Lutte contre la corruption : où en est le traitement des dossiers ?

La lutte contre la corruption, érigée en priorité de la Transition, semble s’accélérer ces dernières semaines avec l’interpellation de plusieurs personnalités soupçonnées dans divers dossiers. Toutes bénéficient de la présomption d’innocence tant qu’elles ne sont pas condamnées, 

Depuis plusieurs semaines, de nombreuses personnalités ont été arrêtées dans le cadre de la lutte contre la corruption. La dernière arrestation d’une personnalité d’envergure est celle d’Adama Sangaré, maire du District de Bamako depuis 2007, placé sous mandat de dépôt le 20 septembre dernier. Il est accusé d’avoir « effectué des morcellements, des attributions illégales de parcelles appartenant à l’État et des accaparements des terres ne relevant pas de leur compétence dans la zone aéroportuaire ». Adama Sangaré qui est un habitué de la maison centrale d’arrêt avait d’abord été incarcéré en octobre 2019 pour faux et usage de faux et atteinte aux deniers publics dans le cadre d’un dossier portant sur une marché d’éclairage public pour près de 500 millions de francs CFA en 2010, avant d’être remis en liberté en mai 2020, puis réincarcéré en mai 2021 dans la même affaire, avant d’être à nouveau libéré un mois plus tard, en septembre 2021. Pour certains observateurs, le cas particulier d’Adama Sangaré est une illustration parfaite de certains maux de la justice malienne : arrêter sans juger. Ce spectre plane sur l’ancien ministre de la Sécurité et de la protection civile, le Général Salif Traoré, accusé de « faux, usage de faux, détournement de biens publics et complicité d’abus de biens sociaux » dans l’affaire dite « Sécuriport ». Il a été placé sous mandat de dépôt le 30 août 2023, au camp 1 de Bamako. Cette nouvelle affaire qui porte sur un contrat de concession entre le Gouvernement du Mali et la Société Sécuriport LLC pour la fourniture d’un système de sécurité pour l’aviation civile et l’immigration est une des nombreuses qui visent d’anciens responsables sous la présidence IBK.

Des procédures lentes

Si les mandats de dépôt sont rapidement décernés, l’instruction des différents dossiers traîne en longueur. Inculpé puis arrêté le 26 août 2021 par la chambre d’accusation de la Cour suprême dans l’affaire de l’achat d’un avion présidentiel et d’équipements militaires, Soumeylou Boubeye Maiga est mort le 21 mars 2022 sans avoir été jugé. L’arrestation de l’ex-Premier ministre d’IBK avait été dénoncée par Cheick Mohamed Chérif Koné, ancien premier avocat général de la Cour suprême. Selon lui, cette juridiction n’était pas compétente pour instruire l’affaire. Le procureur général de la Cour Suprême Mamadou Timbo s’en était défendu affirmant que lorsque la haute cour de justice (compétente pour juger selon la Constitution de 1992) est inopérante, « l’instruction se poursuit à la Cour suprême ». Selon un analyste qui a requis l’anonymat, ces arrestations serviront à « étoffer » le bilan de la transition. Mais dans le fond, les affaires ne bougent pas. Dans le cadre des dossiers de l’achat de l’avion présidentiel et celui des équipements militaires, plusieurs personnes citées, notamment des opérateurs économiques, ne se trouvent pas au Mali. Un mandat d’arrêt vise également Moustapha Ben Barka, aujourd’hui vice-président de la BOAD. D’autres anciens ministres d’IBK, contraints à l’exil, sont visés depuis le 25 juillet 2022 par des mandats d’arrêts internationaux pour « crime de faux, usage de faux et atteinte aux biens publics » dans l’affaire dite Paramount, qui remonte à 2015. Il s’agit des anciens ministres de l’Économie et des finances Boubou Cissé et Mamadou Igor Diarra et de l’ancien ministre de la Défense et des anciens combattants Tiéman Hubert Coulibaly, ainsi que plusieurs opérateurs économiques, notamment Babaly Bah, ancien PDG de la BMS.

Des procès possibles ?

L’absence de ces personnes ainsi que les décès de certains responsables compliquent l’instruction de ces affaires. Madame Bouaré Fily Sissoko, ancienne ministre de l’Économie et des Finances de 2013 à 2015 est placée sous mandat de dépôt depuis le 26 août 2021 dans l’affaire dite de l’avion présidentiel et de l’achat des équipements militaires. Dans une lettre ouverte envoyée au président de la transition le 26 août 2022, elle avait réclamé la tenue de son procès. « J’avais placé tout mon espoir en la procédure en cours. Malheureusement, le temps que prennent les choses me préoccupe au plus haut niveau, notamment au regard de mon âge et de l’espérance de vie très limitée dans notre pays », indiquait-elle dans sa lettre. Mais, selon un analyste qui a requis l’anonymat, il sera difficile de tenir ces procès, car selon lui, « cela pourrait relever la faiblesse de certains dossiers ». Pour lui, « la justice joue la montre, le temps de la transition ». Aucune date n’a encore été indiquée pour d’éventuels procès et la justice communique très peu sur les affaires. Selon une source judiciaire, une cour d’assises spéciale devait être convoquée pour qu’un jugement ait lieu, mais sans donner plus d’explications, il ajoute simplement que cette cour n’est plus en « projet ». Cette source ajoute que la lenteur dans les procédures s’explique aussi par les changements intervenus au niveau des juridictions. Plusieurs juges ont été remplacés. « Avec un nouveau juge, c’est comme si la procédure reprenait de nouveau » , assure-t-il.

Le dossier des masques COVID qui s’est traduit par l’interpellation de Youssouf Bathily, ancien Président de la Chambre de commerce du Mali et certains de ses collaborateurs depuis le 23 novembre 2022, n’a pour le moment pas non plus trouvé de suite. Il leur est reproché des malversations financières dans l’achat des masques COVID qui ont été distribués en 2020 peu avant la tenue du scrutin législatif.

Des auditions en cours 

L’ancien Président de l’Assemblée nationale de 2013 à 2020, Issiaka Sidibé, croupit lui aussi à la Maison centrale d’arrêt de Bamako depuis le 9 août 2023. Accusé d’atteinte aux biens publics, l’ancien député a été mis aux arrêts, ainsi que son ex-Directeur financier et actuel Président de la Fédération malienne de football, Mamoutou Touré dit Bavieux, Modibo Sidibé, Secrétaire général de l’Assemblée nationale et du CNT, Demba Traoré, ancien comptable, et Anfa Kalka, ancien Contrôleur financier de l’institution parlementaire. Si les anciens dossiers patinent, des auditions ont été menées pour ceux récemment sortis des tiroirs. Selon nos informations, le président de la FEMAFOOT Mamoutou Touré a été entendu par un juge d’instruction le 27 septembre. Il a clamé son innocence des faits qui lui sont reprochés. Mamadou Diarrassouba, ancien questeur de l’Assemblée nationale et actuel membre du CNT, est également visé dans le même dossier, mais n’a pas été écroué en raison de son immunité parlementaire. Soupçonnés de malversations financières, Abdrahmane Niang, ancien Président de la Haute cour de justice, et deux de ses anciens collaborateurs, dont l’ancien Directeur administratif et financier Mamby Diawara, ont aussi été placés sous mandat de dépôt début septembre. Après deux semaines de détention, la santé de M.Niang, octogénaire, s’est considérablement dégradée, nécessitant une évacuation dans une clinique pour des soins.

« Ristournes du coton »

Outre ces affaires, Bakary Togola, l’ancien Président de l’Assemblée permanente des Chambres d’agricultures du Mali (APCAM) a lui aussi signé son retour en prison, après avoir été inculpé en septembre 2019 pour « détournement de deniers publics, sur la base de faux et usages de faux, soustraction frauduleuse et autres malversations estimées à plus de 9,4 milliards de francs CFA entre 2013 et 2019 », puis acquitté en novembre 2021. 

Forsat : « Nous ne reculons pas »

Le commandant C. de la Forsat – police (Force spéciale antiterroriste) a le palmarès d’un chef de guerre. Après avoir été garde du corps, passé des années dans la police puis au GIPN (Groupe d’intervention de la police nationale), l’homme ne manque pas de bravoure. Cinq jours après l’assaut qu’il a mené avec la Forsat au campement Kangaba pour libérer des dizaines d’otages et neutraliser 4 terroristes, ce membre du groupe d’intervention aussi discret qu’efficace, dont la devise est « Conserver et maintenir la loi », a exposé, sans gilet pare-balles, au Journal du Mali, le fonctionnement de cette force spéciale qui lutte contre la menace terroriste, et a livré des précisions sur la récente intervention de la force, lors de l’attaque du campement Kangaba, revendiquée par Nusrat al-Islam et qui a fait 5 victimes. Interview exclusive.

 Qu’est-ce qui a motivé la création de la Forsat et quelles sont les missions et les spécificités de cette force ?

La Forsat existe depuis bientôt 1 an. Notre mission spécifique est l’antiterrorisme. Toutes les formations, tous les entraînements que nous faisons aujourd’hui se concentrent sur le terrorisme. Il y a la BAC (Brigade anti criminalité – ndlr), le GIPN, le PIGN (Peloton d’intervention de la gendarmerie nationale – ndlr) et le GIGN (Groupe d’intervention de la garde nationale – ndlr), des forces anti-gang contre le banditisme mais il n’y avait pas de force spécialisée dans la lutte antiterroriste. La Forsat est la première unité entièrement consacrée à cela. L’attaque du Radisson Blu a été une première pour tous ces corps d’intervention, car c’était la première fois que nous étions confrontés à une attaque terroriste en plein cœur de Bamako. Cela a été en quelque sorte une épreuve du feu.

 Cette force a-t-elle aussi comme mission de frapper les terroristes en profondeur, éliminer les racines, à savoir la contrebande, le trafic humain et les trafics d’armes et de drogue ?

Bien sûr. Ce qui est perceptible par la population ce sont les coups de feu, mais derrière, il y a toute une structure qui est là pour détecter comme le CENTIF (Cellule nationale de traitement des informations financières), avec qui nous travaillons. Si une information au niveau financier tombe, nous sommes alertés pour que nous puissions faire des investigations. Ce sont des processus d’enquête que nous sommes en train de développer au niveau des Forsat et que nous allons améliorer. Mais oui, cela fait partie de nos missions.

 Le périmètre d’action de cette force est-il cantonné à Bamako et ses alentours ?

La Forsat a vocation à intervenir partout sur le territoire malien. Dernièrement nous étions dans la région de Mopti, lors de l’attaque de l’hôtel de Sévaré. Là-bas, nos unités sont intervenues avec la gendarmerie. Notre périmètre d’action est élargi à l’ensemble du territoire malien.

Quels sont les critères et épreuves pour intégrer cette force ?

Les recrues sont testées physiquement, psychologiquement et techniquement. Nous sommes épaulés dans cette sélection par nos partenaires comme Eucap Sahel, l’ambassade de France et les Américains, qui nous ont aidé à établir des programmes de test efficaces pour filtrer ceux qui veulent intégrer la Forsat et ne retenir que les meilleurs. Mais être recruté ne garantit pas de rester à la Forsat. Vous êtes sélectionnés et au cours des formations que nous imposons aux nouvelles recrues, si elles se montrent défaillantes, on les écarte. De même, si une recrue a toutes les capacités physiques demandées mais qu’elle a peur des coups de feu ou a un mauvais comportement sous une fusillade adverse, nous l’écartons, car nous faisons souvent face aux tirs nourris de l’ennemi et il faut pouvoir riposter. Les membres de la Forsat sont régulièrement testés pour être au top.

Donc les unités de la Forsat qui partent au feu ne connaissent pas la peur ?

Non, nous faisons face et nous ne reculons pas.

Les Forsat s’entraîne quotidiennement pour être au top. Photo: DGPN

Qui assure la formation des Forsat ?

Le RAID (Recherche, Assistance, Intervention, Dissuasion – ndlr), l’unité d’élite française de la police, est en collaboration avec l’unité Forsat-police et nos forces suivent le programme SPEAR (Accroissement de la capacité de réponse – ndlr) de lutte antiterroriste, initié par le gouvernement des États-Unis. Ce qui nous amène à travailler en symbiose pour que chacun bénéficie de l’expérience de l’autre, donc au niveau des Forsat tout le monde a le même niveau de connaissance.

Comment est composée une unité Forsat ?

Une unité de la Forsat se compose généralement de 3 à 10 personnes. On y trouve des snipers, des tireurs d’élite formés uniquement pour les tirs de précision, des agents d’infiltration qui sont chargés de s’infiltrer pour la collecte de renseignement. Au campement Kangaba, quand nous sommes arrivés, nous n’étions que peu informés de la situation et il a fallu gérer. C’est le renseignement qui nous a permis de savoir s’il n’y avait pas d’obstacle entre l’entrée principale et la colline où les assaillants se trouvaient. Ces renseignements nous ont permis de monter sur la colline et d’en occuper les flancs, d’évoluer sur le terrain et de nous réorganiser pour faire face à l’ennemi. Nous avons des opérateurs, des communicateurs et aussi des techniciens qui facilitent notre progression tactique. Une unité Forsat, c’est un groupe de spécialistes dans leur domaine qui évoluent ensemble.

Photo : Emmanuel Daou Bakary/JDM

Quand la Forsat est amenée à intervenir, est-elle là pour arrêter ou tuer les terroristes ?

La mission primordiale pour nous c’est de tuer. Quand nous nous déplaçons, l’objectif est de neutraliser la menace, neutraliser voulant dire tuer. Le fait qu’on nous appelle veut dire que l’ennemi à déjà commencé à faire des victimes. C’est clair dans notre tête avant notre arrivée. Maintenant dans certains cas, comme un forcené qui prend par exemple sa famille en otage ou un terroriste qui a des revendications comme la libération de camarades et qui n’est pas là pour mourir au combat, nous pouvons entamer des négociations avec ces personnes via nos négociateurs. Nous avons un officier de renseignement en civil, généralement le premier sur zone, qui collecte et recoupe toutes les informations. Il nous informe si les preneurs d’otages sont en mesure de rentrer en contact avec nous. Mais une fois ce contact établi, ce même officier de renseignement nous permet de mettre en place nos snipers car ses renseignements sont précieux pour les positionner efficacement. Après nous constituons une équipe d’approche pendant la négociation pour pouvoir apprécier ce que fait l’ennemi . Comme dit le proverbe, « la confiance n’exclut pas le contrôle ». Mais si le terroriste tue un otage pendant la négociation, là nous cessons tout contact et nous intervenons pour le neutraliser.

Dans le cas de l’attaque du campement Kangaba, y a-t-il eu négociation avec les assaillants ?

Nous avons été accueilli par des coups de feu, donc il n’y avait pas lieu de discuter ou de négocier.

Comment avez-vous été alerté de l’attaque du campement Kangaba et en combien de temps êtes-vous arrivés sur zone ?

Nous avons été alertés sur nos talkies qu’il y avait tout d’abord une attaque de bandits au niveau du campement Kangaba. Nous avons donc demandé à nos équipes de se tenir prêtes et nous sommes restés sur le qui-vive. Dix minutes plus tard, on nous a confirmé que les coups de feu ne s’arrêtaient pas. Nous avons considéré que cela dépassait le seuil du grand banditisme et nous avons mis en branle les équipes. Malgré les difficultés de circulation nous sommes arrivés environ trente minutes plus tard, juste un peu après la Forsat-gendarmerie, car nous sommes en centre-ville. En moins de 40 minutes, les 3 corps de la Forsat étaient en débriefing face à la situation.

Photo : Emmanuel Daou Bakary/JDM
Quelle était la situation sur place ?

Quand nous sommes arrivés, on entendait tirer d’un peu partout. La difficulté était de localiser les tireurs, ce que nous sommes parvenus à faire. Les renseignements issus du terrain nous disaient qu’ils étaient très nombreux. Ensuite ça s’est réduit à 5, puis à 6, les versions divergeaient. Nos collègues de la BAC ont retrouvé le fusil d’un des assaillants. C’est lorsque nous avons établi la stratégie opérationnelle pour localiser les tireurs, qu’on a compris qu’il y avait deux points de départ des tirs, puis il y en a eu trois et enfin un quatrième, caché. Deux tireurs se trouvaient sur la colline au niveau de la piscine et deux autres étaient dans les ravins un peu derrière, en attente de notre passage.

Comment s’est déroulé l’assaut ?

Nos renseignements nous disaient que les assaillants étaient montés sur la colline, donc nous avons envoyé des équipes qui sont parvenues à exfiltrer pas mal de clients de l’établissement. Pendant qu’une équipe les exfiltrait, une autre équipe progressait pour tenter de localiser le danger. Notre objectif était d’exfiltrer le plus de personnes possible pour qu’il y ait le moins de victimes, alors qu’eux, au niveau de la piscine, voulaient faire un maximum de victime, et tiraient sur les gens qui couraient pour fuir. Il fallait arrêter cette hémorragie et ensuite parvenir à les neutraliser. Nous avons demandé à notre point focal au ministère de la Sécurité qui coordonne les opérations et qui est informé en temps réel, d’intervenir immédiatement, parce que les coups de feu ne s’arrêtaient pas et la vie des gens étaient en danger. Sous son autorité, qui émane directement de celle du ministre, nous avons donné l’assaut. Le premier assaut a été donné vers 18h pour les bousculer et estimer le nombre de tireurs car nous avons des gens qui pendant l’assaut sont chargés de localiser leur position. L’un avait perdu son fusil que la BAC a récupéré. Il restait à savoir s’il avait une autre arme et localiser les autres.

Le sommet de la colline du campement qui abritait une terrasse et un bar a été considérablement dévasté. Que s’est-il passé ? Les terroristes ou vos forces ont-elles  fait usage d’explosifs ?

Les assaillants nous ont imposés un combat de nuit. Il y a eu un premier feu vers le crépuscule déclenché par les assaillants pour faire de la fumée et s’échapper. Ils ne voulaient pas mourir avant d’engager le combat avec nous. La nuit tombant, le combat était tellement engagé, de manière si difficile, qu’il nous fallait « allumer », pour éclairer la zone et pouvoir opérer, donc faire flamber des choses. Nous avons les moyens de mettre le feu et on en a fait assez pour pouvoir se faire de la lumière et permettre à nos équipes de progresser. Ça été un facteur décisif pour les mettre hors d’état de nuire, surtout pour la dernière personne qui était très mobile. Elle a voulu fuir vers les collines mais s’est accrochée avec une de nos équipes en attente de l’autre côté de la colline, qui a pu le neutraliser. Au terme des combats, nous avons abattus 4 assaillants et nous avons appris dans la foulée qu’un suspect avait été appréhendé dans un village un peu plus loin par la population, qui l’a conduit à la gendarmerie. Nous ne savons pas s’il faisait partie du groupe. À 3h du matin, tout était fini. À 3h moins le quart, on a fait entrer les autorités, le juge antiterroriste pour lui montrer un premier corps, les autres dans les rochers étaient difficilement accessibles.

Une partie de la terrasse au sommet de la colline au campement Kangaba, au lendemain des combats. Photo :Olivier Dubois/JDM

Quelles difficultés particulières présentait une intervention sur le site du campement Kangaba ?

Nous sommes entraînés à évoluer sur différents types de terrains. La difficulté pour le campement Kangaba c’est que c’était la première fois que nous combattions dans la nuit noire. On avait de la lumière mais on ne pouvait pas se permettre de se faire repérer. Le terrain là-bas est difficile, mais nous sommes formés pour ça. De plus, il y a des cases qui sont un peu cachées dans la forêt. Nous sommes parvenus à toutes les fouiller avant le crépuscule et à faire en sorte qu’il n’y ait pas d’infiltration. Pour opérer, il fallait que le terrain soit clair. Nous ne connaissions que peu les lieux. Une personne du campement nous a fait la description des deux piscines sur la colline et du bar en haut et de l’état du terrain, ce qui nous a donné une idée de ce qui nous attendait.

À quoi tient l’efficacité de l’approche antiterroriste malienne ? 

Toute bonne unité est à l’image de son chef et nous sommes à l’image de notre ministre. C’est quelqu’un qui a la capacité d’écouter ses hommes. Nous sommes à son service et au service de l’État mais lui est à notre service aussi. Son comportement avec les équipes c’est comme quelqu’un qui donne des petites claques à un autre qui veut somnoler. Nous sommes à l’image du ministre.

Photo : DGPN

Plus d’un an et demi après l’attentat du Radisson Blu qui a déclenché la création de la Forsat, est-ce qu’un nouvel attentat de grande ampleur est toujours redouté, envisagé à Bamako ?

C’est possible, car dans le pays où il y a cette guerre qu’on nous impose contre le terrorisme, aucune partie du pays n’est épargnée et nous nous attendons à tout moment à une attaque d’ampleur. Nous nous préparons à ça. Voilà pourquoi la pérennisation d’une équipe comme la Forsat est obligatoire.

Comment analysez-vous les évènements terroristes au Mali ?

C’est un jeu d’intérêt. Un terroriste n’est certainement pas Dieu. Dans le Nord du Mali, il y a beaucoup de passages et de trafics pour la drogue. Je n’ai jamais entendu un groupe terroriste s’opposer à ces trafics. Les vrais musulmans ne sont pas pour la guerre. Un vrai musulman contribue à vivre en harmonie avec les autres, avec son prochain, et prie Dieu pour qu’il puisse amener la paix dans le pays. Mais ceux-là veulent nous imposer leur guerre, ne disent pas non à la drogue, donc ce sont des jeux d’intérêt.

En dehors des interventions, qu’est-ce qui est fait pour lutter contre le terrorisme au Mali ?

La sensibilisation contre le terrorisme est régulière. Cette sensibilisation doit aller de pair avec le développement socio-culturel et économique du pays. Aujourd’hui l’État est en train de tout mettre en œuvre pour développer des secteurs qui peuvent être des facteurs de développement. Pour ce que je sais, c’est la couche vulnérable qui est touchée. Je ne connais pas un leader terroriste, un leader-bandit comme je le dis, qui a son fils, sa femme, engagé dans les guerres pour aller se faire exploser publiquement. C’est la couche vulnérable qui est exploitée, le développement pourrait amoindrir ce nouveau fléau qu’on nous impose et qu’on impose aujourd’hui à tous les pays.

 

 

Interview du général Salif Traoré, ministre de la Sécurité et de la protection civile

Le contexte sécuritaire s’est considérablement dégradé ces dernières semaines. L’attaque d’Ecobank et celle plus récente de Banamba, sont venus accroître les inquiétudes d’une population habitée par le sentiment que l’insécurité s’étend et que rien n’est fait pour endiguer cet état de fait. Malgré le fait que les forces de sécurité sont de plus en plus formées à parer aux menaces, la crainte d’une défaillance de notre système sécuritaire perdure. Dans ce climat délétère, le ministre de la Sécurité et de la Protection civile, le Général Salif Traoré, répond aux questions de Journal du Mali sur ces sujets brûlants qui font l’actualité et préoccupent les Maliens.

Interview du général Salif Traoré, ministre de la Sécurité et de la protection civile 2

Le contexte sécuritaire s’est considérablement dégradé ces dernières semaines. L’attaque d’Ecobank et celle plus récente de Banamba, sont venus accroître les inquiétudes d’une population habitée par le sentiment que l’insécurité s’étend et que rien n’est fait pour endiguer cet état de fait. Malgré le fait que les forces de sécurité sont de plus en plus formées à parer aux menaces, la crainte d’une défaillance de notre système sécuritaire perdure. Dans ce climat délétère, le ministre de la Sécurité et de la Protection civile, le Général Salif Traoré, répond aux questions de Journal du Mali sur ces sujets brûlants qui font l’actualité et préoccupent les Maliens.

Le ministre Salif Traoré : « Il n’y a jamais eu de sécurité parfaite nulle part »

Le contexte sécuritaire s’est considérablement dégradé ces dernières semaines. L’attaque d’Ecobank et celle plus récente de Banamba, sont venus accroître les inquiétudes d’une population habitée par le sentiment que l’insécurité s’étend et que rien n’est fait pour endiguer cet état de fait. Malgré le fait que les forces de sécurité sont de plus en plus formées à parer aux menaces, la crainte d’une défaillance de notre système sécuritaire perdure. Dans ce climat délétère, le ministre de la Sécurité et de la Protection civile, le Général Salif Traoré, répond aux questions de Journal du Mali sur ces sujets brûlants qui font l’actualité et préoccupent les Maliens.

Le contexte sécuritaire semble se dégrader. Comment expliquez vous l’intensification des attaques dans un temps aussi court ?

Les ennemis de la paix s’activent, mais il n’y a pas une faille plus béante qu’avant. Nous sommes en pleine montée en puissance, beaucoup de matériels sont acquis, les formations des forces de sécurité avancent bien avec l’assistance de nos partenaires stratégiques, et nous sommes en train de récupérer du terrain notamment au sud et dans le centre. Mais c’est vrai qu’au même moment, et surtout ces dernières semaines, il y a eu des attaques sur des axes, des postes attaqués et même quelques braquages sanglants à Bamako, alors que nous démantelons des réseaux, des cellules dormantes. C’est assez difficile à accepter pour nous-mêmes mais nous ne devons pas tomber sous le coup de l’émotion. Nous devons rester lucides et tirer les leçons de chaque incident qui survient.

Qui est l’ennemi qui est en face : ce sont des terroristes, des djihadistes, des bandits ?

C’est la même chose, c’est la même famille. Aujourd’hui nous avons du mal à faire la différence entre celui qui se prétend djihadiste, celui qui se prétend terroriste et les bandits de grand chemin. Nous ne faisons pas de différence, et c’est pourquoi à Bamako et environs, la force spéciale antiterroriste que nous avions conçue, préparée et entraînée pour lutter contre le terrorisme, les FORSAT, est employée à présent contre le grand banditisme. C’est elle essentiellement qui est en train de nettoyer les nids criminogènes. Depuis 2 ou 3 semaines déjà, cette force travaille de façon intense.

Cela signifie-t-il qu’auparavant nous n’avions pas les ressources capables de faire cela ? Pourquoi cela commence-t-il seulement maintenant ?

Cela ne commence pas maintenant. Vous savez, pour avoir de la ressource humaine de qualité, il faut du temps. Nous avons nos forces habituelles classiques qui sont là pour la présence, pour les enquêtes, pour la police de proximité. Mais un certain type d’intervention nécessite un certain type de forces. Au Mali, et pas que dans notre pays d’ailleurs, la situation des armes est devenue préoccupante. Beaucoup d’armes circulent. Le banditisme est devenu extrêmement violent, même les petits délinquants détiennent des armes. Face à cette situation, la police classique, les armées classiques ne peuvent pas efficacement agir. C’est pourquoi nous sommes dans une dynamique de rendre les forces plus combatives et de créer des forces spéciales. Cela prend nécessairement du temps. Mais les premiers éléments sont déjà prêts et passent à l’action. Vous les avez vus à l’œuvre au Radisson, également au niveau de l’hôtel Nord Sud. Ce sont ces éléments-là qui, aujourd’hui, de l’avis même de nos partenaires, donnent satisfaction et qui, si d’aventure une attaque terroriste devait avoir lieu, seraient envoyés en première ligne.

L’impression générale c’est que les forces de sécurité ont l’air dépassées par les événements. Les bandits commettent leurs forfaits en toute sérénité sans craindre d’être inquiétés. Est-ce que vous comprenez ce sentiment et qu’y répondez-vous ?

Je ne dirais pas du tout que nos forces sont dépassées. Je peux comprendre le dépit de la population, mais je vous mettrais au défi de me trouver un seul pays où il n’y a pas d’actes de banditisme, de braquages ou de terrorisme. Ça n’existe plus aujourd’hui. Le monde entier doit apprendre à vivre avec ça. Cela nécessite un changement de comportement. Presque tous les cas que nous avons vécu auraient pu être évités ou amoindris si les premiers témoins avaient eu le réflexe simple d’appeler la police, la gendarmerie, la BAC ou d’approcher une autorité quelconque, pour dire « j’ai vu quelque chose, j’ai des doutes ». Le fait qu’il n’y ait pas ce genre de réflexe est un handicap pour nous. Dans d’autres pays, si vous vous trouvez dans un endroit où vous ne devriez pas être, vous allez vous faire arrêter car des gens vont appeler les forces de l’ordre. Ce n’est pas que nous soyons dépassés, bien au contraire, mais le contexte fait aussi que les bandits sont de plus en plus nombreux et de mieux en mieux organisés et équipés.

Est-ce que ce n’est pas aussi une question de posture ? Quand on voit nos policiers dans la ville, on n’a pas l’impression qu’ils soient sur le qui-vive, prêts à faire face. Que faites-vous pour lutter contre cela ?

Nous y travaillons. Vous avez vu que depuis deux semaines nous sommes en train d’ériger sur certains grands carrefours de Bamako, des postes de sécurité en y déployant des hommes à moto. Il y a des véhicules supplémentaires aux carrefours. Les policiers que vous voyez au bord de la route sont affectés à la sécurité routière. Ils sont là pour assurer la fluidité du trafic. Ils ne sont pas là pour combattre, ils n’ont pas été formés pour cela. La police a toujours eu des unités d’intervention. Vous avez la BAC et la BSI qui sont des unités faites pour combattre le banditisme. Vous voyez que ce ne sont pas des unités qui sont préparées pour faire face à des hommes équipés d’armes lourdes. Mais aujourd’hui malheureusement, les bandits nous imposent ce genre de combat en ville et donc cela demande un changement de concept dans la doctrine et c’est ce que nous sommes en train de faire. Je demanderai encore une fois au peuple de comprendre que ce changement, pas seulement au Mali mais partout ailleurs, prend du temps à être mis en place. Il faut changer les habitudes, il faut changer les mentalités, et cela ne se change pas du jour au lendemain. Nous avons des défis au niveau des effectifs, nous sommes engagés dans un grand processus de recrutement et il nous faut constituer de plus en plus d’unités combattantes capables de faire face aux bandits armés.

Il semble y avoir également un déficit de confiance de la population envers les forces de l’ordre jugées souvent corrompues…

Je ne voudrais pas faire de langue de bois en disant que cela n’existe pas. Cela existe ! Mais malheureusement il n’y a pas de corrompu sans corrupteur. Il faut absolument que nous changions positivement et tous ensemble. Aujourd’hui, qu’est-ce qui se passe surtout au niveau de la circulation ? Tout le monde est pressé et, en règle vis à vis des textes ou pas, ce sont les citoyens qui ont tendance à tendre des billets aux agents. On encourage cette forme de corruption. Je sais qu’il peut y avoir des agents qui vont exiger des choses, mais vous devez bien comprendre que cela n’est pas accepté par l’administration. À chaque fois que nous avons un cas confirmé, nous sévissons. Si quelqu’un outrepasse les règles, il est sanctionné et cela peut aller jusqu’à la radiation.

Pourquoi ne pas faire comme en Côte d’Ivoire où cela se passe de manière publique pour lancer des signaux forts ?

Attention ! Ce sont des fonctionnaires de police dont on parle. Il n’est pas bon de généraliser. De plus, venir dire en public « nous avons sanctionné telle ou telle personne », je ne sais pas si c’est productif. Nous avons une inspection interne, nous mettons des moyens à leur disposition pour qu’ils puissent faire des rondes et observer les agents dans leur travail. Ce sont des mesures de discipline qui se prennent en interne. Nous n’avons pas besoin de beaucoup de publicité pour gérer ça. Mais un plaignant avec des éléments de preuve saura ce qu’il advient de sa plainte.

Pour lutter contre les différentes menaces évoquées, le renseignement est tout aussi important. Comment faire quand les populations ont peur d’informer car elles craignent des représailles et savent qu’elles ne seront pas protégées?

Vous avez parfaitement raison, c’est là le cœur du dispositif. Tant qu’on n’a pas d’informations et donc de renseignements, il nous sera difficile de sécuriser la population. Tant qu’il n’y a pas ce lien de confiance, ça ne marche pas. Nous ne pouvons pas déployer des policiers partout, derrière chaque citoyen. Aujourd’hui, nous sommes en train d’acquérir des moyens technologiques pour compléter ce que l’on appelle le renseignement de source humaine. Nous sommes en train de mettre en place un nouveau numéro vert plus court de 5 chiffres. Ce numéro va être le 80 331. Nous pensons qu’avec cela, partout au Mali on peut appeler pour signaler une activité ou un fait suspect. Avec le système d’intervention que nous sommes en train de mettre en place avec des forces spéciales, nous pensons que nous pouvons réduire raisonnablement les délais d’intervention. En cas d’appel, l’unité d’intervention la plus proche va être activée pour intervenir. Nous comptons sur la bonne coopération de la population pour que cela fonctionne.

Ces derniers jours, il y a eu des centaines d’arrestations. Sont-elles liées aux récents incidents ? À quel niveau en sont les enquêtes ?

Il y a des pistes. Nous avons lancé des opérations de ratissage de Bamako et les zones criminogènes ont été visitées. Il y a eu des rafles. Nous sommes tombés sur des personnes que nous étions en train de rechercher depuis longtemps. Les personnes arrêtées sont identifiées. Si on n’a rien à leur reprocher, on les laisse partir. Mais tout ceux qui détiennent de la drogue ou des armes sont gardés et font l’objet d’un PV transmis au procureur, et la justice aura à trancher.

Sur un autre plan, peut-on relier les attaques qui touchent les FAMAs et les forces étrangères à l’accélération actuelle de la mise en œuvre de l’Accord de paix, la mise en place des autorités intérimaires et le scrutin communal à venir, notamment ?

Je fais la même analyse que vous. Certains ont déclaré qu’ils ne voulaient pas de la mise en œuvre de l’accord. Certains trouvent leur compte dans cette situation. Il est évident qu’ils feront tout pour que la paix et le calme ne reviennent pas. C’est pourquoi toute la communauté internationale et le gouvernement du Mali sont conscients que tant que le Mali ne sera pas stable, on ne pourra pas ramener la stabilité dans le Sahel. Les coups que nous prenons, nos voisins les prennent aussi. Nous comptons d’ailleurs faire une prochaine rencontre avec les différents ministres de la Sécurité. Nous allons les inviter pour échanger des informations. Mais il faudrait pousser cela plus loin comme la rencontre qui avait eu lieu après l’attentat de Grand-Bassam en Côte d’Ivoire.

Justement comment va la coopération sécuritaire entre les différents pays de la sous-région ? On entend souvent dire que le Mali est le « ventre mou ». Est-ce qu’aujourd’hui le Mali a changé de position ?

Le concept de ventre mou n’engage que les personnes qui le disent. Ce que je sais c’est que très peu de pays peuvent résister face à ce que nous avons encaissé. Ce qui nous est arrivé, nous ne le souhaitons à personne. Les autres puissances du monde qui sont atteintes arrivent à déjouer pas mal de coups mais elles en prennent quand même. Si vous vous adonnez à un décompte macabre des actes terroristes, vous verrez que nous ne sommes pas en première position. Cela étant, il n’y a jamais eu de sécurité parfaite nulle part. Dans les attaques terroristes, les gens viennent pour mourir et c’est compliqué de combattre quelqu’un qui vient pour mourir. Nous sommes en train de travailler dessus. Les spécialistes en sécurité ne disent jamais que toutes les dispositions sont prises pour que rien ne se passe, mais nous prenons plutôt toutes les dispositions pour que tout se passe bien.

Iyad Ag Ghaly, l’instigateur de nombre d’attaques contre nos forces et partenaires, court toujours. Il aurait été vu plusieurs fois dans le Nord et plus récemment, l’imam Dicko lui a fait parvenir une lettre par un émissaire. Il y a donc des possibilités de le retrouver ?

Vous avez dit qu’on aurait vu Iyad Ag Ghaly dans le nord, une zone où les forces maliennes et l’administration ne sont pas présentes. Il nous serait compliqué de mener certains types d’opération.

Peut-être pas avec les forces maliennes mais avec la police de la MINUSMA avec laquelle vous travaillez, puisque nos forces ne peuvent aller sur zone pour le moment ?

Iyad a été mis sur une liste rouge, non seulement par les Etats-Unis, mais par d’autres puissances qui sont plus présentes sur le terrain que nous. Nous sommes en relation, nous faisons ce qu’il faut…

Le sommet Afrique-France qui arrive dans quelques semaines. Bamako sera-t-elle prête sur le plan sécuritaire ?

Pour le sommet, nous travaillons avec la France. C’est une co-organisation. L’ambassadeur français en charge du sommet vient très régulièrement ici pour faire le point. Je pense que si la France avait le sentiment qu’on ne pourrait pas le tenir, elle aurait mis en place un plan B. Et comme jusque-là personne n’a entendu parler d’un plan B, c’est que la France considère qu’il est possible d’organiser ce sommet à Bamako.

Il faut donc être rassuré ?

Notre préoccupation c’est la population. C’est elle qui souffre, c’est elle dont l’accompagnement est capital. Si elle ne comprend pas notre action, ça ne peut que démotiver ceux qui sont là et qui risquent leur vie. Ce ne sont pas des extra-terrestres, ce sont des Maliens. Si les forces de sécurité sont citées demain comme les plus performantes, ce sera pour la fierté du peuple malien. Ils sont là pour nous, on doit les encourager, nous aider à redresser les torts qu’ils peuvent commettre ou les imperfections, mais en se disant que c’est finalement pour nous-mêmes. C’est vraiment cet appel-là que je lance, la compréhension et l’accompagnement.