CMAS : le gouvernement annonce la dissolution de la coordination

Au cours du conseil des ministres de ce mercredi, le ministre d’État, ministre de l’Administration territoriale et de la Décentralisation le Colonel Abdoulaye Maiga, a annoncé la dissolution de la « Coordination des Mouvements, Associations et Sympathisants de l’Imam Mahmoud DICKO (CMAS) ».

Pour cause, selon le compte rendu du conseil, depuis un certain temps, la CMAS s’adonne à des activités contraires à ses objectifs de départ et à son statut. Selon le Chef de l’Administration territoriale, la CMAS, créée en vue d’œuvrer pour la stabilité et la paix sociales, s’est transformée en un véritable organe politique de déstabilisation et de menace pour la sécurité publique suite au « léger » report de l’élection présidentielle.

Il est reproché également au parrain de la CMAS, l’imam Mahmoud Dicko, de s’adonner clairement à des activités subversives susceptibles de troubler l’ordre public.

Cette dissolution fait également suite à des récentes visites à l’extérieur de l’Imam Dicko et ses rencontres
officielles avec des personnalités de puissances étrangères sur des questions d’intérêt national sans l’autorisation des autorités du Mali. Cette circonstance, selon le ministère de l’Administration territoriale et de la décentralisation, constitue un manquement aux dispositions statutaires de la CMAS et une atteinte aux intérêts supérieurs du pays selon le communiqué.

La dissolution intervient également alors que le retour de l’imam Dicko à Alger depuis plusieurs semaines est annoncé pour bientôt. Pour certains analystes, c’est un avertissement qui lui est lancé. La CMAS a réagi dans la foulée, assurant ne pas être surprise et appelant ses membres à garder leur calme en attendant que la décision leur soit formellement notifiée. Les dissolutions d’association deviennent récurrentes.  Pour rappel, L’ Observatoire pour les Élections et la Bonne Gouvernance et l’Association  Solidarité pour le Sahel (SOLSA), ont été également dissoute.

La dissolution la plus récente est celle de, L’association Kaoural Renouveau qui a été dissoute le mercredi dernier lors du conseil des ministres. L’association est accusée d’avoir orchestré une campagne de dénigrement contre la transition en place. Le président de l’association aurait tenu des propos diffamatoires et subversifs visant à discréditer les autorités et à semer le trouble dans l’ordre public.

La commission nationale des droits de l’Homme CNDH se dit préoccupée face aux menaces sérieuses pesant sur l’exercice de certains droits civiques et politiques, notamment la liberté d’association. Elle s’indigne contre la tendance systémique de dissolution et/ou de suspension de partis politiques et/ou d’associations.

Elle a par ailleurs rappelé les responsabilités de l’État sur la protection des citoyens, et sur la garantie des libertés fondamentales comme la liberté d’association, conformément à la réglementation, en tout temps, en tout lieu et en toute circonstance.

Désengorger les prisons : une nécessité vitale

La surpopulation carcérale est un fléau qui mine les prisons maliennes depuis plusieurs années. Conçue pour accueillir seulement 450 pensionnaires, la Maison centrale d’arrêt (MCA) de Bamako compte plus de 3 800 prisonniers.

À en croire un rapport de la Mission d’appui à la formulation de la politique pénitentiaire du Mali datant de 2018, les principales causes de la surpopulation carcérale sont de deux ordres. D’abord une croissance du nombre des personnes incarcérées au regard du nombre de places en établissements pénitentiaires et d’éducation surveillée et une pratique judiciaire réduisant la prison au statut de « bonne à tout faire » du système pénal.

« En effet, alors que la législation prévoit quelques alternatives à l’incarcération, comme le travail d’intérêt général ou le contrôle judiciaire, force est de constater l’insuffisance de l’application des mesures alternatives à l’emprisonnement au Mali », indique le rapport.

Parmi les 3 590 pensionnaires que comptait la Maison centrale de Bamako le 25 avril 2023, 2 910, soit plus de 81%, étaient en détention provisoire. À l’instar de Bamako, les établissements pénitentiaires de quelques grandes villes du pays, comme Koulikoro, Kati, Kayes, Ségou, Mopti et d’autres sont confrontés à la même réalité.

Pour changer la donne, la CNDH, qui œuvre à la réduction des chiffres de la détention provisoire au Mali, s’attelle à établir un « dialogue constructif et permanent avec tous les acteurs concernés par la problématique dans le but de parvenir à un changement de paradigme ».

Actions

Construite pour assurer le désengorgement de la prison centrale de Bamako, la maison d’arrêt de Kéniéroba accueille depuis 2021 des prisonniers en provenance de la capitale. Selon Ibrahim Tounkara, ancien Directeur national de l’Administration pénitentiaire et de l’éducation surveillée, la mise à disposition de cette nouvelle maison d’arrêt a permis le transfert d’un grand nombre de détenus de la Maison centrale d’arrêt de Bamako, permettant « de façon très significative » de la désengorger.

Si la CNDH salue la poursuite du transfèrement des pensionnaires de la MCA vers la nouvelle prison et tous les autres efforts du gouvernement en matière de désengorgement des prisons, elle recommande dans son rapport annuel 2021 sur la situation des Droits de l’Homme, publié en octobre 2022, de construire de nouvelles prisons aux normes internationales et dmettre en œuvre des peines alternatives à l’incarcération.

Au pouvoir judiciaire, la Commission demande de « privilégier la liberté comme principe lorsqu’il existe d’autres alternatives, notamment en cas d’infractions mineures et certains délits » et « d’envisager la détention comme exception lorsqu’il n’existe pas d’autres alternative ».

Prison de Bamako -Coura : près de 3000 détenus en situation de détention provisoire

Sur environ 3600 détenus, près de 3000 sont dans une situation de détention provisoire. Ce qui résulte d’une visite de la commission nationale des droits de l’homme à la maison centrale d’arrêt de Bamako ce mardi 25 avril à l’occasion de la journée africaine de la détention provisoire. Placée sous le sceau du monitoring des lieux de privation de liberté, la journée africaine de la détention provisoire a été commémorée ce mardi 25 avril au Mali par une visite de la commission nationale des droits de l’homme à la maison centrale d’arrêt de Bamako et au niveau des unités d’enquête de la capitale. Au cours de cette visite à la maison centrale d’arrêt, il a été constaté une certaine insuffisance mais aussi quelques violations des droits de l’homme, notamment sur la situation de surpopulation carcérale. La CNDH par la voix de son président Aguibou Bouaré affirme qu’elle se donnera comme autre objectif, celui de sensibiliser les juges au décernement des mandats de dépôts. Cette visite a permis à la commission nationale des droits de l’homme de visiter quelques détenus mais aussi de s’entretenir avec l’administration pénitentiaire qui avoue souffrir aussi de cette situation de surpopulation carcérale.

Aguibou Bouaré : « Nous sommes inquiets par rapport à un certain nombre d’actes »

Les Conseils de Boubacar Keita, fils de l’ex Président IBK, ont saisi par courrier en date du 21 décembre 2020 le Président de la CNDH pour un accompagnement, afin qu’il sorte « rapidement des conditions arbitraires et dégradantes à lui imposées ». Dans cet entretien,  Aguibou Bouaré revient pour Journal du Mali sur ce dossier et ceux d’autres arrestations extrajudiciaires.

Quelle suite allez-vous donner à ce courrier ?

Nous avons pris le dossier en main et nous sommes en train de l’analyser. Naturellement, comme la loi l’indique, nous devons entreprendre des investigations et essayer d’établir les faits. Au cas où ces faits seraient avérés, nous allons dénoncer la situation et demander aux autorités de tout entreprendre pour la régulariser.

Qu’est-ce qui a été fait depuis que vous avez pris connaissance du dossier ?

Nous menons beaucoup d’actions en marge de l’espace public. Les actes que nous posons peuvent être des approches informelles des autorités, pour leur rappeler les situations qui ne sont pas conformes aux droits de l’Homme. Nous avions donc pris quelques contacts déjà, mais il faut reconnaitre que le courrier des Conseils nous a donné beaucoup plus d’éléments. Aussitôt nous avons pris contact avec les autorités compétentes. Nous sommes en train de poursuivre les investigations et nous ne manquerons pas, s’il est établi que c’est une mise à résidence sans base légale, de conclure à une situation qui viole les droits de M. Keita.

Comment réagissez-vous à l’interpellation extrajudiciaire  de trois personnes par la SE dans la nuit du 21 décembre ?

Nous avons appris l’information comme tout le monde. Nous sommes en train de constituer des dossiers là-dessus. Mais il faut déjà rappeler le principe qu’une personne ne doit pas être l’objet de disparition forcée. Il faut que tout le monde fasse attention. Ce sont des actes qui peuvent vous rattraper après. C’est le lieu de rappeler que les droits de l’Homme ne sont pas le fruit d’une imagination ou l’opinion d’une quelconque personne, mais des obligations souscrites par l’État du Mali.

Êtes-vous inquiet d’une possible dégradation de la situation des droits de l’Homme sous la Transition ?

Notre combat n’est pas lié à un régime ou à une situation quelconque. Quand nous voyons venir des situations qui peuvent constituer des violations des droits de l’Homme, nous les dénonçons. Nous devons  avouer aujourd’hui que nous sommes inquiets par rapport à un certain nombre d’actes. À chaque fois que nous avons eu notre mot à dire, nous avons souhaité que la protection des droits de l’Homme soit au cœur des préoccupations de la Transition.

Lutte contre l’excision : À petits pas

Mis en place en 2002, le Programme national de lutte contre l’excision (PNLE) est depuis juillet 2019 devenu le Programme national d’abandon des violences basées sur le genre (PNA – VBG). Malgré des programmes et l’adoption de plans d’action, la prévalence de la pratique reste élevée au Mali. Les acteurs appellent à l’adoption d’une loi contre les VBG, car les défis restent importants.

« Environ 2 000 communautés ont fait des  déclarations publiques d’abandon, sans compter celles qui ont abandonné sans déclaration publique », se réjouit Youssouf Bagayoko, anthropologue au Programme national d’abandon des VBG.

Selon le rapport 2018 de la Commission nationale des droits de l’Homme (CNDH), « les actions de sensibilisation des organisations de la société civile, (…) en partenariat avec le ministère de la Promotion de la femme, de l’enfant et de la famille, « ont amené plus de 1 088 villages sur les 12 000 du Mali à déclarer leur abandon de la pratique ».

Des réalisations rendues effectives grâce notamment au vote d’une Politique nationale pour l’abandon de la pratique de l’excision, en 2010, assortie des plans d’action 2010 – 2014 et 2015 – 2019.

Sur cette question sensible, où se mêlent tradition et religion, les acteurs ont surtout mis l’accent sur la sensibilisation, même si la « mutation » de la pratique de l’excision « en violence basée sur le genre », n’est pas un progrès, selon certains.

Au plan du plaidoyer, le PNLE s’est attelé à l’organisation de sessions à l’endroit des décideurs, afin d’attirer leur attention « sur la gravité de la pratique et ses conséquences sur les victimes et sur le respect de la dignité et des droits humains en termes de santé, de justice ».

Le changement de comportement étant un processus à long terme, les responsables du programme se réjouissent néanmoins des « déclarations publiques enregistrées » et « des milliers de leaders d’opinion » qui « ont fait des déclarations individuelles pour témoigner de leur position contre la pratique de l’excision ».

Loi consensuelle

Pour avancer, même à petits pas, l’adoption d’une loi est nécessaire « pour permettre à ceux qui refusent la pratique de défendre leurs droits et aux victimes de réclamer réparation », explique Madame Fatimata Dembélé Djourté, Présidente du groupe de travail sur les droits catégoriels à la CNDH.

Il existe déjà un avant-projet, mais le travail continue pour aboutir à « une loi légitime », dont tout le monde comprendra le bien fondé, explique M. Bagayoko. « Cette loi protège tout le monde et n’est contre personne ».

Procès Sanogo : Une affaire oubliée ?

Depuis son arrestation, le 23 novembre 2013, l’ex-chef putschiste du 22 mars 2012, le général Amadou Haya Sanogo, est en  prison à Selingué. L’ancien patron du Comité national pour le redressement de la démocratie et la restauration de l’État (CNRDRE), accusé « d’enlèvement, d’assassinat et de complicité d’assassinat » dans l’affaire des bérets rouges, a comparu une première fois devant les juges, à Sikasso, le 30 novembre 2016. La récente nomination de Me Malick  Coulibaly, présenté comme chantre de la lutte pour les droits de l’Homme au ministère de la justice pourra-t-elle briser le statu quo ?

« Nous réclamons le jugement, mais, à défaut de cela, pourquoi ne pas négocier avec les victimes ? Nous avons vu des pays qui ont eu des cas plus graves que le nôtre, mais ils ont pu trouver des solutions. Je pense qu’il y a juste un manque de volonté », s’impatiente le colonel major à la retraite Soungalo Coulibaly, père d’un des bérets rouges assassinés. Pour la manifestation de la vérité, il intègre très tôt  l’association des parents des bérets rouges disparus. En décembre 2013, après plusieurs investigations, 21 corps ont été découverts, probablement des bérets rouges, dans un charnier à Diago, près de Kati. Son fils, auquel il avait parlé alors qu’il était détenu par des éléments de Sanogo, ferait partie des victimes.

Après six ans d’attente, le colonel major à la retraite espère que la nomination de Malick Coulibaly au département de la Justice relancera ce dossier, tant attendu. « Je ne peux pas rester comme ça, bien que j’ai de la peine à trainer mes compagnons d’armes devant un tribunal. Mais je suis obligé de le faire en tant que  partie civile », insiste-t-il. Le retour de Malick Coulibaly au ministère de la Justice, poste qu’il avait déjà occupé sous la transition de 2012, fait naitre de forts espoirs quant à la reprise du procès. « C’est quelqu’un que je sais à cheval sur le respect des droits de l’Homme, mais aussi surtout les dépassements de séjour en prison. La loi dit trois ans pour les crimes et Sanogo en est déjà à six ans sans jugement. Cela n’est pas admissible », martèle le Dr Abdourahmane Maiga, commissaire à la Commission nationale des droits de l’Homme (CNDH). Selon lui, il urge que la justice se fasse, et pour les victimes et pour les accusés. « S’il ne le fait pas dans les trois mois à venir, nous allons lui demander pourquoi, non parce qu’il est Malick, mais parce qu’il est le ministre de la Justice », annonce-t-il.

Pour les victimes et les accusés

Dans cette longue attente, les victimes ne sont pas les seules à plaider pour que la justice passe. Les droits de l’accusé Sanogo semblent également être piétinés. « Quand quelqu’un est en prison, sa femme et ses enfants aussi sont emprisonnés, d’une manière ou d’une autre. Il n’est pas condamné mais sa femme ne le voit pas, ses enfants non plus. On viole leurs droits », continue de dénoncer le Dr Abdourahmane Maiga, Président de la sous-commission promotion à la CNDH. Pour le politologue Mamadou Sissoko, la lenteur doit être liée à des difficultés juridiques. « Le procès Sanogo dépend-il de la situation politique ou de difficultés juridiques ? Politiquement, rien ne s’oppose à ce que Sanogo soit jugé. S’il n’a pas pu l’être à Sikasso, c’est parce qu’il y a eu des difficultés juridiques soulevées par les avocats », souligne-t-il. Parmi celles-ci figure notamment la demande d’expertise génétique des corps des victimes. Pourtant, le colonel major à la retraite Soungalo Coulibaly assure qu’il y a bien eu une expertise, menée sans l’aval des autorités de l’époque. « Il y a eu des tests ADN, mais le tribunal de Sikasso a estimé que ceux qui avaient fait ces tests n’étaient pas habilités par les autorités maliennes. Or, à cette époque c’étaient Amadou Haya Sanogo et ses hommes qui étaient les autorités », rapporte le colonel major. Depuis le report de 2016, c’est le statu quo. « La partie civile est en droit aujourd’hui d’exiger le règlement de cette affaire. Cela permettra à certaines personnes de faire leur deuil, mais aussi de comprendre ce qui s’est passé. Il est également dans l’intérêt des inculpés que la vérité soit dite », souhaite le politologue. L’un des avocats de Sanogo, que nous avons contacté, n’a pas souhaité s’exprimer sur l’affaire.

(Défis de 2019- 2/7) Droits de l’Homme : Leur respect s’impose !

2018 aura été pour le Mali une année difficile pour les Droits de l’Homme. Les organisations de défense des droits humains dans le pays sont toutes unanimes dans ce constat. Des restrictions ont été observées concernant la jouissance de certains droits élémentaires : manifestation, protestation ou encore liberté d’expression. Les multiples exactions commises, notamment au centre du pays, où l’insécurité va toujours grandissant, ont fini d’amener les indicateurs au rouge. À l’orée de la nouvelle année, d’importants défis restent à relever.

Rien que pour le dernier trimestre 2018, 90 cas de violations de Droits de l’Homme ont été enregistrés, occasionnant 163 victimes, dont 12 femmes et 18 enfants.  En plus de 30 cas d’exécutions extrajudiciaires recensés dans le pays, on note également 5 cas de torture et 9 cas de détentions illégales. Avec 57% des cas, les régions de Mopti et Ségou sont les plus touchées. Par contre, les régions de Koulikoro et de Kidal enregistrent seulement 1% des cas. Ces chiffres proviennent du dernier rapport de l’ONU sur le Mali, publié le 28 décembre 2018. Si, selon ce rapport, la plupart de ces cas de violations de Droits de l’Homme sont commis par le Groupe de soutien à l’Islam et aux musulmans (GSIM), les groupes armés signataires de l’Accord pour la paix et les forces de défense et de sécurité maliennes sont aussi impliqués.

Ce tableau peu enviable de la situation des droits de l’homme dans le pays inquiète les défenseurs des droits humains, qui suivent attentivement l’évolution des évènements. « De façon générale, de notre point de vue, les Droits de l’Homme sont vraiment à la peine au Mali. Qu’il s’agisse des droits civils et politiques ou des droits économiques et socioculturels, il existe encore beaucoup de difficultés et des défis à relever », relève Dr Malick Coulibaly, Président de la Commission nationale des droits de l’Homme (CNDH).

Au sud du pays, plus particulièrement à Bamako, si la situation est globalement acceptable, certaines restrictions se sont néanmoins accentuées autour de libertés fondamentales, notamment les droits de manifestation et la liberté d’expression, entres autres. « Quand il y a des discriminations, quand certaines manifestations sont réprimées parce qu’interdites tandis que d’autres ne souffrent d’aucune interdiction, que le gouvernement obéit les yeux fermés à certains, c’est extrêmement grave », souligne Maitre Moctar Mariko, président de l’Association malienne des Droits de l’Homme (AMDH). Une situation mal vécue aussi au niveau d’Amnesty International Mali, où l’interdiction de la marche de protestation du 5 décembre 2018 contre le projet de loi d’entente nationale est décriée. « Le respect de l’état d’urgence se fait de manière sélective. Lors des rassemblements du Maouloud et du pèlerinage de Kita, personne ne l’a évoqué. Pourquoi, quand il s’agit des fêtes religieuses, on occulte l’état d’urgence, mais quand il s’agit d’attroupements pour manifester des désaccords et des mécontentements, on interdit les marches ? », s’interroge Ramata Guissé, Directrice exécutive d’Amnesty International Mali.

Quels défis pour 2019 ?

Bien des défis sont à relever pour cette nouvelle année en matière de Droits de l’Homme au Mali. Pour la plupart des observateurs, notamment les organisations de défense des droits humains, le défi majeur de cette nouvelle année pour les autorités étatiques du Mali est de résoudre l’épineuse problématique de l’insécurité dans les régions du centre et du nord. Pour y arriver, l’AMDH préconise le dialogue entre les communautés comme solution. « C’est aux communautés elles-mêmes de trouver les voies et moyens, en dehors de l’État, parce que à chaque fois que l’État intervient, il y a certaines communautés qui ne se sentent pas à l’aise, ayant des suspicions de soutien de l’État  à d’autres », estime Maitre Moctar Mariko. La lutte contre l’impunité doit également s’accentuer. Le Président de l’AMDH penche pour des « procès emblématiques », qui feront comprendre à ceux qui s’adonnent aux violations des Droits de l’Homme que certains actes passent nécessairement par la case justice.

Dr Malick Coulibaly évoque pour sa part une lutte incisive contre la corruption, car, dit-il, « un franc détourné, c’est un droit à l’éducation ou à la santé en moins. Qui connait l’interconnexion entre les droits humains comprend aisément que la mauvaise gouvernance impacte négativement la jouissance des Droits de l’Homme ». Selon le Président de la CNDH, les efforts doivent être démultipliés pour que cette année le maximum de Maliens puisse avoir accès aux droits prescrits par la Constitution et les instruments juridiques régionaux et internationaux que leur pays  a librement ratifiés.

 

Cet article a été publié dans le Journal du Mali l’Hebdo N°(196) du 10 janvier 2019

Traite des personnes au Mali : Un phénomène qui prend de l’ampleur

 

Elles ne sont pas moins de cinq Maliennes à avoir été rapatriées du Koweït et de l’Arabie Saoudite entre juillet et septembre 2017, grâce à l’intervention de compatriotes installés dans ces pays. Des jeunes femmes parties dans l’espoir d’une vie meilleure qui se sont retrouvées piégées dans des situations assimilables à de l’esclavage.

Ces cas sont loin d’être isolés, selon M. Dramera, Vice-président du Conseil Supérieur de la Diaspora malienne (CSDM). Le dernier cas en date est celui d’une jeune malienne qui se trouverait aujourd’hui au Sénégal, selon M. Dramera. Partie au Koweït, grâce à des intermédiaires, pour être femme de ménage, elle a été contrainte de travailler pendant dix mois sans salaire. Informé de la situation, le représentant du CSDM sur place et M. Dramera obligeront l’intermédiaire ayant organisé le départ de la jeune femme à payer son billet de retour. Elle rejoindra donc le Mali saine et sauve, mais sans un sou après dix mois de travail. Trois autres jeunes femmes, grâce à l’intervention des mêmes personnes, rejoindront le Mali après des mois de calvaire au Koweït et en Arabie Saoudite.

Le représentant du CSDM en Arabie Saoudite, qui tient à préciser que cette pratique ne peut être généralisée à toute la société, affirme qu’elle est le fait de « quelques individus qui agissent en complicité avec des intermédiaires ». Ces derniers font miroiter le paradis à ces jeunes femmes et abusent de leur naïveté. Elles travaillent ainsi sous « un semblant de contrat », selon le représentant du CSDM, pour rembourser la somme déboursée par l’employeur et versée à l’intermédiaire, avant de toucher un salaire.

Phénomène complexe touchant le Mali, la traite des personnes se manifeste sous plusieurs formes, selon le Docteur Ali Abdourahamane Maiga, Président de la sous-commission promotion à la Commission Nationale des Droits de l’Homme (CNDH). « Il existe la traite à l’interne, concernant des Maliennes qui quittent un endroit du pays pour un autre, mais aussi de plus en plus de personnes, surtout des femmes, qui quittent d’autres pays de la sous-région pour le Mali ».

Dans l’espoir d’une vie meilleure, elles sont déplacées avec ou sans le consentement de leurs parents et sur la base d’une tromperie. Dr Maiga cite le cas de 9 jeunes femmes venues de Diéma. « Elles ont passé quatre jours entre les mains de certains bandits à la gare de Sogoniko avant que l’une d’elle ne s’échappe. Ayant constaté sa disparition, ils libèreront les autres, qui ont été prises en charge dans un centre d’accueil ». Des femmes qui se retrouvent sans travail, sans argent et dans un environnement qu’elles ne connaissent pas, deviennent vite des proies. Elles peuvent alors subir toutes sortes d’exploitations, « y compris les pires », selon Dr Maiga.

 

Le NED offre un nouvel siège à la Trijeud Mali

La Tribune Jeune pour le droit au Mali (Trijeud Mali) continue son bout de chemin, tout en accumulant de bon résultats, du moins c’est ce que témoigne le lancement officiel de son siège sise à  l’ACI 2000 ce mardi 29 décembre. Le président de la Trijeud Mali, Ibrahim Cissé et quelques responsables de la MISAHEL ont présidé le même jour le lancement du nouveau projet dénommé NED. En effet, le NED ou la «Campagne de formation et de sensibilisation des jeunes sur les droits de l’homme au Mali », est un projet visant à  former et sensibiliser les jeunes sur les questions de droits de l’homme. Les domaines d’intervention sont le district de Bamako et la région de Tombouctou et permettra de contribuer à  la prise en compte des questions de droits de l’homme dans la période poste crise à  venir. La « Campagne de formation et de sensibilisation des jeunes sur les droits de l’homme au Ma-li » concernera quatre (4) principales activités sur douze (12) mois, à  savoir:l’installation des points focaux qui permettra l’installation d’un point focal dans la région de Tombouctou, un atelier de formation sur les droits de l’homme d’une trente personnes, des conférences publiques dans le district de Bamako sur le thème : « Jeunesse, halte aux atteintes au droit à  la vie ! » etc. Lancé depuis octobre dernier ledit projet durera un an et prendra fin en septembre 2016. Il a été financé par le National Endorment Democratie (NED) d’une valeur de quinze millions de FCFA. Un nouvel siège à  l’appui La Trijeud Mali a également célébré ce mardi 29 décembre, l’ouverture officielle de son nouveau siège dans le quartier ACI 2000 non loin de la place Can. Ce nouvel abri est pour nous la preuve que la Trijeud Mali avance, a précisé Ibrahim Cissé. Il faut rappeler que c’est le NED qui est à  l’oeuvre de ce geste. Issa Karounga Keà¯ta, représentant du CNDH, dira que le plus important désormais est d’arriver à  rendre la monnaie aux partenaires en incluant dans leur action des vertus telles que la transparence et la responsabilité.

Droits de l’homme : le CNDH publie un nouveau rapport accablant

Organisme gouvernemental créé le 19 novembre 2009 par l’Etat malien, la CNDH a livré, ce mardi, à  la presse son rapport annuel 2011 sur la situation des droits de l’Homme au Mali et le rapport circonstancié  sur les évènements de 2012. Le rapport annuel 2011 fait en première partie, état des droits civils et politiques, des droits économiques, sociaux et culturels et des droits catégoriels, en l’occurrence ceux des femmes et des enfants. La deuxième partie du document traite de l’état de mise en œuvre des recommandations issues de l’examen périodique universel 2008 et du rapport 2010 de la Cndh. Me Kadidia Sangaré, a soutenu que l’Etat a certes fait des efforts pour la mise en œuvre des recommandations, mais des insuffisances subsistent, en l’occurrence, les textes relatifs au code des personnes et de la famille, la carte judiciaire… «Â La situation de cette année est catastrophique » Parlant du rapport circonstancié sur les évènements de 2012. Elle a déclaré : ‘’ la situation de cette année est catastrophique. ‘’ En effet, ce rapport note les atteintes faites aux droits de l’homme commises par les mouvements armés, les atteintes à  la liberté religieuse et aux droits culturels, le crime de guerre, le crime de génocide, les atteintes aux droits de l’enfant, les cas de viol, les amputations et châtiments corporels, les lapidations, les atteintes aux libertés publiques, les atteintes aux droits à  la santé, aux droits économiques, sociaux et culturels, la crise humanitaire, le droit à  la liberté de presse et d’expression, le terrorisme, le recensement injustifié des femmes, la situation des droits de l’homme à  Bamako et dans le reste du pays. Aussi, le rapport circonstancié signale que la mutinerie au sein de l’armée du 21 au 22 mars 2012 a entraà®né de nombreuses violations des droits de l’Homme parmi lesquels : les arrestations arbitraires, la destruction, le vol et le pillage des biens publics et privés, les agressions physiques, les affrontements entre bérets rouges et bérets verts, des exécutions sommaires, des arrestations arbitraires, des tortures et traitements cruels, inhumains et dégradants des détenus. Le rapporteur général de l’organisation, Ibrahim Berthé, a confirmé cet état de fait, exprimant sa déception quant aux conditions difficiles des détenus et la corruption dans la gestion des biens publics. Amadou Bocar Tékété a affirmé que leur rôle est non seulement d’informer le gouvernement, mais aussi de rendre compte à  la population. Placée sous la tutelle du Ministère de la Justice qui remplace la Commission nationale des droits de l’homme créée par le décret du 16 mars 2006, la CNDH a pour mission de «Â contribuer à  la promotion et au respect des droits de l’homme par des conseils, des propositions et des évaluations dans le domaine des droits de l’homme et des libertés fondamentales ».