Zone économique spéciale : Quelle place pour le secteur privé ?

La Zone économique spéciale (ZES) constituée des régions de Sikasso au Mali, Korhogo en Côte d’Ivoire et Bobo-Dioulasso au Burkina Faso, qui a été lancée le 14 mai dernier, suscite de grandes attentes pour une nouvelle dynamique d’intégration économique entre les trois pays. Cela passera aussi par la participation du secteur privé et l’accompagnement des opérateurs économiques.

C’est un grand pari que les chefs de gouvernement des trois pays ont lancé en signant le document portant création de la ZES, dans un environnement économique régional marqué par les coopérations multilatérales de plus en plus nombreuses entre les États. Mais, pour qu’une telle initiative aboutisse et atteigne son ambition affichée, qui est de mettre en synergie toutes les opportunités de développement des trois pays, tout en établissant une plus grande complémentarité entre leurs économies, il faut l’apport d’autres acteurs, non étatiques, notamment les opérateurs économiques et les investisseurs privés.

« Pour ce qui concerne la contribution du secteur privé, l’un des préalables est de savoir quels seront les contours juridiques et commerciaux de cette zone, ainsi que les investissements en termes d’infrastructures qui vont permettre à nos affaires de bien se développer », relève Lassiné Diawara, Président de la délégation régionale des Hauts-Bassins de la Chambre de commerce et d’industrie du Burkina Faso. Selon lui, il faudra faire en sorte que le cadre qui sera créé soit attractif, tant sur le plan des infrastructures que sur les plans fiscal et douanier. «Nous attendons de voir tous ces contours avant de nous déterminer et d’apporter notre contribution. Mais, dès le départ, nous sommes déjà prêts à participer à tout ce qui va être un partenariat public – privé dans l’élaboration et dans la construction de cette zone », poursuit l’homme d’affaires burkinabé.

Mettant en avant le potentiel agricole et industriel de la région des Hauts-Bassins, notamment la ville de Bobo-Dioulasso, notre interlocuteur affirme que c’est un avantage compétitif pour son pays, qu’il faut mettre au profit de la nouvelle zone économique spéciale. A l’en croire, la région pourrait être le pôle d’entrainement de la ZES.

Investisseur privé polyvalent, évoluant entre autres dans le domaine des intrants agricoles, Lassiné Diawara rassure sur l’accompagnement de son secteur pour la réussite de la zone. « Nous serons là pour apporter notre contribution dans le traitement dans tout ce qui est du couvert végétal. Nous allons nous y mettre et développer ce secteur, si les dispositions fiscales et économiques le favorisent », conclut-il.

Daouda Coulibaly, initiateur du Forum PPP Afrique : « Notre continent est une terre d’opportunités »

Les 24 et 25 octobre 2017 se tient à Paris, aux Salons Hoche, le 1er Forum sur le Partenariat Public – Privé (PPP) en Afrique, sur le thème : « Relever le défi de l’énergie et des infrastructures en Afrique ». La rencontre, qui réunira plus de 300 cadres et décideurs africains et européens, est une initiative de Trainis, leader africain de la formation professionnelle continue. Son PDG, Daouda Coulibaly, explique le contexte et les objectifs de ce rendez-vous inédit.

Pourquoi organiser une telle rencontre ?

Les PPP sont à la mode en Afrique, mais les gens ne savent pas concrètement en quoi consiste le concept. Cela fait quatre ans maintenant que nous faisons de la formation sur le PPP. Elle sert à donner des bases, des outils, des clés aux acteurs concernés. Mais, une fois que cela est fait, nous avons constaté qu’ils ont des difficultés pour entrer en contact avec les autres acteurs qui pourraient les accompagner dans le processus. Ce sont, entre autres, les cabinets d’avocats spécialisés, les sociétés d’investissement, qui peuvent éventuellement leur apporter du financement, ou encore les cabinets d’analyses financières. Nous avons donc voulu créer un cadre de rencontre.

Qu’y aura-t-il au programme de ce Forum?

Les participants doivent s’attendre à faire un maximum de rencontre B2B, qui vont leur ouvrir des perspectives. Il y aura aussi quatre modules de formation. Les gens vont être formés sur des cas concrets, comme par exemple comment monter un  contrat PPP ou encore comment rechercher des financements… Il y aura également des conférences animées par des acteurs de success stories sur le continent africain. Ils viendront faire un partage d’expérience avec les participants. Il y a ensuite les panels de discussion. Il y en aura un sur l’énergie et un sur le financement des projets PPP, entre autres. Ce seront donc deux jours intenses et très riches en formation et en information, mais aussi en réseautage.

Le concept est à la mode, mais il y a-t-il des résultats concrets ?

Effectivement, l’appétit est nouveau sur le concept, mais, il faut dire, le concept lui-même n’est pas nouveau en Afrique. Au Mali, il y a des exemples de PPP. On peut citer l’un des plus récents, la centrale hybride de Ségou, qui va être faite en PPP. Les passeports maliens sont aujourd’hui fabriqués grâce à un PPP avec une entreprise française. Ce sont des milliards de francs CFA qui sont mobilisés pour mettre en œuvre ces projets. On appelle cela chez nous la délégation de services publics, c’est l’une des formes de PPP. Il y a aussi la concession et le contrat de marchés, où c’est l’État qui paie directement l’opérateur privé.

Le fait que la dynamique soit relativement récente en Afrique s’explique par plusieurs raisons. Les premiers projets n’avaient pas eu  le succès escompté, parce que non portés réellement par les bailleurs de fonds. Maintenant, la donne a changé, parce que le besoin s’est accru, les États n’ayant plus les ressources nécessaires pour faire face à des investissements de grande envergure. Ils se sont tournés vers le développement des infrastructures et les financements désormais disponibles auprès des bailleurs de fonds sont insuffisants. D’où la nécessité de se tourner vers des financements privés. Ce forum aidera les États à s’informer, à s’imprégner de tous les contours de ce que peut leur apporter ce genre d’opportunités.

Pourquoi ne pas avoir organisé cette rencontre en  Afrique ?

Nous sommes une entreprise africaine, basée en Afrique, même si nous intervenons en France pour des formations mais aussi pour ce forum. Paris, parce que les PPP sont un mécanisme que nous pensons être utile au développement des États. Mais, encore aujourd’hui, les investisseurs privés ne s’intéressent pas énormément à l’Afrique. Nous voulons donc faire se rencontrer les investisseurs et les Africains, pour qu’ils voient que le continent est désormais ouvert, que c’est une terre d’opportunités. Le cadre règlementaire est en train d’être amélioré en fonction du mécanisme PPP et donc les choses vont dans le bon sens. La prochaine édition aura lieu certainement en  Afrique, soit à Abidjan, soit à Kigali, pour permettre aux participants de voir ce qui se fait sur le continent et les opportunités qui leur sont offertes.