COFOP : Derrière les démissions, une bataille de positionnement

Plusieurs associations et partis politiques ont annoncé le 6 février leur démission de la Coalition des forces patriotiques (COFOP), sur fond d’incompréhensions internes et de divergences de positionnements.

Elles sont au total 7 organisations membres de la coalition, dont 2 partis politiques (Parti UNION et Parti démocratique du peuple malien PDPM) et 5 associations (Siguida Tagne, Association Sikidja, AMJP, APAS et AFVAM) à avoir claqué la porte de la COFOP pour « signaler notre désaccord profond et notre refus de participer à une gouvernance qui ne respecte pas les principes qui nous ont unis au départ ».

« Cette décision découle du constat que les principes fondamentaux qui guident notre Coalition, tels que le respect des textes et des règles démocratiques, ont été compromis. Nous regrettons profondément de constater une violation flagrante de la règle de prise de la présidence tournante, établie à un an, qui n’a pas été respectée, le Président en place ayant maintenu sa position pendant cinq ans sans renouvellement », indiquent les démissionnaires.

Ils dénoncent également « l’attitude paternaliste » du  Président de la Coalition qui, selon eux, a contribué à une atmosphère incompatible avec les valeurs démocratiques de la COFOP et sapé la confiance au sein de la Coalition, «  compromettant ainsi notre capacité à œuvrer pour le bien de notre pratique républicaine ».

Divergences de fond

Selon les explications du Président de la COFOP, que nous avons contacté, les membres démissionnaires de la Coalition menaient depuis plusieurs mois des activités contraires au positionnement de la COFOP. « Ils ont appelé à voter non au référendum et ont participé à tous les meetings des opposants alors que la COFOP était pour le « oui ». Nous les avons rappelés à l’ordre mais ils ont refusé. Donc, à l’Assemblée générale, il a été demandé au bureau rentrant de les sanctionner, car ils nuisaient aux actions de la COFOP », précise le Dr. Abdoulaye Amadou Sy.

À l’en croire, en violation de l’article 7 des statuts de la COFOP,  les 7 organisations ont adhéré au Front Uni pour le Mali (FUMA) créé en novembre dernier et dont Mamadou Traoré, Président du parti UNION  et ancien candidat à la présidentielle de 2018, est le coordinateur.

« L’article 7 stipule que nul parti politique ou association ne peut adhérer à un autre regroupement de partis politiques ou d’associations dont les buts sont contraires à ceux de la Coalition des Forces patriotiques. Or le FUMA est un regroupement de l’opposition et la COFOP a signé un accord de partenariat avec le M5-RFP et soutient les actions du pouvoir actuel. À partir de ce moment, deux options s’offraient à eux. Soit ils partaient d’eux-mêmes, soit ils se faisaient exclure », avance le Dr Sy.

Quant à la violation de la règle de prise de la présidence tournante dont il est accusé, l’ancien ministre des Transports et des travaux publics affirme que cette règle n’a jamais existé dans les statuts de la Coalition.

« Il n’est pas écrit dans nos statuts que la présidence est tournante. Les statuts disent simplement que le mandat est d’une année renouvelable. Chaque année, le bureau est refait. Ils se sont présentés à chaque fois mais ils n’ont pas été élus. Ils veulent avoir la présidence de la COFOP pour l’amener à l’opposition ».

Coalition affaiblie ?

Alliance politique d’envergure à ses débuts, issue des entrailles de l’ex-majorité présidentielle sous IBK, la COFOP a enregistré de par le passé les départs de certains grands partis politiques, à l’instar de la Codem et du parti SADI.

Composée depuis de 24 partis politiques et associations,  elle se retrouve désormais avec 17 organisations membres suite aux nouvelles démissions, ce qui pourrait porter un coup fatal à la coalition.

Mais pour son Président, cela ne sera pas le cas. « C’est du pain béni pour la COFOP. Ceux qui partent n’apportent rien à la Coalition. Cela clarifie plutôt notre position. C’est en fait la partie molle qui vient de se détacher du regroupement », clame-t-il.

Mali – Crise politique: après la stupeur, les réactions des acteurs politiques

La confusion a longtemps persisté durant les heures qui ont suivies l’arrestation le 24 mai du Président de la transition Bah N’daw  et de son Premier ministre Moctar Ouane, après l’annonce d’un nouveau gouvernement. Mais la déclaration le lendemain du Vice-président de la Transition, le  colonel Assimi Goïta, a clarifié la situation. Les deux désormais ex-dirigeants de la transition ont été mis « hors  de leurs prérogatives » par l’homme fort de l’ex-junte. Un coup d’Etat de plus que la classe politique dans sa quasi-totalité a condamné.

II a été le premier à avoir pris position face à ce qui était encore désigné dans les premières heures de l’arrestation comme une « tentative de coup de force ». L’ancien Premier ministre Moussa Mara a condamné « sans équivoque » toute prise de pouvoir par les armes, avant d’appeler à la libération des détenus et au dialogue.

« Je demande la libération sans condition des responsables et la poursuite normale de la Transition. Seul le dialogue peut nous permettre de dépasser les incompréhensions et d’avancer ensemble vers le retour à un ordre constitutionnel normal », a insisté celui qui a également appelé à « mettre notre pays au-dessus de nos intérêts personnels ».

Le jour suivant, le 25 mai, son parti, Yelema, a dans un communiqué signé du Président Youssouf Diawara rappelé aux uns et aux autres que « l’extrême profondeur de la crise multidimensionnelle que traverse notre pays exige de chacun de nous d’agir avec responsabilité et exemplarité ».

De son côté, Housseyni Amion Guindo, Président de la Codem et de la plateforme Jiguiya Koura, s’est également dressé contre « les évènements en cours dans notre pays » et a exigé « la libération immédiate et sans conditions » du Président de la transition Bah N’Daw et du Premier ministre Moctar Ouane.

Même son de cloche à l’URD qui, en plus,  a exigé l’instauration d’un dialogue inclusif dans le but de « parvenir rapidement au retour à une situation normale susceptible de conduire le processus de transition à terme dans les délais impartis ».

Manque de concertations

L’Action républicaine pour le progrès (ARP), coalition de partis politiques  portée par l’UDD de Tiéman Hubert Coulibaly est allée plus loin.  Elle a invité à la concertation de l’ensemble des forces vives de la nation en vue de « sauver la République » et a demandé la recomposition du CNT conformément à la charte de la Transition.

Pour le Dr. Abdoulaye Amadou Sy, Président de la Coalition des forces patriotiques (COFOP), un regroupement issu de l’ancienne majorité présidentielle, à partir du moment où le pays est dans une situation anormale, où ceux qui gèrent le pouvoir sont des personnalités nommées, la gestion demande « beaucoup plus de concertations avant la prise de grandes décisions ».

 « L’armée n’a pas été concertée, or c’est elle qui dirige. C’est elle qui a fait son coup d’État et ce sont les militaires qui ont le pouvoir. Le CNSP n’existe plus du point de vue légal, mais dans les faits c’est tout le contraire », a-t-il réagi.

Retour à l’ordre constitutionnel ?

La plateforme An ko Mali Dron, membre du M5-RFP et présidée par Mme Sy Kadiatou Sow, a pour sa part, dans une déclaration, insisté sur « le respect des fondements, des valeurs et des principes de la République » qui « s’impose à toutes les composantes de la Nation et particulièrement aux forces de défense et de sécurité ».

Ce regroupement, dont font partie les Fare An Ka Wuli de l’ancien Premier ministre Modibo Sidibé, a aussi exigé la « libération immédiate du Président, du Premier ministre et de toutes les personnes arrêtées ».

L’Alliance pour le Mali (EPM) a, pour sa part  après avoir condamné « toute prise de pouvoir par la force »,  réaffirmé sa volonté de soutenir le processus de transition civile en cours dans notre pays conformément à la charte et reste « intransigeant au respect du délai de la transition qui est de 18 mois ».

Mais il semble évident qu’avec la nouvelle donne sociopolitique, le chronogramme électoral des futures élections générales, publié le 15 avril dernier et fixant le premier tour de l’élection présidentielle au 27 février 2022, sera difficile à tenir.

Mohamed KENOUVI

 Cet article a été publié dans Journal du Mali l’Hebdo n°320 du 27 mai au 02 juin 2021 

Opposition: En ordre de marche…dans la divergence

Le 8 décembre, les forces de l’ordre dispersaient à coup de gaz lacrymogènes une énième marche de l’opposition dans les rues de Bamako. Depuis la réélection du Président IBK en août, l’opposition ne cesse de contester. Certains de ses leaders, réunis au sein du Front pour la sauvegarde de la démocratie (FSD) ne reconnaissent pas la légitimité du président, contrairement à la Coalition des forces patriotiques (CoFoP), avec laquelle ils sont alliés pour dénoncer « la mauvaise gestion du pays ».

« L’objectif final  de toutes ces marches n’est pas de créer des problèmes au pays, mais qu’il y ait un cadre de dialogue pour traiter toutes les préoccupations en cours, par ce qu’il est illusoire aujourd’hui d’organiser des  élections sur la base de l’élection présidentielle, avec toutes ses failles ». C’est ainsi que l’Honorable Mody N’diaye, Président du groupe Vigilance républicaine démocratique (VRD) résume le combat que mène l’opposition. Depuis le début du nouveau mandat du Président Ibrahim Boubacar Keita, les différentes composantes de l’opposition, au sein du Front pour la sauvegarde de la démocratie (FSD) ou de la Coalition des forces patriotiques (CoFoP), se font entendre. « L’élection présidentielle a été émaillée de beaucoup d’irrégularités et la façon la plus appropriée pour les dénoncer ce sont les marches. Celles qui ont suivi sont dues à la crise sécuritaire, à laquelle s’ajoute la crise sociale,  économique et politique », poursuit le député de l’Union pour la République et la Démocratie (URD). Les différentes actions s’inscrivent dans cette démarche. « Depuis les premiers résultats, qu’elle avait rejetés, l’opposition s’inscrit dans une logique de contestation de la légitimité d’IBK. Ses différentes manifestations démontrent qu’elle est restée sur sa position, par ce qu’elle estime que l’élection a été émaillée de fraudes et d’irrégularités », analyse Ballan Diakité, politologue et chercheur  au Centre de recherche et d’analyses politiques, économiques et sociales (CRAPES). Mais le Président de la République a prêté serment le 4 septembre, avec la reconnaissance de la communauté internationale. Pour Jeamille Bittar, Président  du Mouvement citoyen ATT (MC-ATT), membre de la majorité, « on ne change pas les règles du jeu en plein match. Il faut être des bons perdants », dit-il, s’adressant à l’opposition. « On ne met pas le feu à la case qu’on veut habiter plus tard ».

Une opposition hétérogène

Dans leur annonce de la marche du 8 décembre, le FSD et la CoFoP, ainsi que l’Adema association, devaient battre le pavé contre la « mauvaise gestion du pays ». Si les regroupements partagent cette conviction, ils divergent sur plusieurs points. Le FSD est considéré comme la branche radicale qui s’oppose depuis 2013 à IBK et qui s’obstine à ne pas le reconnaitre alors que tout est terminé et la CoFoP compte en son sein des anciens ministres du premier mandat d’IBK, comme Housseini Amion Guido ou Moussa Mara. Elle a pris acte de la réélection du président et se démarque de tout projet contraire. Dans une interview accordée il y a plus d’un mois à Journal du Mali, Housseini Amion Guindo précisait  que leur combat était différent de celui du FSD. « Nous nous associerons avec tous ceux qui sentent leur avenir menacé. Mais nous ne nous engagerons pas dans un combat qui mettra en cause l’élection du président de la République ou sa légitimité. C’est la ligne rouge à ne pas franchir », disait-il. Certains observateurs qualifient même cette alliance « d’incestueuse » et sans lendemain.  

Sur la prorogation du mandat des députés, aucun des élus de l’opposition  n’a voté contre alors que certains la désapprouvaient publiquement. « Cela peut être interprété comme une inconstance pour quelqu’un qui n’est pas initié en politique, mais toujours est-il que cette opposition  a une coalition parlementaire assez grande. Cela montre aussi une certaine connivence entre les grands partis au sein de la Nation », explique Ballan Diakité. Cette prise de position a en effet étonné ceux qui avaient foi en l’opposition. « Je me suis abstenu et ceux qui l’ont  votée ont estimé qu’en n’allant pas dans ce sens ils risquaient de se faire exclure », se défend l’Honorable Mody N’diaye, notant que « le processus est contraire à la Constitution dans tous les cas ».

Des mesures drastiques

Un nouvel arrêté du gouverneur du district de Bamako en date du 4 décembre scelle toutes grandes artères et places publiques de Bamako. Une manière de contrer toute protestation dans la capitale. En réaction, une cinquantaine d’organisations de défense des droits humains ont dans un communiqué conjoint dénoncé « une violation de la Constitution et un acte de nature à mettre en péril la démocratie malienne ». Pour le politologue Ballan Diakité, le gouverneur « n’a aucune légitimité pour interdire à des partis politiques de marcher », car « le droit de manifester fait partie des droits fondamentaux dans une démocratie ». Il s’inquiète du durcissement des mesures du gouvernement.  « Plus les jours passent, plus le régime d’IBK s’assimile à un régime autoritaire plutôt qu’à un régime démocratique. À un moment donné, il faut revenir aux textes ». Alors que le Comité pour la défense de la République (CDR)  prévoyait lui aussi une marche le 10 décembre, un dispositif policier a été installé tôt le matin au niveau des points stratégiques. Ces mesures,  qui, selon les autorités, s’inscrivent dans le cadre de l’état d’urgence, risquent d’accroitre le mécontentement.

Quelle issue ?

Dans le souci de calmer la situation politique, des leaders religieux et chefs des familles traditionnelles de Bamako ont rencontré le 5 décembre les ténors de l’opposition. Il s’agissait d’asseoir les bases d’un dialogue entre les deux parties. Même si l’initiative a son sens, elle n’a pas produit de résultats concrets, car la protestation prévue pour le samedi 8 décembre a été maintenue. Pour Ballan Diakité, un dialogue entre les deux tendances est « inopportun ». « Il n’y pas de  crise au plan interne entre les partis politiques qui nécessite un certain dialogue entre le gouvernement et l’opposition. L’opposition est dans son plein droit en marchant », justifie-t-il. Il va même plus loin. « La crise que connait le Mali, c’est celle du nord. La laisser de côté et perdre du temps sur ces questions n’est pas respectueux vis-à-vis des citoyens maliens, et surtout vis-à-vis de ceux qui sont au nord et qui souffrent de  l’insécurité depuis 2012 », ajoute-t-il.

Les défis du moment et les réformes à venir nécessitent une convergence des acteurs. Sur la question du consensus, Jeamille Bittar estime que le pouvoir a mené des tentatives. « Le président a tendu la main, mais comment comprendre qu’un Premier ministre se déplace pour une prise de contact avec des formations politiques et que les uns et les autres essayent de fermer leur porte ? », s’étonne-t-il. Il ajoute : « tout le monde veut le dialogue, mais on n’arrive pas à y aller ». De l’autre côté, on affirme aussi la même chose. Et la surenchère de l’opposition a sa finalité. « Nous avons fait une retraite au cours de laquelle nous avons traité de toutes les questions institutionnelles, des réformes administratives en cours et des perspectives de la loi électorale. Le document sera adopté ce 15 décembre par notre conférence nationale et, dans le cadre d’un dialogue constructif, nous pouvons le partager avec la majorité », révèle l’Honorable Mody N’diaye, président du groupe parlementaire VRD à l’Assemblée nationale. Déjà, le Rassemblement pour le Mali (RPM) a tenu une rencontre similaire. Le député conclut sur une note d’espoir d’un dépassement des uns et des autres pour le Mali. « Nous sommes ouverts au dialogue, nous voulons seulement qu’on ne fasse pas l’impasse sur les réformes majeures à venir et sur les propositions de toutes les parties prenantes, partis politiques comme société civile. C’est en allant dans ce sens que le pays va gagner et il qu’il y aura la paix », dit-il, convaincu.

Dr Oumar Mariko : « Les marches et meetings permettent de stabiliser le pays »

Le vendredi 16 novembre, une marche initiée par l’opposition malienne, à travers le Front pour la sauvegarde de la démocratie (FSD) et la Coalition des forces patriotiques (COFOP), a été violemment dispersée par les forces de l’ordre devant la Bourse du travail de Bamako. Des blessés ont été déplorés dont un député SADI. L’Honorable Oumar Mariko, Président du parti, livre à Journal du Mali ses sentiments sur la situation politique actuelle et les actions à venir.

Quels sont vos sentiments après la dispersion par les forces de l’ordre de votre marche, non autorisée ?

J’ai été profondément déçu de la dispersion violente de cette marche. Déçu par le comportement du gouverneur et du commissaire de police du 1er arrondissement et par l’attitude du directeur général de la police. Je suis aussi surpris et déçu par Soumeylou Boubeye Maiga, qui nous avait rencontré le matin et avait évoqué ses souvenirs de combat contre la dictature, sans rien laisser présager de ce qui se préparait contre nous. J’ai un sentiment de révolte contre de telles pratiques et la détermination pour qu’elles s’arrêtent définitivement au Mali.

Quelles actions comptez-vous mener désormais ?

Nous envisageons des actions judiciaires contre ceux qui ont posé de tels actes et également de saisir les associations des droits de l’homme, nationales et internationales. Nous comptons aussi faire jouer aux députés leur rôle parlementaire d’interpellation. Le 4 décembre, nous allons organiser une grande marche de protestation, sur toute l’étendue du territoire national, partout où nous pouvons agir, partout où nous avons des forces pour bouger.

Selon certains observateurs, la situation du pays ne sied pas à un climat politique exacerbé. Qu’en pensez-vous ?

Je pose la question : qu’est ce qui a fragilisé le pays ? Est-ce que ce sont les marches, les meetings et les dénonciations ou l’attitude irresponsable et prédatrice des gouvernants ? Si nous arrivons à la conclusion que ce sont les marches qui déstabilisent le pays, nous les arrêterons. Les marches et meeting, selon nous, ne sont pas cet élément, car ils permettent de stabiliser le pays et doivent aboutir à mettre dehors l’élément déstabilisant, le pouvoir illégal et illégitime d’Ibrahim Boubacar Keita. Il ne faut pas que les gens nous prennent pour des canards sauvages. Les députés ont voté jeudi dernier une loi de 93 milliards de francs CFA, soi-disant pour la sécurité. Mais cette somme n’est pas pour la sécurité du Mali, elle ira dans les poches de gens bien connus du pouvoir. Ce sont les intérêts de petites gens que la répression est en train de servir aujourd’hui, pas ceux du peuple.

Housseini Amion Guindo : « Ce n’est pas un combat contre le Président IBK »

Ces dernières semaines, le président de la Convergence pour le développement du Mali (CODEM), Housseini Amion Guindo, est monté au créneau. L’ancien ministre s’engage dans un combat nouveau contre la prorogation des mandats des députés. Le dimanche 21 octobre, avec d’autres personnalités de la scène politique, il a créé la Convergence des forces patriotiques pour sauver le Mali (COFOP).  « Poulo » revient sur ces prises de position et les raisons de cette nouvelle lutte.

Au second tour vous avez soutenu le président IBK. Vous venez de crée une coalition politique, alors que certains disent que vous êtes membres du Front pour la sauvegarde de la démocratie. Quelle est  réellement votre position ?

Je rappelle que j’ai été membre du gouvernement d’IBK pendant quatre ans suite au soutien que nous lui avons apporté au second tour en 2013. Quand il s’est agi d’aller  à une nouvelle élection présidentielle pour un nouveau mandat en 2018, notre parti a estimé qu’il fallait  conformément à nos statuts présenter une candidature. C’est  qui m’a amené à démissionner de mon propre chef. Au second tour de l’élection,  pour une question de cohérence et de constance notre parti  a soutenu IBK. Ensuite il a été question des  élections législatives. Et pour nous, autant la présidentielle obéit à des délais, les législatives aussi. Le collège électoral a été convoqué. Mais jusqu’au dépôt des liste on ne  nous a pas parlé de report. Le gouvernement peut reporter mais  la prorogation des mandats des députés  ne doit pas venir de lui. Parce que l’Assemblée nationale est censée contrôler le gouvernement.  Si c’est le gouvernement qui  donne mandat aux députés on renverse du coup la République. Pour nous, il fallait un débat inclusif pour faire face à la situation.  Mais il aurait fallu que le gouvernement reconnaisse son incapacité à tenir l’élection et invite la classe politique pour savoir ce qu’il faut faire. Il y a des réformes aujourd’hui  indispensables pour le pays. Et ces réformes ne  doivent pas se faire dans le mépris et l’arrogance.  Nous nous opposons à la dictature d’une personne ou d’un clan contre notre loi fondamentale et au mépris du peuple.

D’où est venue l’idée de cette convergence ?                                                                       

Je suis l’initiateur de cette convergence des forces patriotiques pour sauver le Mali.  C’est moi qui suis parti voir tous les autres membres.  Il est réel que souvent nous sommes différents dans les points de vue mais nous nous sommes voulus complémentaires contre cette dérive et d’autres dérives du pouvoir.

Etes-vous membres du FSD ?

Je n’ai jamais été membre du Front pour la sauvegarde de la démocratie(FSD). Nos combats sont différents, car eux ont du mal à reconnaitre IBK comme Président de la République alors que nous,  nous le reconnaissons. Nous sommes contre cette coalition Cour Constitutionnelle-Gouvernement-Assemblée qui viole notre Constitution. Notre action est une alerte. Si le président qui est la première institution pense que c’est comme cela qu’il faut faire alors notre action se dirigera contre lui.

Pour certains c’est par ce que vous vous  n’êtes pas vu récompenser par IBK ?

En 2013, nous avons été cinquièmes à l’élection présidentielle. Mais le CODEM ne figurait pas dans le gouvernement Tatam LY. Pourtant, nous nous ne sommes pas opposés à lui. Mieux, la majorité m’a combattu en tant que député élu à Sikasso et à la limite volé mes voix. Bien avant qu’IBK ne soit au pouvoir j’ai eu à proposer des ministres dans les gouvernements. Mon ambition n’est pas d’être ministre. Je suis dans le privé et j’ai mes établissements. J’ai toujours vécu en comptant sur moi-même, toute ma vie. J’ai fait trois ans au ministère des Sports  sans que mes établissements reçoivent un seul élève de l’Etat. Personne ne m’a entendu m’en plaindre. Personne ne peut dire que je suis dans les histoires de marché ou de détournements. Je me suis toujours battu pour l’intérêt général.

Ne craignez-vous pas que ces revirements impactent l’image de votre parti ?

Il n’y a pas  de revirement. Notre parti n’est pas un parti d’opposition à IBK. Nous nous opposons à un fait que nous estimons contraire à notre constitution. Quand j’étais membre du gouvernement pendant le  projet de  révision constitutionnelle mon parti était opposé au OUI. Ce n’était pourtant pas une carrière d’opposant.  La position du CODEM a été de demander au président d’écouter son peuple. Je suis  parti le voir et lui dire d’écouter son peuple et de se raviser par rapport à  ce projet. Nous sommes cohérent dans ce nous faisons.

Que comptez-vous entreprendre après ?

Pour le moment c’est une alerte.  J’avais déjà annoncé qu’on combattra cette façon de faire de toutes nos forces et sans répit. Ils ont parlé de report sans arrêter le processus. Nous allons créer un regroupement plus large. Nous serons avec tout ce qui se sentent mal ou qui ont peur de l’avenir pour agir ensemble. Nous userons de tous les moyens légaux pour que nous soyons entendus.  Nous nous associerons avec tous ceux qui sentent leur avenir menacé. Mais nous ne nous engagerons pas dans un combat qui mettra en cause l’élection du président de la république ou sa légitimité. C’est la ligne rouge pour nous à ne pas franchir.  Ce n’est pas un combat contre le président IBK mais un combat contre les dérives.