Loulo-Gounkoto : la mine d’or redémarre après neuf mois d’arrêt

Suspendues depuis janvier 2025, les activités du complexe aurifère Loulo-Gounkoto, dans la région de Kayes, ont officiellement repris à la mi-octobre. Ce redémarrage met fin à plus de neuf mois d’interruption provoquée par un différend fiscal et contractuel entre l’État malien et la société Barrick Gold Corporation, jusque-là opératrice principale du site.

Selon plusieurs sources industrielles, la production a redémarré progressivement sous la supervision d’une administration provisoire malienne nommée en juin. Les premières extractions de minerai ont déjà repris sur la mine de Loulo, tandis que les opérations de traitement sont en phase de montée en puissance. Le complexe, considéré comme le plus important du pays, avait produit près de 723 000 onces d’or en 2024 avant la suspension des activités.

La reprise marque un tournant pour le secteur minier national, dont les recettes avaient connu une forte contraction au premier semestre 2025. Les autorités maliennes, qui entendent renforcer leur contrôle sur les ressources naturelles, affirment vouloir garantir la continuité de la production tout en renégociant les conditions d’exploitation pour mieux préserver les intérêts de l’État.

Barrick Gold, tout en réaffirmant sa volonté de dialogue, n’a pas encore annoncé de retour officiel à la gestion du site. Le complexe Loulo-Gounkoto emploie plusieurs milliers de travailleurs maliens et constitue l’un des piliers des exportations du pays. Sa relance devrait contribuer à stabiliser les revenus aurifères et à soutenir les réserves budgétaires dans un contexte économique tendu.

Production d’or : Vers un rebond en 2025 ?

Le gouvernement malien table sur une production industrielle d’or de 54,7 tonnes en 2025, contre 51,7 tonnes en 2024, soit une hausse de 6%. Cette projection, révélée dans un document du ministère des Mines, marque un tournant stratégique après une chute brutale de 23% l’an dernier.

Deux événements majeurs nourrissent cet optimisme. Il s’agit de la reprise annoncée des activités de Barrick Gold et du retrait de plus de 300 permis d’exploitation artisanale à des acteurs étrangers.

Barrick Gold, acteur important avec une contribution annuelle habituelle de plus de 12 tonnes, a suspendu ses activités à Loulo-Gounkoto début 2025, après la saisie de 3 tonnes d’or par les autorités. En janvier, la compagnie n’a extrait que 0,63 tonne et aucune en février. Sa production reste en deçà des prévisions, mais un scénario de redémarrage au 1er avril est envisagé, selon son rapport annuel. En mars, une reprise partielle devait générer 1,1 tonne, mais cet objectif n’a pas été atteint.

Pour Aliou Traoré, Président de l’ACPM (Association des commerçants et prestataires miniers) la reprise ne pèsera pas sur les prix. « Le marché de l’or est mondial. Son prix, qui a récemment franchi les 3 000 dollars l’once, est dicté par les tensions géopolitiques internationales, pas locales », explique-t-il.

Le retrait des permis miniers à des exploitants étrangers libère un potentiel considérable. L’artisanat aurifère représenterait environ 15 à 20 tonnes par an, souvent mal déclarées. « Si on encadre cette production et qu’on la canalise vers les collecteurs agréés et les raffineries locales, cela pourrait augmenter le PIB, renforcer la balance commerciale et offrir à l’État des marges nouvelles pour négocier à l’international », affirme Aliou Traoré. Il plaide pour un « encadrement national prioritaire et structuré ».

L’ACPM, forte de plus de 2 000 membres, a lancé des études sur les sites d’orpaillage et engagé des négociations avec les banques pour appuyer les prestataires locaux. Elle appelle à un quota minimum de 70% des permis miniers réservés aux opérateurs nationaux.

Avec un or représentant 75% des exportations du pays, 2025 pourrait marquer un tournant vers une souveraineté minière mieux assumée et plus profitable aux Maliens. L’avenir nous en dira davantage.

Massiré diop