Accord pour la paix : l’inévitable confrontation entre les parties ?

Alors que le processus du retrait de la MINUSMA doit s’achever le 31 décembre 2023, la mission onusienne a entamé le 1er septembre 2023 la deuxième phase de rétrocession de ses emprises à l’État malien. Cette phase, qui verra la rétrocession des camps d’Aguelhok, de Tessalit et de Kidal à l’armée malienne, des zones sous contrôle de la Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA), fait craindre une reprise des affrontements armés entre les deux parties.

Si la rétrocession du camp de Ber, dans la région de Tombouctou, avait déjà occasionné mi-août un regain de tensions entre l’armée malienne et les groupes armés terroristes, d’une part, et la CMA, de l’autre, celles en vue dans le bastion des ex-rebelles des camps d’Aguelhok et de Tessalit, du 15 au 30 septembre 2023, et de Kidal deux mois après, le 15 novembre, risque de marquer définitivement la reprise des affrontements entre les Forces armées maliennes (FAMa) et la CMA, depuis la signature du cessez-le-feu du 23 mai 2014. C’est du moins ce que laissent présager les différentes prises de position des deux camps depuis un certain temps.

Escalade

Assurant le 12 août dernier qu’elle poursuivrait pleinement la défense de ses positions, consacrées par le cessez-le-feu du 23 mai 2014 et par les arrangements sécuritaires, lors des heurts qui ont émaillé la reprise en main du camp de Ber par les FAMa, la CMA a dénoncé dans un communiqué, le 28 août 2023, le largage de deux bombes par des avions FAMa sur le village d’Anefis, pour « terroriser les habitants et sur une position de la CMA, sans faire de victimes ».

« Après maintes analyses, et au vu de ce qui précède, la CMA considère que la junte de Bamako a définitivement et délibérément opté pour une escalade vers des hostilités ouvertes aux conséquences obligatoirement désastreuses », indique le communiqué, signé du Porte-parole Ibrahim Ag Eouegh.

Dans la foulée, l’armée malienne a de son côté annoncé avoir mené le même jour dans la localité une frappe aérienne contre un « groupe de terroristes armés, neutralisant plusieurs terroristes et quatre camions ».

À l’occasion de la réunion du Conseil de sécurité, à la même date, sur le rapport d’étape du Secrétaire général des Nations Unies sur le retrait de la MINUSMA, Issa Konfourou, Représentant permanent de la République du Mali auprès des Nations Unies à New York, a déclaré que si les Forces armées maliennes étaient attaquées ou empêchées d’accomplir leurs missions elles se verraient dans l’obligation de réagir vigoureusement.

« La détermination du Mali à faire occuper par l’Armée malienne tous les camps qui seront libérés par la MINUSMA ne constitue pas un acte de belligérance ou de rupture du processus de paix. Au contraire, cela s’inscrit dans le processus régulier de rétrocession des emprises de la Mission et dans le respect du cadre juridique en vigueur, notamment l’Accord pour la paix et la réconciliation, ainsi que toutes les résolutions du Conseil de sécurité qui reconnaissent la souveraineté, l’unité et l’intégrité territoriale du Mali », a clamé l’ambassadeur.

La CMA soutient le contraire. Pour les ex-rebelles, en tenant « coûte que coûte à occuper les emprises de la MINUSMA, y compris celles situées dans les zones sous contrôle de la CMA », Bamako « viole tous les arrangements sécuritaires garantis jusqu’ici par la mission onusienne et la communauté internationale ».

Pour Baba Dakono, Secrétaire exécutif de l’Observatoire citoyen sur la Gouvernance et la Sécurité (OCGS), la question d’une violation ou non aujourd’hui des arrangements sécuritaires devient une « guerre d’interprétation » entre le gouvernement et la CMA.

« À partir de la signature de l’Accord pour la paix, il convient de s’interroger sur le cessez-le-feu de mai 2014, s’il va au-delà de cet Accord, qui prévoit des mécanismes, notamment l’armée reconstituée pour la gestion des zones qui étaient précédemment sous contrôle d’acteurs armés comme la CMA », relève -t-il, précisant qu’il n’y a pas eu d’arrangements sécuritaires sur la rétrocession des emprises de la MINUSMA dans le cadre de son retrait et que les arrangements que la CMA évoque sont ceux de 2014, qui avaient convenu que chaque camp devait rester sur ses positions.

Affrontements en vue ?

Selon Baba Dakono, la poursuite de la rétrocession des camps de la MINUSMA à l’armée malienne dans les régions du nord sera inévitablement jalonnée de tensions entre Bamako et la CMA, parce que la MINUSMA ne peut rétrocéder ses camps qu’à l’armée malienne, ce que conteste la CMA.

Le ministre de la Réconciliation, de la paix et de la cohésion nationale, chargé de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali, le Colonel-Major Ismaël Wagué, a invité le 28 août 2023 les « frères » des mouvements signataires de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali à « revenir à la table des négociations dans le processus de paix, en vue de surmonter les défis actuels par la voie du dialogue ». Un « non évènement » du côté de la CMA, où la main tendue du gouvernement semble être rejetée.

« Un communiqué laconique d’appel au dialogue de la part de l’adversaire, publié concomitamment à des frappes aériennes sur tes positions, ne saurait être qu’une pièce d’un jeu préétabli. Celui qui consiste déjà à refuser d’assumer que l’on te vise en déclarant exclusivement cibler des terroristes. La recette est bien facile mais indigeste », a fustigé le 29 août Attaye Ag Mohamed, l’un des porte-voix de la CMA. « Nous avions tellement gardé les mains tendues pour le dialogue qu’elles souffrent encore de crampes », a-t-il ironisé.

Pour la poursuite de la rétrocession des camps de la MINUSMA à l’État malien, notamment dans le fief de la CMA à Kidal, Dr. Mady Ibrahim Kanté, enseignant-chercheur à la Faculté des Sciences administratives et politiques (FSAP) de l’Université des Sciences juridiques et politiques de Bamako, envisage pour sa part trois scénarios. Le premier serait celui, comme dans le cas de Ber, où l’armée malienne récupérerait les camps après des accrochages avec la CMA sans une véritable guerre.

Le deuxième serait un affrontement entre les deux parties, les camps de la MINUSMA revenant à la partie qui prendrait le dessus. Mais, avec un tel scénario, la partie perdante continuerait à harceler l’autre, avec le risque d’une aggravation par la suite de la situation, souligne-t-il.

Le troisième scénario, selon l’universitaire, serait celui de « discussions sous la table », qui seraient par ailleurs déjà en cours. À l’en croire, même si le gouvernement ne fait pas d’annonces, des discussions discrètes sont menées pour aller vers une solution négociée. Discussions qui, si elles aboutissaient, permettraient une entente entre l’armée malienne et la CMA pour éviter la « guerre ».

« Je pense que ce dernier scénario est le plus probable, parce que la guerre n’arrange pas la CMA aujourd’hui. Elle n’a pas la même position de force qu’en 2012, où elle était plus forte que l’armée malienne. Aujourd’hui, c’est le contraire, l’armée malienne a pris le dessus. Par ailleurs, la CMA n’a plus le soutien des populations locales dans certaines régions du Nord, comme en 2012 où elle était soutenue par ces dernières pour mener les combats contre l’État malien », avance Dr Mady Ibrahim Kanté.

Accord compromis

Soumis à plusieurs difficultés dans son application depuis sa signature en 2015, l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali issu du processus d’Alger n’a jamais autant frôlé la rupture que ces derniers mois.

Selon les analystes, une éventuelle reprise des combats entre la CMA et les Forces armées maliennes sonnerait le glas définitif de cet Accord, déjà bloqué depuis des mois dans sa mise en œuvre suite au retrait des groupes armés signataires réunis au sein du CSP-PSD de tous les mécanismes de son suivi depuis décembre 2022.

« Sauf illusion, il est difficile de croire qu’on puisse revenir à l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali issu du processus d’Alger. Je pense que ce qui pourrait être fait aujourd’hui, ce sont de nouvelles discussions ou de nouveaux arrangements pour permettre de rétablir la stabilité dans le Nord du Mali », préconise Baba Dakono.

Sébastien Philippe : un historien du Mali

L’architecte-auteur franco-malien Sébastien Philippe travaille sur des projets de livres sur l’histoire du Mali, qui le passionne tant.

Le 19 juillet 2023, Sébastien Philippe a reçu des mains du Chargé d’affaires permanent de l’ambassade de France au Mali les insignes de Chevalier des Arts et Lettres. Une distinction qui vient s’ajouter à celles de Chevalier de l’Ordre national du Mali et de Chevalier de l’Ordre national du mérite français. Ces distinctions récompensent le travail, notamment dans le domaine de la culture, de ce Franco-malien installé ici depuis plus de deux décennies. Architecte et auteur, Sébastien Philippe est un homme occupé par les nombreux projets qu’il mène de front. Il travaille actuellement à la réédition de son livre « Une histoire de Bamako », en rupture de stock. Sorti en 2009, ce livre de 262 pages retrace l’histoire de la ville au travers de documents d’archives, de traditions orales et d’images inédites. « Des éléments vont changer », confie l’auteur, qui précise qu’il va ajouter un chapitre traitant de la période de 2009 à nos jours. « Ce qui me passionne dans cette histoire est qu’il y a encore beaucoup de choses à chercher et à trouver, des archives inexploitées. L’histoire de Bamako est issue de mes recherches dans les archives pour comprendre comment la ville s’est créée, comment elle a évolué, comment les quartiers se sont formés. Il y a encore des sujet de recherche ».

Un siècle d’architecture

Parallèlement à la réédition de l’histoire de Bamako, Sébastien Philippe écrit un nouveau livre qui alliera son métier et sa passion pour l’écriture. Il portera sur l’architecture malienne issue de la période coloniale dite néo-soudanaise. « Ce sera un livre épais qui va s’intéresser à l’architecture militaire et civile dans toutes les régions du Mali. Un siècle d’architecture, depuis la construction du fort de Médine, en 1855, jusqu’à l’indépendance du pays, en 1960 », dévoile l’auteur. Pour lui, ce sera aussi un devoir de mémoire. « C’est utile d’écrire, puisque cette architecture disparaît. Des bâtiments sont vendus, détruits. Au nord du pays, où l’architecture était de terre, elle a tendance à disparaître avec le temps ». Tirer les « enseignements » de cette période, notamment de la « gestion et du traitement des matériaux utilisés », motivent l’écriture de l’ouvrage. Si les projets ne manquent pas, la diffusion et la démocratisation des livres dans les écoles se posent. Ce qui permettrait aux Maliens, dont trop peu sont imprégnés de l’histoire de leur pays, d’avoir une précieuse documentation à portée de pages.

Transition : plus de 85% de Maliens à Bamako satisfaits de la gestion du pays

Afin d’évaluer l’opinion de la population sur l’actualité nationale et internationale, l’ingénieur statisticien Sidiki Guindo a effectué un sondage dont la phase terrain a été comprise entre le 22 avril et le 6 mai 2023 à Bamako. Les réponses  des sondés aux  questions posées, qui portent sur l’évolution de la situation générale du pays et d’autres connexes traduisent une grande satisfaction des Bamakois vis-à-vis de la transition.

Les résultats du sondage ont été officiellement présentés à la presse lundi 15 mai 2023 à la maison de la presse de Bamako. Au total 1445 Bamakoises et Bamakois  de 18 ans et plus ont été interrogés, dont 50,1% de femmes et 49,9% d’hommes. Sur la gestion actuelle du pays 65,4% sont « très satisfait » et 26,2% « plutôt satisfait. La somme du taux de ces deux opinions majoritaires équivaut à plus de 85 %. Seulement 4,8% des Maliens résidant à Bamako se disent  insatisfaits et 3% très insatisfaits.

Dans une période où la gestion des politiques sur les trois dernières décennies est souvent critiquée dans l’opinion, ce sondage vient révéler que plus de 63% de Bamakois souhaiteraient un régime militaire (comme actuel sous la transition) plutôt qu’un régime démocratique (33,5% favorable). C’est donc sans surprise que 89,6 % veulent que la transition actuelle soit prolongée jusqu’à la stabilisation du pays contre seulement 9,5% qui sont pour la tenue rapide des élections présidentielles.

Grands défis

83% des sondés estiment que la lutte contre la pauvreté, la vie chère et la crise alimentaire demeure le plus grand défi auquel fait face actuellement le Mali suivi de la lutte contre l’insécurité/ contre les terroristes (81,4%). D’autres défis qui ressortent sont ceux de la lutte contre le chômage, l’assurance d’un meilleur accès à l’eau et/ou à l’électricité, l’amélioration de l’éducation scolaire et l’organisation des élections, entre autres.

Référendum

Sur le Référendum prévu le 18 juin prochain, dont la Campagne va s’ouvrir le 2 juin prochain, 55,2% des personnes interrogées (soit la majorité) ne connaissent « pratiquement rien sur la nouvelle Constitution » tandis que seulement 7% affirment en avoir une « bonne connaissance ». Concernant les intentions de vote lors du scrutin, 83,6% indiquent voter pour le « oui » contre 5,9% pour le « non » et 10,5% qui comptent s’abstenir. Alors que le débat continue sur la légalité du référendum organisé par le gouvernement de transition, 84% de maliens à Bamako estiment que le président de la transition Assimi Goita et son équipe doivent l’organiser contre 10,6% qui appellent à un renoncement.

Côte de popularité

A la tête des personnalités dont les Bamakois ont le plus d’opinion favorable, le  Chérif de Nioro, Bouyé Haidara  avec 71,4% d’opinion très favorable suivi du Premier ministre Choguel Kokalla Maiga (67,6%) et du leader religieux guide des Ançar dine, Chérif Ousmane Madani Haidara. L’Imam Mahmoud Dicko dont la cote de popularité est en baisse, ne reçoit que 24,6 % d’opinion très favorable contre 35,9% défavorable. Le président de la Transition, classé aux côtés des présidents américain, français, russe, burkinabé, nigérien et ivoirien recueille plus de 94% d’opinion très favorable suivi de Vladimir Poutine (89,2%.

Audience des médias

Concernant l’audience des médias que le sondage a également couvert, parmi les activités Web Tv et personnalités de médias les plus connues à Bamako, on retrouve « Ouverture Média » de Thierno N’diaye (61%), Sékou Tangara, le présentateur du « Débat du dimanche » sur Africable et « Mediatik » de Idriss Martinez Konipo.

Quant aux radios communautaires les plus écoutées des Bamakois interrogés, Les Radios Jekafo et Kledu se talonnent de très près (respectivement 28,6% et 28, 3%) suivi de la radio Baoulé (20,2% de la radio  Liberté (18, 6%) et de la radio Nieta (10,9%).

Réorganisation territoriale : une reforme qui ne fait pas l’unanimité

Initié depuis 2012, la Loi N°2012-017du 02 mars 2012 n’a jamais autant été proche d’être totalement appliquée au Mali. Malgré des contestations, elle a été adoptée par le Conseil National de Transition et est en phase d’être promulguée par le Président de la Transition.

C’est une ambition de plus de 10 ans de l’État du Mali qui est en passe d’être réalisée. Convoqués par le Président de la transition en session extraordinaire, le 20 février 2023, les membres du Conseil National de Transition (CNT) ont adopté avec des amendements six projets de loi portant réorganisation administrative du Mali. Ouvrant ainsi la voie à la mise en œuvre d’une réforme territoriale datant de 2012.

Les raisons de la réforme

Selon le ministère de l’Administration territoriale et de la Décentralisation, initiateur du projet de loi, la Loi N°2012-017du 02 mars 2012 portant création de Circonscriptions administratives en République de Mali a opéré une grande réforme administrative en créant 19 régions et le District de Bamako, mais n’a pas créé les circonscriptions administratives de région que sont les cercles et les arrondissements.

Ainsi les nouvelles régions de Nioro, Kita, Dioïla, Nara, Bougouni, Koutiala, San, Douentza et Bandiagara n’ont pas été dotées de cercles et d’arrondissements alors qu’à leur tête ont été nommés des gouverneurs et les membres de leurs cabinets, ce qui posait le problème de leurs ressorts administratifs.

« Dès lors, il devient nécessaire de déterminer les circonscriptions administratives et les collectivités territoriales des 19 régions. L’objectif est ainsi d’opérationnaliser et d’assurer le fonctionnement régulier de chaque région en déterminant ses circonscriptions administratives (cercles et arrondissements) et ses collectivités territoriales (régions et communes) dans un cadre spatial dynamique permettant de promouvoir le développement économique, social et culturel des différents terroirs », se justifie le département de l’Administration territoriale dans son projet de loi, lequel, indique-t-il, permettra d’assurer le maillage du territoire dans le respect des équilibres territoriaux et socioculturels en tenant compte des questions sécuritaires et garantira la présence de l’administration et des services sociaux de base sur toute l’étendue du territoire national.

D’autres enjeux majeurs de la réforme sont de doter chaque région des moyens humains, matériels et financiers nécessaires à son fonctionnement et de permettre aux citoyens de jouir pleinement de leurs droits à travers l’exercice de leurs compétences territoriales et leur participation aux compétitions électorales, gage de bonne gouvernance locale.

Il s’agit également pour le gouvernement de « rapprocher les populations de l’administration, facilitant leur accès aux services sociaux de base », ainsi que de renforcer la sécurisation des populations par la présence effective de l’administration à travers un maillage raisonné d’occupation de l’espace.

La nouvelle réorganisation territoriale devra aussi garantir « une meilleure représentation des populations à l’exercice de la démocratie locale », à travers leur présence dans les instances de décision des collectivités territoriales.

Sur un autre plan, le vote des projets de loi était aussi attendu pour rendre opérationnelle l’Autorité indépendante des gestions des élections (AIGE) sur l’ensemble du territoire national. « Sans ces textes, il était très difficile d’opérationnaliser l’AIGE, parce qu’elle n’arrivait pas à mettre en place ses démembrements dans les différentes régions. Ces projets de loi se rapportaient au Code des collectivités territoriales. Les régions ne connaissaient pas leurs limites, surtout les nouvelles. L’AIGE ne pouvait donc pas connaître le nombre de régions et de circonscriptions électorales nouvellement créées pour déployer ses démembrements », explique Youssouf Z. Coulibaly, Président de la Commission de l’Administration territoriale, de la décentralisation, du culte et de la réconciliation nationale du CNT.

Les changements

La carte administrative du Mali se retrouve entièrement chamboulée avec la création de nouvelles circonscriptions administratives et collectivités territoriales. Outre le nombre de régions qui augmente de 9, celui des cercles passera de 58 à 159, les communes de 748 à 825 et les arrondissements de 330 à 475. Cela aura comme conséquence  l’accroissement du nombre d’élus, actuellement de 147 pour les députés et de 703 pour les maires.

Autre innovation majeure, les 6 communes de Bamako seront remplacées par 7 arrondissements. « Au CNT, nous avons jugé nécessaire d’ajouter un septième arrondissement à Bamako : l’arrondissement de Kalaban-Coro. Il y avait des localités qui étaient à Bamako mais rattachées à Kati et relevant de la région de Koulikoro. Les populations avaient des difficultés à aller auprès des administrations. On a donc pensé qu’il fallait rapprocher l’administration des populations. C’est ainsi qu’on a rattaché à Kalaban-Coro les quartiers qui sont dans sa périphérique. Et tous les autres quartiers relevant de lui et situés ailleurs dans Bamako ont été rattachés aux arrondissements les plus proches », justifie le membre du Conseil national de transition.

Un quartier comme Sirakoro Méguetana, par exemple, qui relevait de Kati et est situé entre les quartiers de Sénou et Yirimadio en Commune VI du District de Bamako, a été ainsi raccordé au 6ème arrondissement de la ville. Aussi et surtout, la capitale est devenue une collectivité unique, avec un seul Maire. Les arrondissements seront dirigés par des sous-préfets, avec des Maires délégués désignés par le Maire principal. « Bamako érigé en District avec un Maire résout énormément de problèmes, parce que dans les textes actuels qui régissent la décentralisation il n’y a pas de hiérarchie entre les collectivités territoriales. Cette disposition a fait que dans la ville, il n’y a pas de hiérarchie entre le Maire du District et les Maires des 6 Communes. Nous avons constaté durant des années des problèmes à cause de cela », atteste Yacouba Traoré, le Président de l’Association des municipalités du Mali (AMM). Ce dernier se réjouit aussi de l’augmentation du nombre de communes, car, rappelle-t-il, malgré leur nombre croissant, l’État du Mali est resté sous-administré.

« Si aujourd’hui, en tenant compte de ces difficultés, nous allons au nombre de 825 communes, je trouve la réforme salvatrice. Elle va permettre non seulement de répondre à la sous-administration mais également de responsabiliser davantage les communautés et les citoyens autour des objectifs de développement », affirme-t-il.

La matérialisation

Si promulguées par le Président de la Transition, les lois relatives à la nouvelle réorganisation seront effectives au Mali, mais leur matérialisation suscite toutefois des inquiétudes. Tant à cause de la situation sécuritaire du pays qu’à cause des ressources financières qu’il faudra mobiliser pour rendre opérationnelles les nouvelles circonscriptions administratives et collectivités territoriales. Des difficultés qui ont nui à cette réforme, engagée et adoptée sous l’ancien Président de la République Amadou Toumani Touré, qui prévoyait alors le passage de 8 régions à 19. Depuis, même les régions de Taoudénit et de Ménaka, qui ont été créées en 2012 et leurs gouverneurs nommés en 2016, ne sont pas réellement opérationnelles. Pour preuve, les autorités administratives de la Région de Taoudénit sont toujours installées et travaillent depuis Tombouctou.

Pour la réussite du processus, sur le plan financier, le ministère en charge de l’Administration territoriale a annoncé d’ores et déjà qu’une enveloppe financière de 263 milliards est prévue pour l’opérationnalisation de la nouvelle réorganisation territoriale « de façon séquentielle, selon les moyens de l’État ». Elle servira dans un premier , sur une période trois ans, d’entre autres, à construire des bureaux et logements, à acquérir  des équipements pour ces bureaux et du matériel roulant et à prendre en charge le  personnel.

Des remous

Alors que la réforme est considérée indispensable par certains, son effectivité crée cependant des remous dans certaines localités, qui estiment être « lésées » dans le découpage. Comme à Niafunké, où la population a battu le pavé ce mardi pour protester contre « un découpage qui affaiblit la localité ». Cercle depuis 1905, la collectivité de 8 communes qui sollicitait d’être érigée en région, voit son territoire réduit à 2 arrondissements (Niafunké et Soumpi).

« La pilule est d’autant plus difficile à avaler qu’avant notre cercle, à l’époque rattaché à la région de Mopti, comptait 15 communes. Après, rattaché à Tombouctou en 1977, on s’est retrouvé à 8 communes. Maintenant, à 2 arrondissements avec ce nouveau découpage. Niafunké se retrouve affaibli et fortement réduit », estime Hamadoun Cissé, le Président de la jeunesse communale de la localité.

Plusieurs localités de la région de Gao (Haoussa Foulane, Taboye, Tacharane etc.) s’indignent également contre la réforme. Une centaine de personnes ont manifesté aussi dans la ville de Gao le 28 février pour contester le projet.

Autre localité, autre revendication. À Mahou, dans la région de Sikasso, les habitants ont barricadé les entrées du village pour exiger leur rattachement au Cercle de Koury, à 27 km d’eux, plutôt qu’à Yorosso, situé à 57 km.

Des manifestations attendues par les autorités de la Transition ? Lors de l’adoption du projet au CNT, le ministre de l’Administration territoriale, le Colonel Abdoulaye Maiga, a indiqué « qu’il s’agissait d’un dossier explosif, car touchant quelque part à l’identité de nos populations », et prôné « il est important de dire qu’il n’y a pas de gagnant ou de perdant. Je pense que c’est le Mali qui gagne ».

IBK : les derniers mois d’un homme éteint

Son humour et ses locutions latines nous manqueront à jamais. Ibrahim Boubacar Kéïta, Boua, le vieux, est décédé ce dimanche 16 janvier en sa résidence de Sébénikoro des suites d’une longue maladie. Depuis sa chute le 18 août 2020 à la suite d’un coup d’Etat militaire, l’homme gardait le silence. Retour sur ces derniers mois.

« Qu’Allah aide et bénisse le Mali. Je n’éprouve aucune haine vis-à-vis de personne. Mon amour pour mon pays ne me le permet pas. Que Dieu nous sauve.» Voilà la phrase qui a ponctué la dernière sortie médiatique d’Ibrahim Boubacar Keïta (IBK), au soir du 18 août 2020, jour du coup d’État qui l’a renversé.

Depuis cette date, l’ancien président avait gardé le silence et avait disparu de la scène publique. Malade, il partageait sa vie entre un hôpital américain àAbou Dhabiet sa résidence de Sébénikoro, entouré de ses proches. Mais il prenait surtout du temps pour lui. Beaucoup de ses anciens compagnons, alliés politiques, ou simples amis, ne le voyaient plus.

« Un homme éteint »

Plusieurs témoignages concourent à dire qu’IBK avait perdu de sa superbe ces derniers temps. « Ce qui est frappant, c’est qu’il apparaissait comme éteint, avait perdu sa flamboyance et qui ne lisait plus. Et un IBK qui ne lit plus, cela était quelque chose de terrible ! Il avait également perdu son humour et s’était recroquevillé sur lui-même», rapporte notre source. « Il ne prenait plus convenablement ses médicaments, et ne s’alimentait plus comme il le fallait. Je crois qu’il était dépité, démoralisé et profondément affecté. Un ressort s’est cassé, ressort physiologique, moral et intellectuel », renchérit une autre source.

Quant à ses activités politiques, IBK les avait abandonnées. « Il ne s’intéressait plus à la vie du parti, le Rassemblement pour le Mali (RPM), qu’il avait créé en 2001 et qui l’avait porté au pouvoir en 2013. « Depuis le coup d’Etat il n’a pas donné un seul mot allant dans le sens d’un conseil, d’une instruction particulière ou d’une demande de rencontre avec le parti », explique Me Baber Gano, secrétaire général du RPM.Il poursuit qu’IBK étant en résidence surveillée dans la foulée du coup d’État et jusqu’en janvier 2021, les contacts politiques étaient difficiles.

Crise et déclic

Après une détention de plus de deux semaines par l’ex-CNSP (Comité national pour le Salut du peuple), Ibrahim Boubacar Kéïta avait été autorisé à quitter le Mali le 5 septembre 2020 pour recevoir des soins aux Émirats arabes unis après un court accident vasculaire cérébral (AVC). De retour à Bamako quelques semaines plus tard, la junte au pouvoir l’avait remis dans ses droits en lui octroyant les prérogatives d’ancien chef d’État. Cependant, l’état de santé d’IBK ne s’améliorait pas, nécessitant un suivi régulier dans la capitale émiratie. Il était rentré à Bamako de son dernier séjour en novembre 2021, sans que le mal qui le rongeait n’ait pu être circonscrit.

Selon ses proches, il avait réellement été peiné par les multiples contestations et trahisons qui se sont soldées par le coup d’Etat militaire. Les ennuis judiciaires de son fils Karim Keïta, exilé à Abidjan, et l’éloignement de ses petits enfants le rongeaient, tout comme la situation d’un Mali isolé et mis au banc des nations

Lors de sa « démission » au Camp Soundiata Kéïta de Kati, c’est d’une voix grave et solennelle qu’il avait reconnu avoir « essayé de redresser le pays du mieux de ses efforts pendant sept ans », insistant pour « qu’aucun sang ne soit versé pour son maintien aux affaires». « Il avait de vraies intentions pour le pays. Certaines ont été traduites en actions. Mais souvent les personnes envoyées ou commises pour ce faire ont trébuché avec le panier », justifie une source qui l’a côtoyé depuis les débuts du RPM jusqu’au décès de l’ancien chef de l’État.

Notre source poursuit avoir discuté il y’a encore peu avec IBK durant plus de 45 minutes et affirme avoir découvert un homme « mal à l’aise ». « C’était un homme qui a toujours porté le Mali dans son cœur. Et ses derniers jours ayant coïncidé avec les jours actuels du pays, cela ne pouvait pas le laisser indifférent. Lors de mon dernier entretien avec lui, durant près d’une heure, j’évitais moi-même certains sujets pour ne pas le mettre mal à l’aise. C’était vraiment difficile. »

Boubacar Diallo

Mali-FIFA : Gianni Infantino en visite à Bamako ce jeudi

Le président de la FIFA, Gianni Infantino va effectuer une visite de travail de 24 h dans la capitale malienne ce jeudi 25 février 2021. L’information a été  donnée  par le président de la Fédération malienne de football (Femafoot), Mamoutou Touré dit Bavieux dans un tweet.

Durant sa visite, le patron de la Fifa rencontrera les autorités de la transition, notamment le Président Bah N’daw et les membres du gouvernement. Il effectuera une séance de travail avec le Président de la Femafoot et rencontrera le personnel de la Fédération.

Gianni Infantino posera également la première pierre du Centre  technique du Mali, entièrement financé par la Fifa dans le cadre de son programme « Forward ». Ce centre, très sophistiqué et comprenant une vingtaine de blocs, va abriter des joueurs du ballon rond.

Cette visite au Mali, première de l’italo-suisse depuis son élection à la tête de l’instance mondiale du football, s’inscrit dans le cadre d’une tournée africaine qu’il a entamée le 17 février 2021. Il s’est déjà rendu en Mauritanie, au Sénégal, en RDC, au Congo, au Rwanda et en Centrafrique.

 

Statues de colonisateurs : Qu’en est-il du Mali ?

Dans le sillage de Black Lives Matter, des manifestants s’en prennent à des statues héritées d’un passé esclavagiste et colonial. Une de Christophe Colomb décapitée aux Etats-Unis, une autre de Léopold II déboulonnée en Belgique, ou encore une de Charles de Gaulle vandalisée en France, la vague a gagné l’Europe, mais également l’Afrique, où, au Sénégal et au Congo, le débat sur ces statues a été relancé. Qu’en est-il au Mali ?

La passion qui entoure cet héritage colonial n’a pas encore submergé le Mali. La raison est peut-être que, des statues de l’époque coloniale, il n’en subsiste plus beaucoup. Parce que plusieurs d’entre elles ont été déboulonnées aux premières heures de l’indépendance, suite à la politique de dé-baptisation entreprise par les autorités de la 1ère République. Sous la 3ème République, à l’instigation du Président Alpha Oumar Konaré, certaines ont été réhabilitées. En septembre 2000 a été inauguré sur la route de Palais de Koulouba un « Parc des explorateurs » où se trouve une grande statue en bronze de Gustave Borgnis-Desbordes, ancien commandant militaire de Bamako et gouverneur français. 6 bustes sont également visibles. Ils représentent des explorateurs, dont René Caillié, décrit comme le premier Français revenu en vie d’un voyage à Tombouctou et un autre dont l’érosion a effacé le nom, présenté par la Direction nationale du patrimoine culturel comme étant l’Écossais Alexandre Gordon Laing, autre illustre Européen à avoir atteint Tombouctou, ou Paul Soleillet. Plus tard, en 2008, a été rajouté le buste d’Ibn Battuta, célèbre comme premier explorateur étranger ayant visité le Mali et pour ses récits de voyage à Tombouctou également. À côté des explorateurs, même si dans leurs biographies ils sont également dépeints comme tels, figurent Eugène Abdon Mage, officier de marine qui atteignit Ségou en 1864, et le missionnaire Augustin Prosper Hacquard, qui arrivera à Ségou en 1898.

« Une part de notre histoire »

En dehors de la capitale, à Ségou, un buste du colon Louis Archinard fait face au fleuve Niger. Même si, comme susmentionné, la question du sort des statues représentant des personnages coloniaux ne se pose pas encore au Mali, des échos sont tout de même parvenus. À la Direction nationale du patrimoine culturel, on assure que les déboulonner ne serait pas une solution, puisqu’elles font « partie de notre histoire et que cet acte ne la changera pas ». Même si l’on estime que « l’État sera obligé de se pencher sur la question » si la population manifestait.

Boubacar Sidiki Haidara

Mali – Mahmoud Dicko: « Une main tendue symbolise qu’on est loin de son peuple »

La Coordination des Mouvements, Associations et Sympathisants de l’imam Mahmoud Dicko (CMAS) ont tenu ce  mercredi 17 juin un point de presse au siège de la CMAS à Bamako. Le point de presse a été animé par Mahmoud Dicko, le coordinateur de la CMAS Issa Kou Djim et les présidents de la jeunesse et des femmes de la CMAS.

L’imam a fait observer une minute de silence en l’honneur des militaires récemment mort avant de s’emparer du microphone.

Dans son allocution, il soutient qu’avec la situation de crise que traverse la population, c’est « l’existence du Mali qui est danger ».

En ce qui concerne la rencontre du Président de la République avec les forces vives mardi 16 juin 2020 qui évoquait une main tendue du Chef de l’Etat à la population, l’Imam se questionne en ces mots:  » est-ce que cette main a été tendue? Non. C’est le peuple qui l’a contrainte. Et une main tendue symbolise qu’on est loin de son peuple.  Si c’était la main du Chérif de Nioro, nous allions l’embrasser. Mais ce n’est  pas le cas. »

Selon lui, à travers différentes manifestations et revendications,  » le Peuple a exprimé son mécontentement, et ceux qui nous gouvernent l’ont ignoré. (…)  Ce sont ceux qui nous gouvernent qui ont brûler ce pays. »

Il poursuit son allocution en invitant le peuple à « faire attention » car poursuit-il,  » on nous distraie. Il est temps qu’on sache que l’heure est grave. Tous les compartiments du pays souffrent. C’est ce qu’on leur dit. Nous devons faire attention.  Ils ont opposé tout le peuple.  »

En ce qui concerne la marche annoncée ce 19 juin 2020, l’Imam Dicko informe que  » les corporations de toutes les régions nous ont assuré de leur soutien pour la grande marche de ce vendredi ». Il convoque donc une sortie massive sans violences, ni insultes avant de fermer ce point de presse.

Idelette BISSUU et Boubacar Diallo

 

 

Mali: Le Mouvement du 5 juin appelle à un nouveau rassemblement vendredi  

Le mouvement du 5 juin – Rassemblement des forces patriotiques (M5-RFP) appelle à une nouvelle mobilisation générale vendredi 19 juin 2020 à partir de 14h à la place de l’indépendance de Bamako.

Ce nouveau rassemblement, qui fait suite à celui du 5 juin dernier s’inscrira toujours dans la principale revendication  du mouvement, à savoir la démission du président Ibrahim Boubacar Keita et de son régime.

Le M5-RFP après s’être réuni hier vendredi a arrêté la date consensuelle de la nouvelle manifestation, qui a été rendu publique ce 13 juin 2020 lors d’un point de presse tenu au siège de la CMAS à Magnambougou.

Plusieurs figures de la scène politique malienne qui se sont ralliés au M5-RFP ont répondu présent au rendez-vous, notamment L’ex premier ministre Modibo Sidibé, l’ex ministre Mohamed Aly Bathily, Maître Demba Traoré de l’URD, ou encore Paul Ismael Boro du Rassemblement des Maliens.

Pour Issa Kaou Djim, coordinateur général de la CMAS, « le peuple malien doit s’assumer vendredi prochain pour démontrer à IBK que le pays ne lui appartient ,ni à sa famille », visiblement très remonté contre la reconduction jeudi 11 juin du Premier ministre Boubou Cissé, chargé de former un nouveau gouvernement.

« Cette fois ci nous n’allons pas que manifester à Bamako mais également dans les régions du pays et nous appelons aussi à des manifestations dans la diaspora devant les ambassades et consuls du Mali à travers le monde. Nous demandons au peuple de ne pas quitter la rue jusqu’à ce que IBK ne démissionne », a martelé Clément Dembélé,  Président de la Plateforme pour la lutte contre la corruption et le chômage (PCC), membre du mouvement Espoir Mali Koura (EMK).

Germain Kenouvi

 

Laboratoires au Mali: Le LBMA en quelques mots

Créé en 2000 et dirigé par le Pr Ousmane Koïta, parasitologue et biologiste moléculaire qui a diagnostiqué en 2014 le premier cas d’Ebola au Mali, le Laboratoire de Biologie Moléculaire Appliquée (LBMA) est spécialisé dans la recherche sur les pathologies humaines et leurs vecteurs, les biotechnologies dans les productions végétales et animales, le suivi de cohortes en matière de santé publique (paludisme, fièvre jaune, dengue, fièvre de Crimée – Congo, etc.) et les anthropozoonoses, pathologies qui concernent à la fois les humains et les animaux.

Il compte 6 unités de recherche : Entomologie, Zoonoses, Parasitologie, Biologie Végétale, Génomique et Clinique. Si nous l’avons visité pour parler de l’actualité sanitaire, vu sa capacité à mener les tests de détection du nouveau coronavirus, il ne peut toutefois se résumer à cette seule compétence!

Covid 19 - Coronavirus - Laboratoire LBMA - Mali - Laborantin
Covid 19 – Coronavirus – Laboratoire LBMA – Mali – Laborantin

Comme tout laboratoire qui se respecte, le LBMA reçoit et forme en effet des chercheurs issus de différents instituts et facultés (Pharmacie, médecine, économie rurale, etc.). Il collabore au plan international avec de nombreuses universités, laboratoires et centres de recherche d’excellence, sur une nouvelle thématique « One health », qui traite des hommes, des animaux et de leur environnement. 

Citons, sans prétendre être exhaustifs, les universités de Montpellier et de Marseille en France, celles de Tulane, de Rhode Island et du Wisconsin aux États-Unis, l’université Ki Zerbo de Ouagadougou et l’Institut de recherche pour le développement (IRD), avec lequel le LBMA vient de lancer le Laboratoire Mixte International (LMI) Dyn-Pathos, pour étudier les maladies de certaines cultures (riz, coton) et l’évolution de la santé des agriculteurs exposés aux pesticides de synthèse chimique et aux risques environnementaux, co-dirigé par le Pr Koïta et Mme la Dr Marjorie Le Bars, chargée de recherches à l’Institut. 

Concluons en signalant les éminents chercheurs du LBMA ont déjà une quarantaine de publications scientifiques à leur actif dans les plus grandes revues internationales de référence, dont the Lancet, the American the Journal of Tropical Medicine an Hygiene Infectious Diseases ou the African Journal of Biotechnology.

Ramata Diaouré

 

Les joies de la circulation dans Bamako

Giffard Road, Nehru Ave, Kojo Thompson Road, Liberation Road, Independence Ave, Kwame Nkrumah Ave sont quelques-unes des routes d’Accra. Des routes à deux ou trois voies, véritables paradis pour les usagers de la circulation.

Qu’importe la taille, une voie, ou deux, ou trois, c’est le même topo : une discipline qui laisse le visiteur malien pantois et émerveillé. Si d’aventure il venait à l’idée de quiconque de s’amuser à créer une voie supplémentaire, les autres automobilistes lui feraient passer l’envie de jouer les pressés. Devant la bronca que sa fantaisie aura créée, la brebis galeuse s’évanouira dans la nature illico presto, sans demander son reste.

À Bamako, sur la route qui mène à Koulikoro en traversant Missira, Korofina, Djélibugu, Bulkasumbugu et autres quartiers, l’interpellation du malotru vous vaudra une réplique cinglante, à vous glacer le sang : « est-ce la route de ton père ou de ta mère ? ».

Les autres gaietés innombrables de la circulation chez nous ? Le premier qui pourra les citer toutes aura droit à un gueuleton au « Gigot d’or », en compagnie de la mousmé de son choix ! Les crevasses assassines, les panneaux de signalisation dégradés, des bords de routes aussi tranchants qu’un couteau de Tabaski… Le soir, les phares éblouissants, en symphonie blanc majeur ou jaune mineur, découragent tous ceux qui n’ont pas un instinct suicidaire et suffisent à eux seuls comme raison de confinement avant la lettre.

Et puis, il y a le cas des autres ! Vous avez bien deviné de qui il s’agit ? Une « petite » moitié est faite d’humains et l’autre « grande » moitié de fauves. La question qui devrait turlupiner toute personne raisonnable est comment l’Administration n’impose-t-elle pas aux importateurs de motos d’inclure obligatoirement le casque et de limiter la vitesse à 40 ou 50 km à l’heure ?

Au Rwanda, pays qui, manifestement, force l’admiration de bien des Maliens, et d’autres d’ailleurs, tous les motocyclistes ont l’obligation impérative de posséder, même quand ils sont seuls sur leur engin, deux casques, le second pour un passager éventuel. On pourrait aussi imposer le permis moto prévu par la loi. À ce propos, pourquoi ne pas adopter le système canadien du permis renouvelable tous les trois ans, qui offre un double avantage : renforcer la sécurité et accessoirement renflouer les caisses de l’État ?

Les dos d’âne ou « gendarmes couchés » (comment nos braves pandores peuvent-ils s’accommoder d’une image aussi peu glorieuse ?) sont l’illustration éloquente de l’impuissance des responsables de la circulation, coûtant des milliards à l’État, car si certains particuliers sont soucieux de ne pas abîmer leurs véhicules, beaucoup de chauffeurs des services publics n’ont cure de telles préoccupations. Véritable aubaine, puisque les frais de réparation, gonflés à souhait, constituent une source supplémentaire de revenus.

Il serait trop long d’évoquer les griefs contre les SOTRAMA, pourtant si utiles à la population, puisqu’ils suppléent les carences de l’Administration, insouciante devant la nécessité impérieuse de créer une société de transport public. Il serait tout aussi urgent d’importer au Mali la pratique de l’alcootest pour les chauffeurs grands amateurs de la dive bouteille aux véhicules sinistres aux décorations souvent douteuses !

Combien de véhicules et d’engins possèdent des feux rouges arrière en bon état et des plaques minéralogiques lisibles, à cause de la mauvaise qualité de leur éclairage ou d’une typographie calamiteuse ?

Les solutions pour normaliser à Bamako et à dans tout le pays la circulation, redoutable foire d’empoigne, ne manquent pas, pour peu que l’État veuille bien s’en donner les moyens : veiller aux normes routières, contrôler plus strictement les règles de la circulation et livrer une guerre impitoyable à l’indiscipline, conséquence d’un incivisme pathétique. Toutes conditions qui impliquent des agents de la circulation mieux formés et plus vertueux. Et, naturellement, une politique d’urbanisation plus rationnelle est plus que jamais indispensable!

Mali – Marche du 05 juin: Une pléiade de revendications à Bamako

La grande marche prévue ce 05 juin à Bamako rassemble de centaines de personnes au coeur de la capitale. Les forces de sécurité et les sapeurs pompiers sont mobilisés et encadrent les manifestants qui pour l’instant respectent la consigne de non violence d’une marche pacifique préalablement annoncée.
Marche du 05 juin – Il faut souligner qu’en cette période de Covid-19, toutes les mesures barrières ne sont pas respectées dans le contexte actuel. Tous les manifestants n’ont pas de masques et la distance barrière d’au moins un mètre n’est pas respectée.

 Les manifestants scandent des slogans comme « Libérez de Soumaila Cissé », « on a perdu Kidal », « l’éducation va mal », « l’hôpital des militaires annulé », « armée divisée », « IBK ne pleut plus, qu’il démissionne ». Ces messages sont le reflet de la crise sociale émaillée des marches et manifestations dans plusieurs secteurs de la vie de l’Etat.

Idelette Bissuu avec Boubacar Diallo

Lutte contre le Covid-19 : Faux sur toute la ligne ?

Alors qu’il peine à faire appliquer la plupart des mesures prises dans le cadre  de la lutte contre la propagation du Covid-19 au Mali et que les cas de contamination continuent de grimper à travers le pays, le gouvernement a opté, à l’issue du Conseil extraordinaire de défense nationale du 8 mai dernier, pour la levée du couvre-feu et l’instauration du port obligatoire du masque dans les lieux publics. De nouvelles mesures dictées par un concours de circonstances qui a abouti à un climat socio-politique délétère, mais qui viennent mettre à mal la cohérence dans la gestion de cette crise sanitaire, où l’État semble de plus en plus tâtonnant.

Il était attendu pour durcir les actions de prévention contre le coronavirus, près d’un mois et demi après l’apparition des premiers cas dans le pays. Mais le gouvernement a vu sa volonté d’aller vers des mesures plus restrictives se heurter à un enchainement de manifestations à travers le Mali, allant des contestations des résultats des élections législatives au rejet catégorique du couvre-feu et à l’expression d’autres mécontentements sociaux.

Dos au mur, l’État a pris du recul et décidé de la levée du couvre-feu, qui était en vigueur depuis le 26 mars 2020, alors que la propagation de la maladie est en nette augmentation.

Une levée hâtive ?

« Le mal sévit parmi nous », reconnaissait le Premier ministre Boubou Cissé dans son allocution du 9 mai, s’appuyant sur le rapport du Conseil scientifique qui constatait qu’à des degrés divers le virus se trouvait pratiquement dans toutes les régions administratives. Conseil scientifique qui avait auparavant demandé d’isoler Bamako et Kayes, épicentres du virus, avis devant lequel le gouvernement s’est montré balbutiant. « L’agenda technique et scientifique s’est heurté à l’agenda politique. Et le politique a pris le dessus. Les travers ont commencé au moment où le gouvernement  s’est entêté à organiser les élections législatives nonobstant la menace de la maladie dans le pays », pointe le sociologue Mahamadou Diouara.

Pour lui, cela veut dire que c’est l’État qui a commencé à ôter aux mesures préventives tout leur crédit, à travers un comportement contradictoire qui s’est ajouté aux abus dénoncés des forces de l’ordre durant le couvre-feu, qui ont cristallisé la population dans une posture de défiance, Il était donc obligé de reculer et de lever le couvre-feu, en contradiction avec le principe et la logique mêmes qui avaient commandé son instauration.

« La décision de lever le couvre-feu a été hâtive, mais elle se comprend. Il y a eu la connexion de plusieurs éléments, qui ont convergé de telle sorte que si l’État n’avait pas desserré l’étau cela aurait pu aboutir à une sorte de désobéissance civile généralisée, qui pouvait se terminer mal pour le pouvoir », souligne également Bouréma Touré, socio-anthropologue à l’Université des Lettres et sciences humaines de Bamako.

Propagation accrue ?

Le confinement général de la population malienne n’étant pas adapté au contexte socio-économique du pays, beaucoup pensent que l’instauration du couvre-feu participait considérablement à la limitation de la propagation de la maladie, les heures passées dehors étant réduites au moins pendant la nuit. Avec ce verrou qui saute, la vitesse de propagation de la maladie pourrait augmenter à bien des égards. Des bars ont par exemple rouvert dans la foulée, alors que leur fermeture court toujours.

« Pendant la journée, les gens sont soumis à une certaine pudeur et à une certaine retenue dans les contacts physiques. Mais avec la promiscuité dans certains lieux la nuit, le taux de contamination pourrait augmenter à une vitesse exponentielle », craint Mahamadou Diouara du cabinet Gaaya.

« C’est vrai qu’avec l’augmentation du temps passé dehors avec d’autres, le risque de contamination pourrait augmenter. Toutefois, les mesures préventives doivent être respectées normalement, de jour comme de nuit. Il en va de la responsabilité personnelle de chacun », relativise Dr. Abdoulaye Niang, analyste et Président de l’association « Joko Ni Maya ».

Une fin de Ramadan à risques

La levée du couvre-feu coïncide avec l’entame des dix derniers jours du Ramadan pour la communauté musulmane. Des jours marqués par l’intensification des prières surérogatoires dans les mosquées, de très tard la nuit jusqu’au petit matin.

Pour Mahamadou Diouara, il serait judicieux que les mosquées soient fermées pendant cette période, parce qu’il y a de fortes chances que ces jours se passent avec une intermittence de pluies, ce qui pourrait augmenter le taux d’humidité qui favoriserait la propagation du virus.

Par ailleurs, à en croire Thierno Hady Cheick Omar Thiam, Président du Conseil fédéral national des adeptes de la Tarîqa Tidjaniya (Confenat) et 2ème Vice-président du Haut conseil islamique du Mali (HCIM), le « nafila » n’est pas obligatoire, que ce soit avant, pendant ou après le Ramadan.

« Il est interdit en Islam que quelqu’un prie avec d’autres lors du « nafila ». Durant les dix derniers jours du Ramadan, cette prière était obligatoire uniquement pour le Prophète (PSL), pour qu’il veille pour Dieu. Elle n’est pas obligatoire pour les musulmans », explique le religieux.

« Il faut aujourd’hui donc sensibiliser pour que la majorité comprenne que tous les « nafilas » ne sont pas obligatoires et que prier ensemble durant cette période de coronavirus, dans les rues et dans les mosquées, ne fait que propager la maladie », préconise-t-il.

Selon le Président du Confenat, il appartient aujourd’hui à chaque Malien de savoir où se trouve son intérêt, parce que « la religion est là pour le bien-être de l’homme. À chacun de prendre ses responsabilités ».

Changer de cap

L’une des mesures également prise à l’issue du Conseil de défense nationale du 8 mai est le port obligatoire du masque dans les espaces publics, qui vient s’ajouter à la liste déjà longue des décisions prises sur le papier mais dont l’application peine à être effective.

Dans le domaine des transports, en l’occurrence, le laisser-aller est tout simplement criard. Quant aux cérémonies de mariages et de baptêmes, elles continuent à rassembler du monde au-delà de la cinquantaine de personnes autorisée.

« La décision rendant le port du masque obligatoire dans les espaces publics ne pourra pas être strictement appliquée. Même si l’État se mettait à distribuer des masques dans chaque carré, les gens les prendraient mais ne les utiliseraient pas », affirme Dr. Niang, pour lequel le programme « un Malien, un masque » relève plus d’une déclaration politique que de la statistique.

Cette attitude de certaines personnes résulte du fait que jusqu’à présent elles ne croient pas à l’existence du coronavirus au Mali, ce qui, selon le socio-anthropologue Bouréma Touré, est à imputer en partie à la défaillance de l’État en matière de sensibilisation.

« Il faut d’abord s’employer à rendre les gens conscients du problème. Ce n’est qu’après avoir gagné ce pari que les uns et les autres s’approprieront les mesures de prévention », suggère-t-il.

Pour reprendre la main dans la gestion de cette crise sanitaire au Mali, le gouvernement aurait grand intérêt à apporter d’importants changements stratégiques qui conduiraient l’ensemble des populations à se soumettre aux mesures prises, selon certains analystes.

« Je pense qu’il serait plus bénéfique de laisser le ministère de la Santé avoir le leadership dans toute la communication relative à cette pandémie. Les populations seront plus enclines à écouter ses messages que ceux des acteurs éminemment politiques », propose Mahamadou Diouara.

« Il faut absolument changer la façon de gérer cette crise, parce que telles que les choses se présentent aujourd’hui, l’attitude de l’État est plus que décevante », déplore aussi Dr. Touré, qui est convaincu que ce changement n’est malheureusement pas près d’arriver.

COVID-19 : Entre incivisme et insouciance, le virus progresse

Le Mali enregistre à la date du 9 mai 692 cas de COVID-19 dont  298 guéris et près de 40 décès. Ce sinistre bilan semble ne rien dire à la plupart des Maliens qui ne se soucient pas des mesures barrières.

Le constat pourrait indiquer que l’on n’est pas en situation d’urgence sanitaire. Ce samedi, 9 mai, au parking Vox  à Bamako-coura, en commune III, on se bouscule pour avoir les meilleures places dans une sotrama au milieu de la cour. Un kit de lavage des mains, composé d’eau et de savon, se trouve près de l’entrée du transport en commun.  Goundo Konaté est la première à se trouver une place. Sans masque, la cinquantenaire semble insouciante.  Au bout de cinq minutes, le vieux véhicule est bondé  et sur la vingtaine de passagers qu’il contient, un seul s’est lavé les mains, mais demeure sans masque comme tous les autres. Or, le mois dernier, c’est au parking Vox même que le ministre de la Santé et des Affaires sociales Michel Hamala sidibé accompagné d’une forte délégation, dont le président du Conseil Malien des Transporteurs Routiers (CMTR) avait fait don de gels hydro alcooliques, de masques et de gants. Aujourd’hui, le parking enregistre uniquement deux kits de lavage des mains. Cette scène témoigne de l’insouciance de la plupart des Maliens en ces temps de crise sanitaire. « La situation désole et elle a pour nom l’analphabétisme et l’incivisme de nos concitoyens. On avait demandé un soutien financier au gouvernement afin de pouvoir détacher des personnes pour la sensibilisation des passagers au lavage des mains, requête sans suite malheureusement », explique Amadou Salif Diallo, secrétaire général adjoint de la section transport de la Confédération Syndicale des Travailleurs  du Mali (CSTM).

Port du masque obligatoire

Mais bien au-delà des transports, l’insouciance est présent ailleurs. A l’Agence principale de la  BNDA, à l’ACI 2000, une solution hydro-alcoolique est fixée à l’entrée de l’un des guichets automatiques de billets. Plusieurs clients y font des opérations sans l’utiliser. Et quand on leur demande pourquoi, aucun ne répond, sinon qu’avec des sourires.

A l’issue du conseil national de défense nationale du 8 mai, le gouvernement a rendu obligatoire le port du masque dans les espaces publiques. A l’égard de certains comportements inadéquats avec la prévention du virus, la mesure sera-t-elle respectée sans contrainte ? Sinon, place devrait être à la sensibilisation encore car pour l’heure, beaucoup sont à la fois « victime et le bourreau, plaie et couteau ».

Immeubles inachevés : Des mesures de sécurité non respectées

Ce serait un euphémisme de dire que Bamako est en chantier, tant dans la capitale les constructions sortent de terre. « Quand le bâtiment va tout va ! », la célèbre expression ne devrait néanmoins pas faire de l’ombre aux mesures de sécurité réglementaires qui doivent accompagner les différents chantiers. Mais cela ne semble pas être pour aujourd’hui.

Selon Cheick Sadibou Kanté, Président de l’Ordre des architectes du Mali, 70 à 80% des chantiers ne répondent pas aux normes. Constructions empiriques, matériaux non normalisés, non-respect des textes, les carences sont nombreuses et conduisent souvent à des sinistres. En septembre 2019, un bâtiment en construction s’est effondré à Banconi Salembougou, tuant 15 personnes.

Un drame qui a conduit les autorités à s’intéresser de près à la question et à faire une troublante découverte. Devant les tribunaux, aucune suite n’avait été donnée à près d’un millier de procès-verbaux (PV), selon Kanté. Rédigés par des brigades rattachées aux services techniques de l’Habitat, elles sont destinés à la justice, qui seule a le pouvoir de stopper les chantiers non conformes.

Les cas les plus fréquents sont ceux de constructions n’ayant pas fait appel à l’expertise d’un professionnel. « Avant toute délivrance d’un permis de construire, il faut au préalable qu’un architecte agréé réalise un plan de construction qui sera transmis par la suite au maire de la commune concernée par le chantier », explique Cheick Sadibou Kanté.

Un préalable qui n’est pas toujours respecté. Quand il l’est, c’est « simplement pour obtenir le permis de construire », déplore-t-il. Un chantier sans suivi par un professionnel est tout autant dangereux. Notre interlocuteur regrette également que le marché soit inondé de matériaux qui ne sont pas conformes. Pour des raisons de coûts, beaucoup préfèrent se les procurer au détriment de la qualité.

Boubacar Sidiki Haidara

Insécurité : Bamako, nid de bandits

Un manteau de terreur enveloppe Bamako en ce début d’année 2020. Caractérisé par des bandits qui ciblent des commerces lors de braquages dignes du cinéma, qui dépouillent et agressent, parfois même en plein jour. Au moins cinq braquages « osés » à mains armées ont été enregistrés dans la ville en l’espace de quelques semaines. Si les autorités en charge de la sécurité tentent de faire face à cette nouvelle donne et ont déjà réussi à appréhender quelques-uns de ces « gangsters », les craintes ne sont pas dissipées dans la population.

Les temps ont changé, les modus operandi aussi. Les braquages de nuit à domicile ont quelques peu laissés place à des techniques nouvelles. Trois ou quatre jeunes cagoulés, armés de pistolets automatiques, débarquant à moto et opérant de manière clinique. Quelques minutes suffisent pour réaliser un coup qu’ils n’hésitent plus à faire en pleine journée.

Boutiques, agences multiservices (Mobicash, Orange Money, Western Union, Wari, Canal+, etc.), guichets automatiques, supermarchés, entre autres, sont les nouvelles cibles des braqueurs. Des endroits où ils peuvent en un temps record mettre la main sur de l’argent liquide et s’enfuir.

Les attaques se sont multipliées dans le district de Bamako et dans sa périphérie depuis environ trois semaines. Dans la nuit du 22 au 23 janvier, un boutiquier a été attaqué et dépossédé d’une forte somme d’argent près de l’école publique de Kalaban-coura, en Commune V.

Quelques jours plus tard, le 25 janvier, dans le quartier des 1008 logements à ATTbougou, les populations, médusées, assistaient à une série de braquages dirigés contre une boutique et deux cyber-cafés, incluant des multiservices de transfert Orange Money, Mobicash et Canal+.

Selon des témoins de la scène, ils étaient quatre, armés et cagoulés, sur deux motos, à débarquer aux environs de 19 h, tirant trois coups de feu et endommageant au passage les vitres d’un véhicule garé tout près. Au final, divers matériels informatiques et plus d’une dizaine de millions de FCFA auraient été emportés.

Comme si cela ne suffisait pas, et toujours selon le même mode opératoire, un autre braquage a été opéré trois jours après, le 28 janvier, à Sébénicoro, où trois bandits armés ont attaqué vers 21 heures une boutique multiservices et de vente de télévisions à écrans plats, non loin de l’axe principal bitumé, à environ 400 mètres du commissariat de police du 9ème arrondissement. Une importante somme d’argent et une moto Djakarta ont été volées.

Les Bamakois inquiets

Avec ces multiplications des braquages, de jour comme de nuit, beaucoup d’habitants de la capitale, surtout les commerçants, les propriétaires de boutiques et les gérants d’agence multiservices de transfert d’argent et de distribution, craignent pour leur sécurité. Ils sont nombreux à interpeller le gouvernement, notamment le ministère de la Sécurité et de la protection civile pour que des mesures rigoureuses soient prises pour stopper es divers cambriolages.

« Nous ne sommes plus sereins dans nos boutiques, parce qu’à n’importe quel moment des bandits  armés peuvent surgir de nulle part pour nous braquer. Personnellement, je ne laisse plus ma boutique ouverte au-delà de 22h30, alors qu’autrefois je ne fermais qu’à 1h du matin », déplore Ibrahima Cissé, propriétaire d’une boutique à Kalaban-coura.

« Il faudrait que la police et la gendarmerie arrivent très rapidement à contrôler la situation parce que c’est inadmissible que cela continue. En un clin d’œil, ces malfrats nous dépouillent de sommes importantes et c’est tout notre commerce qui s’écroule. Ces bandits doivent croupir en prison », ajoute Cissé, visiblement très remonté.

Pour Harouna Sangaré, gérant d’un kiosque Orange money à Niaréla, qui dit craindre chaque jour un braquage de son poste mais s’en remet à Dieu pour sa protection, ce qui se passe actuellement dans la ville est très préoccupant.

« Déjà, nous avons remarqué que les patrouilles se sont intensifiées la nuit, mais il faudrait également penser à des mesures strictes au cours de la journée, parce que les malfrats n’opèrent pas que la nuit », déclare-t-il.

Dispositif renforcé

Aussitôt après les premiers  braquages, le ministère de la Sécurité et de la protection civile s’est penché sur la situation et a donné aux forces de défense et de sécurité  des instructions fermes de renforcement du dispositif sécuritaire sur Bamako et ses environs.

Le 22 janvier 2020, le Directeur général de la police nationale, l’inspecteur général Moussa Ag Infahi, a rencontré les commissaires des arrondissements de Bamako, Moribabougou, Kalaban-coro et Kati et les commandants des brigades spéciales d’intervention.

Après avoir condamné les cas de braquage commis dans la capitale et dans sa périphérie, le premier responsable de la police nationale a invité les différents chefs à être sur le terrain afin de bien coordonner les missions avec leurs éléments.

« Il nous été demandé de sortir à des heures propices aux attaques, de faire un maillage sur Bamako et sa périphérie, de mettre la pression sur la vérification des motos et de multiplier les check points pour faire ralentir les gens, parce qu’en cas de braquage dans un secteur de la ville,  s’il n’y a pas de barrage de police, les braqueurs s’échappent plus facilement », explique le Directeur régional de la police nationale du District de Bamako, le contrôleur général Siaka Bouran Sidibé.

« Nous avons renforcé nos effectifs et  nous les avons dotés des moyens adéquats pour sillonner toute la ville, de jour comme de nuit,  sans relâche, et pour être prompts dans leurs interventions. Les contrôles d’identités et les fouilles des véhicules ont été aussi intensifiés », souligne-t-il.

Une  vaste opération de ratissage, conduite par la gendarmerie nationale, avec à sa tête le lieutenant-colonel Alpha Yaya Sangaré, a également été entamée depuis quelques jours à Bamako et environs pour mieux sécuriser la capitale et ses alentours. Cette opération, dans laquelle sont engagées différentes unités de la gendarmerie, a pour principal objectif de diminuer considérablement les risques d’insécurité et de rassurer les populations.

Premiers résultats

« La situation actuelle à Bamako est critique et  je veux des résultats. L’insécurité est en train de gagner du terrain et cela est inadmissible », déclarait en substance le Directeur général de la police nationale lors de la réunion du 22 janvier.

Des résultats, il y en a eu beaucoup par la suite, à en croire, le Directeur régional de la police nationale du district de Bamako, le contrôleur général Siaka Bouran Sidibé.

« Nous avons interpellé deux braqueurs qui ont récemment participé au braquage d’un car à Bougouni, où un policier a trouvé la mort. À Bamako, au niveau des 6ème, 7ème et 12ème arrondissements, nous avons interpellé des braqueurs en possession d’armes », affirme-t-il.

« Deux des braqueurs de Sébénicoro ont été également arrêtés et nous avons saisi des motos, des sommes d’argent, des clés USB, beaucoup de téléphones, des munitions de pistolets mitrailleurs et automatiques, des pieds de biche, des marteaux, etc. », poursuit M. Sidibé.

À l’en croire, les enquêtes se poursuivent pour interpeller les éventuels complices de ces malfrats et, ceux qui sont arrêtés,  et sont d’ailleurs tous des repris de justice déjà répertoriés dans les archives de la police, sont traités comme des suspects, mêmes s’ils reconnaissent les faits, et seront déférés et mis à la disposition du Parquet pour être jugés.

Si nous en sommes là aujourd’hui, est-ce à dire que les opérations « coup de poing » menées il y a presque exactement un an dans la capitale, et qui avaient permis d’appréhender plusieurs suspects, ont montré leurs limites ?

« Non », répond le contrôleur général Sidibé, pour lequel, à l’époque « il y avait beaucoup plus de braquages sanglants à domicile et qu’on parlait de véritables nids criminogènes, ce qui n’est plus trop le cas aujourd’hui, avec des bandits qui sont plutôt dissimulés dans la population ».

« Certes, il ne peut pas y avoir zéro risque de braquage, mais la situation est sous contrôle », assure-t-il.

Désenclavement : Dans l’attente des chantiers

Longtemps accessible par la voie ferrée, la région de Kayes n’entend plus siffler le train depuis quelques années et la route qui la relie à la capitale « a  pratiquement  disparu ».

Si la mobilisation a conduit à un début de solution pour la route, les cheminots fondent beaucoup d’espoir sur les « démarches »  en cours pour relancer le chemin de fer, convaincus que ces deux voies sont complémentaires et indispensables pour le désenclavement de la région.

« Avec le trafic actuel, les routes peuvent difficilement tenir au-delà de 3 ans. Il faut donc des trains pour soulager la route », soutient Bolidjandjan Keïta, le Président des Conducteurs de train de la société Dakar Bamako Ferroviaire (DBF), coordinateur traction.

Même si la situation a peu évolué depuis la fin de leur grève de la faim, le responsable syndical reconnait « la bonne volonté » des autorités. Mais malgré le paiement de 4 mois de salaire, ils sont aujourd’hui « revenus à 8 mois de salaires impayés », déplore-t-il.

Sur l’évolution du chantier des rails, il note cependant des progrès. « Sur le tronçon sénégalais, il y avait un pont qui était hors d’usage. Il a été réparé et la réception doit avoir lieu dans les jours à venir ».

De lents progrès

À Bamako, l’administrateur  de la  DBF chargé de gérer la phase transitoire souhaite également lancer les travaux de réfection de la voie ferrée. Une étape essentielle attendue avec beaucoup d’espoir.

Cependant, des avancées réelles ne pourront être enregistrées que lorsque les 12 voitures commandées, ce qui n’est pas encore le cas. « Si la volonté des États accompagne l’administrateur, nous avons espoir dans  la reprise », souligne M. Kéïta.

Lors de la nomination de l’administrateur, en 2018, il avait été demandé au Mali et au Sénégal de verser 10 milliards chacun pour relancer les travaux.

Dans le schéma actuel, il a été décidé de renoncer à ce montant et demandé à chaque partie de jouer son rôle, notamment en payant les travailleurs en attendant cette relance.  Ce qui est le cas au Sénégal mais pas encore au Mali.

À Ménaka, c’est un autre projet qui fait naître l’espoir, celui de la route qui liera la région au reste du Mali et à la frontière avec le Niger, d’où vient la plupart de « ce qui est consommé ici », assure Harouna Ibatane Yattara, le Président du Mouvement des jeunes de Ménaka.

« Ce projet fait partie des actions prioritaires de l’alliance G5 Sahel (2019 – 2021) ». Et les autorités ont promis de faire tout pour accélérer le plaidoyer autour de la construction de cette route », conclut M. Yattara.

La banque UBA ouvre ses portes à Bamako

United Bank for Africa (UBA) a officiellement ouvert ses portes au Mali ce 4 février 2019. En présence du président de la République et des membres du gouvernement ainsi que des responsables de la banque panafricaine. Présente dans 20 pays en Afrique, au Royaume-Uni, en France et aux États Unis, la banque ambitionne de contribuer à relever les défis du secteur bancaire en Afrique et d’être très rapidement parmi les 3 meilleures banques du pays.

Avant de procéder à la coupure du ruban symbolique à l’agence principale d’UBA Mali sis au quartier Hamdallaye ACI, M. Ibrahim Boubacar Kéita a tenu à prononcer quelques mots en guise de « témoignage ». Le président de la République a ainsi exprimé sa reconnaissance et sa fierté au « secteur privé malien et africain » pour leur engagement « à relever les défis pour notre dignité à tous » a-t-il souligné. Il a aussi salué l’engagement de ce groupe panafricain en faveur de l’inclusion financière et celui de son président à la formation de ressources humaines de qualité à travers l’octroi de bourses, chaque année à des jeunes entrepreneurs.
En devenant la vingtième filiale africaine du groupe et la quatorzième banque de la place, UBA Mali veut compter parmi les 3 meilleures d’ici à 2022, selon M. Alhassane Sissoko son Directeur Général. La banque qui démarre avec 2 agences dont celle du siège à Bamako, souhaite rapidement couvrir le District et atteindre les autres régions du Mali.
Si elle a la réputation d’avoir une clientèle institutionnelle, UBA se veut une banque à vocation universelle. S’engageant aussi bien dans le financement des grandes entreprise que des petites et moyennes et aussi les particuliers. Pour ce faire, elle adopte une stratégie adaptée à chaque segment, selon ses responsables. Avec un taux de bancarisation de 12 % sous nos cieux, UBA entend contribuer à une plus grande inclusion financière et à jouer pleinement son rôle dans le financement de l’économie.
Le Mali est le premier producteur de coton en Afrique, le troisième producteur d’or du Continent et la troisième économie de la zone UEMOA, avec un taux moyen de croissance de 5 %. Des atouts , qui justifient la venue d’UBA au Mali, et représentent aussi un fort potentiel pour le développement économique du Mali.
Couronnée meilleure banque numérique en 2018, la banque se veut une référence en matière de solutions digitales et compte se focaliser sur ces principaux leviers que sont : l’excellence du service client, l’innovation dynamique (digitalisation) et l’accompagnement de l’Etat et des acteurs de « l’économie réelle ».
Dans cette dynamique d’expansion, la banque entend mettre ses 70 ans d’expérience au service du développement économique et social du Continent et l’inclusion financière Mali et sur le Continent.
Avec des centaines de milliards déjà investis en énergie, infrastructures et éducation dans la zone UEMOA et CEMAC où elle évolue, le Mali ne fera pas exception à cette règle, promettent les responsables de la banque.

 

Agressions sexuelles : Bamako, une ville dangereuse pour les femmes ?

Dans une récente étude publiée par Plan International sur les agressions sexuelles dans le monde, Bamako, a été classée parmi les villes les plus dangereuses en matière d’agression à l’égard des femmes. L’enquête menée  entre mai et août décrit un phénomène qui interpelle. Dans la ville des 3 caïmans, des adolescentes et des jeunes femmes sont victimes d’agressions sexuelles. Des victimes qui peinent encore à se départir de la honte pour dénoncer leurs agresseurs, dont les actes restent pour la plupart impunis.

Selon les conclusions d’une étude menée par l’ONG Plan International, Bamako est parmi les villes les plus dangereuses pour les femmes (agressions sexuelles, enlèvements, meurtres…). Parue la semaine dernière, l’étude, menée en ligne auprès de 392 experts des droits de l’enfant et des femmes, place la capitale malienne au 17ème rang, après Johannesburg et Ouagadougou mais avant Stockholm et New York. 22 villes étaient concernées et dans lesquelles un minimum de 15 experts par ville devaient répondre aux questionnaires de l’ONG. Les critères de choix des différentes villes ne sont pas définis dans l’étude. Cette dernière précise toutefois que dans les 22 villes sondées « le harcèlement sexuel est le principal risque pour la sécurité des filles et des jeunes femmes ». 60% des experts affirment que « les actes de harcèlement sexuel ne sont jamais ou difficilement dénoncé aux autorités ». A la question de savoir à combien ils évaluent les risques d’agressions sexuelles ou de viols à Bamako, les experts l’estiment à 32%, devant des mégalopoles comme New Delhi (Inde) ou encore le Caire (Egypte). Des affirmations qui étonnent le commissaire principal Marie Jeanne Sangaré, commandant de la Brigade des mœurs. « Je ne sais pas d’où ils tirent ces conclusions, mais je ne saurais dire que Bamako fait partie des villes dangereuses pour les femmes » assure-t-elle. Celle qui dirige l’unité qui lutte contre ces cas d’agressions depuis 2015 affirme être très surprise. En 2017, son département n’a enregistré « que » cinq cas de viols, sept de pédophilies, un inceste, mais tout de même 28 attentats à la pudeur dirigé à l’encontre de mineurs. Pour l’année en cours, trois viols ont été répertoriés. Parmi lesquels le sinistre viol collectif qui a circulé sur les réseaux sociaux et dont les images avaient suscité l’émoi de toute la capitale. Pour ce cas, précise la commandante, il a fallu une dizaine de jours à la victime avant de se présenter dans leurs locaux. Ce qu’elle regrette. « Après une agression sexuelle, la victime doit être prise en charge dans les 72 heures, au-delà, elle s’expose ». A moins de trois mois de la fin de 2018, les chiffres sont en baisse. 5 cas d’attentats à la pudeur et un cas de pédophilie complètent le tableau des violences sexuelles à la brigade des mœurs. Toutefois, elle reconnait que tous les cas ne sont pas signalés à leur niveau. Certains le seraient directement dans les commissariats, la non uniformisation des données rend difficile une compilation plus large.  Une fois répertoriée, une expertise médicale est demandée par les forces de l’ordre. « Nous recevons des cas, mais ce n’est pas très fréquent et le plus souvent ce sont des viols commis sur des mineures ou des adolescentes non encore mariées », précise le professeur Issa Diarra, chef du service gynécologique de l’hôpital Mère-Enfant du Luxembourg. Etape délicate pour de nombreuses victimes. « Nous ne devons pas les obliger. Il faut établir une relation de confiance avec les victimes, c’est la base.  Si vous perdez cette confiance, vous prenez le risque que la victime se braque » affirme le commissaire principal Sangaré. Les cas répertoriés ne constituent que la face visible des crimes commis.

Des causes injustifiables Les violences que subissent les femmes sont diverses. Harcèlement, viol, violence physique et morale. Les causes mises en avant ne justifient pas les déchainements. « Parfois, ce sont des comportements liés à l’habillement qui provoquent  mais aussi il y a des hommes qui ne sont satisfaits que quand ils agressent la femme », note le professeur Issa Diarra. La ville de Bamako devient un carrefour où se mêlent divers profils. En plus du climat d’insécurité et de banditisme qui y règne, la cité de 3 caïmans est un réservoir de délinquance juvénile. Madame Diawara Bintou Coulibaly, présidente de l’Association pour le progrès et la défense des droits des femmes (APDF) n’est en rien surprise par la place qu’occupe Bamako. « Les agressions s’accroissent à cause des jeunes qui ne cessent de se droguer », soutient-elle. Avant d’ajouter que les dérives actuelles prennent leur essence jusque dans l’effondrement de la cellule familiale. Nous avons eu des cas où le mari, sous l’effet de la drogue, a poignardé 33 fois sa femme », rappelle celle qui milite pour l’émancipation de la gente féminine. Son association assure-t-elle a reçu de janvier à octobre 2018, 249 dossiers de femmes ayant subi des violences.

Des séquelles pour la vie « Quand une fillette est victime d’une agression sexuelle, cela  reste  toujours  dans sa mémoire. Très souvent, même quand elles sont mariées elles ont peur de l’homme », révèle le professeur Issa Diarra. Les conséquences des actes sur les victimes sont indescriptibles. « Il y a aussi très souvent  la frigidité qui s’installe. Et ce n’est pas le gynécologue seulement qui peut les soigner, il faut aussi un psychologue », souligne Diarra. « Ce sont des séquelles qui restent  très longtemps » appuie-t-il.

Malgré ces conséquences dévastatrices, la pratique est un sujet tabou au sein de la société malienne.  Les victimes de viol, par peur des reproches, se résignent au silence. Le regard de la société, parfois répressif, freinent leurs expressions. En plus de leur dignité volée, elles reçoivent les échos négatifs d’un milieu conservateur. Elles se culpabilisent, la mort dans l’âme.

Une complaisance partagée ? Il y a une semaine, dans le quartier de Banconi, une fille de 14 ans a été violée par un groupe de cinq jeunes. D’eux d’entre eux auraient été appréhendés par le sixième arrondissement qui le transfère devant le procureur de la commune VI. « Mais ce dernier refuse de poser tout acte tant que la grève des magistrats a cours », raconte Madame Bouaré Founé Samaké, présidente de Wildaf. Pendant ce temps, la victime peine à marcher à cause de la violence subie. « Elle est pratiquement couchée. Elle marche à peine, alors que ses violeurs se promènent à  Bamako », explique-t-elle, révoltée. Les interventions de personnalités influentes étouffent  l’affaire.  « Les chefs de quartier et les religieux se sont réunis pour que les auteurs n’aillent pas en prison », rapporte encore Madame Bouaré.

Pourtant, de telles atteintes à l’intégrité de la femme doivent secouer les consciences. Mais l’absence de justice pour les abusées apparait comme un autre supplice. Le plus souvent, les coupables sont libérés avant même de comparaitre.  « Si  ces pratiques continuent c’est qu’il n’y a pas de punition. En cas de viol, les parents sont tentés de régler à l’amiable le problème », s’indigne de son côté Madame Diawara Bintou Coulibaly, présidente nationale de l’Association pour le progrès et la défense des droits des femmes (APDF). Des apartés qui, selon la présidente, amplifie le phénomène. La complaisance des acteurs contribue à la violence.

Que faire ? Face à l’ampleur des violences, une mobilisation est nécessaire pour stopper ces viles pratiques. La sensibilisation des jeunes filles, des familles et des pouvoirs publics serait une initiative porteuse. « Il faut réellement que la justice  soit égale et rendue pour tout le monde », formule le gynécologue. Des mesures préventives doivent être envisagées pour endiguer ce phénomène. Chaque femme violée est un rêve qui s’écroule. Et les victimes dans leur silence, parlent.

Jobs de vacances : Un bon business

D’année en année, le travail des élèves pendant les vacances est de plus en plus visible à Bamako. Cet état de fait s’explique à plusieurs niveaux, d’ordre personnel, familial ou économique. Mais certains s’interrogent sur les effets négatifs de cette pratique sur les enfants.

Les vacances scolaires sont des moments dédiés au repos des enfants après neuf mois de dur labeur. Pendant ces périodes de détente et de repos, certains montent de petits business, la plupart étant des élèves du second cycle ou du lycée. Leurs motivations sont diverses, allant d’une volonté de tirer profit d’une activité à l’ambition de venir en aide à ses parents. « Je profite de ces moments pour me faire de l’argent, car avec mon petit commerce je parviens à mettre de côté quelques sous », déclare Bintou Traoré, une lycéenne. Pour Ousmane Diarra, un élève qui va en 9ème année à la rentrée prochaine, travailler pendant les congés permet d’aider les parents à acheter les fournitures scolaires.

Des avis partagés Ces jeunes sont très présents au Grand marché de Bamako, aux arrêts des Sotrama à travers la ville et autour du Monument de l’Indépendance. Munis de jeux divers, de biscuits, de moustiquaires, de sucettes ou de sachets de beignets de crevettes, ils les proposent aux automobilistes. Certaines mamans ayant comme activité principale le commerce amènent leurs enfants avec elles pendant les vacances pour qu’ils les aident et afin d’avoir toujours l’œil sur eux. « Je viens avec mes deux garçons au marché pour bien les surveiller, car Dieu seul sait ce qui pourrait arriver si je les laissais seuls à la maison », explique Fanta Doucouré. « Certes cette activité des jeunes écoliers leur permet de gagner de l’argent à la sueur de leurs fronts, mais force est de reconnaître qu’elle peut aussi avoir un impact négatif sur leurs études s’ils y prennent trop goût », affirme Samba Touré, économiste. Il interpelle donc les parents pour qu’ils encadrent bien les enfants et l’État pour qu’il veille à leur sécurité.

C’est bientôt, la reprise des cours et certains jeunes vendeurs comptent arrêter leur petit commerce dans quelques jours afin de se reposer avant la rentrée. « En deux mois j’ai fait un bénéfice de 25 000 francs CFA, sans compter mon argent de poche quotidien », précise Amadou Bamba, un élève de 6ème année. « Prendre de son temps pour se faire de l’argent est quelque chose de positif », confie Issa Bagayoko, un lycéen.

Rapport Banque mondiale : Bamako face aux défis de l’urbanisation

La Banque Mondiale a présenté aux journalistes la cinquième édition de son rapport « Bilan économique AFCW3 (Afrique Occidentale et Centrale) ». Le rapport expose les défis de l’urbanisation en Afrique.

Intitulé « Les défis de l’urbanisation en Afrique », le rapport se penche particulièrement sur  trois capitales en Afrique de l’ouest à savoir Bamako, Conakry et Niamey en réfléchissant sur la manière dont ces villes pourraient exploiter et développer leur potentiel en matière de productivité et de croissance. Malgré leur contribution significative à l’économie nationale, à hauteur respectivement de 34% du PIB du Mali et à environ 27% de celui de la Guinée et du Niger, ces trois villes ne sont pas de véritables moteurs de croissance. « Dans les trois villes, la productivité du travail, calculée en tant que valeur ajoutée brute par habitant, est faible et n’a pas évolué au cours des quinze dernières années, contrairement à la moyenne de 15 autres villes d’Afrique Subsaharienne », a souligné Meskerem Brhane, co-auteur du rapport et responsable des programmes d’urbanisation de la Banque Mondiale dans ces pays.

Le rapport relève que la croissance de la population urbaine dans ces trois capitales ne s’est pas accompagnée d’un accroissement proportionnel du PIB, comparée à d’autres pays en développement. C’est pourquoi l’étude vise d’abord à comprendre pourquoi la croissance urbaine en Afrique de l’ouest n’a pas été associée au développement urbain et ensuite comment les villes de Bamako, Conakry et Niamey peuvent devenir plus productives et habitables dans le futur. Selon  Soukeyna Kane, Directrice des opérations de la Banque Mondiale pour le Mali, le Niger, le Tchad et la Guinée, « Pour devenir des vecteurs de croissance et fournir des services publics adaptés, Bamako, Conakry et Niamey doivent se concentrer sur leur urbanisme et leur organisation spatiale car les trois capitales ne disposent pas actuellement de marchés fonciers suffisamment efficaces, ce qui entraine des investissements dans des bâtiments et infrastructures éloignés des centres-villes ».

Pour faire face aux grands défis d’urbanisation, des recommandations spécifiques à l’endroit des trois villes sont faites à l’issue de cette étude menée par la Banque Mondiale.  «  Bamako doit se concentrer sur la modernisation des structures existantes et la coordination du  réaménagement du territoire en même temps que sur des investissements en infrastructure. Conakry doit donner la priorité à une meilleure connectivité entre le centre-ville et sa périphérie tandis que Niamey doit jeter les bases d’un développement urbain futur », peut on lire dans le rapport.

La série de rapports « Bilan économique AFCW3 » traite de questions de développement essentielles au Tchad, en Guinée, au Mali et au Niger. Elle vise à susciter un débat public sur des évolutions macroéconomiques et structurelles importantes pour soutenir la réduction de la pauvreté. Cette nouvelle publication contient un dossier spécial sur la Guinée.

Ozone Mali: La crise

Entassées dans des sacs le long des artères principales de la ville, leur présence accrue depuis plusieurs semaines n’a échappé à personne. Outre la question de santé publique qu’elles soulèvent inévitablement, on peut aussi se demander ce qui se passe autour des déchets de Bamako qui, normalement, sont quotidiennement enlevés par la société Ozone, prestataire de la Mairie du District. Une grève des travailleurs de la société en paralyse les activités depuis fin mars. Mais le mal est plus profond qu’un simple mouvement syndical. Il remet sur la table l’équation de l’assainissement d’une capitale qui ne cesse de grossir…

L’odeur est là… pas encore pestilentielle mais on la sent diffuse quand on circule dans les rues de Bamako, en particulier dans certains quartiers. La cause : une grève chez Ozone, le principal prestataire de l’assainissement de la capitale malienne. Les salariés débraient depuis la fin du mois de mars 2018 et ont posé sur la table certaines conditions, dont la principale est l’augmentation de leurs salaires. Ces derniers tournent autour de 50 000 FCFA pour les agents de nettoyage, « insuffisant pour nourrir une famille » se plaignent les travailleurs. « Bien au-dessus du SMIG malien », répond-on du côté de la Direction qui assure être dans la disposition d’étudier la requête mais ne pas en avoir les moyens « pour le moment ». « Nous sommes dans de sérieuses difficultés », explique Nouredinne Chbani, le Directeur général d’Ozone Mali. Qui tient à rappeler que la société ne doit aucun arriérés de salaires à ses employés mais « ne peut pas discuter d’une quelconque augmentation de ses charges ».

Flash back. … Février 2015, la société marocaine Groupe Ozone Environnement et services démarre en fanfare les activités de sa filiale Ozone Mali. Une convention d’une durée de 8 ans est signée qui lie la Mairie du district à Ozone Mali, avec l’aval de l’Etat puisque deux ministres qui apposent également leur paraphe : celui en charge de l’environnement et celui de la Décentralisation et la politique de la ville. Ozone Mali est depuis responsable de la pré-collecte des déchets ménagers et des produits du balayage des rues de Bamako et de les évacuer vers la décharge finale de Noumoumbougou (sur la route de Koulikoro). A l’époque, les autorités de l’assainissement étaient en discussion avec le groupe français Veolia. Mais l’expertise marocaine a semblé séduire les premiers décideurs qui ont privilégié l’approche sud-sud », se souvient ce cadre du département de l’environnement. Au fil des semaines qui suivent la signature de la convention, Ozone Mali déploie son armada. Elle recrute et forme plusieurs centaines d’agents et on aperçoit les camions couleurs orange et gris arpenter les rues de la ville. Cout de l’opération, 9 milliards par an. Bamako sort petit à petit son nez des ordures sous lesquelles elle commençait à crouler depuis la crise de 2012.

Très vite cependant, les critiques fusent. La première concerne le déversement des ordures collectées dans la fosse derrière l’hotel Olympe en commune 5. « Ça puait et ça prenait feu régulièrement. Les sapeur-pompiers étaient sollicités mais leurs opérations ponctuelles ne pouvaient pas résoudre le problème », se souvient ce riverain de cette décharge géante qui s’est constituée lors de l’opération d’urgence d’enlèvement des tas d’ordures de Lafiabougou et Ngolonina et qui devait, en principe servir à combler ce ravin destiné à devenir un jardin public et une aire de jeux. Les camions n’ont jamais cessé d’y faire leur rotation…La décharge finale officielle ? Personne ne veut y aller. « La route était dans un état si délabré que personne ne voulait y abimer son matériel roulant, à commencer par Ozone »… Faux, répond Noureddine Chbani qui assure que « cette décharge finale n’est toujours pas opérationnelle depuis 3 ans qu’on nous promet qu’elle le sera ». « On nous demande de nous débrouiller. Alors en attendant, nous déversons dans des champs sur requête des propriétaires ou encore pour combler des ravins », explique-t-il. Avec les conséquences sur l’environnement que l’on peut imaginer…

La crise. « Aujourd’hui, à notre niveau, la situation est inquiétante », résume Adama Koné, conseiller technique du DG d’Ozone Mali. « Il y a plusieurs enjeux. Le premier étant l’emploi des jeunes, ils sont plus de 1300 employés par la société. Le deuxième enjeu, c’est la pérennité de l’entreprise qui a fait beaucoup d’investissement et a des charges d’exploitation énormes. Le troisième enjeu, c’est la propreté de la ville de Bamako. Avec ses 2,5 à 3 millions d’habitants aujourd’hui, il faut trouver une solution pérenne à la gestion de son assainissement », déclare-t-il. Le fond du problème c’est le « non-respect par « la partie malienne » des engagements pris. Les dispositions de l’article 45 et 46 ne sont pas respectées et la compagnie a toutes les peines du monde pour rentrer dans ses fonds », poursuit M. Koné. A ce jour, ce sont près de 15 milliards qu’Ozone Mali réclame au titre des arriérés de 2015 à 2017.

« La question des arriérés d’Ozone est un problème profond », explique pour sa part le Directeur des Services de Voirie et d’Assainissement (DSUVA). « Il s’agit de trouver les moyens de la gestion durable des ordures ménagères et des déchets organiques. On ne peut pas produire des ordures et ne pas payer pour leur traitement. Mais à Bamako, personne ne l’a compris. Les gens se contentent de payer les GIE qui viennent enlever devant les ménages, mais personne n’investit dans leur évacuation vers la décharge finale. Or, cette opération est la plus couteuse», poursuit Oumar Konaté. « Le contrat avec Ozone est une concession. Maintenant, il faut mobiliser les ressources au niveau du client, qui est la Mairie sous le contrôle de l’Etat. C’est cela qu’il faut revoir pour mettre fin à la question des arriérés, parce que seule une infime partie des pollueurs paient pour cette opération ». « Il était question que l’Etat soutienne la mairie du district pendant les 5 premières années. L’Etat a toujours budgétisé 4 milliards par an, que nous recevons. Mais le complément qui doit être versé par la Mairie du district reste en suspens car elle n’a pas les moyens. Donc dès la première année d’exercice, nous avons donc accumulé des impayés », confirme M. Chbani. « Cette situation est très difficile à gérer. Ozone a fait ses preuves sur le terrain. Ceux qui disaient qu’Ozone ne travaille pas, la réalité de ces derniers jours a montré que nous avons réalisé des investissements et que nous faisions notre part du travail. Peut-être que les gens ne sont pas au courant mais personne ne peut dire que nous ne faisons pas notre travail, et ce même malgré les conditions qui nous sont imposées »… « Jusqu’ici, la banque nous appuyait ainsi que le siège de notre groupe. Mais aujourd’hui, la banque a atteint son plafond et le groupe également commence à ressentir les effets de l’effort que nous représentons », conclut M. Chbani qui se dit pessimiste pour l’avenir.

Pistes de solution. En ce qui concerne les impayés, des discussions entre les parties sont en cours. Elles ont permis l’adoption d’un échéancier d’apurement « approuvé par le ministère des Collectivités territoriales. Il est convenu qu’ soient versés 4 milliards dans un premier temps, afin que l’entreprise puisse se rééquiper. Le reste du montant sera échelonné sur trois ans, jusqu’en 2020 », explique-t-on chez Ozone. A la Mairie du district, on cherche également des solutions à long terme. « Il faut que nous trouvions l’argent pour évacuer les ordures du dépôt de transit à la décharge finale. Avec le ministère des collectivités territoriales, un schéma est à l’étude pour impliquer les mairies dans le recouvrement des frais de prestations pour les déchets. Aujourd’hui les maires des communes ne se sentent pas impliqués dans le dispositif, et cela fait partie du problème », explique le Directeur de la DSUVA. Des exemples venus d’autres pays comme le prélèvement d’une redevance directement sur les factures d’eau ou d’électricité, pourraient être suivis. En attendant, il faudra peut-être attendre la prochaine journée citoyenne d’assainissement, le 1er samedi du mois, pour voir corps habillés et volontaires civils ramasser les ordures qui continuent de joncher les rues de la capitale..

Célia d’ALMEIDA

Alou Coulibaly : « Cette décision sera attaquée devant la Cour Suprême »

Suspendu trois mois à l’issue du Conseil des ministres du 24 janvier, pour « plusieurs fautes graves contraires à la loi », selon le ministre des Collectivités Territoriales, le maire de la Commune VI, Alou Coulibaly, dénonce une décision « arbitraire ».

Journal du Mali : Quelle analyse faites-vous de votre suspension ?

Alou Coulibaly : Ce que l’on me reproche officiellement porte sur trois points. Tout d’abord, un ordre pour une mission qui n’a même pas eu lieu. Sur l’ordre de mission, ce n’est pas ma signature. Je me demande pourquoi la personne qui a signé n’a pas été suspendue ?

On m’accuse aussi d’avoir accordé des dispenses de TDRL (Taxe de développement régional et local). Cette taxe est du ressort du maire et la loi exempte certaines personnes de son paiement, les femmes qui ont eu plus de quatre maternités, les personnes du troisième âge, les hommes du rang, les indigents…

Le troisième point concerne le recrutement de quatre agents. Je m’en suis déjà expliqué. Le service était paralysé et il y avait des besoins urgents. Le bureau communal, mes cinq adjoints et moi, a échangé et trouvé opportun de recruter pour renforcer le dynamisme de la mairie. Depuis que je suis maire, les travailleurs de la mairie n’ont jamais souffert de retards de paiements, ce qui prouve à suffisance que le budget peut supporter ces recrutements. Je pense que c’est une décision arbitraire, consécutive à l’autorisation accordée à Moussa Sinko de tenir son meeting.

Au-delà du meeting, une connexion trop étroite entre vous serait aussi en cause ?

C’est un rapport citoyen – maire de commune. Il avait besoin du stade municipal pour tenir son meeting et nous a demandé l’autorisation. Quand un citoyen écrit au maire, le maire est obligé de répondre. Et, s’il venait à refuser l’autorisation, il est obligé de motiver ce refus. Le bureau communal, après analyse, n’a pas trouvé de raisons de refus. Comme maire, j’étais dans mon rôle d’autorité de police judiciaire et de police administrative. D’ailleurs, ce meeting s’est tenu sans incident.

Avez-vous des voies de recours ?

Bien entendu. La justice est là pour tout le monde. Cette décision sera attaquée au moment opportun devant la section administrative de la Cour Suprême.

Une plainte ?

Oui, car je ne suis pas d’accord. Je suis donc obligé de porter le problème devant qui de droit.

Si vous n’avez pas gain de cause, quelle sera la suite ?

Je ne le sais pas encore.

Map Action, un outil au service de l’environnement

Map Action, c’est le nom de ce nouvel outil que Kaïcédra Consulting et ses partenaires ont mis en œuvre pour contribuer à la gestion des problèmes Wash Eau, Hygiène, Assainissement). C’est pour partager cet outil et ses objectifs que l’organisation a réuni ses partenaires, acteurs publics et privés au cours d’un atelier de formation ce 30 janvier 2018 à Bamako.

L’utilisation des nouvelles technologies de l’information est devenue incontournable et nombre de citoyens ont recours à ces outils pour leurs besoins quotidiens. Bamako étant une agglomération en pleine croissance, avec selon certaines estimations une population de 3 millions d’habitants et autant de besoins en infrastructures de base comme celles de l’accès à l’eau potable et à l’hygiène. L’un des objectifs de Map Action est de faire en sorte que les nouvelles technologies aident à mieux appréhender les problématiques environnementales et à les gérer. Map Action est un outil technologique qui rassemble une cartographie interactive, une géo-localisation mobile pour recueillir, analyser et transmettre des données pour une meilleure gestion environnementale.

Agir pour son environnement

Les activités de l’outil commencent par l’identification des problèmes Wash. Une phase à laquelle les citoyens prennent une part active avec une implication effective dans la formulation des problèmes qui les concernent. Il s’agit concrètement de faire une photo d’un problème identifié et de l’envoyer via l’application disponible sur Play store. L’autre étape consiste à procéder à l’analyse et l’étude de la situation par une équipe de terrains, formée et gérée par les responsables de l’organisation. Le but est ensuite de trouver des solutions avec la transmission des données aux autorités compétentes. Déjà évoqué, lors de la Cop 21 à Paris, la contribution de ces technologies à la lutte contre le réchauffement climatique est concrétisée par cette application malienne mise au point par Kaïcédra Consulting et son partenaire Aikio.

Créer une synergie

Environ 50 participants, venus d’associations engagées dans la défense de l’environnement, des bureaux techniques et des Organisations internationales ainsi que des partenaires techniques ont reçu cette formation. Tout cela en partenariat avec les autorités et les structures techniques concernées. Dans sa phase pilote, le projet va s’expérimenter sur les communes I et II du District de Bamako. Mais elle entend s’élargir très vite à l’ensemble de la capitale et même à l’intérieur du pays, selon Monsieur Boubacar Keïta coordinateur du projet. Peuvent participer au projet tous les citoyens, afin que les problématiques environnementales soient mieux connues. « Parce que souvent, ce n’est pas par manque de volonté mais souvent par méconnaissance. En outre, lorsque les citoyens participent à la formulation des solutions, cela peut être plus pertinent », ajoute Monsieur Keïta. Les données ainsi collectées seront transmises aux collectivités concernées, chargées des réponses aux questions environnementales, mais aussi à tous les autres acteurs censés intervenir dans le domaine comme les partenaires qui appuient dans le domaine. Pour amener les citoyens à s’impliquer, Kaicédra Consulting lance un challenge citoyen du 30 janvier au 18 février 2018 pour permettre une appropriation de l’application par les citoyens. La phase pilote, quand à elle durera quelques mois. Mais l’organisation entend établir un partenariat durable avec les autorités afin de résoudre ces problématiques environnementales. 
« Nous sommes un maillon d’une chaîne qui part de l’identification à la résolution du problème », conclut Monsieur Keïta. 

Festival Ogo Bagna : Le pays dogon à Bamako

Du 22 au 28 janvier 2018, la capitale malienne vibrera au rythme de la culture dogon. Des dizaines d’acteurs viendront exposer plusieurs pans de leur savoir-faire en matière d’artisanat, de cuisine, de musique et de « Savoirs traditionnels en matière de santé », thème de cette année.

Pour sa troisième édition, le festival Ogo Bagna veut mettre en débat « la problématique des savoirs traditionnels en matière de santé ». Plusieurs raisons justifient le choix de ce thème, selon Casimir Sangala, l’un des organisateurs. Tout d’abord, il existe un potentiel important dans ce domaine et de nombreux Maliens ont recours à la médecine traditionnelle pour se soigner. Il est donc essentiel d’en débattre, de partager les connaissances et, surtout, d’accompagner cette médecine pour établir un cadre de collaboration entre elle et la médecine moderne. Montrer « à un public urbain », plusieurs aspects de la culture dogon, c’est l’un des objectifs de ce festival, né en marge des Journées culturelles dogon créées en 2005 et qui se tiennent en pays dogon tous les trois ans. C’est donc pour permettre au public urbain de découvrir les valeurs de la culture dogon que Ogo Bagna a vu le jour en 2015.

Dans le contexte de crise que le Mali traversait, Ogo Bagna s’est naturellement inscrit dans la recherche de la paix et de la cohésion sociale, à travers le brassage culturel et les mécanismes culturels comme le cousinage. Car les Dogons sont bien placés pour ce faire. « Nous sommes un peu les cousins de tout le monde. C’est pourquoi nous invitons toutes les communautés voisines à venir construire la paix », qui est une œuvre commune, ajoute M. Sangala.

Durant une semaine, les visiteurs auront la possibilité d’admirer « un village typique dogon », promettent les organisateurs. Sur la place du Cinquantenaire qui sera le site de l’évènement, les festivaliers assisteront à des conférences, à des soirées et à des journées culturelles, innovation introduite cette année. « Les journées seront gratuites, mais les soirées payantes », précisent les organisateurs. Ces derniers, qui attendent environ 30 000 visiteurs, espèrent que cette édition aussi sera une opportunité pour les artisans non seulement de vendre leurs œuvres mais aussi de nouer des contacts pour donner un coup de pouce au secteur du tourisme, en berne depuis plusieurs années. Placé sous le parrainage du Président de la République, Ibrahim Boubacar Kéïta, le festival Ogo Bagna, qui signifie « la table du chef », souhaite incarner un espace de dialogue et d’échanges entre toutes les communautés du Mali, y compris la diaspora dogon, attendue lors de la quatrième édition.

Fally Ipupa rend Bamako « Tokoos » !

Salle comble ! Le défi n’était pas difficile à relever pour la star congolaise qui compte un grand fan-club au Mali. Le concert de ce 6 janvier aura été à la hauteur de leurs attentes, malgré l’attente…

Annoncé comme le concert évènement de ce début d’année, le show du chanteur-producteur Fally Ipupa était organisé par Momo Uno Events. L’artiste de 39 ans dont la carrière a débuté au sein du groupe Quartier Latin dont il fut sociétaire de 1999 à 2006, en est à son septième album en dix ans, intitulé Tokoos.  Parmi lesquels un disque d’or.

A 23 h, la salle de sport érigée en salle de spectacle pour l’occasion, commence à remplir, le monde afflue jusqu’à 1h-2h du matin. Il faut dire que le public bamakois n’est pas très matinal. Pour faire patienter cette foule en désir d’ambiance, la production a invité plusieurs artistes maliens. Ainsi se sont succédés, Nigga Fama, Amy Yerewolo, Iba Diabaté, ainsi que Virginie Dembélé en play back. Une mise en bouche appréciée par le public qui attendait l’arrivée du Crooner de Kinshasha. Ce n’est qu’à 2h45 que Fally Ipupa entre en scène sur un roulement de Rumba congolaise. Une tradition respectée, car l’artiste fait ses premiers pas dans ce genre musical d’Afrique central. La ballade d’entame est suivie de la vie belle, une chanson qui n’est pas sans rappeler celle dans le film éponyme porté par Papa Wemba.

Fally embarque son public dans un show en transe continue, interprétant des chansons ancrées dans les thématiques de la vie quotidienne : les relations hommes-femmes, l’amour, la vie, l’espoir… Découvert au public comme meilleur danseur de Koffi Olomidé, il s’impose désormais comme étant cet hériter naturel de la vague des artistes congolais comme Papa Wemba et Koffi Olomidé, mais surtout comme celui qui a su s’adapter à la mutation de la musique africaine dans sa phase pop modernisée.

Il faut signaler que ce deuxième concert au Mali, l’artiste s’est déplacé avec un staff de vingt personnes, composé de ses neufs musiciens instrumentistes, sept magnifiques danseurs et ses deux choristes. Un boys-band musclé, pro en déhanché. L’ambiance de cette salle plongée dans le noir, éclairée par les lumières blanches des smartphones et le jeu de lumière savamment orchestré, est électrique. Un chanteur doublé d’un danseur hors-pair fait sa traversée noctambule dans une symbiose parfaite avec son public de cœur qui lui fait chœur. L’artiste enraciné dans ses premières passions la Rumba et la danse est confiant, car le répertoire interprété est maîtrisé par son public avec lequel, le jeu consiste à demander les titres tant attendus. Dans un show presque sans interruption, il enchaîne certains titres de son dernier album Tokoos, presque tous des hits, entonnant tour à tour : jeudi soir, mannequin, original, bad-boy, etc.

Eloko Oyo réclamé, Fally Ipupa apparait, habillé comme dans le célèbre clip : accoutrement traditionnel de son terroir, tenue en raphia de palmier et de coiffe de chef. Le public reprend avec lui l’air qu’il maîtrise parfaitement et c’est avec ce morceau que l’artiste met fin à une heure et demi de show, trop vite passées. Ce fut Tokoos !

Et pour boucler en  beauté la boucle, Fally Ipupa et l’organisateur du spectacle Momo Uno Events ont offert aux enfants des militaires disparus aufront, une somme de dix millions, remis à Madame Keita Aminata Maiga.

Rue marchande de la commune III : un succès relatif

Pour la 11ème fois cette année, le comité syndical de la commune III du district de Bamako organise la rue marchande. Un espace de vente de divers articles à l’approche des fêtes de fin d’année, censé booster les affaires pour les commerçants et permettre au comité syndical d’alimenter son fonds social.

Ouverte le 15 décembre 2017, la rue marchande de la commune III du district de Bamako fermera ses portes le 5 janvier 2018. Un partenariat entre le comité syndical et l’Union des Associations des Commerçants du Mali pour les Foires qui se porte plutôt bien, après 11 ans d’existence. Les recettes générées permettent de renflouer la caisse du fonds social, destiné à venir en aide aux travailleurs de la mairie dans le besoin. La proximité du marché permet aussi « aux populations de s’approvisionner en période de fête et à des prix plus accessibles », soutient M. Ibrahim Traoré, Secrétaire Général du comité syndical de la commune III. Avec une centaine d’opérateurs économiques présents cette année, dont certains venus de l’étranger, les organisateurs espèrent un agrandissement de ce marché dans les années à venir. 

Bilan mitigé

Ichaka Camara, propose des médicaments traditionnels et semble plutôt se frotter les mains. Il vient de renouveler son stock et pour sa première participation, « la foire se passe très bien. » Il souhaite juste une meilleure organisation, afin que ceux qui souhaitent dormir à une certaine heure de la nuit, puissent le faire sans être dérangés par « ceux qui écoutent les radios ». C’est vrai qu’il est presque dix heures et sur le site, les commerçants se réveillent à peine. « Les gens veillent tard dans la nuit et les premiers visiteurs arrivent vers 11 heures du matin », nous confie un exposant. Installé à Faladié en commune VI du District de Bamako, Steve Segbedji est originaire du Benin, mais vit au Mali depuis quelques années. Il participe aussi pour la première fois à cette rue marchande de la commune III. Il vend également des médicaments traditionnels « à base de plante de son pays », mais estime que les visiteurs se font rares et les affaires marchent peu. Il espère tout de même faire des contacts et avoir des clients potentiels même après la foire.
Les affaires ne marchent pas non plus très bien pour M. Mamadou Ousmane Cissé. Élève de son état, il donne un coup de main à son frère à l’occasion des fêtes. S’occupant d’un des stands de son frère dédié aux chaussures, il estime que le marché est très lent. « Ici, on observe beaucoup de mouvement surtout la nuit, mais très peu viennent pour acheter », constate-t-il. Même si son frère qui vend des habits et accessoires pour femmes, est plus optimiste, M. Cissé estime que « les gens n’ont tout simplement pas d’argent » et pense que la tenue simultanée d’autres foires du même type en commune IV et à Kati cette année, peuvent influencer négativement le marché. Pour l’avenir, il souhaite que les organisateurs pensent à faire des stands de meilleure qualité pour attirer davantage de public en appliquant certaines règles comme ne pas permettre aux vendeurs ambulants qui leur font la concurrence déloyale d’accéder au site.
L’heure est par contre aux bonnes affaires pour Moussa Fofana, exposant à la foire pour la première fois. Pour ne pas « chômer » en cette période après l’incendie survenu au marché rose de Bamako, il a choisi de vendre ses articles, essentiellement des habits et chaussures pour homme, à la foire annuelle de la commune III, et il ne regrette pas son choix. « Al hamdoullilah. Déjà à quelques jours de la fin de la foire, nous avons beaucoup vendu », se réjouit-il, avant d’ajouter que la tendance chez les jeunes, « c’est d’être beaux et de bien s’habiller ».

En route pour une féminisation de la classe politique ?

Selon le dernier recensement, les femmes représentent 50,4 % de la population malienne. Pourtant, cette majorité n’est pas visible au sein des instances de prises de décisions politiques.

Vendredi, peu avant une plénière à l’Assemblée nationale, Fatimata Niambali vient d’affronter les embouteillages de Bamako. La députée de la circonscription de San s’en excuse. Celle qui a fait ses premières armes politiques aux côtés de sa mère se souvient. « J’ai eu la chance d’avoir une mère qui a milité à l’ADEMA. Je la suivais dans ses mouvements. J’ai eu envie de lui emboîter le pas. Je suis partie à San en 1994 et j’ai tout de suite intégré des associations de femmes. C’est là que tout a commencé ». Le constat sera sans appel : l’absence des femmes dans les instances de prises de décisions est évidente. Car « dans la plupart des décisions prises en politique les femmes ne sont pas mises en avant ». Plusieurs facteurs expliquent cette sous-représentation de la gent féminine, comme le poids des traditions, la méconnaissance des rouages des partis et la supposée non-solidarité des femmes. Pour la députée Niambali, c’est le soutien de son époux qui lui a permis de s’épanouir dans ses activités politiques. « Si vous parvenez à convaincre votre époux, vous avez fait le plus gros du travail. Le reste de l’entourage se rangera du côté de votre mari ».

Pourtant, des femmes maliennes dans la lignée d’Aoua Kéïta, il y en a. À l’instar de la Maire de la Commune III de Bamako, Mme Djiré Mariame Diallo, Présidente du Réseau des femmes conseillères municipales du Mali (Refcom). L’avènement de la démocratie a été le point de départ de son engagement. Selon elle, pour susciter des vocations, « il faut informer, éduquer et sensibiliser. Les jeunes doivent avoir une éducation solide, qui se fera avec le temps, car la politique est un apprentissage perpétuel. Entrer en politique, cela ne se décrète pas, cela se prépare ». Madame Djiré Diallo est à ce jour la seule femme Maire d’une commune à Bamako, succédant à Mme Konté, ex Maire de la Commune I.

Une avancée doit être soulignée. La célèbre Loi 052 instituant la promotion du genre, qui instaure aux postes nominatifs et électifs un quota homme / femme de 30 % au minimum pour chaque sexe. Selon les chiffres de la MINUSMA, la part des femmes au sein des postes parlementaires n’était en 2015 que de 9,5%, pour seulement 1,14% au poste de Maire.

Incendies du Marché Rose : mêmes causes, mêmes effets ?

Le Marché Rose de Bamako avait été ravagé par un nouvel incendie dans la nuit du dimanche 10 au lundi 11 décembre.  906 magasins ont été touchés par ce nouveau drame. Les victimes,  ruinées, mettent en cause les  branchements électriques anarchiques et  proposent des pistes pour un nouveau départ.

Neuf cent six magasins hors de service. Pour la troisième fois, le Marché Rose de Bamako,  habituellement scintillant, renoue avec la catastrophe. Le lundi 11 décembre dernier, aux environs de 2h30, un incendie s’est déclaré. Alertés, les commerçants sont parmi les premiers à se présenter sur les lieux, pour voir avec impuissance leurs économies se consumer. Plus d’une semaine après, les traces des dégâts sont encore visibles. Certaines victimes, déboussolées, indexent les installations anarchiques sur des poteaux d’Énergie du Mali (EDM) comme étant les causes de l’incendie. Le mardi 19 décembre, le Président  du Marché, Djeri Coulibaly, a tenu une Assemblée générale avec les victimes pour faire le point sur le recensement des sinistrés et les enquêtes. « Le feu a commencé sur un poteau au niveau de l’immeuble Bathily, puis s’est étendu à deux autres poteaux, avant de descendre vers le marché », s’est-il étonné. L’incendie, outre ses conséquences dramatiques, a aussi été tragique. « Il y a eu malheureusement un mort qui, en voulant  récupérer son argent dans son atelier a été  recouvert par les flammes », a regretté le Président.

Promesses d’espoir 

Daouda Koumaré, vendeur d’habits, ne décolère pas. Pour la seconde fois, son kiosque a été dévasté. « Tous les habits que je vendais sont partis en fumée. Je revenais tout juste de Chine avec des robes pour le 31 décembre », affirme-t-il. Il attribue la cause du sinistre aux branchements électriques anarchiques sur les poteaux d’EDM. « Le premier incendie que j’ai vécu, en 2014, avait également été provoqué par l’électricité, et celui-ci par les trois poteaux EDM que tu vois là », accuse-t-il. Selon lui, la solution doit venir du gouvernement. Le Président Djeri Coulibaly veut rester optimiste. « Il y aura de nouvelles dispositions, que nous allons prendre avec l’État. Le marché sera reconstruit selon les normes », dit-il. Trois sites ont été proposés pour le recasement des commerçants : la Mairie de la Commune III, la cour de Sotelma et le Champ hippique.  En attendant, Ousmane Sy apporte les dernières retouches à son kiosque pour se réinstaller. « A chaque jour suffit sa peine ».

Distribution : petite surface deviendra grande

Parking bondé et double file, devant les supermarchés de Bamako, même si ce n’est pas la cohue, l’affluence des fêtes a commencé. Les grandes surfaces rivalisent d’ingéniosité pour attirer un client qui est de plus en plus exigeant et en veut pour son argent. Quand il ne va pas commander « ses courses » en Europe ou dans les pays voisins, le consommateur malien ou vivant au Mali se réjouit de voir l’offre grossir.

Dès l’entrée du magasin, le ton est donné. Nous sommes à quelques heures de la fête de Noël et ici tout le dit : des guirlandes et sapins disposés dans l’entrée au bonnet rouge et blanc de la fromagère, c’est le grand jeu pour mettre le client dans l’ambiance et le pousser à « se faire plaisir », comme le dit en souriant un des chefs de rayon. Dehors, c’est le gros bouchon. Il est 16h30 et en sortant du travail, Maïmouna est venue « faire quelques courses ». Pourquoi le choix de cette enseigne située sur la route de Koulikoro ? « C’est proche de chez moi et on y trouve de tout, même si les prix sont un peu élevés pour la bourse malienne. Mais, le choix y est et c’est important », explique la jeune mère de famille qui essaie de faire de la résistance face à son jeune garçon campé devant le rayon « chocolat ». Dans les bacs réfrigérés, on sent aussi la fête. Il y a de l’arrivage de fruits de mer et « ce sont les noix de St Jacques que les gens aiment. Avec le saumon aussi. Pour les fêtes, ça sort, avec le chocolat également », poursuit notre interlocuteur.

L’offre s’étoffe

Pour se fournir, le consommateur n’a pas beaucoup à réfléchir. Bamako ne peut pas encore rivaliser avec les autres capitales en termes de « grandes surfaces ». Le terme est d’ailleurs contestable si l’on compare avec les superficies consacrées ailleurs aux supermarchés et centres commerciaux. « La demande n’est pas si importante que cela, pour le moment, même si les choses évoluent. La grande partie de notre clientèle est composée de cadres et d’expatriés. Le Malien n’a pas encore dans sa culture de se rendre au supermarché pour faire ses courses », affirme le gérant de cette autre enseigne. L’offre ne s’en est pas moins démultipliée au cours des 20 dernières années. De l’historique Azar Supermarché ouvert dans les années 90 aux Fitini Market qui essaiment dans les quartiers de la capitale, il y a eu du chemin de parcouru. « Ce n’est pas qu’il n’existait pas de boutique de ce genre auparavant », nuance Amadou, quinquagénaire. « Il y avait des endroits où on pouvait acheter des produits importés. Mais la culture du self-service date vraiment d’une vingtaine d’années, avec la libéralisation du commerce ». Depuis, outre les supermarchés Azar, Fourmi et Shopreate, qui sont les plus importants en surface et en référencements (articles), plusieurs autres enseignes sont nées, la plupart sur la rive gauche de la capitale. On peut citer, entre autres, Mini-Prix, Les mille et une merveilles, mais aussi les Fitini Market, qui eux ont choisi de s’implanter en rive droite, dans les « nouveaux quartiers »  puis de s’étendre de l’autre côté du fleuve Niger. Depuis 2011, la demi-douzaine de « foodstop », comme on peut le lire sur le site de la société, s’est spécialisée dans la distribution en gros et détail des produits alimentaires et d’hygiène. «Il s’agit d’un réseau de supérettes de proximité, pratiquant le libre-service », et misant sur « la valorisation des produits locaux ». Les produits locaux, un argument de vente brandi par la plupart des distributeurs qui veulent attirer une clientèle de plus en plus sensible à cette problématique mais aussi « parce que les entrepreneurs font beaucoup d’efforts sur la qualité et l’emballage, ce qui leur permet maintenant de rivaliser avec les produits importés ».

Fêtes & marketing

Pour se rapprocher de la clientèle et faire face à la concurrence qui s’élargit, les « leaders » innovent. Tout est fait pour attirer le client et surtout le fidéliser. L’un des outils les plus utilisés est la présence sur Internet et les réseaux sociaux. Désormais, les clients sont avertis des offres promotionnelles ou des nouveaux arrivages par le biais de « newsletter » ou de messages sur Facebook et Twitter. Ainsi, Tonino Market, enseigne de Korofina en commune 1 du District annonce des réductions sur les achats à partir de 5 000 francs CFA sur sa page Facebook tandis que La Shopreate invite la clientèle, à travers un mail, à venir découvrir les nouveaux arrivages et bénéficier de la promotion « Festivités ». Pour Mamadou Diakité, qui travaille dans l’administration de cette entreprise familiale qui dispose de deux surfaces à Bamako, il faut redoubler d’efforts au moment des fêtes. « Contrairement à ce que les gens croient, la période de la fin d’année n’est pas très propice pour faire du chiffre. Nos clients sont pour la plupart des expatriés. Ceux-ci rentrent dans leurs pays pour les fêtes, ce qui réduit vraiment les ventes. Nous faisons donc tout pour attirer ceux qui restent et les Maliens qui viennent aussi faire leurs courses de fêtes », explique-t-il. « Nous optimisons les coûts » poursuit-il. « Par exemple, pour le chocolat, nous faisons en même temps la commande du 14 février. Cela nous permet d’offrir plus de produits à nos clients ». Maintenir à flot un supermarché, ce n’est pas tous les jours une sinécure.

« Le premier défi, en tant que cliente, pour moi, c’est la qualité des produits. C’est pourquoi je regarde bien ce que je prends, les dates de péremption, la fraîcheur du produit, etc. », assure Maïmouna. Il est vrai que, régulièrement, des rumeurs courent sur des produits de « piètre qualité », ajoute-t-elle, diplomate. « Il n’y a pas de contrôle strict de ce qui est vendu dans ces boutiques. On retrouve des étiquettes visiblement trafiquées ou alors ce sont les normes d’hygiène qui laissent à désirer » se plaint une expatriée sur un site dédié. Une question que les autorités semblent encore négliger puisqu’effectivement, contrairement aux pratiques dans les autres pays, il n’existe pas de contrôle approfondi mené par l’inspection sanitaire et les descentes sur le terrain sont plutôt « superficielles, juste pour le principe », nous confie un agent. L’autre défi étant le transport et la logistique. L’approvisionnement des magasins et surtout le respect de la chaîne de froid sont une « préoccupation de tous les instants, sans compter les problèmes sur la route, etc. », explique un gérant. La diversification de l’offre a poussé les acteurs à élargir la gamme de produits proposés aux fruits et légumes, mais aussi aux fruits de mer et la boucherie. Autant de denrées sensibles qu’il faut commander, acheminer puis conditionner et vendre dans les meilleures conditions.

Spécialistes

Si dans la plupart des enseignes, on retrouve un peu de tout, alimentation-hygiène-vaisselle-mobilier-etc, de plus en plus de magasins spécialisés s’ouvrent dans la capitale. Le traditionnel ORCA, pour la maison et la déco, se voit désormais concurrencer par des enseignes qui grossissent. C’est le cas de Batimat, spécialisé dans les matériaux de construction et la décoration, qui a ouvert un show-room gigantesque, presqu’en face, dans la zone ACI 2000. Euro Décor, quant à lui, s’accroche à la locomotive et se veut spécialiste surtout des tissus en tout genre et ceux d’ameublement en particulier. Pour revenir aux vivres, le Carré Fermier s’implante lui aussi sur le marché, avec un système de franchise qui permet de rendre accessibles au public, des produits de boucherie Made in Mali.

Difficile d’avoir une liste exhaustive des enseignes présentes à Bamako. La consommation allant grandissant (plus de 100% de croissance les dix dernières années), on peut parier que de nouveaux venus vont bientôt venir chercher leur part du gâteau. On annonce pour 2018 l’arrivée d’un géant français, mais aussi l’évolution d’un chantier de centre commercial, lancé il y a deux ans.