Nord Mali : pourquoi Bamako tarde à intervenir ?

En perte de vitesse, le Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA) a cédé la place à  des islamises déterminés à  élargir leur influence au nord du Mali. Les approches récentes avec la médiation burkinabè montrent qu’Ansar Dine veut rester le seul interlocuteur légitime du Mali dans la sortie de crise. Crise qui s’aggrave de jour en jour puisque les hommes d’Iyad Ag Ghaly ont profané les symboles qui font la grandeur et la mystique de la cité des 333 Saints. En face, l’inaction d’un gouvernement malien, hésitant entre négociation et guerre, exaspère les ressortissants du nord qui multiplient les actions de soutien ou se révoltent contre les groupes armés. En dépit des alertes de l’Unesco, Ansar Dine mène désormais une guerre médiatique et politique. l’assassinat d’un élu à  Gao suivi d’affrontements entre le Mujao et le MNLA, la destruction des 7 mausolées saints à  Tombouctou exacerbe le sentiment d’injustice des populations du nord. La crainte d’une chariaisation progressive ont été illustrés avec les images de la punition en pubic d’un couple sur les écrans du monde. Prudence à  Bamako A Bamako, la prudence règne. Aux Nations Unies, on invite à  préciser les contours d’une intervention de la Cédéao dans le nord du Mali. Face à  une armée en reconstruction et coupée de ses tête de commandement, la remobilisation des troupes et leur équipement reste la priorité. A cela devront s’ajouter des appuis logistiques de la France et des Etats-Unis en matière de renseignements. l’une des bases américaines, établie à  Ouagadougou, agirait dans ce sens en survolant régulièrement la zone avec de petits appareils discrets à  l’œil nu dans le ciel subsaharien. Malgré tout, les hésitations du gouvernement de Cheick Modibo Diarra font monter la psychose dans la capitale malienne : « Si les islamistes ont détruit les mausolées, qu’est-ce qui peut les empêcher de perpétrer des attaques au sud ? », déplore Ibrahim un jeune étudiant.   Qui veut la paix, prépare la guerre Deux schémas se dessinent désormais pour la sortie de crise. Une double médiation menée par la CEDEAO avec d’un côté les islamistes, qui ont pris contact avec Blaise Compaoré pour réaffirmer leur position. l’islam radical ou rien ! De l’autre, la stabilisation de la transition et un gouvernement plus inclusif pour mener une opération conjointe CEDEAO-ONU-Mali. l’intégrité territoriale du Mali n’étant pas négociable au risque de créer une poudrière dans la région, les diplomates de CEDEAO s’accordent sur cette voie sans réussir à  mettre une quelconque pression sur le gouvernement de Cheick Modibo Diarra. Pour que l’institution sous régionale puisse actionner ses 3 300 hommes au nord Mali, une simple demande du Mali ne suffit plus : «Â Tout dépend de Bamako qui doit préciser les contours de cette intervention. Cheick Modibo Diarra avait plaidé pour la négociation, mais sur quelle base, pour négocier, il faut être en position de force ? », analyse Tiégoum Boubèye Maiga, directeur de la Nouvelle République. Le ballet diplomatique du Premier ministre (Alger, Paris, Nouakchott, Niamey et dernièrement Yamoussoukro) pour harmoniser les positions de sortie de crise, ravive les critiques dans la presse malienne. «Â On a parfois l’impression que CMD (surnom du Premier ministre) est plus occupé à  faire des nominations à  chaque Conseil des ministres qu’à  gérer la crise du nord », témoigne Aminata, journaliste. Sanogo définitivement hors-jeu ?   Quant à  Sanogo qui a toujours rejeté une intervention de la CEDEAO à  Bamako, est-il définitivement hors jeu ? Cheick Modibo Diarra a une nouvelle fois salué le vote par l’Assemblée nationale de la loi d’amnistie des putschistes et la transformation du CNRDRE en Comité militaire chargé du suivi de la réforme des forces de défense et de sécurité ( CMSRDFS) : «Â Sanogo est le maà®tre de l‘armée, tous lui obéissent, les hommes, les ministres qu‘il a fait nommer et si demain le Mali était prêt à  intervenir au nord, son veto pourrait bloquer le processus », précise un spécialiste de la crise. Le vrai problème, C’’est l’armée malienne. Elle n’est tout simplement pas prête pour reconquérir le nord ». Les pleins pouvoirs de Cheick Modibo Diarra ne suffisent pas. La convalescence prolongée de Dioncounda Traoré, le Président de transition nommé par la Cédéao pour douze mois, n’accélèrera pas non plus le processus. s’il est des secrets militaires qu’on ne doit pas révéler, le gouvernement de Cheick Modibo Diarra fait sien cette maxime célèbre et prépare la guerre pour avoir la paix ! Comme à  l’accoutumée, Bamako bruisse de rumeurs qui font du bien à  la population, car pendant que le MNLA et Ansar Dine s’étripent, l’armée malienne encerclerait lentement mais surement le nord. La libération est-elle proche ?

Alerte choléra au nord du Mali

Deux personnes sont mortes du choléra sur 28 malades recensés en deux jours à  Gao, dans le nord du Mali contrôlé depuis plus de trois mois par des groupes armés dominés par des islamistes, a appris l’AFP mercredi de sources concordantes. Les premiers cas de choléra ont été recensés mercredi « à  Wabaria, dans la commune de Gounzouray (périphérie sud-ouest de Gao) », sur le fleuve Niger, a affirmé Ibrahima Maà¯ga, un responsable de la santé à  l’hôpital de Gao, joint depuis Bamako.  » 27 cas recensés à  Gao  » Toujours d’après l’agence France Presse, 27 cas ont été recensés par les médecins de l’hopital de Gao, qui ont affirmé que les malades étaient pris en charge avec l’aide d’organisations humanitaires présentes dans la ville. La présence du choléra à  Gao a été confirmée par Almahdi Cissé, président de l’ONG Cri de coeur pour le Nord, qui intervient au plan humanitaire dans cette région sous contrôle de groupes armés, essentiellement des islamistes. « Nous avons envoyé quelqu’un à  Wabaria aujourd’hui pour voir les cas de choléra » et évaluer les besoins, a-t-il indiqué. Selon Yacouba Ag Namoye, un jeune de Gao, les islamistes du Mouvement pour l’unicité et le jihad en Afrique de l’Ouest (Mujao), maà®tres de la ville, ont exhorté les populations à  ne pas utiliser l’eau du fleuve pour éviter une propagation du choléra. « Eviter l’eau du fleuve » « Le Mujao a passé un communiqué à  la radio pour inviter les gens à  ne pas boire l’eau du fleuve et à  ne pas se laver avec », les islamistes « ont aussi placé des gens au niveau des berges (du fleuve) pour empêcher les enfants de se baigner dans l’eau et de la boire », a expliqué cet habitant. Ces informations accroissent l’inquiétude des humanitaires, qui expriment régulièrement leurs préoccupations pour les populations des trois régions administratives formant le Nord sous contrôle des groupes armés: Kidal (extrême nord-est), Gao (nord-est) et Tombouctou (nord-ouest).

Gao : le QG du MNLA aux mains des islamistes

Les habitants de la ville de Gao (nord-est du Mali) ont passé la journée terrés chez eux. Pour cause, les combats qui ont fait rage pendant plusieurs heures entre les hommes du MNLA et les islamistes. Selon l’AFP, ceux-ci ont fini par prendre le contrôle du quartier général des rebelles touareg sis au gouvernorat de la ville. Des témoins ont affirmé qu’il y a plusieurs morts dans les rangs des rebelles ainsi que des prisonniers. « Laissez nous chasser le MNLA Ce sont les hommes du Mouvement pour l’Unicité et le Jihad en Afrique de l’Ouest (Mujao) qui ont mené l’attaque de ce mercredi. Ils avaient dans un premier temps demandé à  la population qui s’apprêtait à  nouveau à  manifester suite à  l’assassinat d’un élu le lundi dernier, de ne pas sortir de chez elle. « Ils nous on dit de les laisser arrêter les coupables du meurtre et chasser le MNLA » rapporte un jeune membre du Collectif « Nous Pas Bouger » joint par téléphone à  Gao. Des tirs à  l’arme lourde ont ensuite été entendus une bonne partie de la journée. Il y a quelques heures maintenant, les islamistes « sont entrés à  l’intérieur du gouvernorat et les combattants du Mouvement national de libération de l’Azawad ont fui, d’autres ont été tués, d’autres arrêtés », selon le récit fait à  l’AFP par le propriétaire de la station-service qui jouxte le gouvernorat. Des témoins ont affirmé qu’après avoir pris QG du MNLA, les « moudjahidines » se sont dirigés vers un camp militaire tenu par le MNLA situé près de l’aéroport de Gao. Gao sous la coupe des islamistes « Le Mujao contrôle actuellement le terrain » affirme un témoin selon qui la tension est encore très vive dans la ville. « Les gens sont terrés chez eux. Même pendant les combats entre le MNLA et l’armée malienne en mars, on n’avait pas vu ça » ajoute-t-il. Si la prise de la ville de Gao se confirme, ce sera la deuxième ville a échappé au MNLA après Tombouctou qui est sous contrôle d’Ançar Dine et ses alliés depuis le mois d’avril. Les islamistes avaient combattu aux côtés des rebelles touareg pour la conquête des principales villes du nord Mali, fin mars-début avril. Mais depuis, ils s’opposent sur les objectifs de leur action. Le MNLA ayant des ambitions indépendantistes mais laà¯ques, les islamistes instaurant la charia, la loi islamique, dans les localités qu’ils contrôlent.

Le gouvernorat de Gao, QG des rebelles touareg, a été pris par les islamistes

Le gouvernorat de la ville de Gao (nord-est du Mali) qui servait de quartier-général à  la rébellion touareg, a été pris mercredi par les islamistes après plusieurs heures de combats qui ont fait des victimes parmi les combattants touareg, ont rapporté des témoins à  l’AFP. Les islamistes du Mouvement pour l’unicité et le jihad en Afrique de l’Ouest (Mujao) « sont entrés à  l’intérieur du gouvernorat. Les combattants du Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA, rébellion touareg) ont fui, d’autres ont été tués, d’autres arrêtés », selon le propriétaire de la station-service qui jouxte le gouvernorat. « Je suis devant le gouvernorat, les moujahidine sont entrés à  l’intérieur, ils contrôlent le gouvernorat et les environs », a affirmé un autre témoin, Issa Fané, membre de l’asssociation des ressortissants de Gao. Selon lui, il y a « des blessés, des morts, des prisonniers » dans les rangs du MNLA. Ces témoins ont affirmé qu’après avoir pris le contrôle du gouvernorat, les combattants du Mujao se dirigeaient mercredi après-midi vers un camp militaire tenu par le MNLA situé près de l’aéroport de Gao. Un ancien policier malien en poste à  Gao, qui ne travaille plus depuis la prise de la ville par différents groupes armés il y a trois mois, a affirmé que « plusieurs prisonniers du MNLA sont actuellement au commissariat » central. « Le Mujao contrôle actuellement le terrain. Des prisonniers du MNLA sont au commissariat, d’autres ont fui la ville, d’autres sont morts ou blessés. mais c’est la débandade » dans les rangs du mouvement rebelle touareg, a-t-il dit.

Tiébilé Dramé : « Ce n’est pas le moment de regarder dans le rétroviseur »

Le Parti pour la renaissance nationale (PARENA) qui a pris de nombreuses initiatives (dont la dernière remonte aux 10 et 11 décembre 2011), en vue d’une solution politique et démocratique des crises qui fragilisent notre pays, propose la tenue d’un atelier dont l’objectif est de réfléchir à  la situation dramatique que traverse le nord du Mali et proposer des pistes de résolution durable sinon définitive. Peut-on encore vivre ensemble (sous le même toit) dans le même pays ? Quelle conduite vis-à -vis du groupe Ansar Eddine ? Comment gérer la revendication séparatiste du MNLA ? Journaldumali.com : Après la rencontre du 10 et 11 décembre 2011, le PARENA convoque une nouvelle concertation sur le Nord, quelle est la pertinence d’une telle initiative dans le contexte actuel ? Tiébilé Dramé : Ce brainstorming sur les graves crises qui affectent le nord du Mali est la première initiative du genre depuis le déclenchement de la rébellion en janvier, le coup d’Etat du 22 mars et la partition de fait du pays. Devant la gravité de la situation et l’impasse cruelle dans laquelle le pays se trouve, il nous a paru judicieux de regrouper les acteurs politiques, les représentants de l’Etat, de la société civile, des élus, des ressortissants du nord afin de réfléchir ensemble au triste sort de notre pays et esquisser des solutions pour mettre fin à  l’occupation des 2/3 du territoire, et préserver l’unité, l’intégrité de notre territoire et la cohésion nationale. Votre engagement pour le Nord remonte à  des années, pourriez-vous revenir sur les différentes actions et négociations que vous avez mené ? Ce n’est pas le moment de regarder dans le rétroviseur. l’heure est trop grave. C’’est le présent et l’avenir qui doivent requérir toute notre attention. La situation au Nord s’enlise, que faut-il prévoir comme action urgente, après les convois humanitaires ? La ville de Gao a vécu lundi une manifesation exprimant le ras-le-bol des habitants ? Je rends un vibrant hommage à  la résistance de la jeunesse de Gao, à  celle de l’ensemble de notre peuple contre l’oppression, les pillages, les exactions et les humiliations quotidiennes dans les régions occupées. Que faut-il prévoir comme action urgente me demandez-vous ? l’urgence, C’’est libérer le pays, refaire son unité, sa cohésion. Par la guerre ou par le dialogue. On ne peut pas continuer dans l’immobilisme actuel qui est honteux et dégradant pour nous. Le FDR dont votre parti est membre, a boycotté la convention nationale proposée par le capitaine Sanogo ? Faut-il aujourd’hui une intervention militaire de la CEDEAO ? Nous n’avons pas encore boycotté la convention. Nous avons demandé des éclaircissements sur le projet et souhaité que la convention ne s’écarte pas de la Constitution, car nous ne nous associerons à  aucune initiative qui vise à  mettre entre parenthèses la loi fondamentale votée par le peuple souverain du Mali. Comment parvenir un accord entre le CNRDRE et la CEDEAO d’ici la fin des 40 jours de l’intérim de Dioncounda Traoré ? Le respect de la Constitution est le schéma le plus facile, le plus rapide à  mettre en œuvre. Doit-on craindre un risque de tension le 22 Mai ? Je ne suis pas devin. Je ne saurai vous dire ce qui va se passer le 22 mai. Je peux, en revanche, vous faire part de mes souhaits : ce pays qui est déjà  par terre, notre peuple qui est humilié et qui souffre tant n’ont pas besoin de tensions, de violences à  Bamako. Résolvons la crise politique et institutionnelle de manière pacifique en trouvant une formule compatible avec la Constitution qui doit rester la référence en toutes circonstances. On ne vote pas une constitution, on ne restaure pas une constitution pour s’asseoir dessus.