coalition Merkel et de ses « compromis » permanents.

Le cyclone tropical Belna a atteint le nord-ouest de Madagascar

Le cyclone tropical Belna a atteint lundi la côte nord-ouest de l’île de Madagascar, noyée sous des trombes d’eau et balayée de vents violents atteignant jusqu’à 180 km/h, a annoncé le gouvernement.

Les autorités n’ont pas publié de bilan immédiat du passage de Belna, qui a touché la Grande île dans la région de Boeny.

« Jusqu’à présent, il n’y a pas de mort, il n’y a pas de blessé, il n’y a pas de disparu, mais juste des évacuations de personnes pour éviter le pire », a indiqué à l’AFP un responsable du Bureau national de gestion des risques et des catastrophes (BNGRC), le colonel Eleck Olivier Andriakaja.

Quelques heures avant l’arrivée de Belna, les autorités malgaches avaient placé la région de Boeny, qui abrite environ un million d’habitants, en alerte rouge et procédé à l’évacuation de près de 200 personnes menacées.

« Il y a déjà des sites d’hébergement qui accueillent les gens qui n’ont pas de maison », a dit le colonel Andriajka, « le BNGRC a déjà prépositionné des vivres ».

Dans son dernier bulletin, la météo malgache a prévu de fortes précipitations pouvant atteindre jusqu’à 200 mm dans les prochaines vingt-quatre heures.

« Les inondations généralisées sont fortement à craindre pour les zones connues vulnérables », a-t-elle ajouté.

Avant de s’approcher de Madagascar, Belna est passé au large de l’île française de Mayotte puis de l’archipel des Comores, plus au nord dans l’océan Indien.

Les autorités locales n’y ont fait immédiatement état d’aucun dégât significatif.

Madagascar, un des pays les plus pauvres au monde, est la cible régulière de cyclones ou autres tempêtes tropicales.

En 2018, le cyclone Ava y avait fait 51 morts et 22 disparus en janvier et la tempête tropicale Eliakim 20 morts et près de 19.000 sinistrés deux mois plus tard.

tm-pa/sd

Boris Johnson, le Brexit à portée de main

Son avenir politique se joue aux élections de jeudi: le Premier ministre conservateur Boris Johnson, partisan sans états d’âme d’une sortie de l’Union européenne, saura alors s’il a les moyens de mettre en oeuvre sa version du Brexit, voté en 2016 par les Britanniques.

Tignasse blonde savamment ébouriffée et dérapages verbaux pas toujours contrôlés, « Bojo », 55 ans, aura mis toute son énergie et son bagout dans la campagne électorale, qui l’a vu tondre des moutons, changer le pneu d’une Formule 1 ou flatter un taureau. Une manière de polir son image d’homme de terrain proche du peuple — bien qu’il soit passé par les plus grandes universités britanniques.

Après avoir joué un rôle moteur dans la campagne du référendum de juin 2016, remporté par le camp du Brexit à 52% des voix, il s’est fixé pour objectif depuis son accession au pouvoir en juillet de le mettre en oeuvre « coûte que coûte ».

Il compte à présent sur le scrutin du 12 décembre pour lui donner une majorité absolue au Parlement, dont les divisions ont jusqu’ici contribué à bloquer la mise en oeuvre de la sortie de l’UE, repoussée à trois reprises, et maintenant fixée au 31 janvier. Cette majorité lui permettrait de faire adopter l’accord sur les modalités du divorce qu’il a négocié avec Bruxelles.

– « Roi du monde » –

Alexander Boris de Pfeffel Johnson est né à New York dans une famille cosmopolite et compte un arrière-grand-père qui fut ministre de l’Empire ottoman, une origine qu’il ne manque pas d’évoquer lorsqu’on accuse son parti d’islamophobie.

Depuis tout petit, il veut être le « roi du monde », a confié sa sœur Rachel à son biographe, Andrew Gimson. Aîné d’une fratrie de quatre, il suit le parcours classique de l’élite britannique: Eton College puis l’université d’Oxford.

Il entame ensuite une carrière journalistique au Times, qui le licencie à peine un an plus tard pour une citation inventée. Le Daily Telegraph le repêche et l’envoie à Bruxelles, de 1989 à 1994. A coup d’outrances et d’approximations, il bouscule la couverture des institutions européennes et devient « le journaliste favori » de la Dame de fer, Margaret Thatcher.

A cette époque, son premier mariage se délite et il renoue avec une amie d’enfance, Marina Wheeler, avec qui il aura quatre enfants. Le couple se sépare en 2018. Boris Johnson fréquente depuis Carrie Symonds, une spécialiste en communication de 24 ans sa benjamine.

Elu député en 2001, il ravit la mairie de Londres aux travaillistes en 2008 et acquiert alors une stature internationale. Avec quelques réussites emblématiques, comme l’organisation des Jeux olympiques. Et des échecs, comme son projet de pont-jardin sur la Tamise, qui aura coûté des dizaines de millions de livres sans aboutir.

– Boris croit en… Boris –

En 2016, il choisit le camp du Brexit au dernier moment. « Je ne pense pas qu’il ait une opinion extrêmement sophistiquée sur le Brexit », confie Pascal Lamy, l’ancien patron de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), qui connaît la famille Johnson. « La seule chose à laquelle croit Boris Johnson, c’est Boris Johnson. »

Dans la campagne de 2016, il promet au Royaume-Uni, débarrassé des « entraves » de l’UE, un avenir radieux coloré de splendeur impériale, où il contrôlera son immigration et récupèrera les millions versés à l’UE pour les consacrer à son système de santé –un engagement basé sur un chiffre faux. Une fois voté le Brexit, il s’apprête à briguer Downing Street mais il est trahi par son allié Michael Gove, qui se met sur les rangs et le proclame inapte à la fonction. Il renonce, Theresa May est choisie par le Parti conservateur et lui confie les Affaires étrangères.

Il y reste deux ans, s’attirant la réputation de dilettante gaffeur. Sans se priver de mettre des bâtons dans les roues de Theresa May, avant de lui ravir le pouvoir.

S’il est donné gagnant par les sondages, sa popularité ne masque pas ses faiblesses, en particulier son rapport à la vérité. Lors d’un débat télévisé pour la campagne électorale, le public a éclaté de rire lorsqu’il a répondu « oui » au journaliste qui lui demandait si « la vérité importe? »

Paul Volcker, qui a terrassé le dragon de l’inflation, est mort

Paul Volcker était une figure historique de la finance, crédité d’avoir dompté l’inflation d’une main de fer à la tête de la Banque centrale américaine (Fed) dans les années 80. Il est décédé dimanche à l’âge de 92 ans.

Une silhouette à la De Gaulle, un humour pince-sans-rire, Paul Volcker a mené sa longue carrière de banquier et de grand commis de l’Etat en artiste de la politique monétaire, doté d’une indépendance farouche.

Paradoxalement, il disparaît alors que l’inflation, son ennemie de toujours, s’est évanouie du paysage économique aux Etats-Unis au point de déconcerter les économistes.

M. Volcker, qui avait été soigné d’un cancer de la prostate, s’est éteint à son domicile de Manhattan, a indiqué sa fille à l’AFP.

L’actuel patron de la Fed, Jerome Powell, s’est dit « profondément attristé » par le décès de Paul Volcker « qui croyait qu’il n’y avait pas de fonction plus élevée que le service public ». « Sa vie a illustré les idéaux les plus élevés: l’intégrité, le courage et l’engagement à faire ce qui est le mieux pour tous les Américains », écrit-il dans un communiqué.

« Ses contributions à la nation laissent un héritage durable », a ajouté M. Powell.

M. Volcker, un démocrate, a servi de nombreux présidents américains, de Richard Nixon en 1971 lorsqu’il était au Trésor où il concocte l’abandon américain de l’étalon or, à Barack Obama en 2008, en pleine crise financière, où il plaide pour une plus grande surveillance des banques.

Mais c’est en tant que président de la Réserve fédérale de 1979 à 1987, sous Jimmy Carter puis sous le républicain Ronald Reagan, qu’il a laissé sa marque, parfois douloureuse et gagné le respect des économistes du monde entier.

L’ancien président Jimmy Carter a été un des premiers à réagir à l’annonce de sa mort: « Rosalynn et moi sommes profondément attristés d’apprendre le décès de Paul Volcker, dont la perspicacité économique a fait un géant de la fonction publique. Paul était aussi obstiné qu’il était grand de taille, et même si certaines de ses politiques en tant que président de la Fed ont été politiquement coûteuses, c’était la bonne chose à faire », a-t-il écrit dans un communiqué lundi.

Même Donald Trump, alors candidat à la Maison Blanche, avait eu ce commentaire à propos de celui qui était vu dans les années 80 comme le 2e homme le plus important de Washington: « j’aime beaucoup Paul Volcker. Il y a quelque chose de très solide dans sa politique et son attitude ».

Celui qui devait lui succéder à la Banque centrale, Alan Greenspan, aujourd’hui âgé 93 ans, a estimé que Paul Volcker était « le président le plus efficace de l’histoire de la Fed ».

– Potion amère –

En 1978, en plein choc pétrolier, l’économie américaine est submergée par une inflation galopante.

Jimmy Carter nomme l’économiste de 51 ans –alors président de la Fed de New York– à la tête de la banque centrale la plus puissante du monde, contre l’avis de plusieurs conseillers qui l’avertissent que la « potion amère » préconisée par son candidat va hypothéquer sa réélection.

L’inflation, que M. Volcker définissait comme « trop d’argent courant après trop peu de biens », caracole alors au rythme annuel de 13%. Pour la juguler il va faire grimper les taux d’intérêt de 11% à 20%. A titre de comparaison ils sont à 1,75% aujourd’hui et l’inflation autour de 2%.

Ce sévère tour de vis ne se fera pas sans douleur et s’accompagnera d’une récession, qui lui vaudra des attaques féroces. Les concessionnaires automobiles lui envoient des clés de voiture dans des cercueils, les agriculteurs étranglés de dettes encerclent le siège de la banque centrale de leurs tracteurs.

Mais cet intellectuel pragmatique et entêté ne cède pas: « rien ne le stimule intellectuellement davantage qu’une crise », disait de lui son épouse Barbara.

– La règle Volcker –

Cette politique inflexible paie, l’inflation passe de 14% en 1980 à 3% en 1983, mais elle coûtera aussi, avec la crise des otages de l’ambassade américaine en Iran, sa réélection à Jimmy Carter.

Paul Volcker quitte la Fed en 1987 mais revient sur le devant de la scène politico-économique en 2008 en tant que conseiller de Barack Obama en pleine crise financière.

Très critique des activités risquées des banques et des hautes rémunérations de leurs dirigeants, il proposera « la règle Volcker », qui interdit la spéculation des banques pour leur propre compte.

Ces dispositions ont perdu de leur substance sous les efforts de dérégulation de l’administration Trump.

« Je me souviendrai de Paul pour sa grande sagesse, sa véritable honnêté et son niveau de dignité à la hauteur de sa stature », a réagi Barack Obama lundi.

Ce petit-fils d’immigrés allemands, né en 1927 à Cape May dans le New Jersey, passionné de pêche à la mouche, a fait ses études à Princeton et Harvard.

Père de deux enfants, dont un fils atteint de paralysie motrice cérébrale, il s’est remarié en 2010, à l’âge de 83 ans, avec son assistante de longue date, après le décès de sa femme Barbara, douze ans plus tôt.

Au style de vie très frugal, Paul Volcker n’était pas porté sur l’enrichissement. En 1981, il laisse sa fille s’endetter pour acheter une maison alors que les taux immobiliers sont à 15%.

Jean-Baptiste Djebbari, pilote en première ligne face à la grève dans les transports

Pilote d’avions d’affaires et figure montante de la macronie, le secrétaire d’Etat aux Transports Jean-Baptiste Djebbari se retrouve en première ligne face aux cheminots et agents de la RATP en grève contre la réforme des retraites, quitte à se mettre « en scène » selon ses détracteurs.

Entré il y a à peine trois mois dans le gouvernement, le député de la Haute-Vienne âgé de 37 ans, venu à la politique dans le sillage d’Emmanuel Macron, s’est fait connaître en 2018 comme rapporteur du projet de réforme ferroviaire.

Il s’entend bien avec la ministre des Transports d’alors, Elisabeth Borne, et met de l’huile dans les rouages avec les syndicats de la SNCF, si bien que son nom circule parmi les successeurs possibles à Guillaume Pepy à la tête de l’entreprise ferroviaire. Ce dernier a finalement laissé son poste le 1er novembre à Jean-Pierre Farandou.

Visage anguleux, débit de mitraillette, ambitions affichées… Le porte-parole du groupe des « marcheurs » à l’Assemblée est depuis devenu un habitué des plateaux et caméras de télévision.

Pour ses premiers pas au gouvernement, il a dû défendre devant les députés le tentaculaire projet de loi sur les mobilités et tenter -sans succès- de sauver de la faillite les compagnies aériennes Aigle Azur et XL Airways.

Avec la grève dans les transports publics qui paralyse depuis jeudi une bonne partie du pays, il est entré dans une nouvelle zone de turbulences.

Il multiplie interventions sur le terrain et dans les médias avec cinq apparitions au premier jour de la grève, d’une rencontre dès potron-minet avec des agents de la RATP à une participation à une émission de divertissement en « prime time » pour vendre le projet de réforme des retraites et promouvoir des moyens de transport alternatifs.

« C’est un acteur, il se met en scène, il se fait prendre en photo avec des non-grévistes, mais n’est pas à essayer de trouver une autre porte de sortie au conflit », raille Frédéric Ruiz, président de la CFE-CGC RATP.

« Personnage sympathique au demeurant », il est selon lui « à l’image du gouvernement, c’est un amateur ».

– Candidat à Limoges ? –

Moins vachard, un responsable syndical de la SNCF qui l’avait déjà côtoyé en 2018 évoque un homme « très accessible, plus ouvert que d’autres dans la majorité sur les questions sociales » et « capable d’entrer dans les sujets malgré l’absence d’expérience préalable ».

« Il a un rôle très politique dans la majorité pour essayer de trouver du consensus », estime ce syndicaliste qui voit en Jean-Baptiste Djebbari un « marcheur convaincu mais pas politisé ».

Issu d’une famille modeste de quatre enfants aux racines berbères lointaines, ce natif de Melun a suivi une prépa maths sup et spé avant d’intégrer l’Ecole nationale de l’Aviation civile (ENAC).

Après avoir débuté comme contrôleur aérien, il est devenu pilote puis directeur des opérations pour une société spécialisée dans les vols d’affaires. Il a été également expert judiciaire aéronautique.

Travaillant en 2015 à la création d’une compagnie aérienne interrégionale, il a rencontré Emmanuel Macron, alors ministre, et s’est engagé dans sa campagne présidentielle. Aujourd’hui, il n’écarte pas une candidature aux municipales à Limoges.

Avec cette crise, « il sent qu’il a le poids d’un rôle à jouer dans un temps assez fort du quinquennat », confie-t-on dans son entourage, qui le décrit comme « très concentré sur la suite des événements ».

Jean-Baptiste Djebbari, dont l’épouse est enceinte de jumeaux, est demi de mêlée de rugby et a manqué « à son grand regret » la Coupe du monde des parlementaires au Japon avec le XV parlementaire à cause de son entrée au gouvernement.

Et comme au rugby, en politique « il y a toujours un peu de combat », confiait-il récemment à BFMTV. « Ce n’est pas mal le combat en démocratie, cela peut être un combat respectueux. Au rugby, vous combattez pendant 80 minutes et après vous faites la troisième mi-temps ensemble et dans la bonne humeur. »

Ouverture à la concurrence: des entreprises déjà prêtes à défier la SNCF

Plusieurs compagnies pourraient répondre aux appels d’offres de l’Etat et des régions, ou lancer directement leurs trains sur les rails français, face à la SNCF. En voici quelques-unes.

– Transdev

Fruit de la fusion en 2011 de Transdev et de Veolia Transport, Transdev a hérité de Veolia ses ambitions de venir concurrencer la SNCF sur les rails français. Filiale de la Caisse des dépôts (66%) et du groupe allemand Rethmann (34%), Transdev fait déjà rouler des trains depuis longtemps, notamment en Allemagne, en Nouvelle-Zélande, aux Pays-Bas et en Suède.

En France, le groupe co-exploite déjà le tram-train de Mulhouse et exploite le petit train à crémaillère du Puy-de-Dôme, ainsi que –en sous-traitance de la SNCF– deux lignes locales en Bretagne.

A force d’attendre depuis des années l’arrivée de la concurrence, Transdev avait commencé à douter de la réalité de l’ouverture du marché. Et son récent échec devant la SNCF et la RATP pour exploiter le futur CDG Express, la liaison rapide devant relier en 2025 Paris à l’aéroport de Roissy, ne l’a pas encouragé.

Le groupe est reparti au combat pour l’exploitation des TER, mettant surtout en avant son expérience en Allemagne, et proposant une organisation décentralisée.

– La RATP

Les régions vont-elles passer de la SNCF à la RATP, un autre groupe public? Exploitant plusieurs lignes de RER dans la région parisienne et le Gautrain –un train régional reliant Johannesburg à Pretoria en Afrique du Sud– la RATP s’intéresse ouvertement aux TER.

Elle-même menacée par l’arrivée prochaine de la concurrence sur son marché historique, la RATP a déjà répondu présent à l’appel à manifestation d’intérêts de la région PACA. Elle vient de s’allier à Getlink (l’ancien Eurotunnel) pour répondre aux appels d’offres dans le Grand Est et les Hauts-de-France.

– Trenitalia

Trenitalia est déjà un opérateur ferroviaire en France via sa filiale Thello (une ancienne coentreprise avec Veolia/Transdev), qui fait rouler un aller-retour par nuit entre Paris et Venise et une poignée de trains entre Marseille, Nice et Milan.

Echaudée par l’arrivée sur ses terres du concurrent Italo (dont la SNCF était un actionnaire important à son lancement en 2012), la compagnie publique italienne a déjà indiqué qu’elle souhaitait participer aux appels d’offres des TER et se lancer sur le marché de la grande vitesse en France.

– Arriva (Deutsche Bahn)

La Deutsche Bahn (DB) et sa filiale Arriva exploitent des trains régionaux en Allemagne, au Danemark, au Pays-Bas, en Pologne, au Portugal, au Royaume-Uni, en Suède et en République tchèque.

– Abellio

Moins connue, Abellio, filiale des chemins de fer néerlandais NS exploite des trains régionaux en Allemagne et au Royaume-Uni.

– MTR

Opérateur du métro de Hong Kong, MTR a fait son entrée en Europe en 2009 en reprenant l’exploitation du métro de Stockholm, et fait actuellement rouler des trains en Australie, au Royaume-Uni et en Suède.

– FlixTrain

FlixTrain, société-soeur de l’opérateur allemand d’autocars FlixBus, propose trois liaisons en Allemagne (Hambourg-Cologne, Berlin-Cologne et Berlin-Francfort-Stuttgart) de même qu’un train de nuit hebdomadaire de Hambourg à Lörrach (près de Bâle). Particularité: FlixTrain sous-traite l’exploitation à des compagnies spécialisées, dont l’opérateur tchèque LeoExpress.

En France, FlixTrain a notifié en juin son intention de faire circuler des trains classiques sur les liaisons Paris-Bruxelles, Paris-Lyon, Paris-Nice, Paris-Toulouse et Paris-Bordeaux, après l’ouverture à la concurrence des grandes lignes fin 2020.

… et la SNCF elle-même, via Keolis

Keolis, filiale de transports publics de la SNCF (à 70%), exploite des trains en Allemagne, aux Etats-Unis, au Pays-Bas et au Royaume-Uni. La SNCF pourrait la faire répondre à des appels d’offres pour des lignes suburbaines, afin de présenter une offre moins chère.

Des consultants russes à Bamako: un lien historique réamorcé

Consultants russes de Wagner vus à Bamako, vente d’hélicoptères: à petits pas, la Russie réinvestit dans sa relation ancienne avec le Mali au nom de la lutte antiterroriste, en pleine dégradation sécuritaire régionale malgré la présence de 4.500 militaires français au Sahel.

En juin 2019, le ministre malien de la Défense, le général Ibrahim Dahirou Dembélé, a signé un accord de coopération militaire avec son homologue russe Sergueï Choïgou, dont le pays, entravé par cinq années de sanctions économiques occidentales, a engagé une opération de charme tous azimuts en Afrique pour conquérir des marchés et s’approvisionner en ressources naturelles.

Sur le papier, l’accord récemment conclu reste très modeste: Moscou, qui a déjà fait don au pays de deux hélicoptères d’attaque MI-35 en 2017, compte vendre deux autres appareils à Bamako et lui fournir une assistance technique.

Mais la présence russe se concrétise. Il y a quelques semaines, une petite équipe du sulfureux groupe paramilitaire russe Wagner, accusé de mercenariat et suspecté d’appartenir à un homme d’affaires proche du Kremlin, a séjourné à Bamako, a appris l’AFP auprès de deux sources sécuritaires distinctes en Afrique de l’Ouest.

Et, selon l’une de ces sources basée au Sahel, « ils vont arriver, ça y est », la décision d’implanter une unité Wagner au Mali ayant, d’après elle, été entérinée lors du premier sommet Russie-Afrique à Sotchi, en octobre dernier.

Ce groupe, avec qui Moscou dément tout lien, fournit des services de maintenance d’équipements militaires, entre autres activités. Ils ont été aperçus ailleurs en Afrique: en Libye, on les dit alliés au maréchal Haftar. Dans le nord du Mozambique, ils combattraient avec l’armée une rébellion jihadiste et des médias occidentaux ont fait état d’une présence à Madagascar et au Soudan.

« Bientôt il y aura des Russes qui vont venir travailler avec nous (…), nous assister techniquement dans certains domaines », a affirmé fin novembre devant les députés maliens le général Dembélé, sans plus de détail. « Lorsque les Russes seront là, au lieu d’envoyer les appareils chaque fois en Russie, ils seront là pour nous aider à les réparer et perfectionner nos pilotes ».

« On ne va pas mettre tout le Mali dans un seul sac et croiser les bras », a-t-il fait valoir pour justifier la conclusion de partenariats d’assistance militaire à la fois avec Paris et Moscou.

Au delà de la sphère sécuritaire, l’agence russe d’information Sputnik a proposé un partenariat aux organisateurs du Forum de Bamako, rassemblement international de décideurs en février, selon deux sources.

– Méfiance –

La Russie n’arrive pas en terre inconnue: à l’époque de la Guerre Froide, l’Union soviétique entretenait des liens étroits avec Bamako. Dès son indépendance en 1961, l’ancienne colonie française se tourne vers le socialisme et conclut des accords de coopération avec l’URSS, qui équipe alors les forces armées maliennes.

Moscou, qui a également signé un accord de coopération avec le Burkina voisin en août 2018 et doit lui livrer deux hélicoptères, met ainsi un petit pied dans la porte en Afrique de l’Ouest francophone, dont il était quasi-absent jusqu’ici.

Côté français, on met en garde contre une surinterprétation des liens ténus retissés entre Bamako et Moscou, qui relèveraient plutôt de l’affichage.

Au Mali, « on n’est pas du tout sur l’ampleur de l’implantation russe dans d’autres pays comme la RCA », abonde une source diplomatique occidentale à Bamako. Début 2018, l’arrivée d’armes et de dizaines de « conseillers militaires » russes en Centrafrique avait permis à la Russie de faire un spectaculaire retour sur le théâtre africain, agrémenté d’une violente campagne de désinformation anti-française.

Cela n’empêche pas une forme de méfiance, au moment même où le sentiment anti-français se fait de plus en plus sonore dans les rues de Bamako.

« Nous soupçonnons les Russes d’encourager le sentiment anti-français » dans la bande sahélo-saharienne où sont déployés les militaires français, glisse un haut gradé.

Sur la scène politique interne, certains groupes d’opposition maliens militent depuis longtemps contre la présence de l’ancienne puissance coloniale et en faveur d’un rapprochement avec Moscou. Ce militantisme pro-russe est notamment porté par le « groupe des patriotes du Mali », une organisation de la société civile dont la page Facebook est sertie d’une photo de Vladimir Poutine.

Questionnée début novembre à Bamako sur la coopération russo-malienne, la ministre française des Armées Florence Parly a prudemment salué l’engagement de Moscou tout en s’interrogeant à demi-mot sur ses motivations profondes.

« La France est prête à collaborer avec tous ceux qui souhaitent continuer à l’émergence de la paix et de la sécurité. Évidemment il faut que ce soit un engagement de bonne foi, mais je n’ai pas de commentaire à faire là-dessus », a-t-elle déclaré.

Dans un jeu d’influence, Moscou se réserve-t-il la possibilité de souffler sur les braises pour porter atteinte aux intérêts français? Un tel comportement n’est pas à exclure, préviennent certains observateurs.

« Il faut tenir compte de ce facteur: même avec des moyens limités, les Russes peuvent exercer un vrai pouvoir de nuisance si on les embête », analyse un expert.

Ursula Von der Leyen, une proche de Merkel adoubée par Macron

Proche d’Angela Merkel, Ursula von der Leyen prend dimanche la présidence de la Commission, forte d’une image d’Européenne convaincue mais déjà éprouvée par une procédure de confirmation difficile, elle va devoir convaincre.

Elle a été le joker du couple franco-allemand quand toutes les autres options ont échoué dans les jours qui ont suivi les élections européennes de mai.

Son accueil au sein des institutions européennes a été plus que frileux. Le Parlement européen ne lui a donné sa confiance qu’à une courte majorité de neuf voix.

Puis trois de ses commissaires candidats ont été retoqués par les eurodéputés, un record, bousculant la procédure de confirmation et l’empêchant de prendre ses fonctions début novembre, comme prévu.

Ursula von der Leyen a finalement retrouvé le sourire mercredi, obtenant une large majorité pour son nouveau collège de commissaires, avant de prendre enfin les rênes de la Commission dimanche.

Soutenue par le président français Emmanuel Macron, cette francophile est appréciée par Paris, notamment en raison d’une bonne coopération sur les questions de défense franco-allemande.

A la tête de l’armée allemande pendant près de six ans, cette femme énergique de 61 ans fut un temps considérée comme la dauphine toute désignée de la chancelière Angela Merkel, qui l’a nommée ministre dans chacun de ses quatre gouvernements (2005-2019).

Une série de scandales ont cependant éclaboussé la Bundeswehr et son ministère pendant son mandat. Si bien que dans un sondage du quotidien Bild au printemps, les Allemands avaient fini par la considérer comme l’une des deux ministres les moins compétents du gouvernement.

– Carrière spectaculaire –

Malgré cette image écornée, Ursula von der Leyen est arrivée à Bruxelles, la ville qui l’a vue naître et grandir jusqu’au début de l’adolescence, avec un atout important: la confiance de Paris et Berlin, à l’heure où M. Macron et Mme Merkel semblaient ne pouvoir s’entendre sur rien.

Outre l’allemand, la responsable politique parle couramment le français et l’anglais. Elle a perfectionné cette dernière langue en Californie, où son mari a enseigné pendant plusieurs années dans la prestigieuse université de Stanford.

La carrière politique de « Röschen » (petite rose), son surnom en famille, est spectaculaire, même pour la fille d’un baron de la politique régionale allemande, Ernst Albrecht.

Ce n’est en effet qu’en 2002, après les Etats-Unis, qu’elle se lance pour un mandat local dans la région de Hanovre. Trois ans plus tard elle était ministre du Travail.

Femme énergique et tenace –certains la diront cassante–, ce caractère a eu du mal à passer dans le monde très masculin de l’armée.

Elle s’est aussi mise à dos une partie de la hiérarchie militaire pour avoir dénoncé des « faiblesses » et un « esprit de corps mal placé », après l’arrestation en 2017 d’un officier soupçonné de préparer un attentat contre des étrangers.

La ministre a aussi été soupçonnée un temps en 2015 de plagiat de son doctorat, un sujet très sensible en Allemagne qui a causé la chute de plusieurs responsables politiques.

– Médecin mère, ministre –

Elle a été la première femme à occuper le poste prestigieux de ministre de la Défense. A ce poste, elle a aussi multiplié les visites aux forces allemandes en Afghanistan ou en Irak.

Médecin de formation, elle est mère de sept enfants. Dans un pays où il reste difficile pour une femme de concilier carrière professionnelle et famille, elle fit régulièrement la Une des magazines avec sa progéniture, au point d’être accusée de l’instrumentaliser.

Au sein du parti chrétien-démocrate (CDU), elle s’est opposée à son propre camp sur certains dossiers, réclamant par exemple des quotas de femmes au sein de la direction des grandes entreprises.

Dans un pays frappé de vieillissement avec une natalité en fort déclin, Ursula von der Leyen reste aussi la « mère » du salaire parental dont peuvent bénéficier les Allemands pendant les 14 mois suivant une naissance.

En Israël, les députés ont deux jours pour éviter de nouvelles élections

Un homme, deux jours, trois élections… Les députés israéliens ont jusqu’à mercredi pour tenter de trouver un remplaçant au Premier ministre Benjamin Netanyahu, faute de quoi le pays se dirigera vers un nouveau scrutin, le troisième en moins d’un an.

Le marathon actuel entre dans ses derniers kilomètres: après les élections d’avril et septembre, qui ont placé M. Netanyahu et son rival Benny Gantz presque nez-à-nez, la vaine tentative de chacun de former un gouvernement et l’inculpation du Premier ministre pour corruption, la classe politique est suspendue aux ultimes tractations de couloirs.

Et si les députés n’arrivent pas à offrir d’ici mercredi 23H59 (21H59 GMT) de majorité à MM. Netanyahu ou Gantz, les deux hommes risquent de rempiler pour une autre course électorale.

Pour éviter une troisième élection, des députés devront changer de camp pour rejoindre soit celui de M. Gantz, soit celui de M. Netanyahu. A moins que les deux rivaux ne s’unissent. Mais aucun député n’a bougé ces dernières semaines et, à moins d’un séisme de dernière minute, les commentateurs s’attendent à un nouveau scrutin, en mars prochain.

Qui porterait alors l’étendard du Likoud? Dans les rangs du parti de Netanyahu, le plus pérenne des Premiers ministres de l’histoire israélienne, une fronde commence à prendre forme sous les auspices de Gideon Saar.

Ce ténor de la formation n’a pas quitté le parti pour rejoindre le camp adverse de Benny Gantz, mais il demande la tenue de primaires pour désigner le prochain chef du Likoud.

Pour la frange du parti emmenée par M. Saar, Benjamin Netanyahu n’arrive plus à rallier une majorité d’Israéliens. Il est mis en examen pour corruption, fraude et abus de confiance dans trois affaires, et des proches le sont aussi pour blanchiment d’argent dans l’achat de sous-marins à l’Allemagne.

D’où l’idée de tenir des primaires.

– « Traître » –

Dimanche soir, lors d’une réunion du comité central du parti fermée à la presse, M. Saar s’est fait traité de « traître » par des membres de sa propre formation, selon des images diffusées sur les réseaux sociaux.

« Les tentatives pour délégitimer et ternir l’image de ceux qui tentent de remettre en cause (M. Netanyahu) sont contraires à l’esprit démocratique du Likoud. Une compétition démocratique renforce le mouvement et ne l’affaiblit pas », a rétorqué M. Saar dans un message retransmis sur sa page Facebook.

Mais sa démarche n’a pas reçu l’appui escompté. Le Likoud va attendre de voir si de nouvelles élections sont convoquées avant de se prononcer sur la tenue de primaires, a-t-il indiqué après la réunion de ce comité central.

Au cours des derniers jours, M. Netanyahu a, lui, proposé la tenue d’une « élection directe » pour le poste de Premier ministre, sur le modèle en quelque sorte d’une présidentielle. Dans ce cas, le gagnant ne serait pas le parti ayant le plus de sièges, mais le chef ayant le plus de votes de la population.

Les troupes de Benny Gantz ont rejeté cette option.

– « Proposition creuse » –

« Changer de système électoral dans un +blitz+ ne nous mènera qu’au même point de départ: il s’agit d’une proposition creuse visant à détourner l’attention de M. Netanyahu qui est inculpé pour corruption dans trois affaires sérieuses et est le seul homme responsable de diriger le pays vers une troisième élection », a répondu le parti « Bleu-Blanc » dans un communiqué.

Pour éviter la tenue d’un troisième scrutin en moins d’un an, M. Gantz pourrait rejoindre M. Netanyahu dans une coalition, mais l’ancien chef de l’armée insiste pour être le premier à diriger cet éventuel gouvernement, assurant que l’actuel Premier ministre doit d’abord régler ses dossiers avec la justice.

M. Gantz a appelé lundi Benjamin Netanyahu à « montrer l’exemple à la population » en cessant d’exiger une « immunité » judiciaire afin d’ouvrir la voie à de réels pourparlers pour la formation d’un gouvernement et ainsi éviter des élections « inutiles ».

Dans l’attente d’un possible nouveau scrutin, M. Netanyahu devrait conserver son poste car les lois du pays ne forcent pas un chef de gouvernement à abandonner ses fonctions en cas d’inculpation.

Quant aux nouvelles élections, elles risquent fort de produire les mêmes résultats: un sondage diffusé lundi par la chaîne Kan place les partis de M. Netanyahu et Gantz au coude-à-coude, comme au premier kilomètre de leur marathon…

Brexit ou nouveau référendum? Réponse jeudi

Brexit ou nouveau référendum ? Avec leur vote du 12 décembre, aux élections législatives anticipées, les Britanniques vont décider à nouveau de l’avenir de leur relation avec l’Union européenne. Voici les différents scénarios.

– Boris Johnson gagne –

Le Premier ministre europhobe Boris Johnson a convoqué ce scrutin après avoir perdu sa majorité au Parlement, à la suite de désaccords avec son petit allié nord-irlandais du DUP et au sein de son propre Parti conservateur sur la forme que doit prendre le Brexit, voté en juin 2016 par 52% des Britanniques.

Les sondages lui accordent un nombre suffisant de députés pour faire passer au Parlement l’accord de divorce qu’il a négocié avec Bruxelles et mettre en oeuvre le Brexit à la date prévue du 31 janvier.

Mais la saga ne s’arrêtera pas là: rien ne changera dans l’immédiat, en raison de la période de transition prévue par l’accord de divorce pour atténuer le choc de la sortie de l’UE. Et Londres aura jusqu’au 31 décembre 2020 pour négocier la future relation avec le club européen.

Ce délai semble d’ores et déjà quasi impossible à tenir, ce type de négociation prenant généralement des années, et les experts parient déjà sur une prolongation de la transition.

– Gouvernement minoritaire –

Le principal parti d’opposition, les travaillistes du Labour, est à la peine dans les sondages et nul ne lui prédit une victoire écrasante. Mais il pourrait en revanche engranger assez de voix pour empêcher une majorité conservatrice.

Le chef du parti Jeremy Corbyn, très marqué à gauche, entrerait alors en compétition avec Boris Johnson pour former un nouveau gouvernement, qui aurait forcément besoin de l’appui d’un des plus petits partis.

La prédécesseure de Johnson, Theresa May, avait dû faire alliance avec le parti unioniste nord-irlandais DUP en 2017 pour s’assurer une majorité. Mais cette fois, le DUP est vent debout contre l’accord de Brexit conclu par Boris Johnson, qui confère à l’Irlande du Nord un statut différent de celui du reste du pays.

Le Labour a lui indiqué qu’il essaierait de gouverner seul mais les indépendantistes écossais du Parti national écossais (SNP) se sont dit prêts à soutenir un gouvernement Corbyn à condition qu’il autorise un nouveau référendum sur l’indépendance de l’Ecosse, après celui perdu en 2014.

– Second référendum –

Le Labour a promis de renégocier l’accord de divorce de Boris Johnson et de soumettre le résultat à un référendum dans les six mois suivant son arrivée au pouvoir.

Jeremy Corbyn a assuré qu’il resterait neutre mais d’autres membres de la direction travailliste ont dit qu’ils feraient campagne pour rester dans l’UE.

Le SNP, le petit parti des Libéraux-démocrates et les nationalistes gallois de Plaid Cymru sont anti-Brexit.

Les sondages montrent que les Britanniques restent tout aussi divisés sur le sujet, avec toutefois une inflexion en faveur du « Remain ».

Rencontre au sommet Poutine-Zelensky à Paris sur la paix en Ukraine

Les présidents russe et ukrainien, Vladimir Poutine et Volodymyr Zelensky, sont arrivés lundi à Paris pour tenter de relancer, sous la houlette d’Emmanuel Macron et Angela Merkel, le processus de paix en Ukraine.

Ces sommets au format « Normandie », en référence à la région française où les des quatre pays s’étaient retrouvés pour la première fois en 2014, ne s’étaient plus tenus depuis 2016.

Le président français a accueilli au palais de l’Elysée la chancelière allemande, puis M. Zelensky, apparemment détendu, qui s’est fendu d’un V de la main, et enfin M. Poutine, arrivé le dernier.

Des réunions bilatérales sont prévues, avant le début formel du sommet puis une conférence de presse vers 18H00 GMT.

Après trois ans de paralysie des négociations, la première poignée de main entre Vladimir Poutine et Volodymyr Zelensky, ancien comédien arrivé au pouvoir en mai, sera scrutée de près. Les deux hommes auront après le sommet une réunion en tête-à-tête consacrée notamment à leur différend gazier.

La rencontre entre Vladimir Poutine et Angela Merkel est aussi très attendue, en pleine crise diplomatique sur fond d’assassinat d’un Géorgien à Berlin imputé à une « entité étatique russe » ou à la Tchétchénie.

« Même si nous avons des contentieux très sérieux avec la Russie en ce moment, nous devons tout faire au sommet +Normandie+ pour progresser vers la paix en Ukraine », a toutefois averti le chef de la diplomatie allemande Heiko Maas, qualifiant ce conflit de « plaie purulente en Europe ».

La guerre entre Kiev et les séparatistes prorusses a fait plus de 13.000 morts dans le Donbass, bastion industriel de l’Est ukrainien, et un million de déplacés depuis 2014.

Les combats ont fortement baissé en intensité depuis les accords de Minsk en 2015. Mais 80.000 hommes continuent de se faire face de part et d’autre d’une ligne de front qui s’étire sur 500 kilomètres. Chaque mois, des morts sont à déplorer dans des accrochages ou sur des mines.

Une militante Femen scandant des slogans hostiles à Vladimir Poutine a été interpellée devant le parvis de l’Elysée après avoir réussi à enjamber une barrière.

– Poser des jalons –

L’Occident et l’Ukraine accusent Moscou de financer et d’armer les rebelles, ce que la Russie nie, affirmant jouer un rôle politico-humanitaire pour protéger les populations locales russophones.

Si la paix n’est pas encore au rendez-vous, Emmanuel Macron et Angela Merkel, la seule à avoir participé à tous les sommets « Normandie » avec Vladimir Poutine, espèrent poser des jalons dans cette direction.

« Nous avons besoin de la consolidation du cessez-le-feu, du déminage le long de la ligne de contact, de définir de nouvelles zones de désengagement (des combattants, NDLR), de prévoir de nouveaux échanges de prisonniers », a-t-on détaillé à l’Elysée.

Pour Emmanuel Macron, dont l’appel au rapprochement de l’UE et de la Russie n’a pas toujours été bien perçu par ses homologues européens, ce sommet constituera aussi un test de la bonne volonté du président Poutine.

« Si le sommet devait échouer, ce serait un échec personnel pour M. Macron tant il a investi pour qu’il se tienne », considère Gerhard Mangott, professeur de relations internationales à l’université d’Innsbruck en Autriche.

Depuis le changement de président en Ukraine, une certaine détente se fait sentir. Un échange de 70 prisonniers a pu avoir lieu en septembre. Les troupes belligérantes ont reculé dans trois petits secteurs de la ligne de front et des navires de guerre ukrainiens saisis par la Russie ont été rendus.

– « Ne pas capituler » –

Mais M. Zelensky, novice en politique, est aussi sous la pression de son opinion, qui redoute de le voir faire trop de concessions face à Vladimir Poutine et à Emmanuel Macron. Le président français, confronté à une vague de grèves pour sa réforme des retraites, entend faire de ce sommet un succès.

Environ 200 personnes ont passé la nuit dans des tentes devant l’administration présidentielle à Kiev, exhortant Volodymyr Zelensky à ne pas « capituler ». Dimanche, 5.000 manifestants s’étaient réunis dans la capitale ukrainienne avec le même slogan.

« Je refuse que nous soyons le plat que se passent les gros +patrons+, je veux que nous soyons à la table (des négociations) au même niveau que les autres! », a assuré Volodymyr Zelensky vendredi soir.

Le président ukrainien a posé plusieurs conditions à la tenue d’élections locales dans le Donbass, étape clé du processus de paix, autour de laquelle se cristallisent beaucoup d’inquiétudes.

Il réclame le démantèlement préalable de tous les groupes armés « illégaux » – comprendre les séparatistes prorusses et leurs parrains russes – et le retour de la frontière entre le Donbass et la Russie sous contrôle ukrainien.

Vladimir Poutine, qui arrive en position de force à Paris, s’est montré plus circonspect sur ses intentions, se contentant de dépeindre son homologue ukrainien comme « sincère » et « sympathique ».

Mais les concessions ne peuvent venir de M. Zelensky seul, insiste Berlin. « Si l’on veut progresser, la Russie doit aussi faire un geste », avertit Heiko Maas.

bur-vl-jri/fz/mw/sg

Kenya: le gouverneur de Nairobi plaide non coupable de corruption

Le gouverneur de Nairobi, Mike Sonko, a plaidé non coupable lundi de plus de 30 chefs d’accusation pour blanchiment d’argent, conflit d’intérêt et pour avoir accepté des pots-de-vin, lors d’une audience dans un tribunal de Nairobi qui s’est déroulée sous très forte protection policière.

Plus récent haut responsable politique ou administratif à tomber pour corruption au Kenya, M. Sonko est accusé, avec d’autres officiels, d’avoir bénéficié de paiements illicites et acquis des biens illégalement pour une valeur totale de 3,5 millions de dollars (3,1 millions d’euros).

Il a plaidé « non coupable » de tous les chefs d’accusation devant le juge anti-corruption Douglas Ogoti, dans un tribunal bondé et protégé par des policiers en tenue anti-émeute.

« Vous avez sciemment acquis des biens et de l’argent en sachant que c’était un acte délictueux », a déclaré un procureur en lisant l’un des chefs d’accusation. Ce à quoi M. Sonko a répondu: « Ce n’est pas vrai ».

Les procureurs ont lu de manière détaillée les comptes bancaires de l’accusé, avec les dates de virements effectués en plusieurs occasions par des chefs d’entreprise ayant remporté des appels d’offre émis par le comté de Nairobi.

M. Sonko a passé le weekend en prison après son arrestation théâtrale vendredi à Voi, dans le sud du pays, au cours de laquelle il s’était bagarré avec des policiers avant d’être maîtrisé et transféré par hélicoptère vers Nairobi.

Le juge Ogoti a ordonné que M. Sonko soit placé en détention provisoire jusqu’à mercredi, le temps que sa demande de libération sous caution soit examinée.

De son vrai nom Gidion Mike Mbuvi, le gouverneur a obtenu en justice le droit de prendre le nom de « Sonko », qui en argot swahili désigne une personne riche et extravagante.

Le parti au pouvoir avait fait un choix non conformiste en 2017 en désignant pour le représenter aux élections des gouverneurs le très populaire et sulfureux Mike Sonko, passé dans sa jeunesse par la case prison et régulièrement accusé d’activités illégales, comme le trafic de drogue.

M. Sonko est très apprécié des Kényans les plus pauvres pour ses services d’ambulances et de pompiers, personnalisés à son nom, chargés de venir en aide aux personnes vivant dans les bidonvilles.

L’excentrique Sonko cultive un look « gangsta », avec ses grosses chaînes et bagues en or, et ses chaussures dorées. Il s’était récemment attiré des critiques pour avoir dévoilé sur les réseaux sociaux sa fastueuse salle à manger, aux parures et accessoires dorés. Il a aussi plusieurs voitures peintes en couleur or.

Le président Uhuru Kenyatta a lancé après sa réélection fin 2017 une guerre contre la corruption dans son pays à l’économie dynamique mais miné depuis des décennies par une culture de pots-de-vin et de malversations.

Depuis, des dizaines de hauts responsables ont été inculpés, dont le ministre des Finances, Henry Rotich, poursuivi depuis juillet pour fraude, abus de pouvoir et pour avoir accepté des pots-de-vin, en lien avec un projet de construction de deux barrages d’une valeur de plusieurs centaines de millions de dollars.