Sécurité : une nouvelle attaque terroriste à Sévaré

Au petit matin, vers 5h20, un énorme bruit réveille les habitants de Sévaré encore endormis. Le début d’une nouvelle attaque dans la ville visant les emprises des Forces de Défense et de sécurité. Les assaillants seraient venus de Bandiagara à bord de véhicules bourrés d’explosifs en direction du camp de la garde nationale et l’aéroport de Sévaré. Ils ont été stoppé selon des témoignages au quartier Sarena où les drones de l’Armée malienne sont rentrés en action pour détruire l’arsenal des terroristes. Selon une source sur place, des hélicoptères de l’Armée ont survolé la ville dans la matinée alors qu’un ratissage était en cours. Une grande partie de la ville a été bouclée par les forces de défense et de sécurité. Plusieurs blessés, notamment des déplacés internes dont le camp se situe à proximité de la zone d’impact ont été évacués vers l’hôpital Sominé Dolo. Certaines sources citant des responsables de l’hôpital évoquent aussi plusieurs morts. L’armée a assuré avoir déjoué une attaque complexe aux environs de l’aéroport mais n’a pas encore communiqué de bilan.

La sécurité est aussi un défi de gouvernance

Au Mali, la politique sécuritaire n’ignore pas les contradictions. Bien au contraire, elle se forge depuis plusieurs années sur les défis inhérents à ces contradictions. Si ces contradictions ont plus ou moins été contenues suivant les épisodes, force est de reconnaître que depuis un peu plus d’une décennie la rapidité et la violence avec laquelle la situation s’est détériorée et enlisée interroge ! Les causes de cette détérioration sont multiples et ont pour racines à la fois des conjonctures ex situ et in situ qui participent, dans un sens ou dans l’autre, d’une crise de l’État.

En référence aux conjonctures ex situ, sur lesquelles nous n’allons pas nous appesantir, comme une impression de déjà vu : le monde est ébranlé par des tensions géopolitiques et géostratégiques qui prennent des allures de remake de la Guerre froide. Ces tensions se sont progressivement inscrites en filigrane dans le Sahel sous la forme de présences de groupes armés terroristes, sous la forme de défiance de l’autorité des États et sous la forme de la présence de forces étrangères et d’opérations militaires de sécurisation.

En référence aux conjonctures in situ, nous pouvons les schématiser et les caricaturer en trois temps. Un premier temps que nous pouvons qualifier de « sécurité sûre d’elle », ou le Mali, au lendemain de l’avènement du pluralisme, s’est quelque peu reposé sur ses lauriers. En atteste la politique tacite de déconstruction des forces de défense et de sécurité comme institutions toutes puissantes. En atteste également une certaine indifférence concernant le renforcement des capacités de ces forces. À titre d’exemple, sur la problématique des différentes politiques et prémices de vision stratégique mises en œuvre, à tort ou à raison, au lendemain de la chute du tout puissant régime militaire de Feu Moussa Traoré, une lecture du document de l’Étude prospective Mali 2025 réalisée en 1999 prouve, si besoin en est, que les questions sécuritaires ne constituaient plus ou pas une priorité pour les acteurs du mouvement démocratique.

Un deuxième temps que nous pouvons qualifier de prise de conscience, en ce sens que les événements, les conjonctures nationales et internationales et le contexte géopolitique et géostratégique ont progressivement imposé la nécessité d’apporter des réponses efficientes et durables aux différentes tensions et aux crises nées ou en gestation. Cette prise de conscience à naturellement imposé le choix du renforcement des capacités des forces de défense et de sécurité face aux menaces qui se sont métastasées à une allure que beaucoup d’experts et de spécialistes n’ont pas vu venir. Des supposés velléités irrédentistes de 2006 en passant par la criminalité organisée, notamment l’affaire « Air cocaïne », les trafics en tous genres et les enlèvements contre rançons, la chute du régime Kadhafi, avec pour ramifications les multiples événements au Mali de 2011 à 2013 et la présence accrue des forces centrifuges, l’Accord pour la paix et la réconciliation issu du processus d’Alger, les conflits communautaires, l’extrémisme violent et la profusion des supposés milices d’autodéfense, la réforme du secteur de la Sécurité, dont la mise en œuvre est toujours en cours, a donné lieu à la Loi d’orientation et de programmation militaire. Autant d’évènements, de contextes et d’enjeux qui ont fini par mettre en lumière la fébrilité de l’architecture sécuritaire du Mali et la nécessité de changer de paradigme en outillant les forces de défense et de sécurité en général et la Grande muette en particulier de capacités de nature à leur permettre de faire face aux multiples défis sécuritaires qui se posaient au pays.

Un troisième temps, que nous pouvons qualifier de « temps du tâtonnement et de la marche timide», en ce sens que si les événements ont imposé le choix de réformes et si des efforts ont été consentis, donnant lieu à des résultats, fussent-ils des bribes au regard des défis et des enjeux, force est de reconnaître que nous sommes très en deçà de ce qu’auraient dû être les avancées comparativement à la complexité des maux. La sécurité a certes été réfléchie, mais pas suffisamment réfléchie dans sa dimension holistique. Elle est encore restée en grande partie la chose des militaires et du presque tout militaire. Or la nature du défi aujourd’hui impose une dynamique sécuritaire qui s’inscrive dans un cadre plus global de gouvernance vertueuse et de redistribution juste et équitable des ressources et des revenus. Une victoire ou un succès militaire qui ne s’inscrivent pas en filigrane dans une stratégie économique, sociale et solidaire resteront un court succès. Ceci pour dire qu’au-delà des capacités militaires et de leur complexité le véritable défi reste celui de la gouvernance.

Tessit : l’armée annonce avoir neutralisé 44 terroristes

Lundi 29 août, de violents combats ont opposé les FAMa à un groupe armé terroriste probablement l’EIGS dans le secteur de Tessit a annoncé hier mardi dans la soirée l’armée malienne sur ses pages officielles. Toujours selon cette publication, le bilan provisoire des combats est de 2 morts et 8 blessés coté FAMa et 44 combattants terroristes neutralisés dont les corps abandonnés sur places, plusieurs motos incendiées et d’importantes quantité d’armes et munitions récupérées. Le 7 août dernier, l’attaque du camp de Tessit par des terroristes avait fait 42 morts et 22 blessés dans les rangs de l’armée malienne qui avait annoncé avoir neutralisé 37 assaillants. L’armée avait aussi assuré dans un communiqué que les terroristes avaient eu un appui extérieur.

Sécurité : une reconstruction pièces par pièces

Le gouvernement de transition poursuit le renforcement des capacités opérationnelles des forces de défense et de sécurité, ainsi que leur réorganisation. Le but est de répondre aux besoins des populations face au terrorisme. Mais cela participerait également de la volonté des autorités de transition de créer des conditions optimales de sécurité afin de tenir les élections, comme l’exige la communauté internationale. 

Le 3 décembre dernier, le Président de la transition, le colonel Assimi Goïta, remettait un important lot de matériels roulants aux forces de défense maliennes. Cela faisait suite à la remise, le 26 novembre dernier, des clés de quatre hélicoptères de combats MI-171 flambant neuf achetés auprès de la Russie. À côté du renforcement des capacités opérationnelles des FAMa, Assimi Goïta procède également à une réorganisation des forces. Trois régions aériennes créées et délimitées, l’unité antiterroriste réorganisée, la Direction générale de la sécurité de l’État remplacée par l’Agence nationale de la sécurité de l’État, une École de guerre en gestation, la sécurité commande les missions de la transition. « Si nous échouons à améliorer cette sécurité, condition nécessaire à l’accomplissement des autres axes du Plan d’action du gouvernement, une grande partie des efforts déployés sera vaine et nous serons condamnés à répéter les mêmes activités sans résultats tangibles », s’est justifié le ministre de la Défense, le colonel Sadio Camara, lors de la cérémonie de remise des matériels roulants aux forces de défense maliennes.

Deux rythmes de réformes se côtoient : le rythme opérationnel, relativement rapide du fait de l’urgence du moment, et le rythme de temps long, d’ordre politique et social, découlant prioritairement de l’assainissement de la gouvernance de la Sécurité.

Une sécurité au second plan

Les prémices des réformes en matière de sécurité au Mali datent des années 1990. Plusieurs initiatives sont nées, à la suite de consultations, afin de toiletter le secteur. Le Code de conduite des Forces armées et de sécurité de 1997,  les Journées de réflexion de la Police nationale de 2001, les États généraux de la Sécurité et de la paix au Mali (2005), etc. en sont des exemples. Cependant, ces réflexions ont souffert de la non-application de leurs recommandations. 

Il manquait également une volonté politique de la part du nouveau régime démocratique, fraîchement installé à la suite d’une dictature, qui voyait d’un mauvais oeil une armée monter en puissance. « Le Mali avait vécu sous une dictature militaire pendant plusieurs décennies et la réforme des forces de défense et de sécurité apparaissait comme potentiellement dangereuse, dans la mesure où elle aurait pu redonner un certain pouvoir aux acteurs en uniformes. Je pense que cela peut aussi expliquer pourquoi les autorités civiles de l’époque n’ont pas donné l’impulsion suffisante pour rendre effectives les différentes initiatives de réformes », analyse Niagalé Bagayoko, experte senior en réforme du secteur de la Sécurité et Présidente d’ African security sector network.

Elle poursuit en affirmant que les politiques d’ajustement structurel ont encouragé ce manque de volonté politique d’accorder une attention particulière à l’armée. « Avec les programmes d’ajustement structurel, on considérait que la Sécurité n’était pas un bien public au même titre que l’Éducation ou la Santé. Et, en la matière, on a tendance à faire en sorte que les investissements dans le domaine de la Défense ne se fassent pas de manière conséquente, car on les perçoit comme contraires aux investissements dans le développement ».  

2012, le déclic

« Pourquoi le Mali ne veut-il pas se battre ? Est-ce qu’il a les moyens de le faire ? Chaque matin on ne fait qu’entendre de tels propos. Je voudrais leur dire que ma réponse est cet exercice. Le reste, on verra plus tard », déclarait fièrement l’ancien Président Amadou Toumani Touré (ATT) lors d’un exercice militaire complexe de commandos maliens le 20 janvier 2011, en marge du Cinquantenaire de l’armée nationale.

L’événement, retransmis en direct sur la télévision nationale, avait rendu les Maliens fiers de leurs forces de défense. Cependant, en 2012, le réveil fut brutal. Ils constatèrent que l’échantillon dont on leur avait vanté la grandeur n’était pas du tout représentatif de l’ensemble des forces de défense et de sécurité, alors en débâcle face aux indépendantistes du MNLA (Mouvement national de libération de l’Azawad), dans le nord du pays. Peinant à défendre l’intégrité territoriale, ATT ne sera plus là pour « voir le reste plus tard ». Il sera emporté par un coup d’État militaire, à la suite de mouvements d’humeur de l’armée mais aussi de la société civile. Trois grandes régions tomberont entre les mains des rebelles du MNLA, puis sous la coupe de djihadistes dont la progression vers le sud du pays durera jusqu’à ce qu’ils soient arrêtés par l’intervention française Serval.

L’affront essuyé avait montré une évidence : il est plus qu’urgent de disposer d’un outil de défense et de sécurité professionnel, qui assure efficacement sa mission régalienne de protection des personnes et de leurs biens.

Une reconstruction à deux vitesses

La transition civile née à la suite du coup d’État de mars 2012 va poser les bases d’une réforme de l’outil de défense nationale et de sécurité, qui va allier réformes opérationnelle, politique et sociale. C’est dans cette optique que la Politique nationale de Défense du Mali et la Loi d’orientation et de programmation militaire verront le jour. « Elles consistaient à rationaliser, assurer et garantir la montée en puissance opérationnelle et capacitaire des FAMa sur cinq années budgétaires glissantes, sur la base des axes d’efforts dégagés et du contrat opérationnel de chaque arme, en autonomie comme en interarmées », explique Kissima Gakou, chargé des affaires stratégiques de défense et en charge à l’époque de conduire les travaux ayant accouché de ces deux politiques.

Cependant, une reconstruction de l’outil de défense dans un contexte de réconciliation était illusoire sans prendre en compte les aspirations de tous les belligérants d’hier. C’est ainsi que le nouveau pouvoir élu du Président Ibrahim Boubacar Kéïta va mettre en place en novembre 2013 un Groupe pluridisciplinaire de réflexions sur la réforme du secteur de la Sécurité (GPRS), dont les travaux vont conduire à la création en août 2014 d’un Conseil national pour la réforme du secteur de la sécurité (CNRSS). Son décret de création sera relu en juin 2016 afin de prendre en compte les dispositions de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali, issu du processus d’Alger. Composé de membres du gouvernement et des groupes armés signataires de l’Accord, le CNRSS permettra de déterminer les critères d’intégration des ex-combattants des mouvements signataires dans les corps constitués de l’État, y compris les forces armées et de sécurité, mais aussi les conditions d’attribution des grades et des fonctions de commandement et de reclassement. Il rendra aussi possible la réintégration des ex-combattants anciennement membres des forces de défense et de sécurité maliennes et le redéploiement des premières unités des forces de défense et de sécurité reconstituées. En outre, le projet de création de la police territoriale est aussi l’œuvre du CNRSS.

Allier gouvernance et capacités opérationnelles

La Loi d’orientation et de programmation militaire, d’un budget de plus de 1 200 milliards de francs CFA, avait pour but d’opérationnaliser les forces armées maliennes à l’horizon 2019 pour faire face immédiatement aux défis sécuritaires du moment. Elle comptait trois axes : les investissements, le personnel et le fonctionnement. Cependant, cette loi a souffert de la corruption, comme en atteste un rapport du Bureau du vérificateur général.

C’est cela le plus grand problème : l’aspect renforcement des capacités opérationnelles des forces est toujours privilégié au détriment de la gouvernance. Ce qui rend difficile l’obtention de résultats sur le terrain. « Il est illusoire de prétendre renforcer les capacités d’une armée sans travailler sur sa gouvernance. De manière presqu’exclusive les autorités maliennes et leurs partenaires étrangers ont mis l’accent sur le renforcement des capacités opérationnelles de combat », explique Niagalé Bagayoko.

Elle ajoute que, malgré tout,  des efforts ont été faits en matière de gouvernance dans le cadre de l’EUTM, la mission d’entraînement et de formation de l’Union européenne pour les forces armées et de sécurités maliennes. Cependant, l’absence de logistique adéquate, notamment de processus d’informatisation de la gestion de la paie et des ressources humaines, n’ont pas permis de produire des effets.

La gouvernance inclut également de former des forces dotées de bonnes conditions de vie et soucieuses du respect des droits de l’Homme et du droit des conflits armés, car « les exactions ont tendance à éloigner les populations, qui ont de moins en moins confiance en leurs forces de défense et de sécurité ».

Pour Niagalé Bagayoko, il faut allier réforme opérationnelle et réforme politique pour plus de résultats. « Le renforcement des capacités militaires est loin d’être l’unique solution au type de crise de conflictualité auquel le Mali est confronté de manière préoccupante depuis maintenant 10 ans. Est-ce que les hélicoptères de combat, les drones, les blindés, etc. détenus par la France au Mali ou par les États-Unis en Afghanistan ont réussi à venir à bout du type d’ennemi combattu ? Non, ce n’est absolument pas le cas. Aujourd’hui, ce qui est nécessaire, c’est d’apporter une réponse politique à la crise actuelle ».

Défis électoraux

À en juger par son Plan d’action, aujourd’hui, la mission fondamentale du gouvernement de transition est l’organisation des élections. Cependant, il pointe du doigt la situation sécuritaire pour justifier l’impossibilité de la tenue de la présidentielle dans un peu plus de deux mois.

Dans une interview à Jeune Afrique, le 8 décembre dernier, le ministre des Affaires étrangères Abdoulaye Diop a souligné les efforts consentis par le gouvernement afin de relever les défis sécuritaires en vue de l’organisation des élections. « Le gouvernement fournit des efforts importants pour améliorer le maillage du territoire et créer les conditions pour la tenue des scrutins. De gros investissements humains et matériels sont en cours. Cette mobilisation nous permettra d’élever le niveau de sécurité dans les plus brefs délais… Nous ne sommes pas naïfs au point de penser qu’il faut 100 % de sécurité pour conduire des élections ».

Mais, selon Wassim Nasr, journaliste à France 24 et spécialiste des groupes djihadistes, penser que dans peu de temps les conditions de sécurité idéales seront réunies pour les élections est illusoire. Cependant, il évoque la possibilité d’organiser élections a minima. « Il faut savoir que bien avant les deux coups d’État la situation sécuritaire n’était pas meilleure. Donc il faut partir du principe qu’il faut tenir les scrutins dans les zones où c’est possible a minima. Les conditions optimales pour leur tenue ne sont pas réalistes aujourd’hui. Et pas qu’au Mali, mais dans plusieurs pays autour du Mali ».

Il explique que la sécurisation du processus électoral demande « une grosse logistique, qui n’est pas dans les capacités des autorités maliennes, même avec l’apport de la MINUSMA ou de Barkhane. Je ne dis pas que le scrutin ne doit pas avoir lieu. Il doit avoir lieu,  mais là où c’est possible ».

Le ministre des Affaires étrangères Diop a déclaré que seules 5 régions du pays sur 19 réunissaient des conditions minimales de sécurité. Alors qu’on sait que l’élection présidentielle de 2018 et les législatives de 2020 ont pu être tenues malgré des incidents. Certains politiques pensent que l’argument de la situation sécuritaire est brandi pour reporter l’organisation des élections. « On se demande si la situation sécuritaire ne fait pas partie d’une stratégie aux fins du report de la date des élections. Certes, il y a beaucoup de localités en insécurité, mais une conséquence de cela est la concentration de ceux qui votent dans les centres-villes et villes moyennes », déclarait à Journal du Mali en septembre dernier, Djiguiba Kéïta, Secrétaire général du PARENA.

Au même titre que plusieurs politiques du Cadre d’échanges des partis et regroupements politiques pour la réussite de la transition, il préconise d’organiser les élections là où c’est possible et de faire consensus pour accepter les résultats des urnes. Pour l’heure, la date des élections et les propositions de réformes de la défense nationale et de la sécurité seront, semble-t-il, connues et validées à l’issue des Assises nationales de la refondation.

Centre du Mali : Après la reconnaissance des exactions, quelles actions ?

Pour la première fois depuis le début des opérations  anti-terroristes de l’armée dans le centre du pays, il y a trois ans, un ministre de la Défense admet l’implication de militaires dans des exactions contre des civils. 25 Peuls arrêtés  par les FAMAs à Nantaka et Kobaka, dans la région de Mopti, le 13 juin,  auraient été exécutés. Une enquête a été ouverte. Qu’y aura-t-il après ?

25 morts. C’est le  nombre de civils peuls  découverts dans trois fosses communes à Nantaka et Kobaka, le 15 juin, dans la région de Mopti. Les premières allégations des associations peules Tabital Pulaaku et Kisal ont vite attiré l’attention. Le ministre de la Défense a, dans un premier temps, nié toute implication des forces armées maliennes, avant de se raviser. Si cette tragédie est au devant de la scène aujourd’hui, d’autres accusations et enquêtes sont restées jusque-là sans suite.

Que s’est-il passé ?

« En réalité, le 13 juin, l’armée a traversé le fleuve à partir de Mopti. Quelques véhicules et des camions. Ils ont encerclé le village de Nantaka, qui est dans le même secteur que Kobaka. Ils ont fait du porte à porte et arrêté tous les hommes, avant de les transporter dans leur base, non loin de là », raconte Abdarahmane Diallo, Secrétaire administratif de l’association peule Tabital Pulaaku. Il dénonce  ce qu’il qualifie de « tentative d’épuration ethnique » et non de lutte contre le terrorisme.  « Quand ils sont  arrivés  à leur base, les hommes des autres ethnies : Sonrhai, Tamacheq, Bozo, ont été libérés, mais ils ont gardé au moins 25 Peuls. Le lendemain de la fête, le vendredi, ils les ont exécutés et enterrés à la va vite dans une petite forêt, dans trois fosses », accuse-t-il.

Les habitants d’un hameau à proximité, ayant entendu des  coups  de feu, se sont rendus sur les lieux et ont découvert trois  fosses contenant respectivement 13, 7 et  5 corps. « Au moment où je vous parle, l’armée s’en prend à tout Peul dans le centre. Que ce soit dans le Delta, à Koro ou à Douentza, c’est exactement la même chose. On ne cherche même pas à savoir ce que vous avez fait », s’indigne Abdarahmane Diallo.

L’envoi par le ministre de la Défense d’une mission conduite par le chef d’État-major général des Armées a abouti à un communiqué, le 19 juin, qui confirme « l’existence de fosses communes impliquant certains personnels FAMAs dans des violations graves ayant occasionné la mort d’hommes à Nantaka et Kobaka, dans la région de Mopti ». Tiena Coulibay instruit en même temps au Procureur militaire d’ouvrir une enquête et « réitère sa détermination et sa ferme volonté à lutter contre l’impunité », engageant les FAMAs au strict respect des Droits de l’Homme.

Flambée de réactions

Les réactions des organisations de droits de l’homme et de la communauté internationale n’ont pas tardé. Deux jours après, le Canada, les États-Unis et l’Union Européenne ont exprimé leur profonde inquiétude face à ces « exécutions extrajudiciaires ». « Les États Unis restent profondément préoccupés par la détérioration de la situation au Mali et dans la région du Sahel », indique le communiqué du Département d’État. Quant à l’Union Européenne, elle « salue l’ouverture de l’enquête judiciaire et  l’engagement des autorités maliennes, au plus haut niveau, à lutter contre l’impunité ».  La MINUSMA a, lors de son point de presse du 21 juin, informé « d’une enquête spéciale ». Le 26 juin, la mission des Nations Unies a rendu publiques les conclusions de l’enquête lancée après  la mort de civils à la foire de Boulkessy, le 19 mai, et souligné que « des éléments du bataillon malien de la Force conjointe du G5 Sahel ont sommairement et/ou arbitrairement exécuté 12 civils au marché de bétail de Boulkessy ». L’expert indépendant de l’ONU sur la situation de droits de l’homme au Mali, Alioune Tine, est arrivé à Bamako et doit se rendre au centre du pays.

« C’est un grand pas. Nous espérons qu’il y aura des sanctions contre les auteurs de ces crimes… Avec les réactions de la communauté internationale nous espérons une suite », se réjouit Hamadoun Dicko, Président de la jeunesse de Tabital Pulaaku. Selon lui, les pressions ont été déterminantes, mais il dit craindre d’autres abus vers Diafarabé, où « les femmes n’osent même plus chercher du bois ».

Dans un environnement où sévissent éléments terroristes et dissensions communautaires, « prudence est mère de sureté ». C’est ce que pense Me Moctar Mariko, Président de l’Association malienne des droits de l’homme. « Il y a de fortes  présomptions contre l’armée malienne. Nous avons recueilli des déclarations, mais il faut rester très prudents et attendre que les enquêtes annoncées soient effectives ».

L’omniprésence ces derniers mois de la « question peule », les accusations d’exactions et les conflits avec les Dozos dans le centre alertent au plus haut niveau. Pour le leader de la jeunesse de Tabital Pulaaku, les autorités doivent envisager dans l’urgence une solution, faute de quoi le pire est à craindre. « S’ils continuent comme ça, beaucoup vont se dire : mieux vaut être djihadiste, pour avoir une arme », prévient-il. Le ressentiment se nourrit de la collusion supposée entre FAMAs et Dozos. Le 23 juin, des chasseurs (Dozos) attaquent le village de Koumaga, dans le cercle de Djenné. 16 morts sont recensés, selon le gouvernement, alors que des responsables de Tabital Pulaaku parlent d’une cinquantaine.

Des cas dans le silence

Selon Corinne Dufka, directrice adjointe de Human Rights Watch pour l’Afrique de l’Ouest, dans un article du Monde publié le 20 juin, « depuis 2017, plus de sept fosses communes contentant les corps d’une soixantaine d’hommes qui auraient été  tués par l’armée malienne au cours d’opérations antiterroristes » ont été documentées. « Mais aucune de ces révélations n’a abouti en justice », déplore-t-elle.  

A Douentza, selon un animateur d’une radio locale, le 9 juin, un véhicule militaire venu en renfort à Boni saute sur une mine. Trois bergers étaient à proximité. Ils auraient été tués. « L’un était un conseiller du hameau de Dalla. Quand le  maire a appris sa mort, il en a été attristé. Si mon parent est tué comme ça et que je vois des gens mal intentionnés, est-ce que je les signalerai aux militaires ? Non ! C’est ça qui aggrave la situation », témoigne-t-il. Selon un rapport de l’organisation International Alert sur le Sahel, publié le 27 juin, « l’expérience ou la perception d’abus commis par les autorités gouvernementales, souvent en toute impunité, a engendré des frustrations dont profitent les extrémistes violents ».

Le sentiment d’abandon de l’État et les violences infligées par les terroristes  finissent par se  traduire en  interrogations. « Pourquoi ils ne se sont pas occupés de nous pendant trois ans ? Mon père, chef de village de Dogo,  a été tué en 2015 par ces terroristes. Combien d’imams, des chefs de villages, ont été exécutés sans que nous entendions le gouvernement ou Tabital condamner ? », se plaint Issa Dicko, natif de Youwarou. « A chaque fois que l’armée arrête des terroristes, les gens font de cela un scandale, mais qui a une seule fois condamné les tueries de ces terroristes ? », ajoute-t-il, estimant que tout ce qui se passe vise « à nous détourner du problème du Nord ». Pour Madame Diarra Tata Maiga, Présidente de la société civile de Mopti et de l’ONG ODI Sahel, « la situation dans le centre est triste. Nos véhicules sont garés, les gens sont en train de mourir, mais à Bamako on nous parle d’élection ».

Que faire ?

« Il faut éviter l’amalgame, sensibiliser, pour que la confiance renaisse. Un miliaire doit sécuriser tout le monde », préconise Hamadoun Dicko. La formation sur les droits humanitaires doit être accentuée. « Il faut renforcer la capacité des militaires maliens. Tous n’ont pas encore compris qu’il y a une ligne rouge à ne jamais franchir », précise Me Moctar Mariko.

En attendant les conclusions de l’enquête sur  ces fosses communes,  le sujet reste sensible en cette veille de l’élection présidentielle. Cette rarissime reconnaissance   suffira-t-elle à calmer les tensions ?  

Alpha Blondy : « Seule une armée de l’Union africaine peut régler le problème du Mali »

De passage à Bamako dans le cadre de la Rentrée Littéraire, l’artiste de renommée mondiale, Alpha Blondy a accordé une interview exclusive au Journal du Mali. Toujours très engagé, portant un discours panafricaniste, le reggae man ivoirien reste fidèle à lui-même et s’exprime sans détour.

Vous reprochez très souvent à nos chefs d’État d’adopter une posture attentiste, que recommandez-vous pour que cela ne soit plus le cas ?

Comment voulez-vous vous faire respecter lorsque vous avez toujours la posture du mendiant ? Surtout que si nous étions de vrais pauvres, j’aurai compris, mais c’est nous qui rendons les autres riches, alors pourquoi en plus devons-nous avoir une attitude de mendiant. Cette posture de mendiant étatique doit s’arrêter. Il faut que nos dirigeants aient de l’épaisseur. Au-delà de cela nous avons un syndrome de Stockholm en Afrique qui fait que les Africains sont les premiers à s’attaquer à toute œuvre africaine. Parce que l’Africain a été déconstruit. Ils ont par exemple mis dans la tête de nos femmes qu’elles seraient belles avec des perruques, des poils de cadavres, ceci fait partie d’une stratégie de déconstruction de l’homme africain. Maintenant il existe un temps pour tout, et ce temps est révolu. Nos frères africains doivent savoir qu’ils sont beaux et intelligents et non bêtes. Dieu a fait de l’Afrique une terre riche, il faut donc à un moment donné que nos chefs aient de l’épaisseur pour les exploiter. Ils ne sont pas parfaits certes, mais aucun président ne l’est. Tous les pays du monde connaissent des problèmes.

Cela devrait être compliqué, vous-même estimez que 90% de nos présidents sont des marionnettes

Mais oui. La main qui donne est toujours au-dessus de la main qui reçoit. Nos présidents que nous élisons, ce n’est pas à l’Occident de les dicter ce qu’ils doivent faire. C’est à nous qu’ils doivent être redevables et non à eux.

Il faudrait une certaine indépendance pour cela?

Ça viendra. J’aime bien cette nouvelle Afrique. Elle est consciente. Quand tu as écouté les présidents Alpha Condé, Alpha Oumar Konare, Nana Akufo-Addo ou encore Paul Kagamé, tu sens que les choses sont en train de changer. Ils se sont réveillés, et c’est ce que nous voulons, pas des béni oui-oui. Si l’Union africaine n’a pas réagi suite à l’assassinat de l’un de ses membres (Kadhafi), ils peuvent venir assassiner un autre président en toute impunité. L’Union africaine doit se faire respecter.

Le président ghanéen pourrait être un exemple à suivre ?

Je suis en admiration totale devant le président ghanéen. Ce qu’il dit est vrai. Avez-vous déjà vu une télévision africaine aller interviewer un président français. Jamais. Mais la réciprocité n’est pas respectée. Tous les jours pratiquement, ce sont les médias occidentaux qui viennent s’entretenir avec nos présidents, très souvent en les posant des questions très embarrassantes. Tout cela doit s’arrêter. Lorsque des journalistes des médias africains feront des interviews avec les présidents occidentaux, là, le respect va s’installer.

Vous plaidez également pour une force africaine pour régler les conflits du continent

Comment un contient aussi grand est incapable d’avoir une coalition militaire ? La souveraineté se protège et de nos jours, elle se fait militairement. Si tu prends des éléments de l’armée malienne, nigériane, marocaine, ainsi de suite, et que des abeilles attaquent le Nord du Mali,  leur riposte fera que ceux qui vont un jour vouloir attaquer le pays à nouveau réfléchirons par deux fois avant de le faire. Il faut que l’Afrique montre ses muscles. La souveraineté se mérite, elle se protège.

Jugez-vous l’intervention française au Mali salutaire ?

Elle ne l’est pas. Cela ne fait qu’augmenter la redevabilité. Tu me dois, c’est grâce à moi que ton pays existe aujourd’hui. C’est grâce à moi que tu es au pouvoir. Cela ne peut et ne doit plus continuer

Vous êtes sensible à la question des immigrés africains, quel message aimeriez-vous lancer à cette jeunesse malienne ou africaine, à ces candidats au départ ?

On m’a souvent demandé de dire aux jeunes d’arrêter de partir. Tous les jours depuis que nous sommes petits, on nous rabâche que la France est belle. Il a étudié en France, donc il est bien. On préfère Canal à nos chaines africaines. On nous a fait croire depuis tout jeune, que, tout ce qui vient de là-bas est bon. C’est donc tout à fait normal que les jeunes veuillent y aller. Pour nos jeunes, le lavage de cerveaux commence par le cinéma. En Occident, le cinéma africain est appelé cinéma calebasse. De fait, les jeunes préfèrent les films américains ou encore français.

Même l’information, pour en attester sa véracité en Afrique, il faut dire que cela vient de RFI. Et donc si c’est RFI qui le dit, c’est que c’est vrai. C’est la mentalité actuelle. Donc si quelque part les jeunes veulent partir, voyez-vous-même. Et ils ne pourront pas arrêter le flot, 1000 pourraient mourir, que 2000 entrerons. L’Afrique c’est l’enfer et l’Occident c’est le paradis, c’est toujours le discours que l’on nous sert. Dans ce cas, ils peuvent tout essayer, mais ils ne pourront pas les arrêter. C’est le retour de boomerang. Ils ne montrent aucune bonne image de l’Afrique. Si des médias occidentaux viennent à Bamako pour faire un reportage, ce n’est pas les hôtels qu’ils vont montrer, ce n’est pas la beauté du pays, ce qui peut rendre le Malien fier, vous ne verrez rien de tout cela. Ils iront dans un quartier précaire, prendre une personne très frustrée, or des pauvres il y en a dans tous les pays du monde, et c’est à cette personne qu’ils donneront la parole. Pourquoi toujours véhiculer cette image rétrograde de l’Afrique. Pour des reportages en Amérique, ce ne sont pas les tueurs que vous verrez, mais les gratte-ciels, Miami, pourquoi ce n’est pas le cas chez nous?

Il faut un repositionnement de l’Afrique, une reconstruction de l’homme africain afin qu’il commence à s’aimer et non à se renier, lui et sa culture. Donc ni Alpha Blondy, ni Ibrahim Boubacar Keita, ni Alassane Ouattara, ni même Emmanuel Macron ne pourront arrêter cette immigration.

L’Afrique a pourtant beaucoup de potentiels ?

En Occident tout est fait. Ici tout reste à faire. Nous avons besoin de nos cerveaux. Ils disent tous que l’avenir c’est l’Afrique. Vous trouvez normal que nous ayons des Cheick Modibo Diarra, des grands techniciens qui travaillent dans les  structures à l’étranger, et que 60 ans après l’indépendance, nous soyons incapables de fabriquer un vélo. Les plus intelligents sont revenus au pays. Ils se sont rendu compte qu’ils étaient esclaves là-bas, mais un esclave qui est instruit, conscient de son niveau, retourne là où il est utile.

Vous avez été ambassadeur de l’ONU pour la paix en Côte d’Ivoire, qu’est-ce qui selon vous permettrait au Mali d’aller vers une paix véritable ?

Tous les feux ne s’éteignent pas avec de l’eau. Souvent des pare-feu sont nécessaires. Allumer des feux pour bloquer le grand feu. Il faut que l’Union africaine ait sa force, nous n’aurons plus besoin que la France vienne garantir la souveraineté de nos États. Seule une armée de l’UA peut régler le problème du Mali une fois pour toute.  L’État malien seul ne pourra pas, car des mains invisibles s’amuseront à avancer des pions.  L’UA doit absolument, impérativement créer une force d’intervention. Ce n’est pas envoyé 500 soldats qui fera évoluer la situation, mais plutôt 200.000 soldats, et là vous pourrez discuter d’homme à homme. C’est ça la solution.

 

Armée malienne : Plus agressive et plus performante

Le samedi 27 janvier, un camp militaire était attaqué à Soumpi, dans la région de Tombouctou, entrainant la mort de 14 soldats. Au-delà de ce sinistre, c’est la remobilisation rapide des Famas, qui ont lancé la contre-offensive et fait 17 morts chez les terroristes, qui doit retenir l’attention. Cet épisode met en évidence la nouvelle posture de l’armée malienne.

Des éléments craintifs, sous-équipés et mal formés, tels étaient certains des qualificatifs peu glorieux utilisés il y a peu pour décrire les militaires maliens. Mais, aujourd’hui, la situation a évolué. Nonobstant les nombreux défis sécuritaires auxquels ils font face, les Famas font désormais front. « A force de subir et d’encaisser, nous avons mené une réflexion et sommes arrivés à la conclusion qu’il fallait mettre l’accent sur l’Homme, parce que c’est l’Homme qui est déterminant dans l’issue d’une guerre », explique le colonel Diarran Koné, chef de la Direction de l’information et des relations publiques des armées (Dirpa).

Pour mener à bien cette politique, de nouveaux centres de formation ont vu le jour et d’autres ont été réhabilités et rouverts. « Nous avions cédé du terrain, et ce n’était pas seulement faute de matériel. Il nous fallait forger la combativité du soldat malien, lui faire comprendre qu’il est le rempart entre la population et l’ennemi », ajoute le colonel. Les dispositions de la Loi d’orientation et de programmation militaire, adoptée en 2015, prévoient également l’achat d’équipements plus performants. « Le matériel vient en complément, c’est un démultiplicateur des forces. Au-delà, il y a une vraie détermination de l’armée pour que le pays se débarrasse une bonne fois de ses assaillants», assure notre interlocuteur. Cela se voit sur le terrain. Régulièrement visés par des attaques complexes, les Famas répondent mieux.

Ripostes vigoureuses, traques sans relâche, la posture a positivement changé. Pour preuve, les « nombreux » terroristes neutralisés dans la région de Mopti, à Djenné début janvier et à Youwarou, le 25. Pas de triomphalisme toutefois chez le Directeur de la Dirpa. « Nous ne devons pas crier victoire. Tant qu’un seul Malien ou ami du Mali sera victime d’une mine ou d’un terroriste, nous estimerons que rien n’aura été fait ».  Ce n’est pas le car de civils qui a sauté sur une mine à Boni, le camp attaqué à Soumpi et le kamikaze a entrainé dans sa mort quatre militaires qui lui donneront tort.

Confiance restaurée

L’armée a aussi su instaurer une relation de confiance avec les populations, indispensable pour recouvrer les parties abandonnées du territoire. Excédés par les nombreuses morts et exactions, les habitants coopèrent mieux avec elle, en dépit des menaces. « Nous constatons un sursaut collectif. La population a compris qu’elle est son premier agent de sécurité et doit nous signaler tout mouvement suspect, afin que nous puissions agir », conclut le colonel Koné.

Moussa Sinko Coulibaly, en lice pour 2018

Cet ancien général de l’armée fut ministre de l’Administration Territoriale sous le gouvernement de Cheick Modibo Diarra, en 2012. À présent, il souhaite se porter candidat à l’élection présidentielle afin de succéder à IBK. 

Après l’annonce de Kalifa Sanogo, maire de Sikasso, c’est au tour de Moussa Sinko Coulibaly de déclarer son intention d’être le futur locataire de Koulouba.

L’information a été relayée par nos confrères de l’Agence France Presse qui s’est procuré une copie de sa lettre de démission où il évoque son intention de « contribuer autrement à trouver les solutions aux défis politiques, économiques, éducatifs, culturels et sociaux auxquels le Mali est confronté ». Cette démission survient quelques jours seulement après celle de l’ancien ministre de la Justice, Mamadou Ismaël Konaté.

Aux cotés d’Amadou Haya Sanogo en étant membre de la junte après le coup d’État de 2012, M. Coulibaly fut ministre de l’Administration Territoriale, poste qu’il a conservé quelques mois après le début du mandat d’Ibrahim Boubacar Keïta.

Son entourage affirme que le candidat a « de nombreux soutiens », notamment dans l’armée. Ce qui peut être une force pour 2018, pour celui qui souhaite devenir le commandant des Armées. Ayant fait ses armes à l’école militaire française Saint-Cyr, il dispose de compétence en la matière.

Son parcours 

Avant d’étudier à Saint-Cyr, M. Coulibaly a commencé son parcours militaire au Mali, au Prytanée militaire de Kati. C’est au cours des années 1990, que le futur colonel s’établit en France pour parfaire sa formation. Après avoir fait ses classes préparatoires du lycée de La Flèche, il sort diplômé de Saint-Cyr, en 1995 avant de terminer sa formation, en France, par un passage à l’École supérieure du génie d’Angers, un an plus tard.

Quelques mois plus tard, de retour au Mali, Moussa Sinko Coulibaly est nommé instructeur permanent à l’École militaire inter-armes (EMIA) de Koulikoro, ensuite, il devient commandant de compagnie de la 261e compagnie et de support de 2000 à 2001.

Jusqu’à sa nomination au poste de Directeur de cabinet du Président du Comité national pour le redressement de la démocratie et la restauration de l’État (CNRDRE), le colonel Moussa Sinko Coulibaly était directeur de l’instruction de l’École de maintien de la paix  Alioune Blondin Bèye (EMP-ABB) depuis 2010. Puis, sa nomination en tant que ministre de l’Administration Territoriale lui permet de goûter à la chose politique. En mai 2014, son portefeuille ministériel ayant pris fin, il regagne son poste de directeur général de l’École de maintien de la paix Alioune Blondin Bèye, à Bamako.

« Pour faire de la politique, la loi obligeait le général Moussa Sinko Coulibaly à démissionner de l’armée. C’est fait. Maintenant, nous voulons avec lui, réaliser l’alternance en 2018 », a déclaré Idrissa Diakité, un de ses principaux soutiens, estimant que « l’actuel président a échoué ».

 

 

 

 

Mali : mort d’un soldat malien et d’au moins trois casques bleus dans le nord-est

C’est dans un communiqué de la MINUSMA que la nouvelle a été donnée. Hier matin, le 24 novembre, la force armée des Nations-unies au Mali, a repoussé une attaque lors d’une opération conjointe avec les FAMas dans la région de Ménaka.

Dans le document, nous apprenons que « trois Casques bleus de la MINUSMA ont été tués, et plusieurs ont été blessés, certains sont dans un état critique. Un soldat FAMa a aussi perdu la vie lors de l’attaque, un autre a été blessé. »

Du côté des assaillants, il y a, également, des morts et des blessés. Une logistique s’est rapidement mise en place avec des renforts aériens pour renforcer la sécurité des hommes de la MINUSMA et des FAMas.

Mahamat Saleh Annadif, Représentant spécial du Secrétaire général du Mali (RSSG) et Chef de la MINUSMA, condamne cette attaque qui survient au moment où les forces armées procédaient à une assistance auprès des populations de la région. « Je condamne avec la plus grande énergie cette attaque qui endeuille une nouvelle fois la Force de la MINUSMA, ainsi que les FAMas. J’adresse mes condoléances aux familles des victimes et souhaite un prompt rétablissement aux blessés », a déclaré le RSSG avant de surenchérir :

« Cette opération, qui entrait dans le cadre de la protection des civils de la région, avait également pour but d’apporter une assistance médicale aux populations dans le besoin. Je salue la bravoure de nos contingents et des FAMas dont l’engagement a permis de neutraliser plusieurs terroristes. J’en appelle à la vigilance, à la solidarité et à l’unité des Maliens pour faire face à la lâcheté de nos adversaires », explique-t-il, en faisant une allusion très claire aux groupes terroristes.

 

EXCLUSIVITÉ : Derek Matyszak : « Cela semble être la fin de l’ère Mugabe »

Il régnait d’une main de fer sur le Zimbabwe depuis 37 ans, le chef de l’État, Robert Mugabe, 93 ans, a vu sa position de force basculée suite à une intervention militaire, ce matin. Les locaux de la radio nationale ainsi que certains bâtiments publics et officiels ont été pris d’assaut dans la nuit de mardi à mercredi. Ce bouleversement politique intervient après le limogeage de l’ancien vice-président, Emmerson Mnangagwa, pressenti pour succéder à Robert Mugabe. Alors que son épouse vise également la fonction suprême. En exclusivité pour le Journal du Mali, Derek Matyszak, nous accorde cet entretien. Ce consultant de l’Institute for Security, à Pretoria, mais actuellement basé, à Harare est un témoin privilégié de cet événement.

Journal du Mali : Les militaires disent que ce n’est pas un putsch mais comment interpréter cet événement ?

Derek Matyszak : Les militaires ont déclaré qu’ils effectuaient une courte intervention chirurgicale et incisive pour « extraire » les éléments contre-révolutionnaires du parti au pouvoir, le ZANU PF. Ils disent que ce groupe contre-révolutionnaire déstabilise le parti au pouvoir et donc le pays, et qu’ils sont constitutionnellement tenus de le défendre. Ils ont déclaré qu’une fois leur devoir accompli, ils retourneront à la caserne. Cependant, leurs actions constituent clairement une ingérence inconstitutionnelle dans les affaires politiques.

Certaines personnes appartenant à l’entourage de Robert Mugabe ont été arrêtées. Mais qui sont-elles concrètement ?

Les personnes qui ont été arrêtées appartiennent à une faction particulière du Zanu-PF connue sous le nom de G40. Ce groupe a essayé d’empêcher la succession à la présidence par Emmerson Mnangagwa, qui a le soutien de l’armée. Lorsque ce dernier a été limogé par le président Mugabe, le 6 novembre dernier, l’armée a décidé de protéger son statut de successeur.

Le vice-président Mnangagwa est destitué et Grace Mugabe est désignée comme la succeseur de son mari, cette intervention militaire peut être considérée comme un avertissement pour le pouvoir ? Une nouvelle ère pour le paysage politique ?

Cela semble être la fin de l’ère Mugabe. Mnangagwa sera installé en tant que président. La question est de savoir s’il a l’intention de chercher une sorte d’alliance avec les groupements d’opposition pour former un gouvernement technocratique pour sauver l’économie zimbabwéenne qui est au bord de l’effondrement.