Aliou Boubacar Diallo : quelles chances pour Koulouba?

Il figure parmi les potentiels candidats à la course pour la prochaine élection présidentielle. Aliou Boubacar Diallo est également l’un des plus visibles en ce moment sur le terrain, aussi bien politique qu’au-delà. Auréolé, selon ses proches, du soutien de plus d’une quarantaine de partis politiques, l’ex-député de Kayes, arrivé 3ème lors de la présidentielle de 2018, peut viser grand en 2022.

Message de rentrée scolaire, vœux de Maouloud ou encore tribune de réflexion sur la question sécuritaire, le Président d’honneur de l’Alliance démocratique pour la Paix (ADP-Maliba), Aliou Boubacar Diallo, ne rate aucune occasion ces dernières semaines de s’adresser aux Maliens.

Après sa première candidature à la magistrature suprême du Mali en 2018, où il avait terminé troisième, les dernières sorties de Diallo s’apparentent déjà à une pré-campagne. S’il y a trois ans le coup d’essai ne s’est pas transformé en coup de maître pour le natif de Kayes, il a l’occasion de frapper à nouveau à la porte de Koulouba lors du prochain rendez-vous présidentiel, qui va consacrer le retour à un ordre constitutionnel normal après la Transition.

Déjà des voix appellent à sa candidature, même si l’intéressé se refuse pour le moment à y répondre favorablement ou non. Le 7 août dernier, l’Alliance des Démocrates Rénovateurs (ADR), qui avait soutenu la candidature de feu Soumaila Cissé en 2018, a jeté son dévolu sur Aliou Boubacar Diallo, expliquant avoir été séduite par le « patriotisme », « l’expérience dans la gestion des affaires » et le « parcours politique » de l’homme d’affaires et philanthrope.

Le 6 novembre 2021, ce fut le tour de 27 partis politiques non alignés de signer une convention appelant à la candidature de l’ex-député de Kayes. Différents soutiens accueillis « avec satisfaction » à l’ADP-Maliba et que le parti compte capitaliser.

« Les partis politiques sont suffisamment structurés et chaque fois qu’ils décident de cheminer ensemble tout se fait sur la base d’un cadre de travail bien élaboré et bien ficelé. Ce cadre de travail va continuer jusqu’à la prochaine élection présidentielle », se réjouit Me Abdoulaye Sidibé, Secrétaire général de l’ADP-Maliba.

Présidentielle 2022, la bonne ?

En février dernier, un sondage réalisé par le cabinet Statix sur un échantillon de 1 520 personnes inscrites sur les listes électorales à travers le Mali concernant la présidentielle de 2022 plaçait Aliou Boubacar Diallo en tête des intentions de vote, avec 27%, devant les anciens Premiers ministres Moussa Mara, Soumeylou Boubeye Maiga, Modibo Sidibé et Cheick Modibo Diarra.

« S’il y a une force politique aujourd’hui sur laquelle il faut compter indéniablement, quels que soient les changements sur l’échiquier politique, c’est l’ADP-Maliba, avec ses différents soutiens. Et s’il y a un grand favori aujourd’hui pour la présidentielle, c’est Aliou Boubacar Diallo. », croit fermement Maitre Sidibé.

Pour lui, la « santé de fer » de l’ADP-Maliba, sa structuration, son degré d’implantation sur le territoire national et les nombreuses adhésions continuelles d’élus communaux, d’anciens députés et de conseillers régionaux, entre autres, sont des atouts importants. Le parti a toutefois dû faire face au départ de plusieurs de ses cadres jeunes, dont Amadou Thiam et Cheick Oumar Diallo.

« Aliou Boubacar Diallo est aussi dans l’humanitaire. Cela marque beaucoup les esprits. S’il continue dans la même dynamique et dans une politique de proximité, on peut sans risque de se tromper dire qu’il peut être en bonne position pour la présidentielle à venir. Il a ses chances, mais il y a un travail de fond qu’il doit faire », analyse le politologue Dr. Bréhima Mamadou Koné.

Ce dernier évoque toutefois un facteur qu’il juge indispensable pour l’élection du futur Président de la République : le soutien des militaires. Le candidat qui sera adoubé par les militaires, affirme-t-il, sera le candidat élu.

Pour sa part l’analyste politique Boubacar Bocoum insiste sur le fait que la configuration politique à l’époque de la dernière présidentielle est différente de celle d’aujourd’hui et que meme en ayant été 3ème avec un score de 8,33% des voix, Aliou Boubacar Diallo ne sera pas de facto vainqueur à la prochaine présidentielle, en l’absence de ses deux anciens challengers Ibrahim Boubacar Keita et Feu Soumaila Cissé. Qui plus est, le soutien du chérif de Nioro qui lui avait permis de réaliser ce score de 2018 ne lui serait plus garanti. De l’avis de Boubacar Bocoum, si la rupture avec l’ancien système politique est réelle, Aliou Boubacar Diallo n’a aucune chance.

ADP – Maliba : Grandes divergences au sommet

Entre l’Honorable Amadou Thiam, Président du Comité exécutif sortant, et Aliou Boubacar Diallo, Président d’honneur du parti, le leadership de l’ADP – Maliba est très disputé depuis un certain temps. Si le mandat du premier a expiré depuis le 8 février dernier, le second ne semble pas légitime pour prendre les rênes du parti sans la tenue d’un congrès.

Dans une déclaration en date du 16 avril 2019, plusieurs membres du Comité exécutif sortant de l’ADP-Maliba, accompagnés de certains députés et membres des coordinations régionales, montaient au créneau pour constater la caducité du mandat du comité présidé par l’Honorable Amadou Thiam et « autoriser le Président d’honneur et fondateur du parti à gérer l’ADP – Maliba avant le prochain congrès ».

Voix discordantes

Loin de mettre fin au problème de légitimité du bureau à la tête du parti, cette sortie a plutôt accentué les divergences entre les deux camps protagonistes. « Cette déclaration n’est qu’une prétention de quelques membres du parti, qui ne sont même pas tous membres du Comité exécutif, à la solde d’un individu », pointe Sory Ibrahima Traoré, Secrétaire général sortant de l’ADP-Maliba. « Jusqu’à preuve du contraire, c’est l’Honorable Amadou Thiam qui est le Président de l’ADP Maliba et le Comité exécutif se prépare à tenir un congrès dans les plus brefs délais », précise-t-il.

Mais les proches du Président d’honneur, Aliou Boubacar Diallo, ont aussi un avis bien tranché. Pour eux, le mandat du Comité exécutif, dirigé par l’Honorable Amadou Thiam, étant arrivé à terme et le congrès n’ayant pas été tenu dans les délais, ce comité  ne peut plus représenter ou engager l’ADP – Maliba auprès de tierces parties.

Irréconciliables ?

« Il y a une question non seulement d’existence légale auprès de l’administration de ce Comité exécutif sortant, mais aussi une question de légitimité au vu de l’expiration de son mandat », relève Cheick Oumar Diallo, Secrétaire politique du Comité exécutif sortant, qui précise qu’il n’a jamais été enregistré auprès de l’Administration territoriale.

Même si une commission de conciliation a été mise en place en interne pour rapprocher les deux parties, cela n’empêche pas la poursuite normale de la procédure de justice intentée par Aliou Boubacar Diallo pour « reprendre la direction du parti et organiser le congrès ».

Le divorce serait-il consommé entre l’ancien candidat à l’élection présidentielle et son ex Directeur de campagne ? « Quoi qu’on dise, Amadou Thiam est une créature d’Aliou Diallo et le vrai problème à l’ADP-Maliba c’est qu’il y en a un qui est pressé d’entrer au gouvernement et l’autre qui s’y oppose », conclut un analyste politique.