Grogne contre le prix d’Internet : une lutte africaine

Tout comme au Mali, les citoyens de plusieurs pays africains militent contre le prix d’Internet dans leurs pays. De la Côte d’Ivoire au Bénin, en passant le Burkina et le Cameroun, la lutte s’intensifie.

Partout le même mot d’ordre : protester pour que baissent les prix des forfaits internet. Au Bénin, des internautes se mobilisent depuis plus d’un mois pour cela. Dans ce pays, le prix d’un giga de forfait Internet est passé de 500 francs CFA en 2018 à 1 000 voire 1 200 francs actuellement, selon les opérateurs. Des mouvements de protestation s’organisent face à « l’inaction » des autorités du pays pour ramener le prix à 500 francs CFA. Ce qu’ont réussi en avril dernier les Ivoiriens. Au début du mois, les fournisseurs Internet de Côte d’Ivoire avaient diminué les volumes des packs : pour le même prix, les consommateurs avaient moins de données Internet. Face à l’ampleur de la contestation sociale et avec l’intervention du gouvernement, les entreprises sont finalement revenueaux prix d’avant. Mais la colère ne retombe toujours pas dans le pays, où des voix s’élèvent encore pour une diminution du prix des tarifs Internet. De la Côte d’Ivoire est parti un mouvement de contestation qui a désormais atteint le Cameroun. Au pays des Lions Indomptables, depuis le 24 avril dernier, les clients des opérateurs de télécoms Orange et MTN organisent des actions de boycott des services de ces entreprises. Outre se mettre en mode avion de 12 à 14h par jour, ils se désabonnent et signalent sur le réseaux sociaux les pages des sociétés de téléphonie.

Le 18 avril 2023, c’est la même stratégie qu’ont adopté les Burkinabè pour « dénoncer le coût d’Internet ». Au pays des Hommes intègres, les citoyens ne conçoivent pas par exemple que le gigaoctet soit vendu 2 000 francs CFA. Un prix « inconcevable » pour les Burkinabè, qui réclament une baisse des tarifs avec un gigaoctet à 300 francs.

Dans les pays africains, où les nombreux jeunes sont de plus en plus connectés à Internet, rendre son accès abordable et accessible est devenu un enjeu majeur pour les gouvernants. Autant pour stimuler l’innovation, le développement des compétences numériques et la croissance économique des États que pour éviter une contestation sociale qui ne cesse de prendre de l’ampleur un peu partout sur le continent.

Six mois d’IBK, les Maliens sont impatients

Il y a déjà  six mois que le président Ibrahim Boubacar préside aux destinées du Mali. Six mois qui n’auront pas été de tout repos pour le presque septuagénaire qui tente lentement mais surement d’imprimer son tempo à  la marche d’un pays mis à  mal par la crise multidimensionnelle qu’il surmonte. Cependant du côté du peuple, le sentiment largement partagé est que les choses tardent à  évoluer. Le « bonheur des Maliens » n’est pas encore une réalité selon nombre d’entre eux. Certains déplorent le statu quo, d’autres pensent tout simplement que, au regard de la conjoncture économique actuelle, la situation des Maliens a plutôt empiré. Le nouveau régime se trouve constamment devant le feu roulant des critiques. Pour les Maliens, la question principale aujourd’hui , C’’est comment gérer son quotidien ? Il suffit d’avoir une conversation avec le mécanicien du coin ou le commerçant du grand marché pour s’en convaincre. « J’ai l’impression que rien ne bouge. Il faut baisser les produits de première nécessité pour permettre aux Maliens de subvenir à  leurs besoins fondamentaux », rouspète Mamadou Traoré, plombier de son état, qui reconnait avoir du mal depuis un certain temps à  faire face à  ses dépenses familiales. Demi- grossiste au marché de Djicoroni-Para, Seydou Gassama constate, non sans amertume, la baisse de la recette journalière. « Je reçois depuis trois mois moins à  peine dix clients par jour au lieu des dizaines naguère », se plaint le boutiquier. Professeurs de lettres, Oumar Traoré note une évolution timide du nouveau régime. Il lui reproche de traà®ner les pieds dans la réalisation des actions concrètes comme la création d’emploi pour les jeunes et une amélioration du pouvoir d’achat du citoyen. « Trêve d’arrestation, trêve de voyage ! La priorité est ailleurs. Les gens ont faim. Il faut aider les Maliens à  assurer les trois repas quotidiens, C’’est ça la priorité, tout le reste est secondaire », affirme avec véhémence Hamidou Togo qui tient atelier de soudure au centre-ville. Les victimes du déguerpissement des voies publiques crient leur ras-le-bol. Certains d’entre affirment avoir regretté leur choix sur IBK. En plus de la pauvreté ambiante, estiment-ils, le pouvoir vient tout détruire en leur privant de source de revenu. Autant de récriminations, reflétant le sentiment de la majorité des compatriotes, qui pourraient inspirer le régime d’IBK. Car comme dirait l’autre : « Vox populi, vox dei » (la voix du peuple est la voix de Dieu).

50f de plus pour le Sotrama !

Décidément, la pilule devient de plus en plus amère pour les maliens. Ce matin il fallait avoir 200 f CFA en poche pour faire une course en transport en commun, appelés Sotrama, soit une augmentation d’environ 35%. Un coup dur de plus pour les bourses déjà  éprouvées. Conséquence de la hausse des prix du carburant La Coordination des groupements professionnels de transports et la Fédération nationale des syndicats et conducteurs du Mali a publié un communiqué annonçant la hausse à  partir de ce 21 mars de leurs tarifs. Comme argument, la Coordination affirme que « depuis 2005, le prix des carburant ne cesse d’augmenter. Au regard des nombreuses charges que subissent les transporteurs et le pouvoir d’achat des Maliens, les groupements professionnels de transports en commun accord avec la Fédération nationale des syndicats et conducteurs ont décidé du réajustement des prix pratiqués depuis 2005». Il s’agit d’un tarif plafond, précise le communiqué. Les syndicats ont mis le paquet pour que l’information passe. Les apprentis informent systématiquement tous les clients de la hausse des tarifs et des copies du communiqué suscité sont distribuées dans les stations. Des émissions radios sur les chaà®nes privées ont également été consacrées à  ce sujet ces derniers jours. « Depuis 6 heures du matin, on est là , et tout se passe plutôt très bien », affirme ainsi Salif Amadou Diallo, le secrétaire aux relations extérieures du syndicat national des transporteurs du Mali. M. Diallo estime que cette mesure se résume par la hausse progressive du prix du carburant depuis 2005 et l’augmentation du prix des pièces de rechange des voitures. Le syndicaliste se défend de toute idée de profiter de la crise pour augmenter les tarifs. «Depuis longtemps on envisageait l’application de cette mesure avant de se raviser compte tenu du pouvoir d’achat faible des populations. Mais au rythme o๠allaient les choses, explique-t-il, les transporteurs ne pourraient plus vivre de leur métier ». Selon Drissa Camara, secrétaire à  l’éducation du syndicat national des transporteurs du Mali, outre la hausse du prix du carburant, les pièces de rechange aussi se font rares maintenant. Selon lui, les pneus appelés  »Tigadéguéni » sont passés de 60 000 à  110 000 F CFA pendant qu’une autre pièce de rechange est cédée aujourd’hui à  47 500 au lieu de 32 000 FCFA naguère. Sur une recette journalière de 30 000 F FCA, déplore M.Camara, on doit 12 000 F CFA journalière au propriétaire de la voiture et dépenser 20 000 F CFA pour le carburant. à‰quation difficile à  tenir. « Ce n’est pas sérieux! » Face à  la mesure qui vient s’ajouter à  une conjoncture déjà  difficile, les avis des usages divergent. Si certains font contre mauvaise fortune bon C’œur, d’autres la dénoncent. Mamadou Touré, qui avait appris l’information par voie de presse, estime que cette augmentation va tout simplement compliquer toute la gymnastique déployée déjà  pour la recherche de la pitance. Mody Fané est dérangé par la situation mais reconnait les difficultés des transporteurs. «Ce n’est pas sérieux, comment on peut faire cela en cette période de crise. Le gouvernement ne devait pas accepter cette mesure » se lamente pour sa part Mariam Koné, qui venait d’être refusée par l’apprenti au niveau du lycée Mamadou Sarr faute d’avoir payé les 50F CFA. Pour le moment, la mesure ne concerne que le transport urbain. Dans les jours à  venir, le transport inter urbain va prendre la cadence. C’’est du moins l’assurance donnée par Seydou Yossi, secrétaire général de la coordination des syndicats et associations des chauffeurs et conducteurs du Mali.