Mali : les médicaments ont-ils la même efficacité qu’ailleurs ?

Les médicaments sont utiles au maintien de notre santé, mais l’efficacité de certains d’entre eux pose question au Mali. S’il existe un mécanisme de suivi pour le circuit licite, beaucoup de médicaments échappent à ce dispositif. En outre, avec les conditions de conservation, difficile de garantir des médicaments efficaces à 100% du fabricant au consommateur.

Pour garantir la qualité et la sécurité des médicaments, il existe un dispositif, un mécanisme, le Schéma directeur d’approvisionnement et de distribution des Médicaments Essentiels et autres produits de Santé (SDADME-PS), axé sur les médicaments du circuit légal pour lesquels des contrôles administratifs et analytiques sont effectués.

Le premier niveau de contrôle est le statut du médicament dans le pays de fabrication, qui permet de savoir s’il y est autorisé ou non, avant d’apprécier les autres critères après un contrôle analytique au Laboratoire national de la santé (LNS). L’accent est ensuite mis sur le contrôle post commercialisation.

Un même médicament peut être fabriqué par plusieurs laboratoires et avoir des dénominations différentes sans que cela ne nuise à son efficacité, qu’il soit vendu ici, en Europe ou en Asie. C’est par exemple le cas des médicaments à base de paracétamol fabriqués par différents laboratoires, appelés différemment et dosés à 500 mg ou à 1g et présentés en comprimé, en sirop ou sous forme injectable (forme galénique). Les différences peuvent donc aussi concerner l’association du produit à d’autres molécules.

Efficacité conditionnée

« L’efficacité des médicaments d’ici est la même qu’ailleurs si les conditions de conservation sont respectées jusqu’au consommateur », explique le Dr Patomo Dominique Arama, Directeur adjoint de la Direction de la pharmacie et du médicament (DPM).

Au Mali, pour le circuit d’approvisionnement, les commandes sont faites sur la base des besoins. L’importateur adresse ses besoins au fournisseur, qui lui donne une facture. Elle est transmise à la Direction de la pharmacie et du médicament (DPM) pour visa, ce qui permet à l’importateur d’obtenir une levée d’intention auprès de la Direction générale du commerce de la concurrence et de la consommation (DGCC) et de récupérer les produits auprès des services de Douane. Les médicaments sont conservés selon les conditions définies par les fabricants, généralement précisées sur les conditionnements.

Ici, les grossistes-répartiteurs qui importent sont la Pharmacie populaire du Mali (PPM) et d’autres distributeurs. À l’extérieur, les fournisseurs sont des laboratoires pharmaceutiques industriels et des sociétés de distribution reconnues dans le secteur pharmaceutique.

Malheureusement, tous les produits ne rentrent pas dans le circuit réglementaire. Difficile donc de garantir l’efficacité et la qualité de certains médicaments douteux, qui sont « destinés à être saisis et détruits », selon le Dr Arama.

Contrôle des médicaments : un dispositif à parfaire

Alors que des médicaments et des sirops douteux font des victimes dans le monde, notamment en Gambie, comment s’effectuent les contrôles de ces produits avant leur entrée sur le territoire malien ? Avec quel processus de suivi ?

Créée en 2000, la Direction de la Pharmacie et du médicament (DPM) regroupe la Division des Laboratoires, la Division Réglementation et suivi des établissements pharmaceutiques et celle dédiée à l’Assurance qualité et à l’économie des médicaments. Ses missions sont entre autres l’élaboration de la Politique pharmaceutique et celle des normes et procédures dans le cadre de la réglementation du secteur pharmaceutique. Outre des moyens plus adéquats pour avoir un système de contrôle plus performant, il faut une lutte efficace contre le circuit informel des médicaments, qui constitue une véritable problématique de santé publique.

Parmi les fonctions de règlementation confiées à la DPM figurent la pharmacovigilance, les essais cliniques ou encore l’homologation. Les médicaments du circuit formel mis à la consommation passent en principe par 2 étapes. La première consiste en l’enregistrement, qui fait suite à une demande d’importation. Lorsque le médicament est autorisé, il peut être importé par un grossiste agréé et la seconde procédure démarre.

Pour les spécialités, l’enregistrement ne pose pas de problèmes puisque les laboratoires sont connus et ont des systèmes normalisés au plan international. Le contrôle n’est donc pas systématique, explique le Dr Yaya Coulibaly, Directeur de la DPM et enseignant-chercheur à la Faculté de Pharmacie de l’USTTB. S’agissant des médicaments dits génériques de marques, les laboratoires sont aussi connus et il existe de fortes chances qu’ils soient de qualité. En ce qui concerne les génériques tout court, il est fait appel au Laboratoire national de la Santé, dont les résultats permettent à la Commission de donner son aval ou non. Là aussi, « le problème ne se pose pas », parce qu’ils « savent que ce sera contrôlé », ajoute le Dr Coulibaly.

Une fois l’autorisation accordée, le médicament peut donc être importé. C’est à cette étape qu’intervient le contrôle post marketing, parce qu’il peut s’agir d’une molécule différente. Ce contrôle doit être effectué par un dispositif qui n’existe pas pour le moment, une équipe pluridisciplinaire constituée de ressources des Douanes, de la DPM, de l’Inspection de la Santé et du Laboratoire national de Contrôle de qualité. Ses résultats permettent d’autoriser ou de refuser l’entrée du médicament sur le territoire.

En l’absence de ce dispositif, un contrôle existe par exemple le cadre des Appels d’offres de la Pharmacie populaire, car il fait partie du cahier des charges. Si le produit n’est pas enregistré, des échantillons doivent être fournis et une vérification est effectuée avant l’Autorisation de mise sur le marché (AMM). Pour ce qui concerne les médicaments antipaludiques, un projet effectue des prélèvements dans les établissements sanitaires.

Mais ces quelques contrôles ne sont pas suffisants, avoue le Directeur de la DPM.  « Il faut contrôler les médicaments essentiels avant la mise en consommation sur le marché ».

Marchés parallèles

Après l’alerte mondiale émise par l’OMS le 5 octobre 2022, suite au décès de 69 enfants en Gambie, et après vérification, il s’est avéré que le « produit n’était pas enregistré au Mali ». Il ne devrait donc pas être présent sur le marché. Mais, compte tenu de l’existence d’un circuit non formel, tout le système a été alerté, affirme le directeur de DPM. Les prescripteurs, les directeurs d’hôpitaux, etc., ont donc été invités à la prudence.

Malgré la mise en place d’une Commission nationale de lutte contre les médicaments illicites en 2002, le fléau reste entier. Le phénomène, qui dépasse largement les compétences d’un seul ministère, doit être appréhendé par tous les acteurs, au niveau national et international, suggère le Dr Coulibaly. Outre l’obligation de sensibiliser les populations sur les dangers des « médicaments de la rue », la problématique doit être abordée dans le cadre d’une « action coordonnée, pour en réduire l’impact ».

S’il reconnaît l’existence d’une volonté politique indispensable pour un système de contrôle plus efficace, des ressources suffisantes et des compétences doivent être mises en place par l’État. « Les médicaments sont le nerf de la guerre en matière de santé publique » et leur qualité ne peut être garantie que grâce à des autorités de réglementations performantes, dotées de moyens et d’expertises suffisants.

Gao : les populations approvisionnées en médicaments après quatre mois de blocage

Les populations de Gao subissent une pénurie de médicament depuis près de cinq mois à cause des camions d’approvisionnements de médicaments bloqués à Douentza. Une première solution d’approvisionnement de la ville en produits pharmaceutiques semble être trouvée ce mardi 30 août.

Un grand soulagement pour les habitants de la cité des Askia. Privée de certains médicaments depuis quatre mois à cause du blocus sur l’axe Douentza-Gao, la ville a accueilli ce mardi un premier lot d’une tonne et demi qui équivaut à plus de 1400 colis de médicaments. Ce premier approvisionnement en quantité depuis plus d’un trimestre a été rendu possible grâce à l’appui de la MINUSMA qui a permis d’acheminer les produits à Gao. Pour le président du conseil régional de l’ordre des pharmaciens de Gao Docteur Agassoumane Maiga, cette action sera bénéfique pour les populations mais aussi pour la mission.

Pour maintenir la dynamique d’approvisionnement, d’autres actions sont en cours. Il s’agit, selon M. Maïga, d’élargir le moyen d’acheminement des médicaments vers Gao en sollicitant l’aide du CICR. Une première livraison de 500 kg du CICR sera acheminée ce vendredi 2 septembre à Gao.

Pour rappel, depuis quatre mois, la route qui relie Gao à Sévaré a été bloquée sur le tronçon Hombori – Douentza, « du fait de l’action de groupes armés terroristes », selon des sources locales. La situation empêche l’acheminement de tout produit de qualité dans la ville via la route.

Gao : les pharmacies en rupture de stock de médicaments

Depuis maintenant quatre mois, la population de Gao fait face à une pénurie de médicaments. Trouver certains produits pharmaceutiques est devenu un véritable casse-tête dans la localité. Une situation due, selon Dr Agssoumane Maïga président du conseil régional de l’ordre des pharmaciens de Gao, au blocus instauré sur l’axe routier Douentza-Gao depuis Mai dernier par des terroristes.

Afin de remédier à la situation, des actions ont déjà été menées auprès des hautes autorités du Mali. « Le 6 juin dernier, nous avons écrit au gouverneur par rapport à la situation. On a également averti nos faitières et le ministère de la santé », explique Dr Agssoumane Maïga. Selon ce dernier, un accord de principe a été trouvé entre les autorités du Mali et la MINUSMA pour que les produits pharmaceutiques soient acheminés à Gao par la voie aérienne avec l’appui de la mission onusienne qui a deux vols sur la localité par jour. Des moyens comme la voie fluviale avec la reprise des bateaux de la Comanav sont aussi utilisés par les pharmaciens pour contourner le blocus de l’axe routier. Certes les pharmacies sont ouvertes et continuent de fonctionner mais elles ne sont cependant pas en mesure de répondre d’urgence à certaines demandes des malades

Déjà confrontées à l’insécurité et au manque de connexion internet, les populations de la cité des Askia « sont totalement désemparées par le nouveau phénomène. Pour avoir un produit, tu peux faire quatre pharmacies. Les gens ne savent plus à quel saint se vouer alors qu’il y a des grands malades dont les vies dépendent de certains médicaments introuvables », témoigne Abdoul Nasir Maiga, journaliste sur place à Gao.

Pour rappel la route qui relie Gao à Sévaré a été bloquée sur le tronçon Hombori – Douentza, « du fait de l’action de groupes armés terroristes » qui ont aussi miné l’axe routier. Une situation qui laissent perplexes les habitants de la cité des Askia qui « ne comprennent toujours qu’il n’y ait pas de solution à ce blocus » qui dure depuis quatre mois.

 

Ces poisons qui viennent d’ailleurs

Le 15 septembre 2016, le rapport publié par l’ONG Public Eye jetait un pavé dans la mare. Les Africains, et particulièrement les Maliens, y découvraient avec stupeur que des traders leur vendaient du carburant « dangereux », car contenant des teneurs de produits toxiques largement au-delà des normes internationales autorisées. Si les compagnies indexées bottent en touche et assurent qu’elles restent dans la légalité en respectant les normes des pays de destination de leurs produits, ce scandale qui fait suite à de nombreux autres, pose la question de la protection des consommateurs face à ces produits importés dont la qualité peut être sujette à caution. Alimentation, médicaments, mais aussi d’autres produits comme les vêtements de seconde main peuvent représenter un vrai danger quand ils ne sont pas soumis à un contrôle drastique. « Tout ce qui est importé au Mali est frelaté : sucre, lait en poudre, engrais, batterie de voiture… », disait Bakary Togola, président de l’APCAM, en juin 2015.

Attention, aliments périmés !

Directement ingérés dans l’organisme, les produits alimentaires sont ceux qui exposent l’être humain à un risque direct, en cas de mauvaise qualité. Le Mali importe la majeure partie de ses besoins alimentaires, en particulier les produits manufacturés, de l’huile aux conserves, mais aussi le riz. La libéralisation du marché a permis à de nombreux opérateurs économiques de se lancer dans l’importation et de proposer aux consommateurs un choix très large de produits alimentaires. Soumis aux contrôles des services de la douane et du ministère du Commerce à travers la Direction nationale du commerce et de la concurrence (DNCC), ils doivent, en principe, obtenir l’autorisation des pouvoirs publics avant de commercialiser leurs produits. Mais les scandales alimentaires dont celui des huiles frelatées, des engrais non conformes, et les images de destruction régulière de produits alimentaires « non conformes », confortent dans l’idée que ces contrôles ne sont pas aussi efficaces qu’ils le devraient. Il n’est pas rare, au contraire, de trouver sur les marchés de Bamako comme à l’intérieur du pays, du lait ou des boissons dont la date limite de péremption est largement dépassée. Ces produits périmés proviennent pour certains des entrepôts des commerçants, qui les cèdent à vil prix pour s’en débarrasser. Mais selon le témoignage d’un employé, sous couvert d’anonymat, d’une de ces sociétés, « les patrons achètent souvent des produits déjà périmés. On sait que les gens ne savent pas lire et que quand c’est moins cher, ils ne se posent plus de question ». Il arrive même de retrouver dans les rayons de certains supermarchés des conserves périmées, ou dont l’emballage est corrompu. En 2009, des milliers de boîtes avaient ainsi été saisies dans les boutiques et sur les marchés. La porosité des frontières mais aussi la corruption des agents en charge du contrôle sont montrées du doigt, mais les autorités, à l’image de Modibo Keïta, directeur général de la DNCC, assure que toutes les mesures sont prises pour lutter contre la présence de ces produits sur les marchés. Pour Salimata Diarra, présidente de l’Association des consommateurs, le véritable problème se trouve à un autre niveau : « il y a un laisser-aller de la part du consommateur, qui avance toujours l’argument de la pauvreté», regrette-t-elle.

Médicaments non conformes

Autres produits de consommation courante, les médicaments. Les médecins déplorent une utilisation exagérée et mal contrôlée de tous les types de médicaments, en particulier les antibiotiques, et ce du fait de l’automédication. Mais l’autre préoccupation, qui est aujourd’hui érigée en problème de santé publique, c’est l’utilisation de médicaments de mauvaise qualité, voire dangereux pour la santé. Des conditions d’importation, à celles de stockage puis du dosage à la vente, les produits pharmaceutiques, déjà sensibles par leur essence même, deviennent de véritables poisons. Les contrôles se font pourtant et selon le rapport du laboratoire national de la santé (LNS- Mali) en date de 2014, sur 218 échantillons de médicaments prélevés, 12,19% étaient non conformes. Les non-conformités concernent essentiellement des antibiotiques, des antipaludiques et des antitoussifs destinés aux enfants. D’après un agent du laboratoire national de la santé qui s’est exprimé sous anonymat, « le phénomène des pharmacies par terre est dû à la non-application de l’arrêt interministériel du 13 février 2008, portant contrôle à l’importation des médicaments, des aliments, des boissons et des eaux. La plupart de ces médicaments sont périmés ». Fodé Coulibaly, gérant d’une pharmacie au marché de Daoudabougou, indexe lui aussi les pharmacies par terre où « les produits ont des dosages souvent doublés ». « Certains pharmaciens vendent des médicaments périmés. Surtout les génériques, qui sont vendus en vrac. Des fois, il suffit de regarder la plaquette pour voir que la date est dépassée », contre-attaque Alassane, vendeur de médicaments à Railda. « Tous les médicaments qui entrent légalement au Mali sont contrôlés par la Direction de la pharmacie et du médicament », assure le Docteur Soumeylou Guindo, pharmacien, qui appelle les consommateurs à faire attention à ceux « qui entrent de façon frauduleuse et sont des poisons. Ils ont des effets secondaires ».

Friperies, nids de germes

Les friperies viennent pour la plupart d’Europe et des États-Unis et, ces dernières années, attirent beaucoup les consommateurs. On leur reconnait d’être plus solide que les produits manufacturés en Asie, et surtout d’être plus accessibles que le neuf. Parmi ces produits seconde main, il y a les appareils électroménagers, de l’informatique, du mobilier, mais surtout des vêtements et depuis quelques temps, de la literie. Ce sont ces deux dernières catégories de produits qui sont les plus dangereux, mais aussi celles qui échappent à tout contrôle, comme le confirme Oumar Togola, douanier. Au Mali, « seuls les frigos et les ordinateurs usagers sont contrôlés car ils peuvent contenir des produits dangereux pour la santé et l’environnement. Les friperies ne sont pas contrôlées. Il n’y a pas de texte qui interdit l’importation de ces produits au Mali », explique-t-il. Pourtant, elles représentent un danger pour la santé. Ces habits peuvent « exposer celui qui les utilise aux mycoses, infections dues à un champignon et autres maladies de peau, pour n’évoquer que celles-là. Les femmes sont d’ailleurs particulièrement exposées, elles qui se fournissent jusqu’aux sous-vêtements chez les vendeurs de « yougou-yougou », souvent mal nettoyés, non traités avant usage. Même si les commerçants de friperie défendent leurs produits et assurent qu’ils ne sont pas nuisibles pour la santé. « Tous les habits sont bien lavés. J’ai passé deux ans dans ce métier mais je n’ai jamais eu une balle où des habits sont sales. Il y en a qui ne sont pas lavés mais la plupart de ces habits sont neufs », dit Amidou, un vendeur de friperie, qui oublie de préciser qu’un produit est répandu dans lesdites balles pour protéger les vêtements des mites pendant le transport, et qu’il n’est pas sans effet sur la santé humaine…

Les véhicules d’occasion, pollueurs ambulants

Depuis les années 1990, l’importation des voitures de tourisme usagées, la vente de voitures d’occasion est devenue une activité dynamique au Mali et l’on a vu se déverser sur le marché les véhicules « amortis » d’Europe et depuis peu de l’Amérique du Nord. Devenus indésirables sous d’autres cieux, car ils ne répondent plus aux normes anti-pollution très strictes de ces pays exportateurs, ils sont expédiés vers l’Afrique pour être commercialisés, alors qu’en principe, ils ne résisteraient pas à une visite technique. « Le Mali est la destination de choix, la demande est exponentielle », assure Gabriel A. S, expert automobile à la Direction régionale des transports de Bamako. Au Mali, aucune restriction n’est faite à ce jour concernant l’âge et l’amortissement des véhicules d’occasion, contrairement au Sénégal qui interdit l’importation de véhicules d’occasion âgés de plus de 8 ans. D’autres pays ont pris des mesures similaires : le Gabon a fixé la limite d’âge à 4 ans, le Nigeria à 10 ans et l’Algérie à 3 ans, une manière de protéger son industrie locale. Selon Ousmane Camara, vendeur de véhicules d’occasion à Bamako, « il faut reconnaître que de nombreuses voitures en provenance de la Belgique et de l’Espagne, où se tiennent les marchés les plus importants dans le domaine, sont des automobiles en fin de course avec des compteurs trafiqués, des cartes grises douteuses et des contrôles techniques fantaisistes ».

Pour Alassane Bouaré, transitaire à Kouremalé, les véhicules à essence ayant atteint 200 000 km de conduite et ceux en moteur diesel ayant atteint 300 000 km sont moins performants et donc plus polluants. Ils devraient normalement être envoyés à la casse, et non venir rouler sur nos routes. Constat confirmé par Amara Kanté, mécanicien et vendeur de véhicules : « plus la voiture est vielle, plus elle a des effets néfastes sur l’environnement et donc sur la santé des usagers de la route ».

Carburant, la « qualité malienne » ?

L’enquête « Dirty diesel » (carburant sale) de l’ONG suisse Public Eye, qui dévoile les pratiques peu scrupuleuses des géants du négoce pétrolier suisses, qui écoulent en Afrique des carburants dont la teneur en soufre est entre 200 et 1 000 fois plus élevée qu’en Europe, a fait l’effet d’une bombe au Mali. Elle interroge encore une fois sur ce marché africain où le manque de contrôle et la seule volonté de profit justifie tout. Au vu de la croissance urbaine qui suit une courbe exponentielle, accompagnée par le nombre de véhicules, la qualité du carburant et son impact environnemental est un sujet crucial. Plus des deux tiers des échantillons prélevés dans le cadre de cette enquête contiennent un taux de soufre supérieur à 1 500 parties par million (ppm). Dans ce tableau déjà noir, le cas du Mali est le plus alarmant avec une pointe à 3 780 ppm, alors que la limite est de 10 ppm en Europe (qui est passée de 2 000 ppm à 10 ppm de soufre en 23 ans de 1993 à 2016). Or, il est reconnu que ces carburants issus de mélange avec des produits toxiques, sont particulièrement nocifs pour l’environnement et la santé. L’explosion du marché de l’automobile a été suivi d’une demande accrue en carburants alors que les législations moins strictes et le contrôle moins contraignant qu’ailleurs, permettent d’écouler ces carburants mélangés, dangereux, et que le consommateur achète pourtant cher à la pompe.

Ce n’est pas la première fois que des produits réputés toxiques sont écoulés en Afrique. La société Transfigura épinglée par l’enquête Public Eye, dont le chiffre d’affaires annuel dépasse de très loin le produit national brut (PNB) de beaucoup d’États africains, avait déjà connu un scandale en 2006. Ce géant pétrolier avait déversé des déchets toxiques en Côte d’Ivoire, suite à la fabrication de carburants bon marché dont le raffinement avait généré des tonnes de déchets, qu’il lui aurait coûté très cher de retraiter en Europe.

Au Mali, comme dans les autres pays visés par cette « qualité africaine », les populations semblent se résigner, faute de moyens, et supportent sans finalement vraiment savoir à quoi on les expose…

Les médicaments Made in China : un poison pour l’Afrique

Dans une grande partie de l’Afrique, les produits made in China ont pignon sur rue. Il est presque impossible de ne pas tomber sur des produits chinois dans les allées du marché de Lagos, d’Alger et de Bamako. Contrairement à  d’autres griffes importées, les marques chinoises sont plus abordables. Le site Think Africa Press s’intéresse à  un produit en particulier: les médicaments. Les affaires de faux médicaments en provenance de Chine ont amplifié la méfiance des Africains, mais beaucoup restent contraintsde les acheter, faute d’argent. Or la qualité de certains médicaments en provenance de Chine n’est pas optimale. «La Chine est l’un des principaux fabricants mondiaux de médicaments et une source principale des médicaments vendus en Afrique. Sur un continent o๠des millions meurent chaque année de maladies curables, la demande de médicaments bon marché est élevé», précise Think Africa Press. Comment distinguer le bon grain de l’ivraie? Là , est la principale difficulté. Les médicaments peuvent avoir le même packaging, la même notice, sans être de qualité équivalente. «Les médicaments de qualité inférieure sont un grand problème», explique Lorraine Kabunga, un pharmacien à  Mbarara, en Ouganda. «Quand les gens achètent des médicaments de moindre qualité, il peut y avoir une réponse différée ou pas de réponse du tout». L’une des solutions serait que les Etats africains réglementent davantage le marché des médicaments. «Il est grand temps pour l’Afrique d’avoir ses propres autorités réglementaires régionales», explique Luiz Loures, Directeur exécutif adjoint du programme de l’ONUSIDA.

Les médicaments génériques, pas si efficaces?

Dans un rapport publié le 14 février, l’Académie française de médecine émet cinq recommandations sur les génériques, dont celle d' »appliquer formellement les dispositions réglementaires de contrôle de qualité » et d' »appliquer les (mêmes) règles de la pharmacovigilance et de la pharmacoépidémiologie » qu’aux médicaments référents.Voilà  qui suffisait pour relancer la polémique sur l’efficacité des médicaments génériques. Pas la même composition Comme le souligne ce rapport, les génériques ne sont pas des copies conformes de la spécialité de référence. Le principe actif est le même, mais couleur et présentation (gélule, comprimé…) peuvent différer, de même que les excipients. Pour être mis sur le marché, un générique doit simplement démontrer sa bioéquivalence (par des tests biologiques qui reflètent le comportement du produit dans l’organisme) avec la molécule princeps, avec une tolérance de + ou – 20 %. Un système qui, pour les autorités de santé, garantit que l’efficacité et la tolérance sont inchangées. Pas si simple, selon les médecins. Globalement, les généralistes pointent des risques de confusion et d’erreur chez les personnes âgées qui prennent beaucoup de médicaments. D’autant que la marque de génériques délivrée par le pharmacien peut varier d’une fois à  l’autre. « C’est une vraie difficulté, qui s’accroà®t depuis trois à  quatre ans. On est aux antipodes des conditions qui permettent une bonne observance, et cela augmente les risques iatrogènes », observe Vincent Renard, président du Collège national des généralistes enseignants. De nouvelles dispositions réglementaires, qui permettent pour tout générique de copier l’apparence et la texture de son princeps, devraient résoudre en partie ce problème. Efficacité non garantie Des questions se posent aussi dans certaines familles thérapeutiques. Le cas des antiépileptiques, dont la marge thérapeutique est étroite, est emblématique. Des cas de déséquilibre de l’épilepsie après introduction d’un générique ont été rapportés, avec parfois des conséquences dramatiques sur le plan médical ou social. Les neurologues préfèrent jouer la prudence. « Quand un épileptique va bien, je demande qu’on ne change pas la marque de son médicament. Je ne veux pas prendre de risques pour quelques centimes », souligne le docteur Arnaud Biraben (CHU de Rennes), en précisant qu’au Canada une enquête médico-économique a montré que le coût d’un traitement par antiépileptique générique était au final supérieur à  celui du médicament de référence. Une telle étude se met en place en France. « Je ne suis pas sûr qu’il existe de grosses différences entre génériques et princeps, mais dans des pathologies o๠soit le taux sanguin du médicament est important, soit le psychisme joue un rôle prépondérant, un changement de marque peut déclencher des effets qui perturbent la vie des patients « , résume le neurologue. De fait, en infectiologie comme dans la plupart des domaines thérapeutiques, peu d’études cliniques sont menées pour comparer les effets d’un médicament et de ses génériques, car ni pouvoirs publics ni industriels ne les financent.

Faux médicaments : quand le paracétamol tue des bébés en Afrique

Les faux médicaments représentent 10% du marché mondial Une rencontre a réuni les experts de la santé tels le Représentant de l’OMS, le Dr Diallo Fatoumata Binta Tidiane, le représentant du Programme pour la Promotion de la qualité des Médicaments auprès de la Pharmacopée Américaine M. Kennedy M. Chibwe, le Directeur des laboratoires et des contrôles de l’Agence Française de la Sécurité Sanitaire des produits de Santé Professeur Alain Nicolas, le Directeur général du laboratoire national de la santé (LNS) Prof. Benoà®t Koumaré, des Directeurs et Experts Analystes des Laboratoires de contrôle de qualité des médicaments de l’Ethiopie, du Ghana, du Kenya, de l’Ouganda, du Sénégal et du Mali. Selon les statistiques de l’Organisation mondiale de la santé, le trafic de faux mé­di­ca­ments rapporte annuellement 60 milliards de dollars américains, et représente près de 10% du marché mondial. Les médicaments contrefaits : une menace pour la santé Le ministre Oumar Ibrahima Touré qui a présidé cette cérémonie d’ouverture a révélé : « Aussi, vous vous souvenez, certainement comme moi, que près de 100 bébés sont décédés dans un pays voisin après avoir absorbé du faux sirop de Pa­ra­cé­ta­mol en 2008. Mieux, la conférence de Cotonou au Bénin, organisée par la Fondation CHIRAC et qui a regroupé 11 Chefs d’Etat, a été l’occasion d’un plaidoyer mondial contre les mauvais médicaments et médicaments contrefaits. Une conférence à  laquelle, nous avons personnellement représenté le Président de la République du Mali Son Excellence Monsieur Amadou Toumani Touré, signifiant ainsi l’engagement de notre pays dans la lutte. ». Il apparaà®t aujourd’hui que les mauvais médicaments et les médicaments contrefaits, constituent une menace pour la santé de nos populations et les économies de nos pays. A ce niveau, les différents constats, ont permis de noter que la qualité, l’efficacité et l’innocuité des médicaments se trouvent menacées par les défis actuels liés à  la mondialisation. Il s’agit entre autres de la réémergence de certaines maladies avec le développement de la résistance des germes aux médicaments classiques, les pandémies comme le VIH, le Sida et la grippe aviaire pour lesquelles la thérapeutique médicamenteuse reste insuffisante. Il s’agit également du développement de la contrefaçon des médicaments, le marché illicite des médicaments, et l’avènement des génériques multi sources dont l’équivalence thérapeutique doit être assurée. Contrôle qualité: une exigence des laboratoires Tout cela exige de nos laboratoires de contrôle, des capacités techniques optimales pour le management de la qualité. D’o๠l’importance de la rencontre de Bamako. Les multiples appuis du Programme pour la Promotion de la Qualité des Médicaments auprès de la Pharmacopée Américaine sont salutaires. Des appuis qui ont permis au Laboratoire National de la Santé, la déconcentration des activités de contrôle par la mise en place de Kits Minilabs au niveau des régions du Mali, et la création de postes sentinelles pour le contrôle de la qualité des antipaludiques. Ils ont également contribué à  étoffer l’arsenal des moyens de contrôle au Mali, comme l’appareil pour les tests de dissolution, le Spectrophotomètre à  Infra Rouge, le Karl Fisher, les substances de références, ainsi que divers accessoires et petits matériels.

Pharmacie : des centaines de kilos de médicaments brûlés

Les médicaments périmés sont très généralement ceux dont la date de consommation est dépassée et ceux avariés sont les plus souvent décomposés par leurs conditions de conservation ou par autres effets dus à  la nature. Les produits ont été apportés par plus de 5 camions remplis. Leur valeur pourrait être estimée à  plus de 2 milliards de francs CFA selon l’un des représentant de la Direction de la Pharmacie et du Médicament (DPM). Ceci est déjà  une perte énorme pour les pharmaciens de la capitale et des populations. Rôle de la Commission de destruction La commission a pour rôle principal le suivi de ces médicaments périmés ou avariés dans les magasins de stockage, du contrôle de leur chargement dans les camions, de leur contrôle au lieu de déchargement et de destruction. Elle doit s’assurer après la mise à  feu que tous les produits sont bien brûlés. Cela est normal pour éviter que les populations ne viennent s’en servir à  leur absence. Elle est constituée par des représentants de l’Etat, du privé et de la société civile. La compétence lui relève d’approuver le Procès Verbal ou de le rejeter. La DPM est l’organe mère chargé de la coordination des activités de cette commission. Le Processus Les pharmaciens sont les seuls responsables des médicaments périmés ou avariés à  leur niveau. C’’est dans ce cadre qu’ils sont tenus d’informer la DPM de leurs produits non utilisables et qui doivent être détruits, cette direction étant la seule structure habilitée à  organiser leur destruction. « Les produits prennent du temps dans nos magasins car nous devrons chercher de l’argent pour qu’ils soient détruits par la commission »explique l’un des représentants des pharmaciens. Et de renchérir « C’’est une double perte pour nous ! ».

Faux médicaments: l’ Afrique « cobaye » des industries pharmaceutiques

Un faux médicament est un produit qui a été délibérément ou frauduleusement étiqueté. Ce sont des produits falsifiés, les faux vaccins et les faux dispositifs médicaux, des médicaments de qualité inférieure. Ces produits qui ont un effet nocif sur la santé humaine représentent 10% des médicaments vendus au plan mondial et environ 75 milliards de dollars de chiffre d’affaires. Ces statistiques prenant une ampleur, il est urgent d’agir. C’’est pourquoi la Fondation Chirac a initié la rencontre de Cotonou pour lancer un appel à  tous les acteurs qui interviennent ou peuvent intervenir dans la lutte contre ce fléau. Le Congo, le Mali, le Burkina Faso, le Libéria, le Nigéria le Sénégal, le Niger,le Chili, le Laos, la Côte d’ivoire, le Togo, Monaco, la Tanzanie, la Corée du sud, la France,la Centrafrique, la Mauritanie, l’Union Africaine, l’Union européenne et les Nations-Unies ont répondu présent à  l’appel de Cotonou. Phénomène inquiétant au Mali Partout à  Bamako, on voit des vendeurs ambulants ou des pharmacies  » parterre » qui font du porte à  porte et trompent la population sur les effets de tel ou tel médicament. l’appel de Cotonou vient à  point nommé pour soutenir la lutte contre la vente illicite de ses médicaments. Le Mali a pris part à  la cérémonie de lancement de l’appel de Cotonou sur le trafic des médicaments illicites par l’entremise du ministre de Santé Oumar Ibrahima Touré pour adhérer à  la convention. Nouhoum Coulibaly a participé à  tous les travaux préliminaires de ce forum en sa qualité de Président de l’ordre des pharmaciens sur la portée de cet appel. Selon lui, l’appel à  Cotonou est un engagement pour faire face à  ce phénomène. La tache n’est pas aisée. Au Mali, le phénomène prend des proportions inquiétantes dans la mesure o๠tout le monde consomme ces médicaments dits de « la mort » sans se rendre compte des effets à  long terme : L’Afrique, cobaye des faux médicaments Selon le Dr Coulibaly, il est difficile de différencier les médicaments de qualité et les contrefaçons car les esprits malins introduisent ces faux médicaments dans toutes les structures de santé. « Ils ne passent pas par les circuits de contrôle classique et évoluent dans l’informel. On les trouve dans les secteurs publics, communautaires, privés, les officines privés, le secteur formel. « Et celui qui vend ces médicaments n’est ni pharmacien, ni médecin et cherche son bénéfice. Les produits vendus sont moins chers et certains agents de la santé les vendent aussi aux Malades dans les structures de santé publique. Ils ingorent cependant que ce sont parfois des produits tests, répandus par les laboratoires pharmaceutiques internationaux. Les populations sont alors des cobayes pour eux. Mais pour beaucoup au Mali, la lutte contre les faux médicaments, c’est du folklore de la Direction régionale de la santé, structure chargée de lutter efficacement contre le phénomène. D’o๠l’organisation de séminaires et de conférences, qui ne suffisent cependant pas à  justifier la lutte. La vraie sensibilisation doit être sur le terrain. Nous n’avons malheureusement pas pu interroger la directrice Régionale de la santé( absente )sur sa structure. l’appel de Cotonou entend alerter sur l’urgence du trafic des faux médicaments dans le Monde. Mais l’Afrique n’a pas attendu Chirac, qui a certes le mérite par sa fondation dinterpeller la communauté Africaine sur le phénomène ! La crise financière aidant, difficile de dissuader un pauvre consommateur démuni d’acheter son viagra contrefait au marché. Reste la sensibilisation et l’appui de nos autorités pour prendre le problème à  bras le corps. Pour le bien être des populations.