BAMEX 2025 : Un renforcement stratégique de la coopération militaire au Mali

Le Salon BAMEX 2025, qui se déroule à Bamako du 11 au 14 novembre, marque la première édition de cet événement consacré à la défense et à la sécurité. Dans un contexte de réorientation des partenariats militaires, le Mali renforce ses liens avec des puissances telles que la Turquie, la Russie, la Chine et l’Iran, pour sécuriser sa souveraineté face aux menaces croissantes dans la région.

Ce salon, qui se déroule en deux phases, a débuté par une exposition au Parc d’Exposition de Bamako et se poursuit avec des démonstrations pratiques au Centre Boubacar Sada Sy de Koulikoro. Il offre ainsi une occasion unique de découvrir des équipements de pointe, présentés par plus de 30 entreprises internationales, principalement turques, mais aussi russes et chinoises. Parmi les principaux exposants, des entreprises de renom telles que ASELSAN, Baykar, Roketsan, MKE, et STM Savunma ont dévoilé leurs dernières innovations en matière de défense. Les équipements présentés comprennent des drones de combat, des systèmes de défense aérienne, des armes lourdes, ainsi que des technologies spatiales et satellitaires.
La Turquie, invitée d’honneur de cette première édition, a particulièrement marqué les esprits avec la présentation de ses drones Bayraktar TB2 et AKINCI, des plateformes reconnues pour leur efficacité dans la lutte contre le terrorisme. Le Premier ministre malien, dans son discours d’ouverture, a salué la contribution de la Turquie à la sécurité de la région, soulignant le rôle clé d’Ankara dans l’exportation d’équipements militaires et dans la coopération militaire avec les pays africains. Il a également mis en avant l’importance de ce partenariat stratégique, qui ne repose pas seulement sur des livraisons d’armement, mais sur des modèles de coopération industrielle et de cofinancement, en opposition aux traditionnelles aides militaires extérieures.
La coopération entre le Mali et la Turquie ne se limite pas aux échanges d’équipements. En effet, des discussions ont eu lieu pour renforcer les capacités de formation des forces armées maliennes, dans le but de créer une défense autonome et plus efficace face aux groupes terroristes qui sévissent dans le Sahel. Ces formations concernent non seulement les aspects militaires, mais aussi la gestion des ressources de défense, un domaine clé pour assurer une sécurité à long terme.
Le salon a également permis de renforcer la position de la Russie et de la Chine dans les affaires sécuritaires du Mali. Ces deux puissances, qui ont récemment intensifié leurs engagements militaires en Afrique, ont présenté leurs systèmes d’armement, allant des systèmes de communication militaires aux véhicules blindés et hélicoptères de combat. Ces nouvelles collaborations sont devenues cruciales pour le Mali, qui cherche à diversifier ses sources de soutien pour répondre aux défis sécuritaires croissants, notamment face à la montée en puissance des groupes terroristes dans la région.
Au-delà de l’aspect matériel, BAMEX 2025 a permis de poser les bases de futures collaborations en matière de sécurité, avec des discussions sur des accords de coopération à long terme, notamment sur la formation des forces de sécurité, la fourniture d’équipements de haute technologie et l’intensification des échanges entre les industries de défense des pays participants. Plus de 50 pays ont été invités à participer, ce qui témoigne de l’ampleur internationale de l’événement et des ambitions du Mali de jouer un rôle clé dans la sécurité régionale.
Ce salon est bien plus qu’un simple événement d’exposition. Il représente un moment stratégique dans la politique de défense du Mali, un pays qui, après avoir longtemps été dépendant des anciennes puissances coloniales, se tourne désormais vers des partenariats plus autonomes. Cette évolution s’inscrit dans une dynamique plus large de renforcement de la souveraineté des États africains, qui cherchent à bâtir des architectures de sécurité régionales solides, capables de répondre aux défis contemporains tels que le terrorisme, la criminalité transnationale et l’instabilité politique.
Avec des événements comme BAMEX 2025, le Mali se positionne comme un acteur clé dans la construction d’un avenir sécuritaire pour l’Afrique. La coopération avec la Turquie, la Russie et la Chine redéfinit les relations géopolitiques du pays, avec l’objectif de renforcer son indépendance stratégique tout en soutenant la stabilité régionale. Ce salon, en réunissant des acteurs majeurs, favorise la création de partenariats solides et durables, essentiels pour la sécurité du Sahel et au-delà.

Kayes : enlèvement de cinq techniciens indiens sur un chantier d’électrification 

Cinq techniciens indiens ont été enlevés le 6 novembre dans la zone de Kobri, à une cinquantaine de kilomètres de Kayes, alors qu’ils se rendaient sur un site d’intervention dans le cadre d’un projet d’électrification rurale.

L’incident intervient dans une région où les mouvements de travailleurs étrangers font déjà l’objet de restrictions et de dispositifs de sécurité renforcés en raison d’attaques répétées contre les chantiers et les convois techniques.
Selon plusieurs sources locales, le véhicule transportant les techniciens a été intercepté sur un axe secondaire reliant Kayes à Bafoulabé, un itinéraire où les mouvements sont désormais régulièrement ciblés. Les autres membres du personnel présents dans la zone ont été regroupés puis transférés vers Bamako dans le cadre des procédures de sécurisation mises en place par l’entreprise en charge du projet. Les autorités locales n’ont pas donné de détails sur la progression des recherches, mais les premières évaluations s’orientent vers des groupes affiliés au JNIM, dont les unités opèrent dans les secteurs boisés et les zones de piste entre Diéma, Kayes et Kita.
Cet enlèvement s’ajoute à celui survenu le 1ᵉʳ juillet dans la même région, lorsque trois ressortissants indiens employés par Diamond Cement Mali avaient été capturés lors d’une incursion autour de l’usine située près de Bafoulabé. Les techniciens enlevés étaient alors identifiés comme P. Venkataraman, originaire de Ganjam dans l’Odhisha, Prakash Chandra Joshi, 61 ans, de Jaipur au Rajasthan, et Kurakula Amaralingeswara Rao, du Telangana. Leur capture avait conduit à l’arrêt temporaire de certaines unités de production et à la réorganisation des équipes présentes sur site, avec un renforcement des escortes et des mesures de déplacement à horaires restreints.
Au cours de la même année, des travailleurs chinois d’un complexe agro-industriel sucrier dans la région de Ségou avaient également été enlevés lors d’une attaque visant directement les installations du site. Depuis, plusieurs entreprises étrangères présentes dans l’énergie, la cimenterie ou l’agro-transformation ont revu leurs plans opérationnels, passant de déplacements routiniers non escortés à des schémas de mobilité sous coordination sécuritaire, avec des horaires réduits et des regroupements de personnel dans des zones considérées comme plus contrôlées.
Une évolution se dessine dans les cibles visées. La quasi-absence de cadres occidentaux sur les sites industriels depuis 2023 a déplacé les stratégies d’enlèvement vers les équipes venues d’Inde, de Chine ou d’autres pays engagés dans des projets techniques. Dans certaines opérations recensées plus au nord du Sahel, des ressortissants émiratis travaillant sur des chantiers d’ingénierie ont également été visés, signe d’une adaptation continue du ciblage vers les professionnels indispensables au fonctionnement de secteurs clefs comme l’électricité, la production de matériaux ou la maintenance industrielle.
La région de Kayes demeure par ailleurs affectée par des contraintes logistiques durables. Un couvre-feu local est en vigueur depuis juillet, tandis que des ruptures intermittentes d’approvisionnement en carburant perturbent les déplacements, l’acheminement des équipements et la continuité des chantiers. Ces éléments limitent la marge d’action des équipes sur le terrain et compliquent les réponses d’urgence en cas d’incident.
Pour l’heure, aucune revendication n’a été enregistrée. Les procédures de coordination entre les autorités maliennes, l’ambassade de l’Inde et les sociétés concernées sont activées. Les discussions portent à la fois sur la localisation des otages et sur les ajustements nécessaires à la sécurisation des travaux industriels dans l’ouest du pays.

L’Union africaine appelle à une réponse urgente à la crise au Mali

Face aux attaques récurrentes et aux blocages qui perturbent l’accès aux biens essentiels, l’Union africaine exprime son inquiétude et appelle à une mobilisation internationale coordonnée. Le contexte sécuritaire demeure sous fortes tensions dans plusieurs régions du pays.

Depuis Addis-Abeba, le Président de la Commission de l’Union africaine, Mahmoud Ali Youssouf, a fait part le 9 novembre de sa préoccupation concernant l’aggravation de la situation au Mali, marquée par des blocus imposés dans certaines zones, la perturbation des approvisionnements et une pression croissante sur les civils. L’organisation souligne que ces attaques visent directement les populations et affectent l’accès aux produits essentiels, aggravant une crise humanitaire déjà fragile.
L’Union africaine condamne également les récents enlèvements, dont celui de trois ressortissants égyptiens, survenus dans un contexte où plusieurs travailleurs étrangers ont été ciblés depuis le début de l’année. Elle demande leur libération immédiate, rappelant que ces actes constituent des violations graves du droit international humanitaire.
Dans son communiqué, la Commission appelle les partenaires régionaux et internationaux à renforcer leur coordination, notamment à travers le partage de renseignements et le soutien aux dispositifs de sécurité déjà existants. Le rappel fait référence à la résolution adoptée lors de la réunion ministérielle du Conseil Paix et Sécurité du 30 septembre 2025, qui prévoyait une assistance accrue aux pays du Sahel.
L’Union africaine réaffirme enfin sa disponibilité à accompagner les autorités maliennes et les États voisins dans leurs efforts de stabilisation, estimant que la lutte contre les groupes armés nécessite à la fois des moyens sécuritaires et un appui durable aux populations affectées.

Tombouctou : exécution publique de la créatrice de contenus Mariam Cissé à Tonka

Mariam Cissé, créatrice de contenus originaire de Tonka, a été enlevée le jeudi 6 novembre 2025 à la foire d’Echel, dans le cercle de Goundam, avant d’être exécutée publiquement le vendredi 7 novembre. Les faits se sont déroulés dans une zone où des groupes armés affiliés au JNIM exercent un contrôle territorial et social constant.

Mariam Cissé a été capturée le jeudi 6 novembre 2025 à la foire d’Echel, un marché hebdomadaire situé à environ vingt kilomètres au nord-ouest de Tonka, dans le cercle de Goundam, région de Tombouctou. Elle y participait aux activités commerciales lorsqu’un groupe d’hommes armés l’a contrainte à les suivre. Le vendredi 7 novembre, elle a été exécutée publiquement dans une localité sous l’influence directe des groupes armés opérant dans la zone, en présence d’habitants rassemblés.

Tonka est située à environ 38 kilomètres de Goundam et à un peu plus de 120 kilomètres au sud-ouest de la ville de Tombouctou. Depuis plusieurs mois, la zone est placée sous l’autorité effective de combattants affiliés au Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (JNIM). Ces groupes y organisent des patrouilles, contrôlent les axes et encadrent les marchés, les déplacements inter-villageois ainsi que certaines pratiques sociales.

Dans les jours ayant précédé son enlèvement, une vidéo montrant la présence d’hommes armés avait circulé localement après avoir été filmée par Mariam Cissé dans un contexte non précisé. Ce contenu, largement relayé dans la région, a été présenté par plusieurs habitants comme l’élément ayant attiré l’attention des groupes armés sur son activité. Ces informations circulent dans les échanges communautaires depuis l’annonce de sa mort et n’ont pas fait l’objet d’un communiqué officiel.

Mariam Cissé était suivie pour ses vidéos mêlant humour, témoignages du quotidien et promotion culturelle de Tonka. Sa présence en ligne lui avait valu une audience importante parmi la jeunesse de la région de Tombouctou et dans la diaspora. Son exécution a suscité une profonde émotion sur les réseaux sociaux et dans les localités du cercle de Goundam, où elle était largement reconnue.

Les proches de la jeune femme et les relais communautaires de Tonka organisent les rites funéraires selon les usages locaux. Les autorités administratives et sécuritaires n’avaient pas publié de communication publique au moment de la rédaction de cet article.

Chauffeurs routiers : retour au dialogue après la polémique

À la suite d’un reportage télévisé perçu comme mettant en cause les chauffeurs dans les difficultés d’approvisionnement en carburant, des tensions sont apparues au sein du secteur du transport routier. Le Premier ministre a reçu les syndicats ce jeudi 6 novembre 2025 pour apaiser le climat et clarifier les engagements de part et d’autre.

Depuis la mi-septembre, l’acheminement du carburant est perturbé par les attaques visant des convois de camions-citernes sur certains axes du pays, entraînant des retards et des difficultés d’approvisionnement dans plusieurs localités. Dans ce contexte, un reportage diffusé récemment sur la chaîne nationale a suscité la réaction des chauffeurs routiers, ces derniers estimant que la présentation des faits laissait entendre qu’ils porteraient une part de responsabilité dans la persistance de la pénurie. Plusieurs syndicats ont fait valoir que les conducteurs sont, au contraire, directement exposés aux risques liés aux trajets et supportent les contraintes de sécurité qui allongent les délais de livraison.
C’est dans ce climat que le Premier ministre, le Général de Division Abdoulaye Maïga, a reçu, le jeudi 6 novembre 2025, une délégation de la Coordination nationale des syndicats et associations des chauffeurs et conducteurs routiers. « Nous sommes prêts à tout donner. Nos ressources, notre énergie. Nous nous battrons corps et âme », a déclaré Marafa Touré, Secrétaire Général de la Coordination, rappelant la volonté des professionnels du secteur de poursuivre les livraisons malgré les difficultés rencontrées sur les corridors.
Au cours de cette rencontre, les chauffeurs ont formulé plusieurs demandes, parmi lesquelles l’application complète de la convention collective, la réduction des contraintes aux postes de contrôle et l’amélioration du système d’assurance maladie pour les conducteurs. Ils ont souligné la nécessité de conditions de travail adaptées aux risques encourus sur les axes d’approvisionnement.
Le Premier ministre a reconnu les efforts fournis par les chauffeurs depuis les attaques de mi-septembre et a salué leur rôle dans le maintien de la circulation des produits stratégiques. Il a assuré que les doléances seront examinées par les ministères concernés, avant d’appeler à l’unité et à la coopération pour assurer la continuité des approvisionnements.
La rencontre s’est tenue en présence des ministres en charge du Travail, du Transport, de l’Industrie et du Commerce, ainsi que du ministère de la Promotion de la Femme, de l’Enfant et de la Famille.

Décès de l’ancien ministre Oumar Hamadoun Dicko à Abidjan

L’ancien ministre malien Oumar Hamadoun Dicko est décédé le 4 novembre à Abidjan, où il résidait depuis plusieurs années selon sa famille. Figure connue de la scène politique nationale, il avait occupé plusieurs fonctions gouvernementales au début des années 2000 et plus récemment en 2019.

L’annonce du décès d’Oumar Hamadoun Dicko a été confirmée par ses proches, puis relayée par de nombreuses sources. L’ancien ministre est décédé à Abidjan, où il séjournait régulièrement depuis sa retraite politique. Les circonstances exactes de sa mort n’ont pas été publiquement détaillées, mais des sources familiales évoquent un décès naturel.
Natif de Nara, Oumar Hamadoun Dicko s’est fait connaître dans les années 1990 dans les milieux associatifs et politiques, avant d’occuper des responsabilités gouvernementales sous la présidence d’Alpha Oumar Konaré puis celle d’Amadou Toumani Touré. Il est nommé le 16 octobre 2002 ministre délégué auprès du ministre des Affaires étrangères et de la Coopération internationale, chargé des Maliens de l’extérieur et de l’Intégration africaine. Le 2 mai 2004, il prend la tête du ministère des Maliens de l’Extérieur et de l’Intégration africaine, un portefeuille sensible en raison de la place de la diaspora dans l’économie nationale et des enjeux frontaliers dans la sous-région. Son action avait notamment porté sur les dossiers de migration, les retours assistés, et la coopération institutionnelle entre États ouest-africains.
Après plusieurs années d’éloignement des affaires publiques, il revient brièvement au gouvernement en mai 2019, à la faveur de la formation de l’équipe dirigée par Boubou Cissé. Il y occupe le poste de ministre du Dialogue social, du Travail et de la Fonction publique. Son passage à ce poste intervient dans un contexte national marqué par des revendications salariales persistantes, des tensions avec plusieurs syndicats et la nécessité de rétablir des cadres de négociation entre administration et organisations socioprofessionnelles.
Oumar Hamadoun Dicko avait également été actif au sein de partis politiques et de structures de concertation nationale, sans occuper de fonction médiatique ces dernières années. Plusieurs responsables politiques maliens ont salué la mémoire d’un homme « engagé dans le service public » et d’un acteur ayant pris part à plusieurs phases de la vie institutionnelle du pays, notamment lors de la consolidation de l’intégration régionale ouest-africaine.
Sa disparition intervient dans un contexte où le rôle de la diaspora, les équilibres diplomatiques et les dynamiques politiques internes demeurent au cœur des débats nationaux. Aucune information n’a pour l’instant été communiquée concernant le programme officiel des funérailles. Selon sa famille, la dépouille pourrait être rapatriée au Mali pour l’inhumation.

Bougouni : inauguration officielle de la deuxième mine de lithium

Deuxième pôle industriel du lithium dans le cercle de Bougouni, la mine opérée par LMLB SA a été inaugurée ce 3 novembre 2025 en présence des autorités nationales et régionales. Le site, développé par Kodal Minerals et Hainan Mining, est déjà entré en production cette année et expédie ses premiers concentrés.

L’inauguration qui s’est déroulée en présence du président de la Transition et de nombreuses autres personnalités, s’inscrit dans la montée en puissance de la filière lithium autour de Bougouni, devenue l’un des principaux bassins de production du pays. L’actif est opéré par Les Mines de Lithium de Bougouni SA (LMLB), société locale liée à Kodal Mining UK (groupe Kodal Minerals) et à Hainan Mining, qui porte le développement industriel du gisement dans le Birimien malien, à environ 180 km au sud de Bamako. Kodal a confirmé que le site a obtenu son permis d’exportation en septembre et que la production de concentré de spodumène a démarré en février 2025, avec une cible de 125 000 tonnes par an pour la phase 1 en procédé DMS, avant une phase 2 par flottation attendue en 2028 (230 000 t/an prévues).
Selon les mises à jour opérationnelles de l’exploitant, les premiers chargements ont quitté la mine à l’automne et la cérémonie de ce 3 novembre intervient alors que les volumes sortent progressivement par convoi routier. Kodal Minerals indique avoir transporté environ 10 000 tonnes au 20 octobre et maintient ses objectifs de montée en cadence.
Cette mise en service intervient un an après la première coulée de concentré à Goulamina, autre projet lithium majeur du pays, lancé fin 2024 sous un partenariat industriel distinct. L’ouverture de Bougouni consacre ainsi une deuxième source d’approvisionnement régulière en concentré Li₂O, dans un contexte global de demande soutenue pour les chaînes batteries.
Sur le plan capitalistique et réglementaire, Kodal précise que LMLB est une entité malienne détenue via Kodal Mining UK, dans laquelle Kodal possède 49 %. Les références publiques à l’accord-cadre avec Hainan Mining et aux exigences du Code minier révisé en 2023 encadrent le projet, notamment sur l’obtention des permis, le contenu local et les conditions d’exportation. Les pourcentages exacts de participation de l’État dans cet actif spécifique ne sont pas détaillés par l’exploitant dans ses communications récentes.
Au niveau local, la présence des autorités administratives et coutumières a accompagné l’inauguration, dans une région déjà structurée par les flux de main-d’œuvre, de sous-traitance et de transports liés au lithium. Les éléments rendus publics par l’opérateur font état d’une trajectoire industrielle désormais engagée, avec production, permis d’exportation et expéditions en cours, tandis que l’accélération de la phase 2 demeure conditionnée au calendrier industriel communiqué par la co-entreprise.

Otages et rançons : un marché qui alimente la violence

Deux ressortissants émiratis enlevés fin septembre près de Bamako ont été libérés le 30 octobre après un mois de captivité. Derrière cette libération, des transactions financières qui risquent de nourrir durablement les circuits du terrorisme au Sahel.

Les enlèvements ont eu lieu sur le terrain d’un aéroclub situé à une quinzaine de kilomètres de Sanankoroba, au sud de Bamako, appartenant à l’un des otages, un homme connu pour ses actions caritatives dans la région. L’aéroclub, doté d’une piste de 800 mètres, accueille depuis plusieurs années des apprenants en pilotage d’ULM. Une vidéo diffusée peu après sur un canal lié au JNIM montrait des hommes armés parlant en fulfuldé, confirmant la piste d’un rapt jihadiste.

Ce cas illustre l’évolution du phénomène : au début des années 2000, les otages étaient principalement des Occidentaux, souvent libérés contre des rançons versées par des États ou des intermédiaires. Mais selon l’International Crisis Group, l’Observatoire sahélien des droits humains et le Centre d’études stratégiques de Dakar, la majorité des rapt-contre-rançon enregistrés depuis 2020 visent désormais des ressortissants régionaux, expatriés africains, commerçants et agents publics.

Le groupe JNIM, affilié à Al-Qaïda, a fait de la rançon une de ses principales sources de revenus, aux côtés de la contrebande de carburant, de l’orpaillage artisanal et de l’extorsion sur les axes routiers. D’après un rapport du Conseil de sécurité des Nations unies, les montants versés pour les libérations d’otages dans le Sahel entre 2015 et 2025 dépassent 400 millions de dollars, contribuant directement à la résilience financière des réseaux jihadistes.

La libération des deux Émiratis, pour laquelle plusieurs sources évoquent un paiement d’environ 50 millions de dollars, confirme la persistance de ce schéma. Derrière la compassion légitime, ces transactions renforcent la capacité logistique des groupes armés et pérennisent un système économique parallèle où la peur, l’argent et la négociation deviennent les leviers d’une guerre sans fin.

Financement humanitaire : le Mali face à une baisse historique des contributions

Au 31 octobre 2025, le Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations unies (OCHA) constate un effondrement du financement humanitaire au Mali. Moins de 16 % des besoins sont couverts, un recul de plus de moitié par rapport à 2024 alors que la crise s’aggrave dans le pays.

Le Financial Tracking Service (FTS) d’OCHA, plateforme mondiale de suivi des financements, indique que le Plan de réponse humanitaire 2025 du Mali, chiffré à 771,3 millions de dollars — soit environ 468 milliards de francs CFA — n’a mobilisé que 120,5 millions de dollars, soit 73 milliards de francs CFA. Ce taux de couverture de 15,6 % est l’un des plus faibles enregistrés depuis plus de dix ans.

En 2024, le plan d’aide du Mali, évalué à 751 millions de dollars (456 milliards CFA), avait été financé à hauteur de 269 millions (163 milliards CFA), soit 36 % des besoins. En un an, les financements ont donc chuté de plus de 55 %, alors que les besoins ont, eux, légèrement augmenté, traduisant un désintérêt progressif des bailleurs pour les crises prolongées du Sahel.

À l’échelle mondiale, seulement 35 % des besoins humanitaires ont été couverts en 2025, selon OCHA, contre plus de 50 % en moyenne au cours de la décennie précédente. Cette baisse est liée à la multiplication des crises simultanées, au ralentissement économique mondial et à la redirection de l’aide vers l’Europe de l’Est et le Moyen-Orient.

Sur le terrain, les conséquences sont tangibles et mesurables. Le secteur de la sécurité alimentaire, qui absorbe la plus grande part du plan, n’a reçu que 22,2 millions de dollars, soit environ 13 milliards de francs CFA, sur 423 millions demandés (254 milliards CFA). La nutrition, deuxième priorité, affiche un financement de 16,6 millions de dollars (9,9 milliards CFA) sur 68,6 millions attendus, soit 24 % de couverture. Les programmes de santé, eux, n’ont reçu que 6,3 millions de dollars (3,7 milliards CFA) sur 38,3 millions demandés, tandis que l’éducation d’urgence plafonne à 4,4 millions de dollars, soit à peine 11 % de son objectif.

Le secteur eau, hygiène et assainissement (WASH), pourtant vital dans un contexte de déplacement massif et de contamination des nappes, n’a mobilisé que 3,5 millions de dollars (2,1 milliards CFA) sur 34,5 millions requis. La protection des civils, la réponse aux violences basées sur le genre et l’appui logistique affichent également des niveaux critiques, tous inférieurs à 20 % de couverture.

Les principales zones affectées demeurent les régions du Centre (Mopti, Ségou) et du Nord (Gao, Tombouctou, Kidal, Ménaka), où les organisations signalent des ruptures d’approvisionnement dans les entrepôts du Programme alimentaire mondial (PAM) et des interruptions de programmes communautaires soutenus par l’UNICEF et le HCR.

Les principaux bailleurs — Union européenne, Allemagne, États-Unis, Royaume-Uni, Canada et Italie — maintiennent leurs contributions, mais sans rehaussement. Le PAM, par exemple, n’a pu distribuer que 60 % des rations prévues en octobre, tandis que certaines ONG locales rapportent la suspension de projets d’eau potable dans le delta intérieur du Niger faute de financements supplémentaires.

À deux mois de la clôture budgétaire, les acteurs humanitaires préviennent que plus de la moitié des programmes prévus pour 2025 risquent d’être suspendus, accentuant les vulnérabilités dans un pays où plus de 7 millions de personnes ont besoin d’assistance, dont plus de 400 000 déplacés internes et 250 000 réfugiés étrangers.

 

« L’ECO doit renforcer la souveraineté économique des pays africains » – Modibo Mao Makalou

L’économiste Modibo Mao Makalou revient sur les enjeux du passage à la monnaie unique de la CEDEAO prévue pour 2027. Il analyse la position du Mali entre l’UEMOA et l’AES, ainsi que les défis d’une souveraineté monétaire réelle pour les États africains.

Le débat sur le FCFA s’intensifie au moment où la région connaît de fortes recompositions politiques. Quelle lecture en faites-vous ?

 Modibo Mao Makalou : En effet, il existe présentement 2 zones monétaires à l’intérieur de la Communauté Économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) qui disparaîtront avec le lancement de la monnaie unique de la CEDEAO, l’ECO qui est prévu pour 2027.  Il existe 8 monnaies en Afrique de l’Ouest pour 15 pays : les 8 pays membres de l’Union Monétaire Ouest Africaine (UMOA) qui possèdent une monnaie commune, le franc CFA (Bénin, Burkina Faso, Côte d’Ivoire, Guinée-Bissau, Mali, Niger Sénégal et Togo), et les 7 autres pays membres de la CEDEAO qui possèdent une monnaie nationale : le cédi au Ghana, le dalasi en Gambie, le dollar libérien au Libéria, le franc guinéen en Guinée, le leone en Sierra Leone, le naira au Nigeria, et l’escudo au Cap-Vert verront leur monnaie disparaitre au profit de l’ECO en 2027. Ces monnaies nationales à l’exception de l’escudo du Cap-Vert sont regroupées au sein de la Zone Monétaire de l’Afrique de l’Ouest (ZMAO) et ne sont pas convertibles entre elles, ce qui augmente les coûts de transactions et tend à défavoriser les échanges commerciaux formels. L’UEMOA et la ZMAO utiliseront la monnaie unique ECO lorsqu’elle sera lancée à l’horizon 2027 car le FCFA et les 7 autres monnaies pourront disparaitre même si l’idée d’une monnaie commune parait plus probable.

Le Mali, membre de l’UEMOA mais aussi de l’AES, peut-il durablement concilier les deux cadres ?

MMM : Une union économique et monétaire pourrait favoriser une utilisation plus efficace des ressources et stimuler la croissance économique. Les 3 pays membres de la Confédération de l’Alliance des Etats du Sahel (AES) ; Burkina Faso, Mali et Niger sont aussi membres avec 5 autres pays (Bénin, Cote d’ivoire, Guinée Bissau, Sénégal, et Togo), de l’Union Economique et Monétaire Ouest Africaine (UEMOA) qui est une organisation d’intégration économique et monétaire régionale établie par le Traité de Dakar du 10 janvier 1994. Parmi les objectifs de l’UEMOA on peut citer la création d’un marché commun avec la libre circulation des personnes, des biens, des services, des capitaux, du droit d’établissement aux personnes pour les activités libérales et les salariés ainsi que l’amélioration de la compétitivité, de la concurrence, et de la convergence des politiques économiques et sociale, de même que l’élaboration d’un tarif extérieur commun (TEC) à l’encontre des non-membres, et l’adoption d’une politique commerciale et des politiques sectorielles. A priori, aucune incompatibilité n’existe pour le moment entre l’AES et ‘l’UEMOA même si l’AES ambitionne d’être une union économique et monétaire à terme.

Quels seraient les avantages et inconvénients pour le Mali d’une monnaie nationale indépendante ?

Le futur Eco pourrait-il renforcer la souveraineté économique des pays africains ou simplement rebaptiser le FCFA ?

MMM : La création d’une monnaie nationale est une décision politique qui doit répondre à des impératifs techniques de fixation du taux de change (quantité de monnaie nationale qu’on peut échanger contre une unité de monnaie étrangère) pour faciliter les échanges avec les principaux partenaires commerciaux tout en assurant la stabilité des prix donc d’assurer le maintien du pouvoir d’achat des citoyens. La création d’une monnaie nationale implique la création d’un institut  d’émission qui servira de banque centrale nationale. Celle-ci agira principalement comme une banque pour les banques commerciales en contrôlant les flux de monnaie et de crédits dans l’économie, de manière à assurer son premier objectif, en l’occurrence, la stabilité des prix.

Les banques commerciales pourront alors solliciter des prêts auprès de la Banque Centrale (des réserves de banque centrale), qui leur servira en grande partie à couvrir des besoins de liquidités à très court terme. Le principal instrument dont dispose la Banque Centrale pour réguler le crédit dans l’économie et pour contrôler la quantité de monnaie en circulation et, par conséquent, la demande de réserves de banque centrale émanant des banques commerciales, consiste à fixer les taux d’intérêt (le coût du crédit).

La création d’une monnaie doit se faire en fonction de la quantité et de la qualité de la production de biens et services dans notre économie et de nos échanges de biens et services avec nos principaux partenaires économiques et commerciaux. Il est surtout crucial d’avoir une banque centrale autonome qui aura les fonctions suivantes : assurer la stabilité des prix ; gérer les réserves officielles de change ; veiller à la stabilité du système bancaire et financier ; promouvoir le bon fonctionnement et assurer la supervision du système financier et bancaire ; et assurer la sécurité des systèmes de paiement.

La monnaie joue un rôle très important pour ce qui concerne les objectifs de la politique économique non seulement pour préserver le pouvoir d’achat des citoyens mais aussi pour les transactions économiques d’un pays avec les autres pays. Rappelons que la solidité d’une monnaie est établie selon les normes internationales lorsque les avoirs extérieurs nets (liquidités disponibles en or et devises) de la Banque Centrale peuvent couvrir 3 mois d’importations. Il est important de souligner que l’ECO sera une monnaie ouest africaine émise par une banque centrale fédérale dont le taux de change sera flexible et adossé à un panier de monnaies internationale. Les pays de l’Afrique de l’Ouest qui respecteront les critères de convergence macroéconomiques de la CEDEAO seront éligibles pour adopter l’EC0 en 2027 selon la CEDEAO.

Quel rôle le secteur privé peut-il jouer dans cette transition monétaire et financière ?

MMM : Afin d’accélérer l’intégration régionale et le développement de nos pays, la politique monétaire ne peut se substituer à une politique de développement holistique et durable. Les pays de l’UEMOA doivent donc continuer à améliorer la viabilité des finances publiques et financer davantage les économies nationales. Le secteur privé est un moteur de la croissance économique, cependant il fait face à des difficultés de financement surtout pour les investissements nationaux ou sous régionaux. Il importe donc de mobiliser l’épargne à travers la création des marchés financiers et baisser les taux d’intérêt  et augmenter la durée des prêts auprès des banques et établissements financiers pour ce qui concerne le financement des investissements productifs mais aussi sociaux et environnementaux.

Enfin, pensez-vous que les citoyens comprennent vraiment les enjeux autour du FCFA ?

MMM : La BCEAO est l’Institut d’émission commun des Etats membres de l’UMOA et de l’UEMOA, chargé notamment d’assurer la gestion de leur monnaie commune, le Franc de la Communauté Financière Africaine (FCFA), de leurs réserves de change et de mettre en œuvre la politique monétaire commune. L’Accord de Coopération monétaire signé entre l’UMOA et la France en décembre 1973 a été modifié en décembre 2019 avec des révisions importantes y compris la fermeture du compte d’opérations de la BCEAO auprès du trésor français. La France devient toutefois le garant de dernier ressort du FCFA  pour assurer la convertibilité illimitée du FCFA en euro et maintenir sa parité fixe avec l’euro, cependant les représentants français ne siègent plus dans les organes de gouvernance de la BCEAO (conseil d’administration, comité de politique monétaire et commission bancaire). Notons par ailleurs que la pérennité des accords de coopération monétaire après la mise en place de l’euro est garantie par la décision du conseil européen du 23 novembre 1998 n° 98/683/CE “concernant les questions de change relatives au franc CFA et au franc comorien”.

Départs de ressortissants : Aly Tounkara appelle au discernement

Alors que les États-Unis, l’Italie, l’Allemagne et l’Australie ont appelé leurs ressortissants à quitter le Mali, les autorités maliennes observent une prudente réserve. Ces appels interviennent dans un climat marqué par la pénurie de carburant, la multiplication des attaques contre les convois et une tension sécuritaire croissante autour de Bamako.

Les ambassades concernées évoquent une dégradation rapide de la sécurité et une imprévisibilité accrue des conditions de déplacement, notamment sur les grands axes. Les représentations américaine et italienne ont explicitement recommandé un départ « immédiat » par vols commerciaux, tandis que Berlin et Canberra déconseillent tout voyage vers le Mali, citant la menace terroriste, les enlèvements et la crise énergétique. Les alertes s’ajoutent à celles déjà émises par les Pays-Bas et le Royaume-Uni, qui classent le pays en zone rouge sur leurs portails de sécurité.

Dans une analyse publiée le 29 octobre 2025, le Dr Aly Tounkara, enseignant-chercheur et expert au Centre des Études Sécuritaires et Stratégiques au Sahel (CE3S), estime ces appels « hâtifs » au regard du contexte malien. Selon lui, le Mali ne saurait être comparé à la Syrie, en raison de la différence des structures armées, de la sociologie du pouvoir et du maillage territorial assuré par les Forces armées maliennes. Il rappelle que l’armée bénéficie d’un équipement aérien renforcé, de formations diversifiées depuis 2012 et d’une forte résilience populaire face à la menace jihadiste.

L’expert souligne que, si chaque État a le devoir de protéger ses ressortissants, les véritables partenaires d’un pays se mesurent dans les périodes de crise aiguë. Il invite à relativiser la gravité du risque en soulignant la capacité de l’État malien à garantir une certaine continuité territoriale et la détermination des populations à défendre leur souveraineté.

Pour finir, Aly Tounkara interroge la portée politique et symbolique de ces retraits : que restera-t-il de la perception du Mali si « l’apocalypse prédite » ne se produit pas ? Et quelle légitimité accorder aux groupes armés dont la violence, loin d’inspirer la confiance, alimente le rejet populaire ?
Pour lui, la crise actuelle exige plus de discernement que d’alarmisme, dans un pays où la fragilité coexiste avec une résilience éprouvée.

Axe Ségou–Bamako : deux commerçants égyptiens enlevés, la piste jihadiste évoquée

Deux ressortissants égyptiens, présentés comme commerçants ambulants, ont été enlevés le mardi 28 octobre 2025 sur la route reliant Ségou à Bamako. Selon plusieurs sources locales et sécuritaires, l’incident s’est produit en pleine journée dans une zone régulièrement ciblée par des groupes armés.

Les victimes, identifiées par des sources non officielles sous les noms de Saleh Samir et Abdelazim Morsi, circulaient à bord d’un véhicule utilitaire lorsqu’elles auraient été interceptées par des hommes armés non identifiés. Un interprète malien, Houssam Diko, aurait également été enlevé au même moment. Si aucune revendication n’a été formulée, des sources de sécurité évoquent la possible implication du Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (JNIM), actif dans le centre du Mali et le long des grands axes commerciaux.
L’incident intervient dans un contexte de recrudescence des enlèvements visant des étrangers et des travailleurs expatriés. En juillet, trois ressortissants indiens avaient été enlevés lors d’une attaque contre l’usine Diamond Cement dans la région de Kayes. Quelques semaines plus tard, deux citoyens chinois avaient été kidnappés à Narena, dans le sud du pays, au cours d’une attaque contre un site minier. En septembre, des informations faisaient état de l’enlèvement de deux Émiratis et d’un Iranien dans les environs de Bamako. Ces incidents illustrent la montée des risques sécuritaires pour les travailleurs étrangers, en particulier sur les axes économiques stratégiques.
Depuis plusieurs mois, la route Bamako–Ségou est l’une des plus exposées du centre du Mali, avec des embuscades récurrentes, des poses d’engins explosifs et des enlèvements ciblés. Les forces armées maliennes ont renforcé leurs opérations de ratissage et de contrôle dans la zone, sans pour autant parvenir à neutraliser complètement les cellules mobiles qui y opèrent.
À ce stade, ni les autorités maliennes ni l’ambassade d’Égypte à Bamako n’ont confirmé officiellement les identités des victimes ni communiqué sur les recherches en cours. Les services de sécurité restent mobilisés pour tenter de localiser les otages et retrouver leurs ravisseurs. Cet enlèvement rappelle l’extrême vulnérabilité des civils et des travailleurs étrangers sur les principaux axes économiques du pays, où les groupes armés cherchent à exercer un contrôle territorial et financier.

Détenu depuis août : Moussa Mara écope de deux ans de prison

L’ancien Premier ministre du Mali, Moussa Mara, a été condamné ce lundi à deux ans d’emprisonnement, dont un an ferme et un an avec sursis, par le Tribunal du Pôle national de lutte contre la cybercriminalité (PNLC).

Le parquet avait poursuivi M. Mara pour atteinte au crédit de l’État et opposition à l’autorité légitime, à la suite de publications effectuées sur le réseau social X (anciennement Twitter). Ces messages, diffusés au cours de l’été 2025, avaient suscité l’ouverture d’une enquête pour propos jugés contraires aux lois encadrant la communication en ligne.
L’audience s’est tenue à Bamako sous la présidence du juge du PNLC. Le tribunal a également condamné M. Mara à verser une amende de 500 000 francs CFA et à payer un franc symbolique à l’État, constitué partie civile.
L’ancien chef du gouvernement, en poste entre 2014 et 2015, avait été incarcéré le 1er août 2025, après son inculpation formelle. Ses avocats, dont Me Mountaga C. Tall, avaient déposé plusieurs demandes de mise en liberté provisoire, toutes rejetées par le juge d’instruction.
Le ministère public avait requis deux ans de prison à l’encontre de l’accusé, conformément aux dispositions du nouveau Code pénal adopté en 2024. La défense a annoncé son intention de faire appel du jugement dans les délais légaux prévus.
Moussa Mara demeure détenu dans l’attente de la procédure d’appel.

LCCP : Un levier de 100 milliards FCFA pour bâtir les champions miniers maliens

AFG Bank Mali a lancé ce lundi son Local Content Champion Program, dotant les sous-traitants locaux du secteur minier d’un outil de financement et d’accompagnement sans précédent. L’initiative, qui porte l’engagement total du groupe Atlantique, ambitionne de créer 2 000 emplois et de faire émerger trente entreprises nationales de classe mondiale.

​L’hôtel Radisson Collection de Bamako a accueilli ce lundi 27 octobre 2025 le lancement officiel du Local Content Champion Program (LCCP), une initiative stratégique d’AFG Bank Mali. L’événement, présidé par le Professeur Amadou Keïta, Ministre des Mines, a réuni les figures importantes de l’écosystème minier et financier du Mali. Autour des dirigeants d’AFG Bank et d’AFG Assurances, les échanges se sont déroulés en présence de personnalités éminentes comme le Président de la Commission mine du CNT, le Ministre de l’Énergie et de l’Eau, un membre du Conseil d’Administration du Groupe Atlantique, le Secrétaire permanent du Contenu local et le Vice-Président du CNPM. Pour ne citer que celles-ci.
​C’est avec une immense fierté que Sayouba Ouédraogo, Directeur Général d’AFG Bank Mali, a ouvert la cérémonie. Il a souligné que le LCCP est né d’une conviction simple mais puissante : « Le développement du Mali passe par ses acteurs locaux et leur capacité à innover et à collaborer ».
Le DG a rappelé que ce programme, annoncé une première fois en février au Mining Indaba, est la traduction concrète de l’engagement de la banque à être proche du terrain, notamment en renforçant son réseau d’agences et en investissant dans le digital. Saluant la présence du Ministre des Mines, M. Ouédraogo y a vu la confirmation de « sa vision et son engagement en faveur d’un secteur minier plus inclusif ».
​L’impact potentiel du LCCP repose sur une enveloppe financière exceptionnelle de 100 milliards de francs CFA, dédiée à stimuler la participation des entreprises maliennes dans la chaîne de valeur minière. L’approche d’AFG Bank Mali va au-delà du simple crédit, proposant un appui structuré et combiné pour les sous-traitants et fournisseurs. Cet accompagnement inclut des financements sur mesure utilisant des mécanismes innovants tels que le leasing, l’affacturage et les solutions de capital-risque, ainsi que des sessions de renforcement de capacités techniques et managériales.
​Le programme se fixe des objectifs ambitieux pour les trois prochaines années. D’ici 2027, AFG Bank Mali s’engage à créer 2 000 emplois directs, à accompagner la structuration de 150 entreprises locales, et surtout, à faire émerger une trentaine de champions nationaux capables d’opérer aux standards mondiaux. Ce dispositif est conçu pour aider les entreprises à surmonter le défi principal identifié à savoir la difficulté d’accéder au financement et à la structuration nécessaire pour répondre aux exigences des opérations minières.
​L’ancrage panafricain au service du développement local
​Poursuivant les allocutions, Sionlé Yéo, Directeur Général d’AFG Holding, le pôle financier du Groupe Atlantique, a souligné la dimension stratégique du LCCP. Il a insisté sur le fait que l’initiative malienne s’inscrit parfaitement dans la vision globale du Groupe visant à  contribuer significativement au développement des économies africaines en soutenant l’émergence de champions. M. Yéo a rappelé que le Groupe Atlantique, présent dans 13 pays et couvrant la banque, l’assurance, l’industrie et l’agriculture, est par nature le partenaire du développement national.
​Le DG du Holding a félicité les équipes maliennes pour leur performance remarquable. Il a notamment souligné que depuis le rachat en 2020, AFG Bank Mali est passée de la 13e à la 8e position des banques du pays. Il a rendu hommage au travail de M. Sayouba Ouédraogo et de Madame Adam Cissé, Directrice Générale d’AFG Assurances Mali, saluant la convergence et les synergies entre les deux entités. Pour M. Yéo, le contenu local est une « source prodigieuse d’opportunités économiques » que le Groupe est déterminé à répliquer dans d’autres pays miniers comme la Côte d’Ivoire ou la Guinée.
​Un allié stratégique de la puissance publique
​Clôturant les prises de parole, le Ministre des Mines, le Professeur Amadou Keïta, a chaleureusement salué cette initiative. Il a rappelé que si le Mali a fait le « fort effort politique » d’adopter une loi sur le contenu local, l’efficacité de cette loi repose sur des outils concrets. Le LCCP apporte précisément cet élément de solution en répondant à la nécessité de financement et d’accompagnement des prestataires et fournisseurs locaux.
​Le Ministre a insisté sur le fait que ces « standards mondiaux » ne sont pas des contraintes, mais une « opportunité pour nos acteurs de s’aguerrir » avec l’objectif de conquérir les marchés régionaux et internationaux. Il a d’ailleurs cité plusieurs entreprises maliennes qui, par leur sérieux, « nous rendent fiers » en s’exportant déjà. Le Professeur Keïta a conclu en affirmant que le LCCP fait la preuve que le secteur privé est un allié stratégique de l’État dans la mise en œuvre des politiques publiques. Il a assuré les acteurs de l’engagement total des autorités : « L’État, je peux vous l’assurer, se tiendra aux côtés d’AFG Bank pour accompagner cette dynamique », dont l’objectif ultime est de créer plus d’emplois et d’opportunités pour la nation.

Coupes CAF : le football malien signe un doublé historique

Le Stade Malien de Bamako et le Djoliba AC se sont tous deux qualifiés pour la phase de groupes des compétitions africaines interclubs. Une performance pleine qui offre au pays un taux de réussite de 100 % à ce stade de la saison.

À l’issue des deux tours préliminaires des compétitions africaines interclubs 2025-2026, les clubs maliens ont réalisé un exploit retentissant. Le Stade Malien de Bamako, engagé en Ligue des champions de la CAF, a validé sa qualification historique pour la phase de groupes après sa victoire 2-0 face au FC Nouadhibou de Mauritanie, ce dimanche 26 octobre au Stade du 26-Mars. Ce succès, obtenu après un nul encourageant (1-1) à l’aller, permet aux « Blancs de Bamako » d’accéder pour la première fois de leur histoire à ce niveau de la compétition. Il s’agit également de la seconde présence d’un club malien à ce stade, après le Djoliba AC la saison passée.

En Coupe de la Confédération, le Djoliba AC a lui aussi confirmé sa solidité. Après avoir gagné 1-0 à Ouagadougou à l’aller, les « Rouges » ont récidivé à domicile en s’imposant 2-1 face à l’USAFA du Burkina Faso. Ce deuxième succès consécutif leur ouvre les portes de la phase de groupes et confirme leur statut parmi les équipes les plus régulières du continent.

Avec ces deux qualifications, le Mali réalise un parcours sans faute et conserve son indice continental en progression. Cette performance collective reflète la montée en puissance du football national, portée par une nouvelle génération ambitieuse et mieux préparée pour rivaliser sur la scène africaine. Les supporters espèrent désormais voir leurs clubs briller dans les phases de groupes et prolonger cet élan victorieux.

 

Éveil Mali lance les « Ateliers Citoyens II » : La jeunesse et les femmes, vecteurs de bonne gouvernance

Le lancement officiel de la Phase II du projet « Les Ateliers Citoyens » d’Éveil Mali, sous la direction de son Coordinateur national Hamma Cissé, s’est déroulé à Bamako le 25 octobre 2025. Ce projet, financé par le Fonds d’Appui aux Moteurs du Changement (FAMOC) du royaume du Danemark, vise à renforcer la participation citoyenne et le leadership des jeunes et des femmes maliennes dans la gestion des affaires publiques.

​L’événement a rassemblé de nombreuses personnalités, soulignant l’importance nationale du projet. On notait la présence de membres éminents du Conseil National de Transition (CNT), dont Amadou Diallo, ainsi que des guides religieux influents tels que Iba Haïdara, Bandjougou Doumbia, et Mohamed Cheick Oumar Coulibaly. Le représentant de la mairie de la Commune V de Bamako, le représentant du FAMOC, le Président du Conseil National de la Jeunesse du Mali (CNJ-Mali), et le représentant des étudiants maliens au Burkina Faso ont également pris part à la cérémonie.
​Le représentant de la mairie de la Commune V de Bamako a félicité Éveil Mali pour son engagement citoyen et a exhorté les autres organisations à suivre cet exemple pour un Mali plus prospère. Il a également adressé ses remerciements à M. Kaboré, représentant du FAMOC, pour son « engagement constant aux côtés de la jeunesse malienne ».
​« Ateliers Citoyens II » : Une feuille de route pour l’autonomisation
​Éveil Mali est une organisation citoyenne et patriotique, apolitique et inclusive, dont la mission centrale est de contribuer à la promotion de la bonne gouvernance et de la participation citoyenne des jeunes et des femmes.
​Le Coordinateur national, Hamma Cissé, a présenté la Phase II, un projet de douze (12) mois, dont les objectifs spécifiques visent à renforcer le leadership des jeunes et des femmes, contribuer à l’appropriation par les populations des grandes réformes de la transition et de la Charte pour la paix et la réconciliation nationale, et consolider leur connaissance et leur respect des institutions et symboles de l’État.
​Le projet ciblera plus de 102 000 bénéficiaires finaux dans plusieurs zones, notamment l’ensemble du district de Bamako, et les communes de Niono (région de Ségou) et de Goundam (région de Tombouctou) pour les activités physiques.
​Le FAMOC : Un soutien structuré aux moteurs du changement
​M. Kaboré du FAMOC a rappelé que le Fonds, financé par le royaume du Danemark, a pour vocation de favoriser l’émergence d’une société malienne plus résiliente et respectueuse des droits humains par des actions focalisées sur la citoyenneté active, la lutte contre l’extrémisme violent et les droits humains.
​Le processus de sélection a été rigoureux, avec 89 projets retenus sur 124 candidatures soumises, dont celui d’Éveil Mali. Le FAMOC propose différents niveaux de subvention pour ses bénéficiaires : les Organisations à grande capacité peuvent obtenir un financement allant de 25 à 125 millions de FCFA pour des projets d’une durée de deux ans ; les Projets d’une année peuvent bénéficier d’un financement allant jusqu’à 80 millions de FCFA ; et les individus et structures informelles peuvent obtenir une subvention allant jusqu’à 20 millions de FCFA pour un projet d’un an.
​Pour finir, Hamma Cissé a lancé un appel vibrant à la responsabilité collective, insistant sur le fait que « Chacun compte » et que « il n’y a pas de petit effort » dans l’édification de la nation. Il a également réitéré la confiance et le soutien total d’Éveil Mali aux Forces Armées Maliennes (FAMA) pour leur rôle crucial.

AFG Bank Mali prépare le lancement du LCCP pour soutenir les entreprises locales

AFG Bank Mali procédera ce lundi 27 octobre 2025, à partir de 9h00, à l’hôtel Radisson Collection, au lancement officiel du Local Content Champion Program (LCCP), sous la présidence du Ministre des Mines, le Professeur Keïta.

Cette initiative ambitieuse vise à renforcer la compétitivité des entreprises maliennes du secteur minier et à faire émerger de véritables champions nationaux grâce à un accompagnement financier structuré.

Plusieurs activités marqueront cette journée, notamment un panel sur “Financement et compétitivité locale : bâtir des champions du contenu local” et des rencontres B2B entre acteurs du secteur, institutions financières et entreprises locales.

À travers ce programme, AFG Bank Mali entend confirmer son rôle de catalyseur du développement économique, en mettant le financement au service du conteu local.

Niger : enlèvement d’un pilote humanitaire à Niamey et libération de l’ancien préfet d’un département du nord-est

Dans la nuit du 21 au 22 octobre 2025, un ressortissant américain, pilote de l’ONG Serving In Mission (SIM) présent au Niger depuis 2010, a été enlevé à Niamey. Le lendemain, le 22 octobre, le commandant Amadou Torda, ancien préfet du département de Bilma, ainsi que quatre de ses compagnons (deux gendarmes, deux soldats de la Garde nationale) ont été libérés après plus d’un an de captivité.

Le pilote américain, âgé de 48 ans selon plusieurs sources, a été retiré de son domicile situé dans le quartier Château 1, un secteur sécurisé près de l’hôtel Bravia et du palais présidentiel. Trois hommes armés non identifiés l’ont emmené. Le Département d’État des États-Unis a indiqué que l’ambassade américaine à Niamey travaille avec les autorités nigériennes pour obtenir sa libération. Aucune revendication n’a encore été faite, et les forces de sécurité nigériennes ont engagé des recherches dès le mercredi 22 octobre. Il s’agit, selon les médias, du premier enlèvement d’un ressortissant étranger à Niamey depuis 2011.
Le pilote enlevé exerçait des missions de transport aérien d’urgence humanitaire pour SIM International, organisation active dans plusieurs pays du Sahel. SIM confirme sa présence au Niger, en soulignant les défis sécuritaires grandissants dans la région.

La seconde situation concerne la libération du commandant Amadou Torda et de ses quatre compagnons qui avaient été enlevés le 21 juin 2024 alors qu’ils revenaient vers Bilma, dans la région d’Agadez. L’enlèvement avait été attribué à un groupe armé non identifié. Des documents de l’époque mentionnaient la mort d’un membre de la délégation et la mise en œuvre d’une vaste opération de recherche par les forces de défense et de sécurité nigériennes. Leur libération, intervenue le 22 octobre 2025 après plus de 16 mois de détention, marque un soulagement dans la communauté locale mais s’inscrit dans un contexte d’insécurité récurrente dans cette zone du nord-est du pays.

Ces deux affaires reflètent la persistance des risques sécuritaires au Niger où les enlèvements – tant de ressortissants étrangers que de représentants de l’État – interviennent dans un contexte de dégradation de la sécurité, en particulier dans les régions du Sahel et du nord-est. L’enlèvement à Niamey d’un humanitaire opérant dans un quartier hautement sécurisé illustre notamment l’extension des menaces urbaines. De son côté, la libération des otages de Bilma souligne la lenteur du processus de réponse, mais aussi la capacité de l’État à conduire des opérations de recherche et de négociation.

L’ONG humanitaire concernée, active depuis des années au Niger, signale que le contexte opérationnel s’est durement complexifié ces dernières années, avec une multiplication d’attaques et d’enlèvements dans les zones rurales et frontalières. Les otages libérés de Bilma étaient détenus dans des conditions qui restaient obscures jusqu’à récemment, et leur retour pose la question de la prise en charge et de la réinsertion de personnels de sécurité confrontés à de tels conflits.

Enfin, la multiplication de ces opérations d’enlèvement met en lumière les défis de l’État nigérien en matière de sécurisation de ses frontières, de protection des humanitaires et de maintien de l’ordre dans des zones de faible densité administrative. Le retour à la normale pour les familles et les organisations concernées va nécessiter une gestion psychologique, matérielle et institutionnelle.

Étienne Fakaba Sissoko : “L’Eco ne sera pas une rupture brutale, mais une recomposition institutionnelle sous contrainte politique

Alors que la mise en circulation de la monnaie unique “Eco” est annoncée pour 2027, les incertitudes économiques et politiques fragilisent toujours le projet. L’économiste Étienne Fakaba Sissoko estime que cette transition ne sera pas une rupture brutale, mais une recomposition institutionnelle sous fortes contraintes régionales.

Où en est selon vous le projet de passage du franc CFA à la monnaie unique “Eco” annoncé pour 2027 ?

Le calendrier de 2027 reste celui inscrit dans la feuille de route officielle de la CEDEAO. Mais il faut reconnaître que cette échéance relève davantage de l’ambition politique que de la réalité économique.
La plupart des pays ne remplissent pas encore durablement les critères de convergence fixés — déficit budgétaire inférieur à 3 % du PIB, inflation maîtrisée, réserves suffisantes pour trois mois d’importations.
La succession de chocs — pandémie, guerre en Ukraine, crise énergétique, insécurité régionale — a repoussé les ajustements nécessaires.

De plus, la recomposition géopolitique actuelle, marquée par la sortie du Mali, du Burkina Faso et du Niger de la CEDEAO, complexifie l’architecture du projet monétaire commun. Ces pays demeurent membres de l’UEMOA, mais leur arrimage politique à la CEDEAO est désormais suspendu, ce qui fragilise la gouvernance collective.

En réalité, 2027 sera sans doute une étape symbolique, marquant le lancement d’un noyau d’États “prêts” sur le plan macroéconomique et institutionnel, plutôt qu’un basculement simultané de l’ensemble de la région.

Quelles différences majeures distinguent le futur Eco du FCFA actuel, sur le plan technique et institutionnel ?

Il faut distinguer deux trajectoires : la réforme déjà engagée au sein de l’UEMOA et le projet d’Eco plus large porté par la CEDEAO.

La réforme UEMOA, amorcée en 2019, a été importante sur le plan institutionnel :
• suppression du compte d’opérations logé au Trésor français ;
• fin de l’obligation de dépôt de 50 % des réserves de change en France ;
• retrait des représentants français des instances de la BCEAO et de la Commission bancaire.

Cependant, cette réforme n’a pas modifié le cœur du régime monétaire : la parité fixe avec l’euro et la garantie de convertibilité par la France ont été maintenues, désormais sous la forme d’une ligne de crédit.

Le futur Eco de la CEDEAO, en revanche, suppose un changement d’échelle et de philosophie. Il devrait inclure des pays aux structures économiques très différentes — Nigeria, Ghana, Sierra Leone, Cap-Vert — ce qui nécessitera de repenser entièrement la gouvernance, les règles de convergence, et le régime de change.
C’est sur ce terrain institutionnel que se jouera la véritable rupture avec le modèle actuel.

L’arrimage à l’euro reste-t-il une garantie de stabilité ou un frein à la souveraineté monétaire ?

C’est à la fois une source de crédibilité et une contrainte systémique.
L’arrimage à l’euro a permis de préserver la stabilité des prix, de limiter les dérapages monétaires et de maintenir la confiance des investisseurs. En 2024, la BCEAO affichait l’une des inflations les plus faibles du continent et un niveau de réserves satisfaisant : c’est la face vertueuse du système.

Mais cette stabilité a un coût : la perte d’autonomie de décision. La BCEAO ne peut pas ajuster son taux de change pour soutenir ses exportations, ni utiliser pleinement la politique monétaire pour amortir les chocs.
Donc, l’arrimage protège contre l’instabilité, mais il verrouille la capacité d’adaptation.

L’enjeu aujourd’hui n’est pas de rompre brutalement avec le peg, mais de le redéfinir dans un cadre africain maîtrisé : un système plus flexible, appuyé sur un fonds de stabilisation régional, des marchés financiers intégrés et une coordination budgétaire renforcée.

Quelle place occupe aujourd’hui la France dans la gouvernance du système monétaire ouest-africain ?

Formellement, la France n’exerce plus de pouvoir décisionnel dans la gouvernance monétaire de l’UEMOA. Elle ne siège plus dans les conseils de la BCEAO ni dans les comités de politique monétaire.
Son rôle se concentre désormais sur la garantie de convertibilité, assurée par une ligne de crédit, et sur la parité fixe avec l’euro.

Autrement dit, l’influence directe a disparu, mais l’influence structurelle demeure.
Tant que la stabilité de la zone dépendra de l’ancrage à l’euro et du soutien de Paris en cas de crise de liquidité, la relation restera asymétrique.
C’est ce que j’appelle une indépendance encadrée : l’Afrique de l’Ouest a gagné en autonomie institutionnelle, mais pas encore en souveraineté stratégique.

Quels défis spécifiques le Mali devra-t-il affronter dans cette transition, notamment après la création de l’Alliance des États du Sahel (AES) ?

Le Mali se trouve aujourd’hui au carrefour de trois dynamiques contradictoires : son appartenance à l’UEMOA, sa rupture politique avec la CEDEAO et son adhésion à l’Alliance des États du Sahel.
Cette triple appartenance pose un défi de cohérence monétaire.

Techniquement, Bamako reste adossé à la BCEAO, donc au système du franc CFA, mais la sortie de la CEDEAO complique son intégration à la future monnaie Eco.
Politiquement, l’AES évoque la création d’une architecture économique autonome, voire de mécanismes de paiement intra-Sahel, mais sans cadre technique ou institutionnel concret à ce jour.

Le Mali devra donc préserver la stabilité de sa monnaie actuelle tout en préparant sa position stratégique dans les recompositions à venir. Cela suppose de renforcer la discipline budgétaire, la transparence financière et la résilience économique interne, faute de quoi toute ambition de souveraineté monétaire resterait illusoire.

Selon vous, le débat sur le FCFA est-il avant tout économique, politique ou symbolique ?

C’est un débat éminemment total : à la fois économique, politique et symbolique.

Sur le plan économique, il interroge la performance réelle du système : la zone CFA a assuré la stabilité nominale, mais pas la transformation structurelle des économies.
Sur le plan politique, il pose la question du pouvoir : qui décide de la politique monétaire africaine, selon quelles règles et au profit de qui ?
Et sur le plan symbolique, il touche à la mémoire postcoloniale, à la quête de dignité et à la légitimité des institutions héritées.

En vérité, le débat sur le franc CFA est le miroir des contradictions africaines : vouloir la souveraineté sans en assumer les disciplines internes.
Changer de monnaie n’aura de sens que si nous changeons notre rapport à la production, à la dépense publique et à la gouvernance.
Autrement, l’Eco ne serait qu’un rebranding monétaire, sans transformation économique réelle.

Finalement, le passage du franc CFA à l’Eco ne doit pas être vu comme un acte de rupture, mais comme un processus d’ajustement institutionnel vers une souveraineté monétaire effective.
Le véritable enjeu n’est pas de savoir quand l’Eco sera lancé, mais dans quelles conditions il sera viable.
Car sans discipline budgétaire, sans convergence macroéconomique et sans vision partagée du développement, aucune monnaie ne peut être souveraine — fût-elle rebaptisée Eco.

Lutte contre l’extrémisme violent : l’ONG Think Peace lance le projet « PACTE »

L’ONG Think Peace a procédé, le 22 octobre 2025, à l’École de maintien de la paix Alioune Blondin Beye de Bamako, au lancement officiel du Projet d’Action Communautaire pour la Transformation et la lutte contre l’Extrémisme violent (PACTE). Financé par le Fonds canadien d’initiatives locales (FCIL), ce projet sera mise en œuvre pendant 7 mois à Bamako, Ségou et Ménaka.

La cérémonie de lancement présidée par le secrétaire permanent de la Politique nationale de prévention et de lutte contre l’extrémisme violent et le terrorisme, Djoubeirou Oumarou Diallo,  s’est déroulée en présence de nombreuses organisations de la société civile.

Dans son intervention, Abdou Kola Bocoum, coordonnateur national de Think Peace, a rappelé que le projet PACTE s’inscrit dans un contexte marqué par une crise malienne devenue plus complexe, affaiblissant la cohésion sociale et la confiance entre les communautés.

« Le projet PACTE permettra d’intégrer au sein des groupements de femmes et de jeunes, des acteurs et actrices religieux, des mécanismes d’alerte précoce et des actions communautaires comme la sensibilisation, la médiation, le partage d’informations fiables et d’expériences pour prévenir l’extrémisme violent », a-t-il expliqué.

Il a souligné que cette initiative entend transformer les communautés en véritables acteurs de changement, capables de résister aux discours de haine et de promouvoir des alternatives fondées sur la solidarité, l’inclusion et la citoyenneté.

La chargée d’affaires de l’ambassade du Canada, Lee-Anne Hermann, a, quant à elle,  salué l’engagement de Think Peace et la portée du projet. Elle a invité les bénéficiaires à s’approprier cette initiative, avant de réaffirmer le soutien du Canada à la population malienne. « Le Canada continue son accompagnement à la population malienne, en particulier aux femmes et aux jeunes, qui sont les premières victimes de la crise », a-t-elle indiqué.

Pour sa part, le secrétaire permanent de la Politique nationale de prévention et de lutte contre l’extrémisme violent et le terrorisme, Djoubeirou Oumarou Diallo, a souligné la complémentarité du projet PACTE avec la stratégie nationale. Selon lui, l’approche adoptée par Think Peace illustre parfaitement la vision du gouvernement, qui privilégie des actions de proximité, inclusives et participatives.

« En misant sur la mobilisation des acteurs locaux et le renforcement de la résilience communautaire, le projet PACTE contribuera à la mise en œuvre effective de notre stratégie nationale », a-t-il affirmé.

Le projet PACTE repose sur la mobilisation des acteurs locaux autour de mécanismes endogènes de prévention des conflits et de renforcement de la cohésion sociale. À travers des formations, des dialogues communautaires et des actions de proximité, il vise à renforcer la résilience des populations de Bamako, Ségou et Ménaka face aux idéologies extrémistes et à favoriser la participation citoyenne dans la consolidation de la paix.

Son objectif global est d’encourager un dialogue intergénérationnel et intercommunautaire, de promouvoir une gouvernance inclusive et d’installer une culture de paix durable.

Mohamed Kenouvi