Jeux de l’AES : Clap de fin sur la première édition

La première édition des Jeux de l’Alliance des États du Sahel (AES) s’est achevée le 28 juin 2025 au Palais des Sports Salamatou Maïga de Bamako, au terme d’une semaine de compétition placée sous le signe de la fraternité, de la résilience et de l’unité sahélienne.

La cérémonie de clôture, présidée par le ministre de la Jeunesse et des Sports, Abdoul Kassim Ibrahim Fomba, a rassemblé autorités, athlètes, encadreurs et un public nombreux venu saluer la réussite de cet événement inédit. Elle a été marquée par des prestations artistiques qui ont mis en lumière des talents venus des trois pays.

Durant une semaine, les athlètes maliens, burkinabè et nigériens se sont affrontés dans différentes disciplines, telles que le judo, le karaté, la lutte traditionnelle, le taekwondo, le kung-fu, le bras de fer, l’athlétisme, le tir à l’arc et le football, affichant un esprit de fraternité et de solidarité entre les trois pays membres.

« Pendant ces quelques jours, bien qu’il s’agisse d’une compétition, nous avons vu des regards complices, des mains tendues, des hymnes chantés à l’unisson. Nous avons vu des peuples se reconnaître au-delà des frontières, des accents ou des drapeaux burkinabé, nigérien, malien », a salué le ministre Fomba devant les trois ambassadeurs des JAES : Cheick Ahmed Alhassan Sanou dit Iron Biby du Burkina Faso, qui porte le titre de l’homme le plus fort du monde, Daba Modibo Keïta du Mali, double champion du monde de taekwondo, et Abdoulrazak Issoufou Alfaga du Niger, champion du monde de taekwondo en 2017 dans la catégorie des 87 kg.

« Nous avons couru, lutté, combattu, mais jamais seuls. Nous avons formé un seul bloc, une seule équipe, une seule famille : la grande famille du Sahel, unie et solidaire », a-t-il poursuivi, soulignant que l’AES, tracée par les plus hautes autorités des trois pays, n’était pas seulement une entité politique, mais « une communauté de cœur, une union de valeurs, un destin commun ».

Un bilan sportif dominé par le Mali

Au plan sportif, le Mali termine premier avec 59 médailles, dont 27 en or, 21 en argent et 11 en bronze, suivi du Niger avec 48 médailles (20 or, 10 argent, 18 bronze). Le Burkina Faso se classe troisième malgré un total supérieur de 55 médailles, mais seulement 14 en or, 28 en argent et 13 en bronze.

« Tous les trois pays ont remporté des médailles d’or. Pour moi, il n’y a donc pas de perdant, c’est l’AES qui a gagné. L’objectif était de réunir les fils et les filles d’un même espace pour rivaliser d’audace et de talent », a indiqué Roland Somda, ministre des Sports, de la Jeunesse et de l’Emploi du Burkina Faso.

Un projet d’intégration au-delà du sport

Ces premiers Jeux de l’AES se referment sur un espoir : celui d’un Sahel debout, résilient et uni autour de sa jeunesse sportive, prête à porter haut le flambeau de l’alliance.

Au-delà des performances, ces jeux restent un symbole fort d’intégration et de résilience pour l’AES. Ils ont permis de renforcer les liens fraternels entre les trois pays et d’affirmer leur volonté commune d’avancer unis. La prochaine édition se tiendra en 2026 au Burkina Faso.

Mohamed Kenouvi

Développement durable : lancement du programme « Chinfinw Ka Baara Sira » au Mali

Le gouvernement, en partenariat avec l’Union européenne et LuxDev, a récemment lancé « Chinfinw Ka Baara Sira », un programme de formation professionnelle destiné aux jeunes de 15 à 35 ans, financé à hauteur de 17 millions d’euros dans le cadre de la Vision 2063 « Mali Kura ».

La ministre de l’Entrepreneuriat national, de l’Emploi et de la Formation professionnelle, Oumou Sall Seck, a présidé la cérémonie de lancement du projet « Chinfinw Ka Baara Sira » (« Le chemin des jeunes vers l’emploi »), dans le cadre de la Vision 2063 du Mali Kura. Ce programme vise à former et insérer professionnellement 5 500 jeunes âgés de 15 à 35 ans. Il s’inscrit dans la stratégie nationale de renforcement du capital humain pour un développement durable du pays.

Le projet, financé par l’Union européenne à hauteur de 17 millions d’euros, soit plus de 11 milliards de francs CFA, propose une double orientation : dix pour cent des bénéficiaires seront formés pour occuper un emploi salarié, tandis que quatre-vingt-dix pour cent seront accompagnés dans la création d’activités indépendantes . Les profils ciblés incluent des jeunes non scolarisés, déscolarisés, diplômés, techniciens, personnes en situation de handicap et migrants de retour.

Lors de son intervention, Oumou Sall Seck a souligné que ce dispositif répond à la demande du marché du travail tout en tenant compte des réalités locales. Le programme prévoit dès le démarrage la mise en place d’un comité de pilotage chargé de lancer un plan opérationnel doté d’un budget consacré à l’élaboration de modules adaptés, la sélection et la formation initiale de jeunes, ainsi qu’à l’étude des besoins du marché.

Aux côtés de LuxDev, acteur de la coopération luxembourgeoise, les premières activités de formation et d’accompagnement se sont tenues, dans une dynamique de renforcement des capacités et de soutien à l’emploi .

Le lancement de « Chinfinw Ka Baara Sira » marque une étape majeure dans la mise en œuvre de la Vision 2063, qui vise à transformer le capital humain en moteur du développement durable du Mali.

 

Lutte antiterroriste au Sahel : Abou Dahdah tué à Chamane, Oubel se rend à Tessit

Deux figures de l’État islamique au Sahel (EIS, ex-EIGS) ont été mises hors d’état de nuire en moins de 24 heures dans le nord-est du Mali, marquant un affaiblissement stratégique du groupe dans la région de Ménaka et du Liptako.

Le samedi 28 juin 2025, une opération des Forces armées maliennes (FAMa) a visé un groupe armé affilié à l’EIS dans la localité de Chamane, à 38 km au nord de Ménaka. Selon plusieurs sources sécuritaires et des canaux spécialisés dans le suivi du terrorisme au Sahel, l’opération a abouti à la neutralisation de six combattants, dont Abou Dahdah, identifié comme un cadre étranger du groupe. Cet individu, connu pour son rôle idéologique et technique – en particulier dans la fabrication d’engins explosifs improvisés (IED) – serait impliqué dans de nombreuses attaques transfrontalières au Mali et au Niger.

Le lendemain, Oubel, un autre cadre de l’EIS opérant dans le cercle d’Ansongo, s’est rendu volontairement aux autorités maliennes à Tessit, dans la région de Gao, accompagné de dix de ses éléments armés. Bien que cette reddition n’ait pas fait l’objet d’un communiqué officiel au moment de la rédaction, plusieurs sources concordantes au sein de la sécurité malienne l’ont confirmée, et elle a été largement relayée sur des plateformes de veille sécuritaire en arabe et en anglais.

Ces deux événements se sont produits dans une région où l’EIS a longtemps maintenu une présence active, notamment dans le couloir Ménaka–Ansongo, théâtre de multiples affrontements avec le Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (JNIM), affilié à al-Qaïda. Ces dernières années, le JNIM a nettement pris l’ascendant dans le Liptako malien, en partie grâce à une stratégie d’ancrage local, reléguant l’EIS à des positions défensives.

Toutefois, l’EIS, désormais désigné sous l’appellation « État islamique au Sahel » (EIS), reste loin d’être éradiqué. Il conserve une forte capacité de nuisance, en particulier au Niger, comme l’a démontré l’attaque meurtrière de Banibangou le 19 juin 2025, où 34 soldats nigériens ont été tués. Au Burkina Faso, le groupe poursuit également ses incursions, notamment dans les provinces frontalières de l’est.

Plus inquiétant encore, plusieurs analystes évoquent la possibilité d’une restructuration transfrontalière : une jonction stratégique avec d’autres factions de l’État islamique dans la région, comme ISWAP (province d’Afrique de l’Ouest de l’État islamique, active au Nigeria et autour du lac Tchad), pourrait offrir à l’EIS un second souffle sur le territoire malien. Cette hypothèse est d’autant plus plausible que les pressions militaires subies par ces groupes dans leurs bastions initiaux les poussent à envisager des reconfigurations régionales.

La neutralisation d’Abou Dahdah et la reddition d’Oubel sont, pour l’instant, des succès tactiques indéniables pour les FAMa. Mais leur portée stratégique dépendra de la capacité des autorités à stabiliser durablement ces zones, à empêcher les reconstitutions de cellules, et à restaurer les services de base pour les populations, durement éprouvées par des années de violences, de déplacements et de ruptures d’accès humanitaire.

Dialogue humanitaire au Mali : le FONGIM initie le Café des ONG  

Dans le cadre de la campagne ‐ Le Mali en action, la contribution des ONG internationales – le Forum des ONG internationales au Mali (FONGIM), qui regroupe 110 organisations, a organisé la première édition du Café des ONG internationales ce 24 juin 2025. Ce cadre d’échange a permis aux acteurs d’aborder les défis et les perspectives des ONG dans un contexte difficile, où malgré les efforts, les besoins restent supérieurs aux moyens.

Le Mali traverse depuis plus d’une décennie une crise multidimensionnelle, dont les conséquences ont contribué à une dégradation de la situation socio-économique des communautés dans plusieurs localités du pays. Déplacement de populations, fermeture d’écoles ou de centres de santé, inaccessibilité à l’eau ou absence d’activité économique : ces maux ont aggravé la vulnérabilité de certaines couches sociales.
Pour répondre à leurs besoins et appuyer l’État dans ses missions, plusieurs organisations internationales, dont celles regroupées au sein du FONGIM, ont apporté leur assistance dans divers secteurs. C’est ainsi qu’en 2024, les organisations membres du FONGIM ont appuyé 880 écoles en kits et équipements scolaires, scolarisé 122 851 enfants dans le système classique, inscrit 10 925 enfants dans les Centres de Stratégie de Scolarisation Accélérée – Passerelle (SSAP) et construit ou réhabilité 295 salles de classe.
Dans le domaine de la santé, plus de 556 centres ont reçu des appuis en médicaments, vaccins ou autres équipements.
Sur le plan de la sécurité alimentaire, 868 789 personnes ont bénéficié d’une assistance alimentaire d’urgence, et 67 271 personnes ont été soutenues dans des activités génératrices de revenus. En matière de lutte contre les violences basées sur le genre (VBG) et dans le cadre de la cohésion sociale, les ONG ont également apporté leur soutien à de nombreuses personnes, ainsi que dans la création d’emplois.
Mais malgré ces réalisations, les défis sont immenses, et les attentes envers les ONG restent grandes.
Défis persistants
Confrontées à la persistance de la crise, et donc à la croissance des besoins, ces organisations doivent faire face à de multiples défis, dont des préjugés qui ont la vie dure. Tantôt perçues comme des sauveurs, elles sont souvent vues comme des « espions » ou des acteurs qui contribuent à la dépravation des mœurs. Les ONG sont surtout « confrontées à trois crises majeures : politique, sécuritaire, environnementale », selon un responsable du FONGIM, ce qui fait que l’écart reste important entre les moyens disponibles et les besoins à satisfaire.
Elles en ont conscience : désormais, les ONG « ont la lourde responsabilité de transformer les perceptions négatives en perceptions positives », en rappelant qu’elles interviennent dans un cadre légal et qu’elles n’ont pas vocation à remplacer l’État, mais à l’appuyer.

PREDIRE : Des alumni du NIMD partagent leurs expériences avec des étudiants

Une rencontre entre jeunes chercheurs ayant participé aux études du Programme de recherche et de dialogue pour la refondation (PREDIRE) et des étudiants s’est tenue le 24 juin 2025 à la Faculté des Sciences Administratives et Politiques (FSAP) de Bamako. Organisée par l’Institut Néerlandais pour la Démocratie Multipartite (NIMD), cette séance a permis d’échanger sur leurs expériences de terrain et de stimuler la réflexion autour de l’engagement citoyen dans la démocratie et la participation politique au Mali.

Plus d’une cinquantaine d’étudiants, principalement issus des cycles de Licence 3 et de Master de la FSAP, de la Faculté de Droit Public (FDPU) et de l’Institut Supérieur Privé de Recherche et d’Intelligence Culturelle (ISPRIC), ont participé à cette rencontre, en présence du Dr. Cheick Amala Touré, Doyen de la FSAP et de représentants du NIMD.
La première partie de la matinée a été marquée par la présentation des carnets de recherche de quatre jeunes alumni du NIMD, ayant participé à la réalisation des études thématiques du PREDIRE.
Ces derniers ont partagé avec les étudiants leur expérience du terrain, les méthodes employées pour la collecte de données et les difficultés rencontrées dans la conduite des études sur la gouvernance, la participation citoyenne ou encore l’accès aux services publics.
Pour beaucoup d’étudiants, ce moment a permis de mieux comprendre les réalités de la recherche en contexte malien. « On parle souvent de recherche en théorie, mais entendre des jeunes comme nous qui l’ont pratiquée sur le terrain est très inspirant », a confié un étudiant de la FSAP.
Le point culminant de la rencontre a été la présentation de la note d’analyse élaborée par les alumni sur une étude produite par le cabinet de recherche Point Sud, intitulée : « Démocratie et participation politique : quels leviers pour renforcer l’engagement citoyen ? »
Cette note d’analyse, titrée « Mali : vers un renouveau de l’engagement citoyen », porte sur trois principaux points à savoir l’analyse des espaces de socialisation, notamment les « grins » et les tontines, une réflexion approfondie sur le rôle du numérique dans l’engagement citoyen et la perception de la démocratie par les citoyens.
Son exposé a suscité de nombreuses questions, recommandations et contributions, attestant l’intérêt de la jeunesse estudiantine sur la question. Les échanges avec les étudiants ont été particulièrement nourris, notamment autour du renforcement de la démocratie « Made in Mali », des élections et du rôle de l’éducation civique dans la consolidation démocratique.
« Aujourd’hui, il y a plusieurs perceptions sur la démocratie au Mali. Tant qu’on ne fera pas un dialogue ou un débat approfondi sur le modèle démocratique que nous voulons, il sera très difficile d’identifier les failles pour pouvoir le réinventer et que la démocratie et sa pratique soient à la hauteur de nos souhaits », a souligné Konimba Ballo, alumni NIMD et co-rédacteur de la note d’analyse.
Organisation non gouvernementale qui a pour objectif de promouvoir une politique paisible, juste, inclusive et représentative partout dans le monde, le NIMD mène des activités au Mali depuis 2002 et a ouvert une représentation à Bamako en 2018.
Le PREDIRE vise à contribuer à la refondation de la gouvernance démocratique au Mali. Il s’appuie sur une double dynamique : valoriser les résultats de la recherche-action sur des thématiques sensibles (inclusivité, gouvernance locale, emploi des jeunes…) et renforcer la culture du dialogue entre les acteurs de la vie publique.
L’initiative présentée à la FSAP s’inscrit dans cette logique. Elle permet non seulement de rendre accessibles les résultats des recherches, mais aussi d’en faire un levier d’apprentissage et de mobilisation pour les jeunes générations.
Mohamed Kenouvi

Baccalauréat 2025 : 199 449 candidats composent dans 517 centres, en baisse notable par rapport à 2024

Ce lundi 23 juin 2025, à 8 h, l’ouverture officielle de la session du baccalauréat, s’est tenue au centre Askia Mohamed, à Bamako.

Le Premier ministre, le Général de Division Abdoulaye Maïga, a procédé à l’ouverture de l’enveloppe contenant le premier sujet, une épreuve de littérature en arabe, en présence des autorités éducatives et administratives. Dans ce centre, 855 candidats sont inscrits.

Au total, 199 449 candidats sont convoqués cette année à travers le pays, dont 95 437 filles et 104 012 garçons. Les épreuves se déroulent dans 517 centres d’examen, soit 11 de plus que l’année précédente. La session intègre également le centre de Mberra, en Mauritanie, mis en place pour les candidats réfugiés. La participation de ces derniers a été rendue possible grâce à un accord de coopération entre les autorités maliennes et mauritaniennes.

Comparée à l’année 2024, qui comptait 230 979 candidats, la session de 2025 enregistre une baisse de 31 530 inscrits, soit une diminution de plus de 13 %. En 2023, 212 862 candidats avaient été enregistrés. Cette tendance à la baisse est notable, bien que le nombre de centres d’examen ait légèrement augmenté. Le ministère de l’Éducation nationale attribue ce recul principalement aux perturbations causées par les inondations survenues en début d’année scolaire, qui ont affecté la régularité des cours dans plusieurs localités.

Le respect du calendrier scolaire et la tenue des examens à la date prévue ont été confirmés par les autorités éducatives, qui évoquent une coordination renforcée avec les partenaires sociaux et les forces de défense et de sécurité. Le ministère a également rappelé les mesures prises pour limiter les cas de fraude, sécuriser les épreuves et garantir une égalité de traitement sur l’ensemble du territoire.

Aucune déclaration chiffrée n’a encore été avancée concernant les prévisions de réussite pour cette session. Les deux dernières éditions ont affiché des taux relativement faibles : 24,35 % en 2023 et 27,23 % en 2024, selon les résultats publiés par la Direction nationale de l’enseignement secondaire. La publication des résultats de la session 2025 est attendue pour le mois d’août, conformément au calendrier académique.

En dépit de la baisse du nombre de candidats, les autorités affirment que les conditions matérielles et organisationnelles ont été réunies pour assurer le bon déroulement des épreuves. Aucune anomalie majeure n’a été signalée au premier jour de composition.

CEDEAO : le sommet acte la rupture avec l’AES et annonce une réforme de fond

Réunis à Abuja ce dimanche 22 juin 2025, les chefs d’État et de gouvernement de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) ont tenu leur 67e sommet ordinaire dans un contexte marqué par les tensions géopolitiques liées au départ acté du Mali, du Burkina Faso et du Niger.

Cette session, présidée par le président nigérian Bola Ahmed Tinubu, a abouti à plusieurs décisions structurantes pour l’avenir de l’organisation régionale.

La Conférence des chefs d’État a désigné Julius Maada Bio, président de la Sierra Leone, pour assurer la présidence tournante de la CEDEAO pour l’exercice 2025–2026. Il succède ainsi à M. Tinubu, dont le mandat a été caractérisé par la tentative, restée sans effet, de dialogue avec les pays membres de l’Alliance des États du Sahel (AES). La nomination de M. Bio intervient à un moment charnière où l’organisation, créée en 1975, cherche à réaffirmer sa légitimité face aux critiques croissantes sur son efficacité politique et sécuritaire.

Concernant le retrait de l’AES, le sommet a entériné une période de transition fixée au 29 juillet 2025, correspondant au terme du délai de six mois prévu par les textes en cas de retrait d’un État membre. La CEDEAO maintient, jusqu’à cette échéance, les discussions avec les autorités de transition de Bamako, Ouagadougou et Niamey. Les présidents du Sénégal, Bassirou Diomaye Faye, et du Togo, Faure Gnassingbé, poursuivent la médiation en vue d’un dialogue politique et sécuritaire structuré, bien qu’aucune avancée significative n’ait été enregistrée à ce jour.

Sur le volet sécuritaire, la Conférence a réaffirmé sa volonté d’intensifier la lutte contre le terrorisme, en mettant en œuvre les recommandations du Plan d’action régional 2020–2024, notamment à travers le déploiement d’une force conjointe. Le mécanisme de coordination avec la Force multinationale mixte, l’Initiative d’Accra et les partenaires multilatéraux comme l’Union africaine et les Nations Unies a également été reconduit.

L’ordre du jour a aussi inclus une évaluation des progrès de l’intégration économique régionale. La Commission a présenté une mise à jour technique sur la future monnaie unique, l’ECO, dont le lancement est désormais envisagé pour 2027, sous réserve de la convergence macroéconomique entre États membres. Des engagements ont été pris pour renforcer l’harmonisation fiscale, le commerce intra-régional et les mécanismes de solidarité face aux crises alimentaires et humanitaires qui affectent durablement certaines zones frontalières.

Enfin, les chefs d’État ont exprimé un consensus sur la nécessité d’une réforme institutionnelle profonde de la CEDEAO. Plusieurs délégations, notamment celle du Bénin, ont insisté sur la révision des protocoles de gouvernance, une plus grande transparence dans les prises de décisions et un recentrage sur les missions de base de l’organisation. Cette orientation pourrait donner lieu à la convocation d’un sommet extraordinaire dans les prochains mois, destiné à réviser certains textes fondamentaux.

Ce sommet, malgré l’absence des représentants des pays sahéliens en rupture, confirme la volonté des États membres de préserver un cadre régional structuré, capable d’anticiper les défis de sécurité, de développement et d’intégration. La CEDEAO devra toutefois démontrer, au-delà des déclarations d’intention, sa capacité à se réinventer dans un environnement géopolitique en recomposition rapide.

Alphadi présente sa « Caravane de la paix » au ministre Diop : art, réconciliation et diplomatie culturelle

Le créateur de mode nigérien Alphadi, pionnier de la haute couture africaine et figure de la diplomatie culturelle sur le continent, a été reçu ce mercredi par le ministre des Affaires étrangères, Abdoulaye Diop, pour présenter son initiative baptisée « Caravane de la paix », prévue au Mali à partir de septembre 2025. Cette tournée artistique, artisanale et éducative entend mettre la culture au service de la cohésion sociale, de la paix et du développement économique.

Fondateur du Festival international de la mode africaine (FIMA) en 1998 à Agadez, Alphadi – de son vrai nom Seidnaly Sidhamed, né à Tombouctou – s’est vu décerner en 2016 le titre d’Artiste pour la paix par l’UNESCO. Son parcours de plus de 40 ans lui a valu une reconnaissance internationale, et il continue d’utiliser la mode comme levier de dialogue interculturel.

Selon ses premières annonces, la caravane malienne visitera les régions de Kayes, Ségou, Mopti, Tombouctou, Gao et le district de Bamako, en collaboration avec les directions régionales de la culture. Chaque étape prévoit :

des défilés mettant en avant les textiles locaux (bogolan, bazin, tissage traditionnel) ;

des ateliers de formation pour jeunes créateurs, stylistes, tanneurs et brodeurs ;

des conférences sur l’art et la paix, et des performances collectives.

L’objectif est double : renouer les communautés autour de l’héritage culturel commun, et créer un cadre de développement économique pour les métiers d’art. D’après une note transmise aux autorités, le projet vise à former 300 jeunes artisans, à générer plus de 2 500 emplois temporaires, et à attirer plus de 20 000 visiteurs locaux. Un budget estimatif de 1,2 milliard de FCFA est en cours de finalisation, incluant les aspects logistiques, sécuritaires, promotionnels et techniques.

Pour le ministre Diop, cette initiative s’inscrit pleinement dans la dynamique de 2025, décrétée Année de la Culture par le Président de la Transition. Il a salué « une vision panafricaine de la paix par la création », et promis l’appui de son département pour mobiliser les partenaires diplomatiques et culturels. Le projet pourrait également s’insérer dans les priorités du Fonds national pour la culture, ainsi que dans les programmes jeunesse du ministère de la Réconciliation nationale.

Le calendrier précis de la Caravane sera présenté fin juillet lors d’une conférence conjointe avec les ministères de la Culture, de la Jeunesse, et de l’Artisanat. Des partenaires comme l’UNESCO, l’Union africaine, le Réseau des villes créatives africaines, ou encore des enseignes du secteur textile sont sollicités pour contribuer au succès de l’événement.

À travers cette caravane, Alphadi souhaite « redonner espoir à une jeunesse talentueuse souvent oubliée », tout en rappelant, selon ses mots, que « la culture est une arme douce mais puissante contre la division et la pauvreté ».

 

Blanchiment de capitaux : le Mali n’est plus sur la liste grise du GAFI

C’est une bonne nouvelle qui est tombée le 13 juin 2025 depuis Strasbourg, en France. À l’issue de sa réunion plénière, le Groupe d’action financière (GAFI) a décidé de retirer officiellement le Mali de sa liste grise. Une décision attendue, mais surtout méritée, après des années de travail discret mené par les autorités maliennes pour renforcer la lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme.

Le Mali avait été placé sur cette liste en 2021. Cela signifiait que notre pays était considéré comme ayant des faiblesses dans la surveillance des flux financiers et dans la prévention des risques liés au financement d’activités criminelles. Cette situation exposait le Mali à des contrôles renforcés dans ses relations bancaires et à une méfiance accrue de la part des investisseurs étrangers.
En réponse, l’État a mis en place un plan d’action structuré en 27 mesures. Sous la coordination du ministère de l’Économie et des Finances, du ministère de la Justice, de la CENTIF et d’autres institutions nationales, plusieurs réformes ont été engagées. Le pays a produit neuf rapports d’évaluation et a reçu une mission d’inspection du GAFI à Bamako entre le 28 et le 30 avril 2025.
Des institutions mobilisées, un travail reconnu
Cette mission sur le terrain a permis aux experts internationaux de constater les avancées concrètes. Il s’agissait notamment du renforcement de la surveillance des transactions financières, de la régulation des professions dites « non financières » (comme les notaires ou les comptables), de la coopération entre autorités, et de l’application effective des sanctions prévues.
La Commission nationale de coordination des activités de lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme (CONAC-LBC/FT) a joué un rôle clé dans cette mobilisation, aux côtés de la CENTIF et de partenaires comme le GIABA, l’Union européenne ou encore la Banque mondiale.
Cette sortie de la liste grise est un soulagement pour le monde des affaires. Elle devrait améliorer les relations entre les banques maliennes et leurs correspondants étrangers, notamment en Europe, où certaines restrictions avaient été mises en place ces dernières années. Les entreprises pourraient désormais bénéficier de conditions de financement plus favorables.
Selon les chiffres de la Banque mondiale, les investissements directs étrangers (IDE) au Mali sont passés de 384 millions de dollars en 2020 à 312 millions en 2024, en grande partie à cause du contexte sécuritaire et de la pression liée à la liste grise. Un retour progressif de la confiance est donc attendu dans les mois à venir.
Un engagement à maintenir
Sortir de la liste ne signifie pas que la vigilance peut retomber. Le GAFI continuera d’observer les efforts du pays pour garantir que les progrès réalisés s’inscrivent dans la durée. Des défis subsistent, notamment dans la formalisation du secteur informel, la régulation des acteurs non bancarisés ou encore la formation continue des institutions concernées.
Mais pour l’heure, la reconnaissance internationale de ce travail est une victoire pour l’État malien. Le ministre de l’Économie et des Finances, M. Alousseni Sanou, s’est félicité d’un « processus collectif ayant impliqué toutes les parties prenantes nationales ».

Mopti : le général Daouda Dembélé prend officiellement les commandes d’une région sous tension

La cérémonie d’installation du nouveau gouverneur de la région de Mopti s’est tenue le jeudi 12 juin 2025 dans un climat solennel mais chargé d’attentes. Le général de brigade Daouda Dembélé, officier supérieur de l’Armée de l’Air, a prêté serment dans une région marquée à la fois par les défis sécuritaires, le ralentissement économique et les espoirs d’un renouveau administratif.

Originaire de San, âgé de 53 ans, le général Dembélé n’est pas un inconnu pour les habitants du centre du Mali. Militaire chevronné, il a occupé plusieurs postes de commandement dans la région avant de prendre la tête de l’état-major de l’Armée de l’Air. Nommé gouverneur le 21 mai 2025 par décret présidentiel, il était jusque-là PDG des Aéroports du Mali. Sa carrière mêle rigueur stratégique, expérience du terrain et connaissance fine des dynamiques régionales. Ce profil singulier suscite aujourd’hui de nombreux espoirs parmi les acteurs locaux.

Dans son allocution après avoir prêté serment, le général Dembélé a évoqué avec gravité les enjeux de sa mission, plaçant la sécurité, la cohésion sociale et la relance économique au cœur de ses priorités. La région de Mopti, longtemps considérée comme un carrefour culturel et agricole, fait face depuis plusieurs années à une situation sécuritaire instable, marquée par les incursions de groupes armés, la fermeture d’écoles, la fragilité des routes et la détresse de certaines populations déplacées.

Le choix d’un militaire pour gouverner cette région n’est pas anodin. À Bamako comme à Sévaré, beaucoup y voient un signal fort. La présence d’un officier supérieur à la tête de l’administration régionale est perçue comme un moyen de restaurer l’autorité de l’État dans les zones les plus exposées. Elle cristallise aussi une volonté de coordination accrue entre les forces armées et les services déconcentrés de l’État.

Dans les rues de Mopti, les avis oscillent entre prudente confiance et attentes fermes. Certains habitants espèrent que l’arrivée du général marquera un tournant dans la gestion quotidienne des dossiers urgents, notamment la sécurisation des axes, le retour des services sociaux de base et la stabilisation des activités économiques, aujourd’hui fragilisées par l’insécurité.

D’autres, plus sceptiques, rappellent que plusieurs gouverneurs se sont succédé sans parvenir à enrayer les dynamiques de violence, souvent liées à l’absence de réponse rapide de l’administration face aux alertes communautaires ou à la lenteur dans la mise en œuvre des projets de développement.

Pour l’heure, les premiers pas du général Dembélé sont observés avec attention. L’installation rapide de son équipe, le contact direct avec les leaders locaux, ainsi que les premières décisions en matière de sécurité intérieure seront déterminants pour imprimer une dynamique nouvelle.

À Mopti, où la population a souvent le sentiment d’être reléguée à la marge du processus de reconstruction nationale, l’arrivée d’un gouverneur expérimenté, ancré dans le tissu local et fort d’une légitimité militaire, pourrait bien créer les conditions d’un regain de confiance. À condition que la parole officielle se traduise vite en actes tangibles.

Axe Bourem–Gao : des voyageurs pris pour cibles

Ce dimanche 15 juin 2025, le tronçon entre Bourem et Gao a été la cible d’une nouvelle attaque sanglante. Cette agression relance l’alerte sur la sécurité routière dans le Nord-Mali, tandis que les évènements de Kobé en février continuent de hanter les populations.

Dimanche 15 juin en milieu de journée, un groupe armé a pris d’assaut plusieurs minibuses circulant entre Bourem et Gao, à hauteur de Tondibi. Les assaillants, arrivés à moto, ont obligé les passagers à descendre, leur subtilisant téléphones, portefeuilles et effets personnels sous la menace des armes. Aucune blessure physique n’a été signalée, mais les victimes sont profondément traumatisées. Ce braquage intervient alors que déjà, à la fin du mois de mai, une série d’agressions similaires avait ébranlé la quiétude des voyageurs de cette route.
Depuis plusieurs mois, cet axe est marqué par une présence sécuritaire sporadique. Malgré les appels répétés des syndicats de transporteurs, la défense militaire reste timide, donnant à ces zones comme Tondibi une vulnérabilité permanente. Les habitants évoquent un sentiment d’abandon, exprimant leur exaspération : voyager revient à jouer sa vie, à l’abri d’aucune garantie tangible.
Le souvenir de l’attaque meurtrière du 7 février 2025 près de Kobé, à environ trente kilomètres au sud de Gao sur la route vers Ansongo, ressurgit automatiquement. À l’époque, un convoi de 19 véhicules civils, escortés par des soldats maliens et leurs partenaires, a été pris en embuscade par des djihadistes de l’État islamique dans le Grand Sahara, faisant 34 morts civils et 34 blessés. Les assaillants s’en sont pris indistinctement aux civils comme aux militaires, incendiant des véhicules, semant la terreur, avant que le convoi ne fasse demi-tour. Dans les jours qui ont suivi, les transporteurs de la région avaient décrété une grève, exigeant la fin des simples escortes et la mise en place de véritables patrouilles régulières.
Si le trafic a repris après cet épisode tragique, notamment sous la pression de la reprise économique, la menace n’a jamais disparu. Des témoignages rapportent que les attaques à Kobé sont devenues presque banales : « on est dépouillé, on est frappé, et les femmes ne sont pas épargnées », racontent certains chauffeurs .
Les enjeux sont avant tout d’ordre public et politique. Sans mesures de sécurité dignes de ce nom—comme des postes permanents, un accompagnement organisé des convois et une présence militaire tangible—les échanges commerciaux, les déplacements familiaux et la vie quotidienne resteront rythmés par la peur. Les voyageurs demandent à cor et à cri une réponse ferme de l’État, faute de quoi le Nord du Mali continuera de payer un lourd tribut au banditisme et au terrorisme.

Protection des civils : Le pari de l’OCGS pour une sécurité enracinée

L’Observatoire Citoyen sur la Gouvernance et la Sécurité (OCGS) a animé, le mardi 10 juin 2025, au Mémorial Modibo Keita un rendez‑vous auquel ont participé experts en sécurité, représentants religieux, juristes, militaires, organisations humanitaires et membres de la société civile, pour mettre en lumière la vulnérabilité des civils au Mali en contexte de crise. La maîtrise de la cérémonie confiée à Anissé, de l’OCGS, a posé un cadre chaleureux invitant à la réflexion collective.

Au cœur des échanges, Baba Dakono, coordonnateur de l’OCGS, a insisté sur l’urgence de fonder toute stratégie de protection sur la dignité humaine et la reconnaissance des savoirs culturels et religieux malien. Il a appelé à unir les enseignements des traditions orales, des textes sacrés et des textes juridiques pour faire émerger des politiques réellement adaptées et légitimes aux yeux des populations.
Le communicateur traditionnel Mamadou Ben Cherif Diabaté a capté l’attention en évoquant une ancienne charte de 1236, témoignage de la richesse des normes sociales maliennes dans la prévention des conflits. En valorisant savoirs locaux et mémoire collective, il a plaidé pour une réinterprétation de ces références historiques en lien avec les juristes et universitaires, regrettant que les propositions issues des Journées de la Refondation ne soient pas pleinement intégrées aujourd’hui dans les politiques publiques, faute de réelle volonté politique.
Foi et traditions au cœur du débat
Des intervenants ont ensuite illustré la façon dont la foi peut nourrir une solidarité active envers les plus vulnérables. Intervenant à nouveau, Ben Cherif Diabaté a souligné la nécessité de former les mosquées, églises et chefferies traditionnelles aux mécanismes de prévention et de protection, car c’est là que la résilience communautaire se construit. En rappelant qu’une mère non sensibilisée peut, même involontairement, faciliter l’infiltration de groupes armés, il a souligné l’importance d’associer toute la communauté, dans sa diversité, à la sécurité collective.
L’après‑midi a été l’occasion d’une présentation du Programme national d’éducation aux valeurs (PNEV) par un représentant du ministère de la Refondation. Ce programme vise à inculquer dès l’école des notions de citoyenneté, de cohésion sociale et de protection mutuelle. Pour Mamadou Ben Cherif Diabaté, le PNEV constitue un levier stratégique pour ancrer la culture de la sécurité dans le quotidien des Maliens, de l’écolier à l’officier. « La guerre ne se gagne pas seulement sur le front, mais aussi dans les familles et les quartiers », a‑t‑il affirmé, en invitant à voir l’éducation aux valeurs comme une condition de résilience nationale.
Former pour mieux protéger
Enrichie par des échanges spontanés impliquant ONG, forces de sécurité, journalistes, universitaires et acteurs communautaires, la conférence a ouvert des pistes concrètes : reconnaître dans le droit national les pratiques traditionnelles, développer des modules de formation communautaire, organiser à l’échelle nationale des journées de réflexion incluant l’ensemble des acteurs de terrain.
Dans un dernier appel, Mamadou Ben Cherif Diabaté a exhorté les autorités maliennes à lancer un dialogue national institutionnalisé, pour faire entrer les communautés traditionnelles au cœur des politiques de sécurité. Alors que l’urgence sécuritaire se fait chaque jour plus pressante, son message était clair : seule une approche enracinée dans les valeurs et réalités locales pourra redessiner un avenir plus sûr pour les civils maliens.

Décès du rappeur Lord Makhaveli : la jeunesse malienne perd l’une de ses voix les plus prometteuses

Le monde de la musique urbaine malienne est en deuil. Le jeune rappeur Abdoulaye Macalou, plus connu sous son nom de scène Lord Makhaveli, est décédé dans des circonstances tragiques ce 10 juin à Bamako. L’enterrement de l’artiste est prévu ce vendredi 13 juin 2025 dans son quartier natal de Lafiabougou.

Selon les premiers éléments recueillis, Lord Makhaveli aurait été victime d’un lynchage collectif dans le quartier de Bacodjicoroni ACI. L’altercation, survenue en plein jour, aurait démarré de manière banale, impliquant selon certaines sources une dispute avec une vendeuse de galettes. La situation aurait rapidement dégénéré en agression physique.

Grièvement blessé, le rappeur a été transporté d’urgence à l’hôpital Gabriel Touré, où il a succombé à ses blessures quelques heures plus tard. Les causes exactes de sa mort seraient liées à des traumatismes multiples, notamment au niveau du crâne et de la cage thoracique.

Une enquête a été ouverte par les services du commissariat du 5ᵉ arrondissement pour faire la lumière sur les circonstances de ce drame. Des témoins auraient déjà été entendus, et une reconstitution des faits serait en cours.

Une étoile montante du rap malien

Âgé d’environ 23 ans, Lord Makhaveli incarnait une génération d’artistes maliens conscients, porteurs d’un rap engagé et sans compromis. Révélé sur la scène bamakoise par des morceaux comme Fly, Un Autre Malien Américain ou Gangsta Écrivain, il s’était produit dans plusieurs lieux emblématiques de la capitale, du Centre international de conférences de Bamako (CICB) au Stade du 26 Mars.

Son style, mêlant réflexions sociopolitiques, introspection personnelle et dénonciation des inégalités, lui avait valu une reconnaissance croissante au sein de la jeunesse urbaine.

« C’était un gamin sincère, intelligent, qui voulait changer les choses avec sa musique », témoigne un confrère artiste ayant partagé la scène avec lui.

Vague d’émotion sur les réseaux sociaux

L’annonce de sa mort a déclenché une vive émotion sur les réseaux sociaux. Des milliers d’internautes ont exprimé leur colère, leur tristesse et leur incompréhension face à ce qu’ils considèrent comme un acte de barbarie.

Des artistes de renom comme Iba One, Mylmo, Master Soumy ou encore Gaspi lui ont rendu hommage, appelant à des réflexions profondes sur la montée des violences urbaines et le phénomène des « justices populaires ».

« Ce n’est pas seulement un artiste que nous perdons, c’est un frère, une voix, un miroir de nos luttes », a déclaré Mylmo dans une vidéo relayée sur TikTok.

Enterrement ce vendredi à Lafiabougou

La levée du corps aura lieu après la prière du vendredi (Jummah) au quartier Lafiabougou, dans la commune IV du district de Bamako. De nombreuses personnalités du monde de la culture, amis, proches et anonymes sont attendus pour cet ultime hommage.

Un appel au calme a été lancé par plusieurs leaders communautaires afin d’éviter tout débordement lors des funérailles, qui s’annoncent particulièrement suivies.

Un drame révélateur

Au-delà de l’émotion, ce drame soulève une fois de plus la question de la montée des violences collectives à Bamako. Les lynchages publics, alimentés par une méfiance croissante envers les forces de l’ordre et la justice, semblent se banaliser dans certains quartiers.

Le cas de Lord Makhaveli illustre tragiquement cette dérive : un différend mineur, un soupçon, un attroupement… et la mort d’un jeune homme, d’un artiste, d’un citoyen.

La mort de Lord Makhaveli n’est pas seulement celle d’un rappeur. C’est une perte pour une jeunesse qui cherche à s’exprimer, à être entendue, à être comprise. C’est aussi un avertissement sur la fragilité du vivre-ensemble, sur les risques d’une société où la colère déborde plus vite que la justice ne répond.

Il laisse derrière lui des textes, des rimes et une voix – qu’on espère assez forte pour ne pas s’éteindre.

Inde : un avion d’Air India s’écrase à Ahmedabad avec 242 personnes à bord

L’avion Boeing 787‑8 Dreamliner d’Air India assurant le vol AI171, en route vers Londres depuis Ahmedabad, s’est écrasé ce jeudi peu après décollage. Selon les autorités, l’appareil transportait 242 personnes à bord, dont 169 Indiens, 53 Britanniques, 7 Portugais, 1 Canadien, ainsi que 12 membres d’équipage, dont deux pilotes.

Alors qu’un mayday a été émis, le signal de l’avion a été perdu à une altitude d’environ 625 pieds (190 mètres), environ 30 à 50 secondes après le décollage.
Dans les instants suivant l’impact, la carcasse a pris feu en touchant le sol, provoquant une énorme boule de feu et une colonne de fumée épaisse, visibles à plusieurs kilomètres. Ce crash s’est produit dans un quartier résidentiel adjacent au BJ Medical College, percutant un bâtiment utilisé notamment comme internat pour étudiants en médecine. Parmi les victimes au sol figurent au moins cinq étudiants, selon des responsables universitaires.
À l’heure actuelle, les secours ont récupéré au minimum 204 corps sur le site du crash, et au moins 41 blessés ont été pris en charge localement. Le chiffre total des victimes pourrait s’élever à plus de 290, en incluant à la fois les passagers et les personnes restées au sol.
Dans un contexte exceptionnel, un seul passager a survécu à l’accident, identifié comme Vishwashkumar Ramesh, actuellement hospitalisé dans un état stable.
Réactions et enquête
Le gouvernement indien a réagi immédiatement. Le Premier ministre Modi a exprimé sa tristesse sur les réseaux sociaux, tandis que le ministre de l’Intérieur Amit Shah évoque des conditions extrêmes, avec un incendie alimenté par environ 125 000 litres de carburant, rendant les opérations de secours quasi impossibles malgré le déploiement d’au moins sept camions de pompiers et de nombreuses ambulances.
Air India a confirmé la mise en place d’une cellule de crise et une ligne d’assistance aux familles. Le constructeur Boeing, dont l’action a chuté de 4,7 % en Bourse, enverra un groupe d’experts pour soutenir l’enquête, conjointement avec les autorités américaines (NTSB) et britanniques.
Ce drame représente le premier accident mortel impliquant un Boeing 787 Dreamliner depuis son entrée en service en 2011. Il survient alors qu’Air India poursuit une profonde modernisation de sa flotte sous l’égide du groupe Tata, avec des enjeux importants de sécurité et de réputation.
Les investigations, menées selon le protocole international, devront identifier les causes – mécanique, humaine ou liée à la procédure de décollage, notamment la rétractation du train d’atterrissage – afin de prévenir de nouvelles tragédies.

Insécurité alimentaire : Le Royaume d’Espagne appuie le PAM pour l’assistance des personnes vulnérables au Mali

Le Commissariat à la sécurité alimentaire et le Programme Alimentaire mondial (PAM) au Mali ont organisé, ce jeudi 12 juin 2025, une cérémonie de remerciements à l’endroit du gouvernement du Royaume d’Espagne pour sa nouvelle contribution financière à l’exécution du programme alimentaire d’urgence du PAM en faveur des populations maliennes nécessiteuses.

Huit mois après sa dernière contribution, le Royaume d’Espagne octroie à nouveau une importante aide financière d’une valeur de 3 millions d’euros (1,9 milliard de FCFA) au PAM, en faveur des populations maliennes vulnérables.
La cérémonie de remerciements et de remise symbolique de ce nouveau financement s’est tenue au siège du Commissariat à la Sécurité alimentaire à Bamako, en présence du ministre Commissaire à la Sécurité alimentaire, de l’ambassadeur du Royaume d’Espagne au Mali et de la Directrice adjointe du PAM au Mali.
Grâce à ce geste de solidarité et d’amitié entre le Royaume d’Espagne et la République du Mali, le PAM, à travers son programme d’aide alimentaire d’urgence, disposera de moyens adéquats pour soutenir, pendant une année, plus de 65 000 personnes les plus touchées par l’insécurité alimentaire et les conflits dans les régions de Kayes, Ségou, Mopti, Tombouctou, Taoudéni, Kidal, Ménaka, Gao, Koulikoro et Sikasso.
« Cette contribution permettra de répondre aux besoins immédiats et de renforcer la résilience des populations touchées à travers une intervention intégrée couplant la réponse d’urgence et le renforcement de la résilience des communautés vulnérables à l’insécurité alimentaire et nutritionnelle », a indiqué Jacqueline Flentge, Directrice adjointe du PAM au Mali.
« Le soutien de nos partenaires est absolument vital pour apporter une réponse plus efficace et durable aux besoins des personnes qui comptent sur l’assistance alimentaire du PAM », a-t-elle rappelé.
En effet, selon Mme Flentge, le PAM a urgemment besoin de 91,4 millions de dollars, soit plus de 50 milliards de FCFA, d’ici la fin décembre 2025 afin de couvrir les besoins essentiels des communautés vulnérables au cours des six prochains mois.
Par ailleurs, près de 1,5 million de personnes sont confrontées à une insécurité alimentaire aiguë durant cette période de soudure agro-pastorale, a-t-elle indiqué.
Le ministre Commissaire à la Sécurité alimentaire, Redouwane Ag Mohamed Ali, a pour sa part salué la nouvelle contribution financière du Royaume d’Espagne, qui, selon lui, témoigne de l’engagement du gouvernement espagnol à accompagner le Mali dans la préservation de sa souveraineté alimentaire, à travers le renforcement de la capacité de résilience des communautés vulnérables.
C’est la deuxième fois en moins d’un an que le Royaume d’Espagne appuie le PAM en faveur des populations maliennes. Grâce à sa contribution en 2024, le PAM a pu apporter une aide vitale à plus de 50 000 personnes vulnérables à travers le Mali.
Mohamed Kenouvi

Dengue au Mali : plus de 336 cas confirmés, le président appelle à la vigilance

Le Mali, confronté à une recrudescence inquiétante de la dengue, totalise 336 cas confirmés sur 2 406 suspicions recensées à la mi-avril. Les foyers les plus touchés se trouvent dans les régions de Bamako et Sikasso, d’après le rapport du 16 avril de l’Organisation mondiale de la santé pour l’Afrique (AFRO‑WHO).

Dans un contexte marqué par la confusion persistante entre dengue et paludisme, le Président de la Transition a prié les citoyens de respecter rigoureusement les mesures de prévention : éliminer les eaux stagnantes, utiliser systématiquement moustiquaires imprégnées et répulsifs, et consulter rapidement un centre de santé en cas de fièvre.

Selon le dernier bulletin hebdomadaire de l’OMS couvrant la période du 1er janvier au 13 avril, 253 cas de dengue ont été confirmés dans quatre districts, avec huit décès, soit un taux de létalité de 3,2 % . Ces données confirment l’urgence de renforcer la surveillance et les soins médicaux spécialisés.

Le malentendu autour des symptômes de la dengue et du paludisme persiste. Les autorités sanitaires rapportent que cette confusion complique la prévention et retarde la prise en charge adaptée des patients. De plus, la circulation de conseils inappropriés sur les réseaux sociaux, incluant l’usage de remèdes traditionnels, accentue ce phénomène.

Dans la lutte contre cette épidémie, la mobilisation communautaire est jugée cruciale. Le ministère de la Santé a intensifié les campagnes publiques, multiplié les messages de sensibilisation sur les ondes et WhatsApp, et organisé des sessions d’information dans les écoles. Les citoyens sont sensibilisés à l’importance d’assainir leur environnement et de solliciter un diagnostic médical en présence de fièvre ou de douleurs inhabituelles .

Comparativement aux données de 2024, où l’Afrique subsaharienne avait enregistré plus de 14 000 cas et 505 décès entre janvier et avril, notamment au Mali (8 709 cas et 39 décès) , la situation de 2025 révèle une dynamique différente, mais reste préoccupante. L’épidémie actuelle s’inscrit dans une évolution globale de la fièvre denguée, particulièrement dans les grandes villes comme Bamako, épicentre de l’épidémie.

Face à cette crise de santé publique, les efforts collectifs sont essentiels. Le Président a rappelé que chaque citoyen a un rôle à jouer : le moindre dépôt d’eau stagnante, la moindre négligence dans l’utilisation des protections individuelles peuvent contribuer à étendre l’épidémie.

Interview de Me Fatoumata Diatigui Diarra, conseil fiscal agréé 

Dans un contexte marqué par la recrudescence des saisies de devises à l’aéroport de Bamako, Me Fatoumata Diatigui Diarra, conseil fiscal agréé, décrypte pour nous le cadre juridique encadrant l’exportation physique de devises au Mali. Elle souligne le déficit d’information du public, rappelle les obligations déclaratives prévues par les textes communautaires, et appelle à une meilleure accessibilité des outils bancaires pour freiner les flux illicites.

1. Quel est le cadre juridique malien encadrant l’exportation de devises par voie physique ?

L’exportation de devises par voie physique est encadrée par un corpus de textes communautaires constitué du Règlement n°06/2024/CM/UEMOA relatif aux relations financières extérieures des États membres de l’UEMOA, de l’Ordonnance n°2024-011/PT-RM du 30 août 2024 portant lutte contre le blanchiment de capitaux, le financement du terrorisme et la prolifération des armes de destruction massive (BC/FT/FP), telle que modifiée, ainsi que de ses textes d’application, fixant le seuil pour la déclaration des transports physiques intracommunautaires et internationaux d’espèces et d’instruments négociables au porteur (instructions BCEAO n°231/07/2024 et n°002-02-2025).

Cette réglementation met notamment en place une obligation déclarative à la charge des personnes transportant des espèces ou des instruments négociables au porteur, à partir d’un certain seuil.

L’obligation déclarative est catégorisée parmi les mesures préventives relatives à l’utilisation des espèces. Il s’agit de s’assurer de l’origine et de la destination de ces espèces ou instruments au porteur, et ainsi, de lutter contre le BC/FT/FP.

2. Quels sont les montants soumis à déclaration et quelles sont les sanctions en cas de non-déclaration ?

Aux termes des instructions précitées, toute personne à destination ou en provenance d’un pays tiers de la Zone UEMOA est tenue d’effectuer une déclaration de transport physique d’espèces et d’instruments négociables au porteur auprès de l’Administration des Douanes, à partir d’un seuil de 5 millions de francs CFA.

Le seuil est relevé à 10 millions de francs CFA pour les transports intracommunautaires d’espèces et d’instruments négociables au porteur.

À l’issue de la déclaration, l’Administration des Douanes peut bloquer ou retenir, pour une période n’excédant pas soixante-douze heures, les espèces ou instruments susceptibles d’être liés au BC/FT/FP. Un récépissé est délivré à l’intéressé. Passé ce délai, les fonds sont restitués en l’absence d’infraction constatée.

En cas de non-déclaration, de fausse déclaration, de déclaration incomplète, ou s’il y a suspicion de blanchiment de capitaux, de financement du terrorisme ou de prolifération, l’Administration des Douanes saisit la totalité des espèces retrouvées et dresse un procès-verbal.

Les espèces saisies et une copie du procès-verbal sont transmises au Trésor, à la structure nationale chargée de la gestion des avoirs criminels gelés, saisis ou confisqués, ou à l’organisme en tenant lieu. Le dossier est également envoyé à la Cellule nationale de Traitement des Informations Financières (CENTIF), dans un délai de huit jours calendaires.

Il s’agit là de mesures conservatoires, avant toute procédure judiciaire.

3. À votre connaissance, ces règles sont-elles effectivement appliquées sur le terrain, ou souffrent-elles de failles ?

La presse a récemment fait état de saisies à plusieurs reprises, mais n’étant partie à aucune de ces procédures, je ne saurais dire si les dispositions mentionnées ci-dessus ont été rigoureusement suivies.

4. Peut-on considérer que ces flux de cash traduisent un affaiblissement de la fiscalisation et de la confiance dans le système bancaire ?

Ces flux me semblent plutôt refléter nos habitudes culturelles. Les difficultés de mobilisation des recettes fiscales, notamment du fait de l’importance de l’informel dans nos économies, ne sont plus à démontrer. De même, l’inclusion financière, dont un élément essentiel est la bancarisation, demeure au cœur des politiques de la BCEAO, qui consacre chaque année un rapport à ce sujet. C’est dire qu’il s’agit d’une problématique structurelle et toujours d’actualité.

À cela s’ajoute sans doute un déficit de communication autour des réglementations.

5. Quels dispositifs pourraient être renforcés pour lutter efficacement contre les sorties illégales de capitaux et la fraude fiscale transfrontalière ?

À mon avis, l’Administration des Douanes gagnerait à mener une vaste campagne de communication sur ce sujet, compte tenu de notre culture du voyage. Ces sorties illégales de capitaux sont manifestement, d’abord, le résultat de l’ignorance de la réglementation en la matière, et peut-être également du coût élevé des services bancaires.

La mise à disposition de cartes bancaires prépayées constitue une avancée notable, d’ailleurs largement prise en compte par le Règlement UEMOA. Celui-ci précise que les sommes excédant le plafond fixé par la BCEAO peuvent être emportées sous forme de cartes de retrait et de paiement, prépayées ou classiques.

Ces instruments gagneraient à être davantage utilisés, à condition d’être rendus plus accessibles.

Géopolitique : l’APA appelle à une réforme du système international depuis Lomé  

Réunis à Lomé le 2 juin 2025, les ministres de l’Alliance Politique Africaine ont appelé à un sursaut stratégique du continent. Dans une déclaration dense, ils demandent des réformes immédiates des institutions multilatérales, une autonomie accrue en matière de sécurité, et un partenariat renforcé avec les BRICS.

À l’abri des projecteurs internationaux mais dans une atmosphère studieuse, la capitale togolaise a accueilli la troisième conférence ministérielle de l’Alliance Politique Africaine (APA). L’événement s’est tenu sous le haut patronage du président Faure Essozimna Gnassingbé, président en exercice du Conseil de l’APA. Le thème retenu, « Place de l’Afrique dans un monde en mutation : enjeux d’un repositionnement stratégique et diplomatique », a donné le ton d’une déclaration ferme, fondée sur des faits et des objectifs politiques précis.
Les ministres présents ont dénoncé l’inaction de la communauté internationale face à la marginalisation persistante de l’Afrique dans les mécanismes de gouvernance mondiale. Ils ont exigé une réforme du Conseil de sécurité des Nations unies, ainsi que des grandes institutions financières internationales, estimant que le continent ne peut plus rester spectateur des décisions qui engagent son avenir.
Sécurité collective, industries de défense, souveraineté technologique
Sur le plan sécuritaire, les participants ont défendu une vision d’autonomie stratégique, appelant à renforcer l’Architecture africaine de paix et de sécurité (APSA) et à créer un mécanisme opérationnel de défense collective. La déclaration exhorte à intégrer les dimensions maritime et spatiale, avec une insistance particulière sur l’entrée en vigueur effective de la Charte de Lomé sur la sécurité maritime, adoptée en 2016 mais encore peu appliquée.
Les États membres sont également encouragés à développer une industrie continentale de l’armement, à partir de technologies locales, afin de limiter les dépendances critiques. Le texte recommande de mutualiser les moyens militaires, de financer nationalement les efforts de défense, et d’adopter une approche holistique incluant les enjeux énergétiques, sociaux, et informationnels. Une telle posture, insistent les signataires, est un prérequis à toute stabilité durable.
En toile de fond, les bouleversements géopolitiques en cours, notamment la montée en puissance des BRICS, sont vus comme une opportunité. L’APA appelle à construire un agenda commun avec ce groupe, désormais élargi, pour faire avancer les réformes du système international. Les pays africains membres des BRICS sont invités à y défendre activement les positions stratégiques du continent.
Mémoire historique, justice globale et diplomatie panafricaine
Le communiqué salue également l’adoption par l’Union africaine, lors de sa 38e session ordinaire tenue le 16 février 2025 à Addis-Abeba, d’une décision historique reconnaissant l’esclavage, la colonisation et la traite négrière comme crimes contre l’humanité et génocide à l’encontre des peuples africains. Cette initiative, portée par le Togo, est présentée comme un moment décisif dans la reconnaissance des injustices historiques subies par l’Afrique.
Dans la continuité, les ministres ont lancé un appel aux Nations unies pour qu’elles intensifient la lutte contre les discriminations systémiques subies par les personnes d’origine africaine dans plusieurs régions du monde.
Deux événements à venir ont été annoncés comme priorités diplomatiques : la 2e édition du Lomé Peace and Security Forum, en octobre 2025, et le 9e Congrès panafricain, prévu pour décembre à Lomé. Ces rendez-vous visent à consolider la dynamique de concertation continentale et à construire une parole panafricaine forte, structurée et audible sur la scène mondiale.
À travers cette déclaration, l’APA entend marquer un tournant. Non par des effets d’annonce, mais par la formulation de revendications concrètes, stratégiques et coordonnées, à même de repositionner durablement l’Afrique dans le nouvel équilibre mondial en gestation.

Presse malienne : un plaidoyer collectif pour refonder le cadre juridique

Les 14 et 15 mai 2025, la Maison de la Presse de Bamako a accueilli un atelier consultatif organisé par Search for Common Ground, en partenariat avec le Réseau Siguida Herema et l’URTEL, avec le soutien de la Coopération belge. L’objectif portait sur l’élaboration d’un répertoire des textes régissant la presse au Mali et la formulation d’un message de plaidoyer. L’atelier s’inscrit dans le projet Siguida Herema, centré sur la promotion d’un environnement médiatique plus favorable.

L’atelier s’est déroulé pendant deux jours, les 14 et 15 mai 2025, à la Maison de la Presse de Bamako. Il a réuni des représentants de la Haute Autorité de la Communication (HAC), de l’URTEL, de la société civile, ainsi qu’une vingtaine de médias publics et privés. L’initiative est portée par Search for Common Ground, avec le concours du Réseau Siguida Herema et de l’URTEL, dans le cadre du projet Siguida Herema financé par la Coopération belge au développement.

Le projet Siguida Herema, d’une durée de 30 mois, couvre les régions de Mopti, Gao et le district de Bamako. Il vise à renforcer la participation citoyenne et le dialogue démocratique, notamment par l’amélioration du cadre légal encadrant les médias. L’organisation de cet atelier consultatif répond à ce double objectif : dresser un inventaire des textes législatifs et réglementaires encadrant la presse malienne et initier un message de plaidoyer en vue de leur harmonisation.

Les travaux ont été introduits par plusieurs intervenants institutionnels, parmi lesquels des représentants de la Maison de la Presse, de l’Ambassade du Royaume de Belgique, du Gouvernorat du District de Bamako et de Search for Common Ground. Le modérateur Alexis Kalambry et l’expert Mahamane Hamèye Cissé ont ensuite animé les échanges, structurés autour de la présentation de l’arsenal juridique existant, de ses insuffisances, et des perspectives de réforme.

Le cadre juridique analysé repose essentiellement sur la loi n°00-046/AN-RM du 7 juillet 2000 sur le régime de la presse et les délits de presse, la loi n°2012-019 relative aux services privés de communication audiovisuelle, ainsi que divers décrets encadrant l’aide publique à la presse, la délivrance de la carte de presse ou encore les cahiers de charges des médias audiovisuels. À ces textes s’ajoutent la loi sur la protection des données personnelles et la loi sur la cybercriminalité.

Selon les participants, plusieurs dysfonctionnements ont été identifiés. Certains textes sont jugés obsolètes ou inadaptés aux évolutions récentes du secteur, notamment en ce qui concerne les nouveaux formats numériques et la multiplication des acteurs non traditionnels. Des dispositions spécifiques, comme le délit d’offense au chef de l’État ou l’absence de garanties judiciaires en matière de saisie administrative, ont été soulignées comme problématiques.

L’atelier a également mis en lumière les lenteurs du processus de relecture des textes, engagé depuis 2021 sans qu’aucune réforme ne soit encore adoptée. Plusieurs recommandations ont été formulées à l’issue des échanges. Parmi celles-ci figurent l’adoption d’une loi sur l’accès à l’information, la réforme de la commission de la carte de presse, le renforcement de l’indépendance de la HAC, l’amélioration des mécanismes d’aide publique, ou encore l’intégration des nouveaux acteurs du paysage médiatique dans les textes.

Les participants ont insisté sur la nécessité d’établir un cadre de concertation formel entre les autorités compétentes et les faitières de la presse afin de faciliter l’adoption des réformes. Une déclaration de plaidoyer a été rédigée à la fin des travaux, avec l’intention de la présenter dans le cadre des discussions en cours sur le Plan d’action gouvernemental (PAG), dont l’examen est prévu au Conseil national de transition.

La clôture de l’atelier a confirmé l’engagement des parties prenantes à poursuivre ce travail collectif en vue d’une modernisation du cadre légal de la presse, considérée comme un levier de gouvernance démocratique.

« Mali Ko… » : Quand le Mali parle, chante et se raconte à sa jeunesse

Sous le sceau de l’Année de la Culture proclamée par les autorités maliennes, le lancement du projet « Mali Ko… (Le Mali dit…) » marque un tournant pour la scène culturelle nationale. Cette initiative ambitieuse, portée conjointement par Africa Scène et l’Espace Culturel Blonba, s’appuie sur une dynamique inédite de création, de diffusion et de mobilisation citoyenne.

Du mois de juin à celui de décembre, elle sillonne onze grandes villes du pays, avec pour ambition de réconcilier la jeunesse malienne avec son histoire, sa mémoire musicale et son avenir collectif.

Abdou Guitteye, directeur d’Africa Scène et coordonnateur général du projet, évoque une nécessité sociale autant qu’un devoir culturel. « Ce projet, nous l’avons pensé comme une grande conversation nationale entre les générations. Le Mali est riche d’une mémoire musicale que nos jeunes n’écoutent plus, parce qu’on ne la leur donne pas à entendre dans leur langue, dans leur époque. Il ne s’agit pas de nostalgie mais de transmission. Le Mali a beaucoup à dire, et il doit le dire avec les voix d’aujourd’hui. »

Pendant sept mois, de Tombouctou à Bamako en passant par Ségou, San, Bougouni, Sikasso ou Kita, chaque ville traversée sera symboliquement élevée au rang de capitale culturelle du Mali. Dans les stades, les quartiers, les plateaux de télévision et les réseaux sociaux, la parole musicale se mêlera à l’image, au récit et au débat. Le projet mobilise un budget prévisionnel de 150 millions de francs CFA, avec le soutien du ministère de la Culture et du programme Donko ni Maaya, mis en œuvre par la GIZ.

Au cœur de Mali Ko…, dix-neuf chansons majeures du patrimoine musical national, des années 1960 aux années 2000, ont été sélectionnées. Des titres comme Mali Twist de Boubacar Traoré, Mali ba de Bazoumana Sissoko, Diadjiri de Fanta Damba, Tassidoni du Super Biton, Kulukutu de l’orchestre Kanaga de Mopti, Bi furu d’Oumou Sangaré, Nyama Toutou de Nahawa Doumbia, Chérie d’Ali Farka Touré, Mamaya d’Ami Koïta ou CAN 2002 de Nyeba Solo seront réinterprétés dans une forme nouvelle, à travers la voix de la jeune scène contemporaine.

Six artistes porteront ces relectures : Malakey, Young BG, Dr KEB, Black AD, Maimouna Soumounou et Mamou Fané. Tous ont été choisis pour leur singularité artistique, leur ancrage local et leur capacité à résonner avec les aspirations urbaines de la jeunesse malienne. Ces jeunes voix ne reprennent pas seulement des titres, elles les revisitent, les réécrivent parfois, pour leur donner une nouvelle vie sans trahir leur âme.

Alioune Ifra Ndiaye, metteur en scène du projet et fondateur de l’Espace Blonba, précise l’intention esthétique et politique. « Il ne s’agissait pas de faire un spectacle patrimonial figé, mais un geste vivant, mobile, populaire. Nous avons voulu que chaque chanson redevienne ce qu’elle était à l’origine : un message, une mémoire, un outil de lien. Dans Mali Ko…, on ne chante pas pour plaire, on chante pour transmettre. Et on le fait avec rigueur, passion et exigence. »

Le projet s’exprime aussi à travers l’image. Une série télévisée de quarante épisodes, mêlant création documentaire, journal de bord et immersion dans les villes traversées, accompagnera la tournée. À cela s’ajouteront dix talk-shows de quatre-vingt-dix minutes, conçus comme des espaces de débat, de témoignage et d’expression populaire. La diffusion est prévue à la fois sur les chaînes publiques et via les réseaux sociaux, avec un objectif cumulé de trois millions de téléspectateurs et un million de vues numériques.

Mali Ko… vise une fréquentation directe de 150 000 spectateurs à travers ses spectacles-concerts. Mais au-delà des chiffres, c’est la portée symbolique qui importe : montrer que la culture malienne peut être à la fois savante et populaire, enracinée et innovante, locale et universelle.

Pour Abdou Guitteye, le choix de villes parfois éloignées des circuits habituels est un acte volontaire. « Ce n’est pas Bamako qui exporte son modèle. Ce sont les villes, les quartiers, les communautés qui deviennent les cœurs battants du projet. Chaque ville accueillera une création, une émission, un moment de partage. Nous voulons créer un effet de chaîne, une onde culturelle qui touche toutes les couches. »

Alioune Ifra Ndiaye insiste quant à lui sur la responsabilité des artistes dans le contexte actuel. « Le Mali traverse des moments complexes. Ce que nous disons avec Mali Ko…, c’est que l’art n’est pas un luxe. C’est un acte de souveraineté. Nous ne racontons pas le Mali pour en faire un folklore, mais pour en faire un projet. »

À travers cette initiative, Africa Scène et Blonba affirment une ligne claire : la culture est un levier de transformation, un facteur de cohésion, une force de projection collective. Mali Ko… n’est pas seulement un programme artistique, c’est un manifeste. Une invitation à dire, à écouter et à rêver un Mali debout, multiple et vivant.