Niger : Mohamed Bazoum appelle à l’aide, échec de la mission de la CEDEAO

Le coup d’Etat au Niger pourrait avoir des conséquences « dévastatrices » pour le monde et faire passer la région du Sahel sous « influence » de la Russie, via les « mercenaires » du groupe Wagner, a écrit le président déchu Mohamed Bazoum dans une tribune parue jeudi dans le Washington Post. « J’appelle le gouvernement américain et l’ensemble de la communauté internationale à aider à restaurer l’ordre constitutionnel », écrit-il, « à titre d’otage ». Tard jeudi, dans un communiqué lu à la télévision, les militaires du CNSP ont dénoncé « les accords de coopération dans le domaine de la sécurité et de la défense avec la France ». La France a un contingent de 1500 militaires déployés au Niger. Le CNSP a aussi promis une « riposte immédiate » à « toute agression » de la part d’un pays de la CEDEAO, hors  membres « amis » suspendus (Mali, Burkina Faso, Guinée) eux aussi dirigés par des militaires.

Arrivée jeudi à Niamey pour trouver une sortie de crise au Niger, la délégation de la CEDEAO conduite par l’ancien président du Nigeria Abdulsalami Abubakar est repartie quelques heures plus tard, sans avoir rencontré le chef du CNSP. Le président du Nigeria Bola Tinubu, aussi président en exercice de la CEDEAO qui se montre intransigeant avait toutefois demandé à la délégation, de « tout faire » pour trouver une « résolution à l’amiable ». L’organisation, qui a notamment suspendu les transactions financières avec le Niger, a dit se préparer à une opération militaire, même si elle a souligné qu’il s’agissait de « la dernière option sur la table ». Les chefs d’état-major de la CEDEAO sont réunis à Abuja jusqu’à vendredi. Plusieurs armées ouest-africaines, dont celle du Sénégal, se disent prêtes à intervenir si l’ultimatum n’est pas respecté dimanche.

Yèrèwolo – Minusma : après l’ultimatum, la « guerre » ?

22 septembre 2022. La date est doublement symbolique. Le Mali commémore les 62 ans de son accession à l’indépendance, mais ce jour marque également la fin de l’ultimatum du mouvement « Yèrèwolo debout sur les remparts » pour le retrait de la MINUSMA, devenue, selon ses tenants, une « force d’occupation ». Comme pour le départ de Barkhane, dont il en avait fait un « combat » de premier ordre, Yèrèwolo fera-t-il fléchir la mission onusienne au Mali ? La manifestation que ce mouvement « panafricaniste et souverainiste »  organise ce jeudi pourrait bien marquer le début d’une longue série d’actions.

C’est « l’assaut final », soutient-on à Yèrèwolo. Ce 22 septembre marquera tout simplement le lancement du « début des hostilités contre la MINUSMA », clame Ibrahima Maka Keita, membre du mouvement. Et comme pour la plupart des manifestations de ce collectif, devenu en moins de 3 ans le porte-voix des acteurs de la « Révolution souverainiste » au Mali, c’est du Boulevard de l’Indépendance de Bamako que va partir le « nouveau combat ».

Un combat porté depuis toujours par Yéréwolo, qui se dresse contre la présence de forces étrangères sur le territoire malien et dont la lutte a pris un important tournant le 20 juillet 2022, quand le « Commandant en chef » Adama Ben Diarra et ses camarades ont déposé une lettre au Quartier Général de la MINUSMA exigeant le « retrait pur et simple » de la mission onusienne  du Mali.

« À présent, la MINUSMA est devenue une force d’occupation qui ravive et entretient la peur, les clivages ethniques et la méfiance entre les communautés du Mali », accuse Yèrèwolo, pour lequel le mandat le mandat de la Mission a été vidé de son contenu authentique.

Le mouvement, dans la foulée du dépôt de cette lettre d’ultimatum, n’est pas resté inactif. Dans la dynamique de pousser la MINUSMA « dehors », il a tenu le 5 août dernier  un meeting « d’avertissement » au Palais de la Culture de Bamako, « l’opération Bonnets bleus contre Casques bleus », pour appuyer sa demande de retrait du Mali.

Pour l’analyste politique Boubacar Bocoum, Yèrèwolo a parfaitement raison, dans le fond, de demander le départ de la Minusma, parce que le Mali n’a tout simplement pas besoin aujourd’hui d’une mission d’interposition mais plutôt d’hommes pour faire la guerre.

« Dès lors que sa structuration ne répond pas à une co-entreprise militaire des Nations pour faire la guerre, forcément, à un moment donné, la MINUSMA devient désuète », avance-t-il.

Ultimatum et après ?

La MINUSMA, dont le mandat a été prolongé, sur fonds de réserves du gouvernement malien, il y a quelques mois, ne s’inscrit visiblement pas dans un retrait du Mali, du moins pas dans l’immédiat, comme le demande le mouvement « Yèrèwolo debout sur les remparts ».

Selon Adama Ben Diarra, après la lettre du 20 juillet,  les premiers responsables de la mission sont allés voir les plus hautes autorités du pays et « nous avons eu des retours de ces différentes rencontres qui parlaient de notre demande ». Pour autant, affirme-t-il, le mouvement n’a pas été directement approché.

La fin de l’ultimatum reste donc sujette à plusieurs interrogations sur la suite des évènements. La seule certitude est que Yèrèwolo, qui, comme le clame sa devise, « préfère la mort à l’esclavage »  et s’est juré de « combattre l’ennemi quelle qu’en soit la nature, endogène ou exogène », ne compte pas lâcher prise.

« Ce que le peuple veut, le peuple le peut. S’il défend une cause de manière pacifique et qu’on joue avec l’oreille de l’âne, au fur à mesure que le temps passe cela peut aussi le pousser  à changer son approche », prévient le « Commandant en Chef », par ailleurs membre du Conseil national de transition (CNT), en laissant entrevoir un prochain passage à une vitesse supérieure dans leurs actions.

« Nous prévoyons quand même que tout est possible. Mais où, quand et ce que nous allons poser concrètement comme actions, c’est le terrain qui commandera », confie-t-il,  affirmant que plusieurs démarches à venir seront communiquées lors de la mobilisation générale du 22 septembre.

« Je pense qu’ils vont planifier d’autres sorties, jusqu’à ce qu’il y ait une plus forte adhésion populaire, parce que tout le monde ne comprend pas la dimension de la démarche aujourd’hui et qu’il va falloir travailler de façon pédagogique sur la question et surtout annoncer une solution alternative si la MINUSMA s’en va », analyse pour sa part Boubacar Bocoum.

« Victoire certaine »

« Nous sommes dans la révolution intelligente et c’est à travers cette intelligence que nous avons pu chasser la France. Cela se passera un peu de la même manière avec la MINUSMA, sans violences », déclare, confiant, Ibrahima Maka Keita.

L’exemple du départ « demandé et obtenu » de la force française Barkhane du Mali constitue justement le premier « signal » de la force du mouvement, même si, sur un plan politique, malgré les ajustements de la mission que souhaite le gouvernement de transition, ce dernier n’a pas la question du retrait de la MINUSMA dans son agenda.

À en croire Adama Ben Diarra, l’absence d’un « soutien » gouvernemental dans cette lutte ne devrait pas être une entrave à son aboutissement. D’ailleurs, selon lui « une autre victoire du peuple malien s’annonce pour très bientôt ».

« Peut-être que ce sont les autorités qui ont besoin de notre soutien, pas l’inverse », relativise le numéro un de Yèrèwolo, avant de rappeler qu’aux premières heures de leur combat contre Barkhane, il n’y avait également pas de soutien politique à leur cause.

« Le 20 janvier 2021, nous avons subi des tirs de gaz lacrymogènes lors d’un rassemblement exigeant le départ de Barkhane, mais la suite on la connait tous », argue celui qui est surnommé « Ben le cerveau ».

«Nous savons ce que nous voulons et nous allons continuer à défendre notre conviction. Nous n’avons pas besoin d’un soutien quelconque d’une autorité. C’est le peuple qui demande et le peuple a les moyens. C’est à sa volonté que les autorités sont tenues de se plier et non l’inverse », ajoute-t-il.

Au même moment, pour certains observateurs, « Yèrèwolo debout sur les remparts », dont le leader est réputé proche des militaires au pouvoir sous la transition, serait en mission pour amener la communauté internationale à constater un rejet apparent par la population malienne de la MINUSMA et ouvrir la voie à un retrait de la force onusienne qui s’imposerait de lui-même aux Nations unies.

« Le mouvement aura gain de cause tôt ou tard mais il faudra de la persévérance. La MINUSMA est décriée par tout le monde, que les autorités l’affichent de façon officielle ou pas », glisse  M. Bocoum

Une ascension fulgurante

Partis de l’idée que le colonialisme a toujours un impact en Afrique et au Mali, plusieurs associations et mouvements de jeunes impliqués dans la lutte panafricaniste se regroupent  pour  lancer le mouvement « Yèrèwolo  debout sur les remparts» le 19 novembre 2019 à Kayo, dans la région de Koulikoro, lieu emblématique du mouvement, où avait été arrêté en 1968 le président Modibo Keita, dont ils se réclament défenseurs des idéaux.

Dans ses premières heures, sous la présidence de l’ancien président feu Ibrahim Boubacar Keita,  le mouvement connait des périodes difficiles et fait profil bas pendant que ses responsables, qui ne s’affichaient que sous des pseudonymes, tentent de se faire entendre à travers quelques actions, dont une grande marche, le 10 janvier 2020, qui marquera véritablement le début de l’ascension de « Ben le cerveau » et des siens.

Le 5 mars 2022, un « Appel sous le drapeau » est lancé, invitant à un soutien accru du peuple malien à son armée et, rapidement, les dirigeants de Yèrèwolo se lancent dans une vaste dynamique d’implantation du mouvement sur toute l’étendue du territoire national et multiplient les meetings à travers le pays. À les croire, « Yèrèwolo  debout sur les remparts » est aujourd’hui présent dans  571 communes sur 703, sur la base de l’actuelle organisation territoriale, et dans « plus de 13 pays de la diaspora ».

Le mouvement est organisé en « Compartiments », avec à sa tête un « Haut commandement » et un « Comité de pilotage », organe suprême qui se réunit périodiquement. Des réunions ordinaires sont tenues tous les mardis au Quartier Général à Bolibana, mais chaque compartiment, à travers le District de Bamako et à l’intérieur du pays, a son propre jour de réunion hebdomadaire.

« Nous avons créé ce mouvement pour combattre  tout le mal  et tout ce qui peut être un frein au développement de l’Afrique et du Mali. C’est la raison pour laquelle nous ne nous considérons pas comme un mouvement « Anti » mais tout simplement « Pro » Mali et Afrique, qui se bat pour la vraie souveraineté de l’Afrique et du Mali », se justifie Ibrahima Maka Keita.

Axé vers un combat « principalement idéologique » pour la jeune génération, Yèrèwolo accorde une importance particulière à la formation de ses adhérents. À intervalles réguliers, des séances d’information sont tenues entre autres sur le panafricanisme, la citoyenneté ou encore les grandes figures révolutionnaires historiques.

UNTM – Gouvernement : l’ultimatum

Après un début de transition emmaillé par les grèves de l’Union nationale des travailleurs du Mali (UNTM), suivi d’une trêve, notamment durant les sanctions de la CEDEAO, une nouvelle épée de Damoclès plane désormais au-dessus de la tête du gouvernement. En effet, la plus grande centrale syndicale du pays donne jusqu’à la fin du mois d’août au gouvernement pour annuler les arrêtés n°2022-0278/MTFPDS-SG-CNCFP du 22 février 2022 et n°2022-3266/MTFPDS-SG-DNFP-D1-3 du 26 juillet 2022 relatifs à l’intégration de contractuels dans la Fonction publique de l’État. Des arrêtés du ministère en charge du Travail, de la Fonction publique et du dialogue social dont elle juge l’adoption truffée d’irrégularités.

Abidjan, 14 décembre 2020. Bah N’Daw est en roue libre. Devant la diaspora malienne, le Président de la transition d’alors lâche : « avec l’état actuel du Mali, quelqu’un qui jouit de ses facultés mentales ne doit pas parler de grève, a fortiori partir en grève ». C’était le symbole de l’agacement de son gouvernement face aux multiples revendications syndicales de la principale centrale malienne, l’UNTM. Ce  fut également l’une des principales causes invoquées par les autorités de la transition actuelles pour son éviction du pouvoir, en mai 2021. « Le gouvernement s’est montré incapable de constituer un interlocuteur fiable, susceptible de mobiliser la confiance des partenaires sociaux ». Cela a conduit à « une consternation générale, marquée par la persistance des grèves de l’Union nationale des travailleurs du Mali, dont l’issue est finalement une grève illimitée » et a entraîné « une véritable asphyxie de l’économie malienne », s’étaient-elles justifiées.

Si « la rectification de la trajectoire de la transition » a permis de suspendre les mots d’ordre de grève de l’UNTM, ceux-ci semblent vouloir refaire surface. Et pour cause : « à notre grande surprise, nous avons constaté l’intégration de certains contractuels disant qu’ils avaient passé un concours dont nous n’avons pas eu connaissance », regrette Issa Bengaly, Secrétaire administratif de l’Union nationale des travailleurs du Mali. En croire ce dernier, les arrêtés n°2022-0278/MTFPDS-SG-CNCFP du 22 février 2022 et n°2022-3266/MTFPDS-SG-DNFP-D1-3 relatifs à l’intégration des contractuels dans la Fonction publique de l’État ont été pris par le ministère en charge du Travail, de la Fonction publique et du dialogue social sans que l’UNTM ne soit au courant. « L’UNTM avait déjà déposé sur la table du ministère des doléances par rapport à l’intégration des agents contractuels de l’État qui émargent au budget de l’État. Dans ce contexte, l’État devait faire part de sa décision à la centrale syndicale, avec laquelle il est en collaboration et qui a accepté, au vu des conditions dans lesquelles l’État se trouve, d’observer une trêve dans ses revendications », ajoute-t-il.

« Duperie collective »

Dans la lettre, datée du 3 août et signée par son Secrétaire général, Yacouba Katilé, également Président du Conseil économique, social et culturel, l’UNTM va plus loin en dénonçant « les remous suscités par les régulations de situations administratives du premier arrêté » portant intégration dans la Fonction publique de l’État d’agents précédemment recrutés comme contractuels et payés sur les fonds propres de leur établissement et non sur le budget d’État, « donc qui n’étaient pas des contractuels d’État payés sur le budget national. Ces décisions ont, par leur ampleur et incidence, soulevé de graves inquiétudes », dit le courrier. Selon le regroupement syndical, c’est la démonstration de la « duperie collective entretenue à propos du Mali Kura », car, à l’en croire, l’intégration tranche avec la légalité et méconnait l’égalité de naissance, de citoyenneté et de chances, comme le stipule la Constitution du 25 février 1992, ainsi que la Charte de la transition. Le fait que les bénéficiaires des arrêtés d’intégration, au lieu d’être dans les corps de l’Enseignement supérieur, où ils officient déjà, soient directement versés dans ceux des Planificateurs, des Inspecteurs des finances et des Administrateurs civils, alors que l’intégration à ces corps se fait via une formation dans la nouvelle ENA, constitue également « une anomalie » soulignée par M. Katilé dans sa correspondance.

« Pour l’UNTM, l’intégration des ces agents contractuels de l’Enseignement viole toutes les procédures administratives sans exception et, pis, ils ont été intégrés dans des corps relevant uniquement de l’ENA. Son communiqué est responsable, même si les concernés vont encore crier à l’injustice et à l’obsession de l’UNTM au détriment de leurs intérêts. C’est une déclaration de guerre, si je ne m’abuse pas, car l’annulation des arrêtés est exigée par la centrale, qui ne capitule pas devant les faits », signale Moussa Cissé. Selon cet analyste de la vie politique et sociale, « le sentiment d’injustice semble depuis un moment occuper tous les débats liés au rêve et à l’idéal du Mali Kura ». Les deux arrêtés fustigés par la centrale syndicale, poursuit-il, violent les textes d’intégration dans la Fonction publique, surtout le fameux Décret 051, qui empêche toute intégration dans la Fonction publique qui n’est pas issue de la voie des concours. « Le pilier sans lequel rien ne sera atteint demeure la justice sociale. Elle ne devrait pas faire de préférences entre les fils du pays pour des appartenances quelconques. Rien ne peut justifier de tels faits en ces moments précis de la refondation », estime-t-t-il.

La même situation est décriée par le Secrétaire administratif de l’UNTM. « Dans la même Fonction publique, que pour des agents qui ont le même problème on vienne en prioriser certains au détriment d’autres, cela n’est pas normal. Vu que la situation des contractuels qui émargent déjà au budget de l’État était d’actualité. Malgré cela, l’État se permet de prendre des arrêtés pour intégrer d’autres types de contractuels, cela équivaut à une insulte aux autres. Nous souhaitons que l’intégration soit faite pour tout le monde », sollicite M. Bengaly, qui précise que l’UNTM n’est pas « contre les contractuels intégrés mais veut que cela soit fait dans les règles de l’art et que cela ne soit pas sélectif ».

« Favoritisme »

Le deuxième arrêté n°2022-3266/MTFPDS-SG-DNFP-D1-3 du 26 juillet 2022, portant régularisation de situation administrative, comporte également des incohérences estiment les syndicalistes. Il s’agit notamment des cas des anciens détenteurs du diplôme de Licence, qui ne bénéficieraient pas du privilège d’accéder à la catégorie A de la Fonction publique, contrairement aux diplômés de Licence du système LMD.

Se basant sur ces « irrégularités », l’UNTM, qui « n’acceptera jamais pendant la transition le népotisme, le favoritisme, les privilèges qui ont tant assombri le développement de notre pays du fait d’un afflux d’incompétents, de corrompus à la tête des responsabilités dont le pays pouvait se glorifier », exige d’ici la fin du mois d’août, « une annulation pure et simple » des arrêtés.

« Suicidaire pour l’économie du pays »     

L’Union nationale des travailleurs du Mali, créée en 1963, est l’organisation syndicale la plus puissante et la plus structurée du pays. Elle regroupe 13 syndicats nationaux et les travailleurs maliens de France. De ce fait, plusieurs observateurs de la vie sociale craignent qu’elle n’aille en grève, d’autant plus que lors de sa première grève sous la transition, en novembre 2020, elle avait occasionné une perte de « plusieurs dizaines de milliards de francs CFA pour l’Etat », estimait alors l’économiste Modibo Mao Makalou.

De même, pour l’analyste Moussa Cissé, « une grève de l’UNTM à l’heure actuelle serait suicidaire pour l’économie du pays. Elle va énormément peser sur le quotidien des Maliens, surtout en cette période de vie chère. Elle pourra causer des tensions sociales de grande envergure et fera monter la grogne sociale dans des secteurs déjà handicapés par l’embargo et la crise économique internationale ». Pour l’éviter, ajoute-t-il, les autorités doivent prendre « le problème et les mises en garde de la centrale très au sérieux en engageant des discussions sincères autour des points de divergence. Les arrêtés qui sont au centre des tensions entre la centrale et le ministère de la Fonction publique doivent faire objet de débats pour que soient engagées les décisions adéquates possibles ».

Pour l’heure, le Secrétaire administratif du regroupement, Yacouba Bengaly, explique qu’il laisse le temps au gouvernement d’apprécier son ultimatum, tout en indiquant que « l’UNTM élabore une stratégie en se basant sur deux conditions : soit l’annulation des arrêtés, soit l’intégration des autres contractuels », annonce-t-il. Les autorités de la transition n’ont pas encore réagi à cette demande de l’UNTM. Et, en dépit de nos nombreuses sollicitations, elles ne nous ont pas non plus répondu.

« Les rivalités syndicales »

Autre crainte avec l’ultimatum de l’UNTM, le spectre du retour des revendications suspendues par les différentes organisations syndicales du pays à cause de l’embargo de la CEDEAO que subissait le Mali.

« La logique qui a prévalu à la suspension des mots d’ordre des syndicats n’est plus d’actualité, à cause du simple fait que l’embargo de la CEDEAO a été levé. En plus de cela, l’État ne montre pas qu’il y a suffisamment un besoin de résilience et de résistance à travers les différentes commissions créées (élaboration de la constitution, suivi des ANR, etc.) et surtout l’augmentation du nombre des membres du CNT. Toutes ces structures sont budgétivores et ne créent pas de ressources. Donc l’UNTM, en tant première centrale, ne fera qu’ouvrir le bal du front social », prévient le sociologue Dr Hamadoun Haïdara.

Et Moussa Cissé d’ajouter : « à l’heure actuelle, il faut craindre tout et s’attendre à tout. Les rivalités syndicales sont vivaces, surtout sous cette transition. Le risque de grèves répétitives est bien réel, mais je pense que de chaque côté l’esprit patriotique va dominer les sentiments réactionnaires des uns et des autres. Pour ce qui concerne, par exemple, l’application de l’article 39, l’État doit convoquer des États généraux de l’Éducation pour définir un nouveau pacte social avec le monde éducatif. Il n’y a aucune refondation possible sans l’École et elle devrait être le premier pilier à être diagnostiqué pour apporter des solutions efficaces. Quand l’école est malade, tous les autres secteurs sont forcément atteints de carences ».

À l’issue du Conseil des ministres du 29 juin dernier, le gouvernement avait annoncé l’organisation d’une Conférence sociale, dont la date n’est toujours pas fixée, pour permettre l’adoption d’un Pacte de stabilité sociale.

 

 

Gouvernement d’union: le Mali joue les prolongations

Exclusion de l’instance régionale, c’est la menace qui pesait sur le Mali si le Premier Ministre Cheick Modibo Diarra ne parvenait pas à  la date du 31 juillet à  former un gouvernement d’union nationale. Ce dernier peut donc pousser un ouf de soulagement après l’annonce de l’octroi d’un délai supplémentaire. La décision de fixer au 31 juillet un ultimatum au pouvoir de transition avait été prise le 7 juillet à  Ouagadougou, par les chefs d’Etat de la Communauté économique des Etat d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO). Les consultations sont en cours Depuis son retour de France et surtout son discours à  la Nation le dimanche dernier, le Président de Transition a repris les choses en main. Il mène ainsi depuis quelques jours les tractations en vue de la formation le plus tôt possible d’un gouvernement de large union réclamé par une partie de la classe politique et la CEDEAO. Devant l’impossibilité d’arriver à  un résultat dans les délais impartis, le Mali a, le jour même o๠un premier ultimatum arrivait à  échéance, demandé et obtenu au moins dix jours de plus. « Le Mali a obtenu de ses partenaires le report de la date butoir du 31 juillet pour la formation du nouveau gouvernement », a déclaré un conseiller du président Dioncounda Traoré. Qui ajoute que le président « est actuellement en train de mener les consultations pour la formation de la nouvelle équipe » et que « tout va bien ». Espoir d’avancées A Bamako et dans la plupart des chancelleries, l’optimisme est de mise. Le discours volontariste et rassembleur du Président Traoré y est pour beaucoup. Ainsi que son annonce de la création de nouveaux organes de la transition pour tenter d’enrayer la crise. Il avait par ailleurs précisé qu’il se chargerait lui-même de former le gouvernement d’union exigé. Une nouvelle donne qui a sans doute fléchit les dirigeants de la CEDEAO. Du côté de la médiation burkinabé également on se réjouit. »L’essentiel est fait. L’essentiel est que le président soit rentré, qu’il se soit adressé à  la Nation sur la nécessité de mettre en place des organes de transition, dont le gouvernement d’union nationale », avait déclaré hier Djibrill Bassolé, ministre burkinabè des Affaires étrangères, représentant le Président Compaoré. La CEDEAO attend la formation de ce gouvernement et une demande formelle du Mali pour y envoyer une force de quelque 3.300 soldatsqui bénéficieront d’un soutien logistique de plusieurs pays occidentaux. Avec pour mandat de sécuriser les institutions de ltransition et d’aider l’armée malienne à  reconquérir le nord du pays, sous occupation depuis fins mars.

Mali: l’Ultimatum de la Cedeao !

Deux semaines et demi pour proposer un gouvernement de transition au président de la transition Dioncounda Traoré. Telle est la décision majeure qui a sanctionné le sommet des chefs d’Etats de la communauté des Etats de l’Afrique de l’ouest (CEDEAO) auquel prenaient part le président burkinabè Blaise Compaoré, médiateur de la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest et cinq autres chefs d’Etat (Côte d’Ivoire, Togo, Bénin, Niger, Nigeria) avec des représentants des « forces vives » (partis, syndicats, religions) du Mali, mais en l’absence du président de transition Dioncounda Traoré et du Premier ministre Cheick Modibo Diarra. l’objectif du sommet étant de renforcer les institutions de transition, en situation « précaire », pour enfin affronter la crise dans le Nord. Les chefs d’Etat de la région sont donc décidés à  résoudre définitivement la crise malienne. Ils ont donc invité les « forces vives » à  faire des propositions au président malien par intérim « en vue de la formation avant le 31 juillet 2012 d’un gouvernement d’union nationale », chargé d’appliquer « une feuille de route de sortie de crise », indique le communiqué final. Si ce délai n’est pas respecté, « la Cédéao ne reconnaà®tra plus le gouvernement du Mali et le pays sera suspendu de toutes les organisations sous-régionales », a indiqué à  l’AFP une source proche du sommet. Ce durcissement de ton illustre l’impatience des capitales régionales face au statu-quo à  Bamako malgré une multitude de sommets et de concertations, et l’irritation de la Cédéao à  l’égard du Premier ministre Diarra, jugé insuffisamment coopératif. Mobilisation de la communauté internationale Le Conseil de sécurité, qui était trop réservé sur le sujet, a évolué dans ses positions en déclarant qu’elle «soutient pleinement» les efforts de médiation de la Cédéao et de l’Union africaine (Ua) pour régler la situation malienne. Le Conseil de sécurité de l’Onu a appelé «les à‰tats membres à  soumettre les noms des individus, groupes et entités qui sont associés à  Al Qaà¯da (…) dans le nord du Mali». Le ministre français des Affaires étrangères Français, Laurent Fabius, a tenu à  saluer cette résolution qui «fixe le cadre d’une solution politique globale au Mali et témoigne de la mobilisation de la communauté internationale». Laquelle se sent plus que jamais interpellée pour lutter efficacement contre le terrorisme au Mali et au Sahel, terrorisme qui menace de déstabiliser l’ensemble de la région ouest africaine et même le Maghreb. Le président de la Commission de la Cédéao, Kadré Désiré Ouédraogo, avait prévenu que si les efforts diplomatiques devaient échouer, les 15 pays membres de l’Organisation se verraient obligés d’aider l’armée malienne à  «restaurer l’intégrité territoriale du pays».