Moura : l’ONU accuse les FAMa et du personnel militaire étranger d’avoir tué plus de 500 personnes

Dans un rapport publié ce vendredi 11 mai 2023, le Haut-Commissariat aux droits de l’Homme des Nations unies, accuse l’armée malienne et des combattants « étrangers » d’avoir exécuté entre le 27 et le 31 mars 2022 au moins 500 personnes lors d’une opération de traque de terroristes à Moura.

Le rapport de la mission d’établissement des faits du Bureau des droits de l’homme des Nations Unies a conclu qu’il y’a de fortes indications que plus de 500 personnes aient été tuées par les soldats maliens et du personnel militaire étranger en mars 2022 au cours d’une opération militaire dans le village de Moura. D’après l’ONU, le rapport est le résultat d’une vaste mission visant à établir des faits menés durant plusieurs mois par le personnel des Nations Unies au Mali. Le rapport précise que les demandes d’accès au village ont été refusées par les autorités maliennes. La méthodologie se base sur des entretiens avec des victimes et des témoins, ainsi que des sources d’informations médico-légales et autres telles que l’imagerie satellitaire. Les Forces Armées Maliennes ont toujours démenti les informations portant sur des exactions commises sur des civils à Moura. C’est une opération assure-t-elle antiterroristes qui a permis de neutraliser au moins 203 terroristes. Dans le rapport publié ce vendredi, les pages 18 à 21 sont consacrées au déroulement de l’opération militaire menée par les Forces Armées Maliennes, avec des éléments des forces spéciales et appuyées par des personnels militaires étrangers. Pour Volker Türk Haut-Commissaire de l’ONU aux droits de l’Homme, la tragédie de Moura pourrait constituer un crime de guerre.

Sur la BBC le 17 avril 2022, le ministre des Affaires étrangères Abdoulaye Diop qui invite à dépolitiser la question des droits de l’homme a assuré qu’il n’y avait pas eu de massacre à Moura, fustigeant une « propagande occidentale ».

La question de Moura cristallise les tensions entre les autorités de la transition et plusieurs pays occidentaux. Quelques jours après l’opération, des ONG de défense des Droits de l’homme ont accusé l’armée d’exactions sur les civils. Mais des organisations locales se sont désolidarisés de certains des rapports produits dénonçant la méthodologie. « Nous nous sommes désolidarisés du communiqué de la FIDH, car nous avons des antennes à Mopti à Douentza et à Bandiagara et aucune ne nous a saisi pour des soupçons d’exactions de l’armée sur les populations civiles » a explique Me Moctar Mariko, président de l’association malienne des droits de l’Homme.

Le gouvernement n’a pas encore officiellement réagi au rapport de l’ONU mais ce nouveau document pourrait porter un coup dur aux relations entre les autorités et la MINUSMA alors que le renouvellement du mandat de la mission sera débattue le mois prochain.

Droits de l’Homme : Abdoulaye Diop à Genève pour porter la voix du Mali

Le Ministre des Affaires étrangères et de la Coopération internationale, Abdoulaye DIOP, prend part du 27 février au 03 mars 2023 à Genève, au segment de haut niveau de la 52ème session ordinaire du Conseil des droits de l’Homme.

Selon le département, la participation du ministre Diop qui est à la tête d’une délégation malienne permettra de promouvoir et protéger les droits de l’Homme au Mali, de mettre en exergue les efforts importants déployés, ou en cours par le pays pour la sécurisation et la protection des populations et de leurs biens.

Ce conseil de haut niveau sera aussi l’occasion d’après le ministère des Affaires étrangères de porter le message du Gouvernement en vue de déconstruire les allégations non fondées sur la question des droits de l’homme au Mali. Le 7 février dernier, lors de la visite au Mali du ministre des Affaires étrangères russe Serguei Lavrov, Abdoulaye Diop avait assuré qu’il était nécessaire de dépolitiser les droits de l’homme. Le 27 janvier dernier lors de l’examen d’un rapport sur la situation au Mali, le ministre des Affaires étrangères avait regretté « une instrumentalisation de la société civile ». Cette indignation faisait suite à l’intervention d’Aminata Cheick Dicko, vice-présidente de l’organisation Kisal sur des exactions présumées des partenaires russes de l’armée malienne. Plusieurs rapports pointent du doigt des exactions commises par Wagner au Mali. Le gouvernement dément la présence des paramilitaires russes sur le sol malien et conteste les accusations portées à l’encontre de leurs partenaires et des FAMa.

Lors de son séjour, plusieurs activités importantes sont inscrites dans l’agenda du Ministre DIOP, notamment, sa rencontre avec le Haut-commissaire aux droits de l’Homme, ses échanges avec le groupe des Ambassadeurs africains à Genève et son intervention au segment de haut niveau du Conseil des droits de l’Homme.

Pour rappel, le Conseil des droits de l’Homme est un organe du système des Nations unies dont la mission est d’assurer la promotion et la protection des droits de l’Homme dans le monde. Les sessions du Conseil servent de cadre pour faire le suivi de la mise en œuvre des obligations des Etats membres en matière de droits de l’Homme, avec la participation de l’ensemble des acteurs concernés.

Abdoul Sogodogo : « le Mali est un partenaire stratégique pour la Russie »                          

 

                          

Sergueï Lavrov, le ministre des Affaires étrangères de la Russie a effectué, le 7 février 2023, une visite « d’amitié et de travail » au Mali. Le Dr Abdoul Sogodogo, spécialiste des Relations internationales et Vice-Doyen de la Faculté des Sciences administratives et politiques de Bamako (FSAP) nous analyse les enjeux de ce déplacement. Propos recueillis par Aly Asmane Ascofaré.

 

Que retenir de la visite du ministre des affaires étrangères russe au Mali ?

 

Cette visite est une manifestation évidente de la bonne entente entre les deux gouvernements sur les grands défis actuels du monde notamment la crise sécuritaire au Sahel et en Ukraine. Pour le Mali, l’objectif est de trouver un allié capable de lui fournir l’équipement nécessaire pour son armée et de porter aussi la voix au sein du conseil de sécurité des Nations unies.  La Russie, semble être cet allié pour le Mali aujourd’hui.

 

Lors de sa conférence de presse, Sergueï Lavrov a dit que son pays voulait entretenir un partenariat gagnant-gagnant avec le Mali. Quel intérêt particulier la Russie vise au Mali?

 

Le Mali est un partenaire stratégique pour la Russie. Le Mali peut servir de point de pénétration de l’économie russe en Afrique de l’Ouest qui est un grand marché d’avenir.

Surtout que le Mali est géographiquement situé au cœur de l’Afrique l’Ouest et peut donc servir aisément de point d’impulsion pour les opérateurs économiques russes.

 

La Russie souhaite également se positionner dans le Sahel, mais également dans le golfe de Guinée pour combattre le terrorisme. Que pensez vous  de cette ambition de Moscou ?

 

La guerre d’influence entre la Russie et les pays de l’OTAN semble justifier son redéploiement en Afrique. La Russie a besoin du soutien des États africains au sein de l’Assemblée générale des Nations unies pour amorcer des réformes cruciales pour la survie de cette organisation. Cette organisation doit être refondée, car le Conseil de sécurité est au bord de l’implosion.

 

Les États du Sahel doivent-ils faire confiance aux Russes?

 

L’État est souverain et donc responsable de son choix qu’il doit assumer avec élégance. Il appartient à chaque Etat de veiller, à tout prix, aux intérêts de ces citoyens et de répondre à leurs besoins d’Etat. Je ne doute pas du sens de responsabilité des dirigeants africains à situer les intérêts de leur nation.