Coton : Le Mali plaide à l’OMC pour une fin des subventions

Alors qu’il ne reste que quelques heures avant la clôture de  la 13ème Conférence ministérielle de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) à Abu Dhabi du 26 au 29 février, le C4+, groupe dont fait partie le Mali continue à plaider pour une fin des subventions. Mais, les négociations sont très difficiles. 

« La question du coton est l’un des dossiers chauds ». Présent à la 13ème Conférence ministérielle de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), Moussa Alassane Diallo, ministre de l’Industrie et du commerce du Mali, a planté le décor. Alors que la conférence n’a officiellement débuté que le 26 février, lui se trouvait à Abu Dhabi, ville hôte, depuis une semaine. Il a participé le 24 février à une session spéciale organisée par l’OMC et la FIFA sur le secteur de l’or blanc pour le compte du groupe Coton4+ (C4+). Composé de 4 pays producteurs de coton d’Afrique de l’Ouest (Bénin, Burkina Faso, Mali et Tchad) et mis en place en 2003, il a été rejoint par la Côte d’Ivoire pour devenir le C4+. Ces pays militent depuis 20 ans pour une réforme des subventions, qui entraînent selon eux une distorsion des marchés mondiaux. En effet, la Chine et les États-Unis, ainsi que des pays européens tels que la Grèce et l’Espagne, allouent des subventions importantes à leurs producteurs. Grâce à ces aides, le coton provenant de ces pays est vendu moins cher sur le marché. À la Conférence ministérielle de Nairobi, en 2015, le secteur du coton avait bénéficié de l’accord visant à éliminer les subventions à l’exportation de produits agricoles, mais les lignes n’ont toujours pas bougé. Ahmat Abdelkerim Ahmat, ministre du Commerce et de l’industrie du Tchad et Coordonnateur du C4+, a lors de la Conférence plaidé pour ne plus « diluer » le coton dans le « paquet de l’agriculture ». En sus, il a affirmé que le groupe avait soumis un projet de décision ministérielle, avec des « modalités réalistes pour plafonner et éliminer progressivement les subventions », mais « qui n’a pas été pris en compte », selon lui. Face aux positions tranchées, le C4+ a proposé aux États concernés d’adopter une flexibilité qui permettrait au groupe d’avoir un meilleur accès au marché, un soutien interne et une concurrence à l’exportation plus avantageuse.

La FIFA comme alternative

Alors qu’en coulisses les délégués et experts ne sont pas enthousiastes sur un hypothétique accord sur les subventions au coton, l’OMC essaye de trouver une alternative auprès de la FIFA. Les deux institutions ont signé en septembre 2022 un protocole d’accord portant sur une réflexion sur les moyens de faire du football un outil au service de l’inclusion économique et du développement. Le Président de la FIFA, Gianni Infantino, a participé à la session spéciale du 24 février, au cours de laquelle le groupe C4+ a présenté ses opportunités d’affaires en lien avec le coton. Le Président de la FIFA avait expliqué un peu plus tôt que le football représentait un marché de près de 270 milliards de dollars, dont 70% générés en Europe. En développant l’économie du football sur d’autres continents, cette valeur pourrait augmenter de près de 500 milliards de dollars et profiter à d’autres pays, notamment ceux du C4+. « Le Mali accueille favorablement l’accord OMC – FIFA. Le développement durable et inclusif se fera avec le coton », a affirmé Moussa Alassane Diallo. Ce développement, selon le chef du département du Commerce, passera par l’accroissement du taux de transformation sur place alors que 98% du coton malien est exporté, ce qui soumet les producteurs maliens aux risques de fluctuation des cours du produit sur le marché mondial. De leur côté, La FIFA et l’OMC veulent contribuer à créer et à améliorer la chaîne de valeurs du coton. « Les grands pays et les grands clubs ont leurs propres producteurs d’équipements, mais beaucoup d’autres à travers le monde ont du mal à trouver des acteurs économiques pour produire leurs maillots. Nous pensons que ce partenariat avec l’OMC peut les intéresser », a assuré le Président de la FIFA, avant d’ajouter « nous avons aussi de nombreux projets à travers le monde. Football for Schools est un projet éducatif qui constitue un débouché pour les équipements sportifs que nous commanderons aux pays du C4+ ».

Le blocage des États-Unis

Cet accord OMC-FIFA se présente pour l’heure comme la meilleure option des pays du C4+ vu l’évolution des négociations. Le porte-parole de l’OMC, Ismaïla Dieng, a confié que les discussions, qui se sont prolongées tard dans la soirée, ont été difficiles. Si difficiles que celui qui pilote le dossier de l’agriculture a proposé de « réduire la voilure » du texte. Selon l’un des experts du C4+ qui participent aux échanges, ce n’est pas lors des rencontres formelles que les lignes « bougent » mais plutôt durant les échanges bilatéraux. « Les pays peuvent se parler directement, faire des propositions concrètes, pour aboutir à des concessions ».

Dans ce sens, le groupe C4+ a rencontré des délégations de la Nouvelle-Zélande, des États-Unis et du Pakistan. Selon l’expert, ce sont les États-Unis qui bloquent pour l’heure tout accord, alors que la Chine et l’Union européenne, qui accordent également des subventions à leurs producteurs, seraient prêtes à faire des concessions. Pour la suite des négociations, le C4+ devra faire sans son Coordonnateur, le ministre du Commerce et de l’industrie du Tchad Ahmat Abdelkerim Ahmat, qui devait quitter Abu Dhabi ce mercredi, à la veille de clôture de la Conférence ministérielle, qui pourrait être prolongée. Les échanges continueront en présence de la délégation malienne, pour laquelle le coton est plus qu’une priorité.

Pour la CMDT, « le coton contribue à lui seul pour 15% du PIB national et fait vivre directement ou indirectement 4 millions de personnes ». Et selon les dernières prévisions du Comité de pilotage du Programme régional de production intégrée du coton en Afrique (PR-PICA), la plus haute instance sous-régionale de gestion des questions liées à la filière coton, la production du Mali est estimée en 2024 à 690 000 tonnes de coton graine, contre 480 000 pour la campagne précédente. Si ces chiffres se confirment, ils relègueraient le Bénin, avec 553 787 tonnes, en deuxième position.

OMC : au dernier jour de la conférence ministérielle, l’organisation appelle les membres à rapprocher leurs positions

Le temps presse. 24h après avoir lancé cet appel aux chefs de délégation, la directrice générale de l’organisation mondiale du commerce, Dr Ngozi Okonjo-Iweala, l’a de nouveau retirée ce jeudi matin, dernier jour de la 13ème conférence ministérielle de l’OMC qui se tient à Abu Dhabi. Lors d’une rencontre avec les organisations de la société civile, elle a exhorté les différents membres de l’organisation à avancer sur les dossiers pour un avoir un résultat positif. Si, sur certains dossiers, les négociateurs se montrent optimistes notamment celui sur les subventions à la pêche, sur d’autres, les négociations sont beaucoup plus dures. Depuis maintenant plusieurs années, l’agriculture fait partie des épineuses questions. Rebecca Miano, secrétaire de cabinet au ministère des Investissements, du Commerce et de l’Industrie du Kenya, facilitatrice des négociations sur l’agriculture a assuré que les membres étaient conscients de la nécessité de produire des résultats lors de cette conférence, alors que lors des deux dernières, les positions tranchées des différents avaient bloqué les différentes initiatives. « Cela fait plus de deux décennies que les discussions sur l’agriculture sont difficiles, elles le sont de nouveau cette année » a reconnu la Directrice de l’OMC. « Mais, les échanges se poursuivent, mon travail est de créer une balance » a-t-elle ajouté. Pour l’heure, selon des experts engagés dans les négociations, les positions des Etats-Unis ou encore l’Inde empêchent tout accord sur le commerce. D’après un responsable de l’OMC, le dernier jour est souvent mis à profit pour mettre un peu de pression afin d’obtenir des accords. La Directrice générale a toutefois précisé qu’elle « n’interfère » en rien dans les discussions. « Nous aidons les délégations à se parler ». Outre le commerce, plusieurs pays ont fait part de leur déception sur le peu de progrès réalisés sur la réforme de l’OMC, une des thématiques phares de cette 13ème conférence ministérielle. Espen Barth Eide, ministre des Affaires étrangères de la Norvège qui a animé une séance thématique sur la question a confié que les membres pourraient ne pas être en mesure de terminer les travaux sur la réforme du règlement des différends lors de cette conférence. L’organe de règlement des différends de l’OMC permet à un Etat se sentant lésé par un autre de porter plainte, en cas de litige, sur des subventions ou des obstacles techniques au commerce. Ce mécanisme est en suspens depuis plusieurs années parce que les Etats-Unis bloquent la nomination des membres de l’organe d’appel. « Il y a trois ans, nous n’avions aucune discussion sur cette réforme, les Etats ne se parlaient pas, mais des discussions sont engagées cette fois-ci, c’est déjà à souligner » a-t-elle commenté. Cette dernière journée de conférence s’annonce longue, les discussions pourraient durer jusqu’à tard dans la soirée. Dans les coulisses, certains évoquent qu’en cas de désaccord trop flagrant, la conférence pourrait être prolongée de quelques jours afin d’aplanir les angles, mais rien n’est encore acté.

OMC : l’organisation veut des résultats probants à l’issue de sa 13ème conférence ministérielle

« A la croisée des chemins ». Le Dr Thani Bin Ahmed Al Zeyoudi, ministre du commerce extérieur des Emirats Arabes Unis n’aurait pas pu trouver meilleure formule pour décrire la situation de l’organisation mondiale du commerce. Celui qui est également président de la 13ème conférence ministérielle de l’OMC qui s’est ouverte à Abu Dhabi ce lundi et se tiendra jusqu’au jeudi 29 février a exhorté à l’issue des travaux à montrer au monde « que l’OMC est vivante et pleinement capable de produire des résultats ». Cette semaine de négociations qui démarre s’annonce difficile pour les délégués des plus de 160 pays membres de l’OMC présents à Abu Dhabi. Dans un contexte géopolitique très tendu, les délégués devront s’entendre afin de dégager un consensus pour adopter les décisions. « Que ce soit le pays le moins avancé ou le plus puissant, chacun à son mot à dire, c’est ce qui fait le charme de l’OMC et rend aussi complexe les négociations » a reconnu la Directrice générale de l’organisation, la Nigériane, Ngozi Okonjo-Iweala, première femme et première africaine à occuper ce poste.  Agriculture, commerce électronique, environnement ou encore l’épineux dossier de la réforme de l’OMC pour le règlement des différends sont entre autres au menu de cette conférence. Les pays étalent pour l’heure leurs différences.  L’organe de règlement des différends de l’OMC est en panne. Ce dernier permet à un Etat se sentant lésé par un autre de porter plainte, en cas de litige, sur des subventions ou des obstacles techniques au commerce. Ce mécanisme est en suspens parce que les Etats-Unis bloquent la nomination des membres de l’organe d’appel.

Optimisme modéré 

Face à ces écueils, la directrice de l’OMC est d’un « optimisme modéré », même si elle assure être confiante en la capacité des pays à faire « les bons choix ».  Motif de satisfaction pour elle, durant la conférence, les ministres ont approuvé l’accession à l’OMC des Comores et du Timor-Leste, un État insulaire d’Asie. Les chefs d’Etat de ces pays ont salué cette décision. Les Comores ont déposé leur demande d’adhésion en 2007 alors que  le Timor Leste a attendu huit ans pour voir sa demande approuvée. 22 autres pays tapent à la porte pour intégrer l’organisation, une preuve selon Ngozi Okonjo-Iweala que l’OMC fonctionne et est résiliente. En sus, elle s’est réjouie qu’un accord soit proche sur les subventions à la pêche alors que la question est débattue depuis 2001.

Le Coton 4 veut des résultats

Le coton occupe une place importante dans les négociations de l’OMC depuis 2003. Le groupe Coton-4 composé du Mali, du Burkina Faso, du Tchad, du Bénin, auxquels s’est ajoutée la Côte d’Ivoire militent pour réformer les subventions au coton qui entraînent une distorsion des marchés mondiaux selon eux. La délégation malienne qui comprend le directeur commercial de la CMDT, des conseillers techniques est conduite par le ministre du Commerce, Moussa Alassane Diallo. Un événement spécial regroupant le Coton-4, l’OMC, la FIFA a été organisé le 24 février dernier autour du « Partenariat pour le coton ». Un appel a été lancé à de nouveaux investissements des secteurs public et privé dans le coton africain pour améliorer la chaine de valeur de l’or blanc. Le C4 qui a qualifié ce partenariat de mariage de raison s’est toutefois désoler des progrès lents réalisés dans l’atteinte de leurs objectifs à appeler à plus de soutiens internes.

Conférence d’Abu Dhabi : IBK présente l’expérience malienne

Depuis hier, le chef de l’Etat Ibrahim Boubacar Keita est à Abu Dhabi, capitale des Emirats arabes unis (EAU), où il prend part à la conférence internationale pour la protection du patrimoine culturel dans les zones de conflit. Il est accompagné pour la circonstance de la ministre de la Culture Mme N’Diaye Ramatoulaye Diallo et le grand imam de Tombouctou, Abderhamane Ben Essaouti.

Le patrimoine culturel au Mali se singularise par sa diversité et surtout par son immense potentiel d’expression de fortes identités culturelles et territoriales qui s’expriment, entre autres, à travers sites et monuments, édifices religieux, objets culturels, pratiques et savoir-faire divers. Le pays en inscrivant certains éléments de cet  héritage  multiséculaire sur les listes du patrimoine national et  mondial, prouve à souhait son engagement à assurer leur protection et leur promotion. Pour ce faire, des mesures législatives, réglementaires et administratives ont été  prises afin de soutenir cette politique de protection/promotion  et des  structures de gestion de proximité du patrimoine (missions culturelles, musées régionaux, banques culturelles,  espaces culturels, etc.) ont été créées en vue de mieux  faire connaître et protéger ce patrimoine.

Le président de la République assiste à cette conférence internationale pour la protection du patrimoine culturel dans les zones de conflit qui se tient sur l’initiative de la France. Le fond qui sera créé et pour lequel la France s’est engagée à mettre 30 millions de dollars, sera une véritable bouffée d’oxygène pour les pays qui souffrent du phénomène. Aujourd’hui, notre pays est concerné par cette situation du patrimoine en péril.

Pour rappel, le Mali a été victime du pillage de son patrimoine lors de l’occupation des régions. Des monuments historiques, notamment les mausolées et autres manuscrits anciens ont été saccagés par des terroristes se réclamant de l’islam. La présence d’IBK à ce forum international est d’amener la communauté internationale à profiter du retour d’expérience de notre pays qui n’a pas attendu l’aide des autres pour commencer à restaurer ou réhabiliter une partie de son patrimoine. C’est dans ce cadre que l’État du Mali a signé avec l’ONG Savama-DCI, un accord cadre qui vise à la sauvegarde, la valorisation des manuscrits anciens et la défense de la culture islamique. Un accord cadre qui montre tout l’intérêt que le Mali porte sur les manuscrits constituant un patrimoine riche à protéger contre les aléas et les ennemis de tous ordres. En plus de Tombouctou, l’ONG Savama DCI intervient à Djenné, Ségou, Sikasso, Gao et d’autres villes du pays.

La ministre de la culture, Mme N’Diaye Ramatoulaye Diallo, a expliqué la nécessité de positionner le Mali, car il est le premier pays à avoir commencé à réhabiliter son patrimoine culturel après le conflit, voire pendant le conflit. « Nous sommes un exemple dans le monde entier et l’UNESCO ne cesse de brandir le cas malien en exemple. Ce leadership malien va être partagé et défendu au cours de cette rencontre internationale à Abu Dhabi », conclut Mme N’Diaye Ramatoulaye Diallo.