DEF 2023 : pas d’orientations pour près de 1 700 établissements secondaires privés

Après six longs mois d’attente, les orientations du DEF session de mai 2023 sont disponibles depuis le 28 octobre 2023. Si elles mettent fin à une certaine angoisse chez les élèves, elles l’ont créée chez certains promoteurs de lycées privés, qui n’ont pas eu d’élèves orientés et qui craignent aujourd’hui de mettre la clé sous la porte. 

Si pour certains observateurs et parents d’élèves les orientations du DEF session 2023 ont beaucoup tardé, car ils s’inquiètent de voir comment les établissements pourront terminer les différents programmes en six mois, sans compter d’éventuelles grèves, plusieurs établissements secondaires privés n’ont pas obtenu d’élèves cette année. Sur 72 688 élèves réguliers orientés dans les établissements secondaires, 29 900 l’ont été vers des établissements publics, au nombre de 111, soit un total de 42%, contre 41 000 élèves, soit 58%, dans 869 établissements privés sur 2 539 sur l’ensemble du territoire national. Selon un promoteur de lycée qui a requis l’anonymat, lors des orientations de la session du DEF 2021-2022, son établissement n’avait pas reçu d’élèves de la part du gouvernement, ce qui a fait que l’année dernière il n’avait pas de classe de 10ème. Cette année, le même scénario se dessine pour le jeune promoteur, qui craint d’ailleurs la fermeture de son école si la situation perdure encore l’année prochaine. M. Kaba Diok, PDG du groupe scolaire et universitaire Toubakôrô Alassane Doucouré, assure que chaque année les écoles publiques envoient des quotas au niveau de la Cellule de planification statistique (CPS) et qu’après la proclamation des résultats l’État priorise ces établissements. Ce n’est qu’ensuite qu’il partage le reste des effectifs entre les lycées et les centres de formation professionnelle. La grogne naissante des promoteurs enfle alors que depuis plusieurs jours un rapport du Vérificateur général sur la période 2017-2022 révèle 19 milliards de francs CFA de fraudes et de mauvaise gestion dans le cadre des subventions de l’État accordées aux établissements privés. Selon ce rapport, « des subventions ont été versées sur la base d’attributions irrégulières d’élèves aux établissements privés alors qu’ils étaient initialement orientés vers les établissements publics ». Un rapport similaire de l’Office central de lutte contre l’enrichissement illicite (OCLEI) a fuité sur les réseaux sociaux en août dernier. L’OCLEI a par la suite rédigé un communiqué pour se désengager du contenu publié, qui n’était pas encore définitif selon la structure.

Orientations : du retard et plus de places pour les privés

Depuis environ trois décennies et le recours aux écoles privées au Mali, l’orientation des titulaires du Diplôme d’études fondamentales (DEF), continue de se poser avec la même acuité chaque année. Les écoles privées continuent d’offrir plus de places aux nouveaux élèves du secondaire, malgré le coût élevé de cette opération pour l’Etat qui peine à accueillir ses élèves.

L’augmentation croissante des effectifs et l’insuffisance des classes d’accueil continue de justifier cette politique d’orientation des titulaires du DEF vers le privé. L’augmentation de l’effectif mais aussi un soutien au secteur privé qui représente une alternative au chômage des jeunes. Mais cette politique a un coût et est même devenue un véritable « fardeau » pour l’Etat, reconnaissent les autorités en charge de la question. Mais c’est le prix à payer pour l’Etat qui s’est engagé à orienter cette année 97 237 élèves admis.

53% de ces élèves sont affectés cette année au privé et 47% au public. En raison notamment de la politique décennale de l’éducation qui entend donner une place de choix à l’enseignement technique et professionnel, plus pourvoyeur d’emplois.

En effet, c’est lorsque l’État envoie le maximum dans les lycées que le pourcentage attribué au public est élevé, mais dès que la priorité est accordée à l’envoi au professionnel technique, le quota des privés se trouve élevé, parce que l’Etat « est à la traîne » et accuse donc un retard dans la construction de structures dans ce domaine.

Du temps perdu pour les enfants

Les nouveaux admis au DEF devant être orientés par l’Etat doivent encore patienter, presqu’un mois après la rentrée officielle des classes le 3 octobre 2022. Un retard qu’ils devront rapidement combler pour rattraper leurs camarades ayant déjà commencé. S’il déplore ce retard, M.Amadou Coulibaly, secrétaire général national du Syndicat national de l’éducation (SYNEB) ne blâme pour autant pas les autorités.

« En réalité, la cellule de planification et de statistiques fait des études et au même moment certains parents demandent des transferts pour des questions de proximité », justifie-t-il.

Mais depuis deux ou trois ans, le gouvernement a envisagé des mesures pour éviter les retards, parce que les examens se passent en juin et amoindrir les erreurs. Le gouvernement a donc commencé à décentraliser ces études dont les résultats restent centralisés par la cellule. L’objectif de ces études étant de « mieux maîtriser les coûts et savoir si les critères de choix des élèves se justifient ».