Arrêtés de paiement des redevances audiovisuelles : les associations de presse exigent un retrait et appellent au dialogue

Les principales associations de la presse audiovisuelle et en ligne du Mali, notamment l’Union des Radios et Télévisions Libres du Mali (URTEL), l’Association Malienne des Télévisions (AMATEL), l’Association des Professionnels de la Presse en Ligne du Mali (APEL Mali), l’Union des Radios Privées du Mali (URPM) et l’Association des Éditeurs de la Presse Privée (ACCESS), ont exprimé leur profonde préoccupation suite à la publication par la Haute Autorité de la Communication (HAC) des arrêtés interministériels n°4473 et 4474. Ces arrêtés fixent les montants et les modalités de paiement de la redevance annuelle pour l’exploitation des services audiovisuels, ainsi que les frais de délivrance et de modification des autorisations.

Dans un communiqué conjoint, ces associations dénoncent la mise en application immédiate de ces mesures, malgré leurs précédentes demandes de sursis lors des consultations antérieures. Elles soulignent le contexte économique difficile auquel font face les médias maliens, aggravé par la crise énergétique actuelle. De plus, elles regrettent le manque de concertation dans la détermination des montants des redevances, estimant que ces décisions unilatérales pourraient fragiliser davantage le secteur médiatique national.
Les associations demandent donc un report de la mise en œuvre de ces arrêtés et appellent à l’ouverture d’un dialogue inclusif avec les autorités compétentes afin de trouver une solution concertée et adaptée à la réalité économique des médias au Mali.
Le communiqué est signé par les représentants des différentes associations et a été adressé à plusieurs institutions gouvernementales, notamment la Primature et les ministères concernés.
Cette situation intervient dans un contexte déjà tendu. Les médias jouent un rôle important dans la consolidation de la démocratie et la promotion de la bonne gouvernance. Il est donc essentiel que les autorités et les acteurs du secteur travaillent ensemble pour garantir un environnement favorable à l’exercice du journalisme, tout en assurant la viabilité économique des organes de presse.
Les associations de presse réitèrent leur engagement à œuvrer pour une information de qualité au service des citoyens et espèrent que les autorités prendront en compte leurs préoccupations légitimes pour le bien de la démocratie malienne.

Massacre à Kobé : 25 civils tués dans une embuscade terroriste entre Gao et Ansongo

25 morts et 13 blessés : c’est le bilan tragique de l’attaque perpétrée le vendredi 7 février 2025, dans l’après-midi, contre un convoi de véhicules civils escorté par les Forces Armées Maliennes (FAMa) entre Gao et Ansongo, à hauteur de Kobé, à une trentaine de kilomètres de Gao.
Selon le communiqué de l’État-major Général des Armées, la mission d’escorte a été prise en embuscade par un groupe de plusieurs terroristes. Au cours des violents combats qui ont suivi, les assaillants, repoussés dans leur fuite, ont délibérément ciblé des passagers civils en débandade, provoquant la mort de 25 personnes et blessant 13 autres, majoritairement des jeunes orpailleurs étrangers en route vers la mine d’or de N’Tahaka, dans la région de Gao.
Les FAMa ont immédiatement réagi en lançant des opérations de ratissage toujours en cours. Elles ont permis de retrouver 19 corps de terroristes abandonnés, d’en capturer 4 autres blessés, et de récupérer plusieurs armes et matériels de guerre. L’identification des corps est en cours.
La zone de Kobé est depuis longtemps considérée comme particulièrement dangereuse. À plusieurs reprises, des citoyens et des personnalités y ont été pris pour cible. Les bus et autres véhicules de transport sont parfois contraints de payer des rançons pour circuler sans encombre, alimentant ainsi le financement du terrorisme.
Cette région est le théâtre d’incursions répétées de la Province du Sahel de l’État islamique (EI-Sahel), une branche de l’État islamique opérant principalement au Burkina Faso, au Mali et au Niger. L’EI-Sahel, également connue sous le nom d’État islamique dans le Grand Sahara (EIGS), est une organisation militaire et terroriste d’idéologie salafiste djihadiste, née en 2015 d’une scission d’Al-Mourabitoune. Elle a été officiellement reconnue par l’État islamique en 2016.
Les attaques de l’IS Sahel se caractérisent par une violence de masse et indiscriminée, causant de nombreuses victimes civiles et semant la terreur parmi les populations locales.
L’État-major Général des Armées présente ses condoléances aux familles endeuillées et souhaite un prompt rétablissement aux blessés. Il rassure que les opérations de sécurisation des axes, particulièrement la RN-17, avec des escortes de véhicules civils, se poursuivront. L’objectif est de démanteler les réseaux terroristes qui entravent la libre circulation des personnes et de mettre fin au paiement des rançons servant au financement du terrorisme.
Cette attaque souligne une fois de plus la nécessité d’une vigilance et d’une coopération renforcée entre les forces de sécurité et les populations locales pour contrer la menace persistante que représente l’EI Sahel dans la région.

L’Afrique a elle aussi besoin de sécurité minérale

 Du 3 au 6 février, dirigeants politiques et acteurs industriels se réuniront dans la ville du Cap à l’occasion de la conférence annuelle Mining Indaba relative à l’investissement dans l’exploitation minière en Afrique. Au sommet des priorités de cet événement figureront les réserves africaines de minerais critiques, et la manière dont le continent peut tirer parti du rôle que jouent ces matières premières dans l’économie mondiale.

 

Depuis de nombreuses années, l’Afrique est l’un des principaux fournisseurs de matières premières au monde, ce qui en fait un élément central de la diplomatie des ressources naturelles ainsi que de la compétition géopolitique. En 2024, l’Union européenne a adopté la loi sur les matières premières critiques, qui vise à garantir un meilleur accès de l’Europe aux ressources du continent africain, en échange d’un rôle plus important de celui-ci dans le traitement local des matières premières, et d’une trajectoire de développement alignée sur un certain nombre de feuilles de route politiques telles que la Vision minière pour l’Afrique.

 

Une question sera néanmoins sur toutes les lèvres dans les couloirs de l’International Convention Centre du Cap : Pour qui ces ressources sont-elles essentielles ? Dans le contexte des matières et des minéraux, le terme « critique » est souvent associé à la transition énergétique. En réalité, un minéral est considéré comme critique pour deux principales raisons, qui n’ont pas grand-chose à voir avec la promotion des énergies renouvelables : il revêt une importance économique dans la mesure où ce minéral est difficilement remplaçable, et des risques de perturbation existent quant à son approvisionnement.

 

Ces deux critères dépendent du point de vue de chacun : Quels sont les États pour lesquels ces minéraux présentent une importance économique, et quels sont ceux dont les chaînes d’approvisionnement sont exposées à des risques ? L’UE dispose d’ores et déjà de solides chaînes d’approvisionnement concernant la plupart des minéraux, et c’est pourquoi elle adopte une approche très sélective en la matière. Outre les minéraux essentiels à la transition énergétique tels que le lithium et le cobalt, sa liste de matières premières critiques inclut le béryllium (utilisé dans les systèmes de guidage des missiles), le tantale (utilisé dans les condensateurs et l’électronique), et même certaines matières premières en contradiction directe avec la transition énergétique, telles que le charbon métallurgique.

 

Supposons toutefois que nous posions la question différemment : Quels sont les besoins de l’Afrique sur le plan de sa sécurité minérale ? Du point des pays du Sud et des populations les plus pauvres de la planète, une liste des matières premières essentielles serait tout à fait différente. Elle inclurait des minéraux essentiels à la sécurité humaine – ciment pour les logements et les infrastructures, engrais pour l’agriculture, sel pour la nutrition et la conservation des aliments, chlore pour la purification de l’eau et fluorine pour sa fluoration.

 

Observée sous cet angle, la sécurité minérale est moins une question de sécurité nationale et d’augmentation des bénéfices d’extraction qu’une question d’accès, d’abordabilité et de satisfaction des besoins de tous. De la même manière que la sécurité alimentaire correspond à une nutrition universelle, la sécurité minérale doit répondre à des besoins universels – logement, mobilité, communication, énergie et subsistance.

 

La création de chaînes de valeur locales adaptées aux besoins de l’Afrique sera vitale pour la sécurité minérale du continent. À titre d’exemple, l’Afrique produit 30 millions de tonnes d’engrais minéraux par an, mais elle en exporte la majeure partie, ce qui couvre seulement 3 à 4 % de la consommation mondiale – une conséquence du niveau élevé des coûts ainsi que de la complexité des chaînes d’approvisionnement. Les roches concassées constituent une source alternative prometteuse d’éléments nutritifs pour les cultures, et présentent l’avantage supplémentaire de piéger le dioxyde de carbone. Au Brésil, le mouvement Rochagem a été le premier à utiliser des roches locales, ce qui a permis de réduire les coûts de 80 %, tout en produisant des rendements égaux ou supérieurs à ceux obtenus avec des engrais conventionnels.

 

De même, l’Afrique consomme seulement 5 % de la production mondiale de ciment alors qu’elle abrite 18 % de la population mondiale. Le coût élevé du ciment clinker importé entrave son développement économique, fragilise ses infrastructures de logement et de transport, ralentit ses efforts de rétablissement à l’issue de catastrophes naturelles, et limite la capacité des pays africains à protéger leur littoral contre les effets du changement climatique. Plusieurs alternatives telles que le ciment d’argile calciné au calcaire (LC3) peuvent être produites localement à partir d’abondantes ressources d’argile, pour des coûts jusqu’à 25 % inférieurs et une empreinte carbone inférieure de 40 %.

 

Un accès abordable aux produits à base de minéraux intégrés au niveau mondial, tels que les panneaux solaires et les batteries, demeure particulièrement difficile à atteindre. À titre d’illustration, alors que la République démocratique du Congo produit 72 % du cobalt mondial, un élément clé des batteries lithium-ion, l’Afrique devrait représenter seulement 0,1 % du marché mondial d’ici 2030.

 

Ce problème ne se limite pas à l’Afrique. Entre 2002 et 2022, des pays d’Amérique latine comme le Chili, l’Argentine et la Bolivie ont exporté 1 980 kilotonnes de lithium, dont seulement 13 kilotonnes (moins de 1 %) ont regagné la région sous forme de produits finis.

 

Plusieurs approches innovantes, telles que les systèmes de « matériaux en tant que service », qui encouragent la location plutôt que la vente de matières premières, pourraient contribuer à combler ces écarts en permettant aux pays producteurs de minerais de percevoir des redevances à chaque étape du traitement et de la production. En s’inspirant de cette approche, les dirigeants politiques pourraient également exiger des fabricants de produits finis qu’ils les revendent à des prix abordables.

 

Pour que de tels programmes puissent être mis en œuvre, le soutien des économies développées, notamment européennes, sera indispensable. Coopération et assistance techniques seront particulièrement importantes pour promouvoir une sécurité minérale centrée sur l’être humain, dans la mesure où le secteur des minéraux a perçu un peu moins de 600 millions $ sur les 239 milliards $ consacrés à l’aide publique au développement à travers le monde en 2021.

 

Pour garantir un accès durable aux matières premières essentielles, l’UE ne doit pas se contenter d’offrir aux pays africains un rôle plus important dans le traitement de minerais qui seront en fin de compte exportés. Elle doit davantage contribuer à la création d’un modèle de sécurité minérale plus équitable, qui place l’accent sur l’accessibilité financière et l’autosuffisance, permettant ainsi à l’Afrique de répondre à ses propres besoins en matière de développement.

 

Daniel M. Franks est professeur à l’Université du Queensland, et directeur du Global Centre for Mineral Security au sein du Sustainable Minerals Institute. Rüya Perincek, chercheuse en politiques publiques à la Willy Brandt School of Public Policy de l’Université d’Erfurt, est membre principale adjointe au Global Centre for Mineral Security.

 

Project Syndicate, 2025.
www.project-syndicate.org

Championnat national de basket-ball : Coup d’envoi de la nouvelle saison

Après le double sacre du Stade Malien de Bamako en Supercoupe du Mali, tant chez les Hommes que chez les Dames, le 24 janvier 2025, le championnat national de basketball pour la saison 2024 – 2025 a démarré le 30 janvier. Au total, huit rencontres ont été disputées lors de cette journée inaugurale.

Les deux affiches phares de cette première journée, opposant le Stade Malien à l’AS Real, ont tourné à l’avantage des Stadistes sur les deux tableaux. Chez les Messieurs, les Blancs de Bamako se sont largement imposés (78 – 38). Les protégés du technicien Boubacar Kanouté ont plié le match dès la première mi-temps, avec une avance de 19 points (38 – 19) avant de prendre également le dessus lors du troisième quart-temps, portés par Gaoussou Fofana, auteur de 11 points et meilleur marqueur de la rencontre.

Les Dames de l’AS Real de Bamako n’ont pas réussi à prendre la revanche pour leurs homologues masculins. Elles se sont également inclinées devant les Dames du Stade Malien, même si elles ont fait légèrement mieux que les hommes en termes d’écart au score (82 – 67).

Autres résultats

Dans les autres rencontres, dans le tableau masculin l’AS Police s’est imposée devant le promu Faso Kanu (65 – 53). Pour leur grande première dans l’élite, les joueurs de Faso Kanu se sont logiquement inclinés face à des Policiers plus expérimentés.

En revanche, la tâche n’a pas été facile pour le CRB de Tombouctou face à la deuxième équipe promue cette saison chez les Messieurs. Le Centre Mamoutou Kane de Kalanbacoro a longtemps tenu tête aux Tombouctiens avant de s’incliner sur le fil (62 – 61).

L’autre affiche de cette première journée, entre deux habitués du championnat, l’USFAS et l’Attar Club de Kidal, a tourné à l’avantage des Militaires, qui ont largement dominé les Kidalois (71 – 53).

Chez les Dames, l’AS Police a pris le dessus sur l’AS Commune V (74 – 55). Les Policières ont été nettement supérieures aux joueuses de la Commune V, en manque de rythme. Kalaban Sport Club est également venu à bout du CRB de Tombouctou (57 – 39), alors que le Djoliba AC a perdu sur tapis vert, car les Rouges de Bamako, en se présentant sur le parquet du Palais des Sports, n’étaient pas en possession de leurs licences.

Mohamed Kenouvi

Élections : Où en est la mise à jour du fichier électoral ?

Débutée le 1er octobre 2024, la révision annuelle des listes électorales, qui devait s’achever le 31 décembre dernier, a été prorogée jusqu’au 28 février 2025. À trois semaines de la clôture du processus, comment se présente le fichier électoral ?

Les chiffres actualisés des opérations ne seront disponibles qu’à la fin des opérations de révision, selon nos informations auprès du ministère de l’Administration territoriale et de la Décentralisation. Mais, selon le point d’étape en date du 30 novembre 2024 que nous avons consulté auprès du ministère, le fichier électoral comportait à cette date 8 472 439 électeurs inscrits, 4 398 633 hommes et 4 073 806 femmes. Au total, 7 899 155 électeurs ont été inscrits à l’intérieur du pays et 573 284 ont été recensés à l’extérieur, dans les missions diplomatiques et consulaires.

58 906 validations (34 373 hommes et 24 533 femmes) ont été enregistrées sur l’ensemble du territoire national, dont 25 407 à Bamako, 7 435 à Koulikoro, 5 441 à Ménaka, 3 577 à Ségou, 3 506 à Sikasso et 2 311 à Kayes, entre autres.

Quant aux transferts d’électeurs, 56 283 ont été enregistrés à l’échelle nationale (32 051 hommes et 24 232 femmes). La région de Gao a enregistré le plus grand nombre de cas, avec 10 098 électeurs transférés. Elle est suivie de la région de Ménaka (9 420), du District de Bamako (5 846) et de la région de Koulikoro (4 062).

La révision annuelle des listes électorales en cours a aussi jusqu’à présent enregistré 37 833 radiations d’électeurs du fichier électoral, 22 511 hommes et 15 322 femmes. La région de Ségou totalise le plus grand nombre de radiations avec 5 244 cas, suivie de Kayes où 3 642 cas de radiations ont été enregistrés, de Koulikoro (3 413), de Bougouni (3 101) et de Sikasso (3 050).

Faible engouement

Malgré la prorogation de la période de révision annuelle des listes électorales, les opérations suscitent peu d’engouement, selon nos constats, dans certaines mairies du District de Bamako. Pour y remédier, le ministère a pris certaines dispositions. « Nous sommes en train de mener différentes campagnes de sensibilisation à travers différents créneaux, que ce soit sur la chaîne nationale, les web TV, les radios de proximité, avec des messages dans toutes les langues nationales », assure Badara Aliou Keita, Sous-Directeur des Affaires politiques et du partenariat à la Direction générale de l’Administration du territoire.

Mohamed Kenouvi

Ségou’Art – Festival sur le Niger 2025 : Une 21ème édition sous le signe de la diversité culturelle

Du 4 au 9 février 2025, la « Cité des Balanzan » accueille la 21ème édition de Ségou’Art – Festival sur le Niger, un événement culturel majeur au Mali et en Afrique de l’Ouest. Sur le thème « Diversité culturelle, paix et unité », le festival vise à promouvoir la richesse artistique et la cohésion sociale à travers une programmation variée.

Créé en 2005, le Festival sur le Niger est une plateforme d’expression artistique couvrant musique, arts visuels, théâtre, danse, artisanat et conférences. Il attire chaque année des milliers de visiteurs locaux et internationaux, contribuant ainsi au rayonnement culturel de Ségou.

La musique reste l’un des points forts du festival. Cette année, des artistes renommés comme Tiken Jah Fakoly (Côte d’Ivoire), Sékouba Bambino (Guinée) et Alif Naaba (Burkina Faso) sont attendus pour animer des concerts géants, célébrant la diversité musicale africaine.

Le Salon d’art contemporain mettra en avant les jeunes talents maliens avec l’exposition « Bi Mali », qui offrira une perspective moderne sur la scène des arts plastiques du pays.

Introduite en 2024, la « Nuit du Pagne Tissé » revient pour célébrer les tissus locaux et le bogolan, symboles du textile malien. L’événement comprendra défilés de mode, expositions-ventes, ateliers et masterclasses, valorisant le savoir-faire des artisans. La « Ségou Hip Hop Night » offrira une scène aux artistes urbains du Mali et de la sous-région, confirmant l’essor du rap et du hip-hop africains. Autre moment fort, la « Caravane Culturelle pour la Diversité » visant à dévoiler la richesse culturelle du Mali et des pays partenaires à travers des rencontres communautaires, soirées de diversité culturelle, ateliers environnementaux et discussions sous la tente touarègue. Le concours « Talents de la Cité » rassemblera près de 300 jeunes artistes (De 18 à 35 ans) dans les domaines de la musique et des arts visuels, offrant une opportunité de visibilité aux créateurs émergents.

En parallèle, la Foire de Ségou (du 3 au 10 février) réunira 400 artisans et créateurs locaux et internationaux, offrant une vitrine à l’artisanat et aux produits agricoles. Cet événement attire chaque année des centaines de milliers de visiteurs et favorise ainsi la promotion de l’économie locale.

Avec une programmation diversifiée et un fort accent sur la diversité culturelle, la paix et l’unité, les initiateurs promettent que la 21ème édition de Ségou’Art – Festival sur le Niger sera un moment de célébration et de partage qui renforcera les liens entre les cultures africaines et des autres continents.

MD

La crise de l’IA occidentale est une réalité

La sortie du grand modèle de langage chinois DeepSeek-R1, qui impressionne par ses capacités et son faible coût de développement, a provoqué une onde de choc sur les marchés financiers, et conduit plusieurs observateurs à parler de « moment Spoutnik » dans le domaine de l’intelligence artificielle. Or, nous ne devrions pas être surpris par l’émergence d’un innovant modèle chinois capable de rivaliser avec ses équivalents américains. Il constitue tout simplement le résultat prévisible d’un échec politique américain et occidental majeur, dont l’industrie de l’IA porte elle-même une grande part de responsabilité.

 

Les capacités croissantes de la Chine en matière d’IA étaient bien connues de la communauté des chercheurs du domaine, comme du public adepte de cette technologie. Les entreprises et les chercheurs chinois spécialisés dans l’IA se sont en effet montrés remarquablement ouverts concernant leurs progrès, en publiant des articles, en permettant un libre accès à leurs logiciels, ainsi qu’en s’entretenant avec des chercheurs et journalistes américains. En juillet dernier, un article du New York Times titrait déjà : « La Chine comble le fossé qui la sépare des États-Unis en matière d’IA ».

 

Le fait que la Chine soit quasiment parvenue à égaler les États-Unis dans ce domaine s’explique par deux facteurs. Premièrement, Pékin applique une politique nationale agressive et cohérente en direction de l’autosuffisance et de la supériorité technique dans l’écosystème entier des technologies numériques, qu’il s’agisse des équipements de production de semiconducteurs ou des processeurs, matériels et modèles d’IA – aux fins d’applications tant commerciales que militaires. Deuxièmement, les politiques publiques et le comportement des industriels aux États-Unis (et dans l’UE) se caractérisent par un affligeant mélange d’autosatisfaction, d’incompétence et de cupidité.

 

Chacun doit comprendre une bonne fois pour toutes que le dirigeant chinois Xi Jinping et le président russe Vladimir Poutine ne sont pas des amis de l’Occident, et que l’IA engendrera des transformations économiques et militaires aux conséquences incalculables. Compte tenu des enjeux, la préservation d’un leadership des économies démocratiques développées en matière d’IA justifie, pour ne pas dire impose, une immense mobilisation stratégique des secteurs public et privé, d’une ampleur comparable à celle du projet Manhattan, de l’OTAN, des divers efforts d’indépendance énergétique, ou encore des politiques sur les armes nucléaires. Or, l’Occident suit aujourd’hui précisément la direction opposée.

 

Aux États-Unis, la recherche publique et universitaire en matière d’IA accuse un retard par rapport à la Chine et au secteur privé. En raison de financements insuffisants, ni les agences gouvernementales ni les universités ne peuvent rivaliser avec les salaires et les installations informatiques que proposent des entreprises telles que Google, Meta, OpenAI ou leurs concurrentes chinoises. Par ailleurs, la politique américaine d’immigration à l’égard des étudiants diplômés et des chercheurs est à la fois contre-productive et insensée, puisqu’elle contraint de grands talents à quitter le pays une fois leurs études achevées.

 

Intervient également la politique américaine de réglementation de l’accès de la Chine aux technologies d’IA. Les contrôles à l’exportation sont apparus trop tardivement, et se révèlent inadaptés, insuffisamment pourvus en effectifs, et peu rigoureux dans leur exécution. L’accès de la Chine aux technologies d’IA américaines au travers d’accords de services et de licence demeure quasiment non réglementé, alors même que les technologies qui les sous-tendent, telles que les processeurs Nvidia, sont elles-mêmes soumises à des contrôles à l’exportation. Les États-Unis ont annoncé la mise en place de règles plus strictes en matière d’octroi de licences une semaine seulement avant que l’ancien président Joe Biden ne quitte ses fonctions.

 

Enfin, en matière d’IA, la politique américaine néglige la nécessité d’une R&D qui soit solidement soutenue, utilisée et, le cas échéant, réglementée au niveau du secteur privé, de l’État et de l’armée. Les États-Unis ne disposent toujours pas d’agence relative à l’IA ou aux technologies de l’information qui équivaille au département de l’Énergie, aux Instituts nationaux de santé, à la NASA, ou aux laboratoires nationaux qui conduisent (et contrôlent étroitement) la R&D américaine en matière d’armes nucléaires.

 

Cette situation résulte en partie de bureaucraties étatiques sclérosées à la fois dans l’Union européenne et aux États-Unis. Le secteur technologique de l’UE est en effet surréglementé, tandis que les départements américains de la Défense et du Commerce, entre autres agences, ont besoin d’être réformés.

 

Sur ce point, les critiques formulées par le secteur technologique à l’égard des gouvernements sont justifiées. Pour autant, l’industrie elle-même n’est pas irréprochable : avec le temps, les efforts de lobbying et les rotations fréquentes dans la nomination des cadres ont affaibli les capacités d’institutions publiques d’importance cruciale. Bon nombre des difficultés liées aux politiques américaines résultent de la résistance ou de la négligence du secteur technologique lui-même, qui à plusieurs égards majeurs est devenu son propre ennemi, ainsi que l’ennemi de la sécurité de l’Occident à long terme.

 

À titre d’illustration, l’entreprise néerlandaise ASML (qui fabrique des machines de lithographie de pointe utilisées dans la production de puces électroniques) et le fournisseur américain d’équipements pour semiconducteurs Applied Materials ont tous deux fait pression pour affaiblir les contrôles à l’exportation sur les équipements de production de semiconducteurs, ce qui a facilité les efforts fournis par la Chine pour supplanter TSMC, Nvidia et Intel. Pour ne pas ne retrouver dépassée, Nvidia a conçu des puces spéciales pour le marché chinois, aux performances tout juste inférieures au seuil fixé pour les restrictions à l’exportation ; ces puces ont ensuite été utilisées pour entraîner le modèle DeepSeek-R1. Au niveau des modèles d’IA, Meta et la société de capital-risque Andreessen Horowitz ont exercé un lobbying acharné pour empêcher toute restriction sur les produits en open source.

 

À tout le moins publiquement, la ligne de conduite de l’industrie a été la suivante : « Le gouvernement n’y comprend absolument rien, mais tout ira bien si vous nous laissez faire ». Seulement voilà, tout ne va pas bien. La Chine a quasiment rattrapé son retard sur les États-Unis, et devance d’ores et déjà l’Europe. Par ailleurs, le gouvernement américain n’est pas un cas désespéré, et il doit être mis à contribution. Historiquement, les travaux fédéraux et universitaires en matière de R&D n’ont rien à envier à ceux du secteur privé.

 

C’est bel et bien l’Agence américaine pour les projets de recherche avancée (l’actuelle DARPA) qui est à l’origine d’Internet, de même que le World Wide Web est né des travaux de l’Organisation européenne pour la recherche nucléaire (CERN). Marc Andreessen, le cofondateur de Netscape, a créé le tout premier navigateur Web dans un centre d’informatique haute performance financé par le gouvernement fédéral, au sein d’une université publique. Pendant ce temps, le secteur privé nous dévoilait des services en ligne tels que CompuServe, Prodigy et AOL (America Online) – autant de jardins clos centralisés, fermés et mutuellement incompatibles, qui ont fort heureusement disparu lorsqu’Internet a été ouvert à une utilisation commerciale.

 

Les défis soulevés par la montée en puissance de la Chine en matière de R&D liée à l’IA nécessitent une sérieuse et puissante réponse. Là où les capacités de l’État font défaut, nous devons les renforcer, pas les détruire. Nous devons verser des salaires compétitifs aux fonctionnaires et aux universitaires, moderniser les infrastructures et les procédures technologiques aux États-Unis (et dans l’UE), créer de solides capacités publiques de R&D (notamment pour les applications militaires), renforcer la recherche universitaire, et mettre en œuvre des politiques rationnelles en matière d’immigration, de financement de la R&D liée à l’IA, de tests de sécurité, ainsi que de contrôle à l’exportation.

 

La seule difficulté politique réellement épineuse réside dans la question de l’ouverture, notamment l’octroi de licences en open source. Nous ne pouvons pas laisser le monde entier accéder à des modèles optimisés pour les attaques de drones tueurs, mais nous ne pouvons pas non plus estampiller « top secret » tous les modèles. Il nous faut établir un juste milieu pragmatique, potentiellement en nous appuyant sur les laboratoires nationaux de recherche en matière de défense, et en appliquant des contrôles à l’exportation soigneusement élaborés pour les cas intermédiaires. Par-dessus tout, l’industrie de l’IA doit comprendre que si nous ne travaillons pas ensemble, nous échouerons chacun de notre côté.

 

Charles Ferguson, investisseur technologique et analyste politique, est le réalisateur du documentaire oscarisé Inside Job.

 

Project Syndicate, 2025.
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Le moment Spoutnik de l’IA ?

Après le lancement du modèle d’intelligence artificielle DeepSeek-R1 le 20 janvier dernier, qui a provoqué un effondrement du cours de l’action du fabricant de puces Nvidia ainsi qu’une forte baisse de la valorisation de plusieurs autres entreprises technologiques, certains ont déclaré qu’il s’agissait d’un « moment Spoutnik » dans la course sino-américaine à la suprématie en matière d’IA. Pour une industrie américaine de l’IA qui avait sans doute besoin d’être bousculée, cet épisode soulève toutefois plusieurs questions difficiles.

Les investissements de l’industrie technologique américaine dans l’IA ont été massifs, Goldman Sachs s’attendant à ce que « les géants technologiques, les grandes sociétés et les services publics investissent environ 1 000 milliards $ au cours des années à venir pour soutenir l’IA ». Or, depuis un certain temps déjà, de nombreux observateurs et moi-même nous interrogeons sur l’orientation des investissements dans l’IA et du développement de celle-ci aux États-Unis.

 

Toutes les entreprises leaders en la matière appliquant pour l’essentiel le même plan d’action (bien que Meta se distingue dans une certaine mesure par son modèle partiellement en open source), l’industrie semble avoir placé tous ses œufs dans le même panier. Toutes les entreprises technologiques américaines, sans exception, se montrent obsédées par l’optimisation de l’échelle. Invoquant des « lois de mise à l’échelle » qui restent encore à prouver, elles partent du principe que l’introduction d’une quantité croissante de données et de puissance de calcul dans leurs modèles constitue la clé qui leur permettra de débloquer des capacités toujours plus impressionnantes. Certains vont jusqu’à affirmer que « l’échelle est tout ce dont vous avez besoin ».

 

Avant le 20 janvier, les entreprises américaines n’étaient pas disposées à envisager d’autres solutions que les modèles fondamentaux préformés sur des ensembles massifs de données pour prédire le mot suivant dans une séquence. Compte tenu de leurs priorités, elles se concentraient presque exclusivement sur les modèles de diffusion et les chatbots destinés à effectuer des tâches humaines (ou similaires). Bien que l’approche de DeepSeek soit globalement la même, elle semble s’appuyer davantage sur l’apprentissage par renforcement, les méthodes basées sur un ensemble d’experts (en utilisant de nombreux modèles plus petits et plus efficaces), la distillation et le raisonnement par chaîne de pensée. C’est cette stratégie qui lui aurait semble-t-il permis de créer un modèle compétitif à un niveau de coûts beaucoup moins élevé.

 

Bien que nous ne soyons pas certains que DeepSeek nous ait tout dit, cet épisode vient mettre en lumière une « pensée de groupe » au sein de l’industrie américaine de l’IA. L’aveuglement du secteur américain face à des approches alternatives moins coûteuses et plus prometteuses, combiné à un battage médiatique, constitue précisément ce que Simon Johnson et moi-même avions prédit dans Power and Progress, que nous avons écrit juste avant le début de l’ère de l’IA générative. La question consiste désormais à savoir si cette industrie américaine présente d’autres angles morts, plus dangereux encore. Les principales entreprises technologiques américaines sont-elles par exemple en train de manquer l’occasion d’orienter leurs modèles dans une direction davantage axée sur l’être humain ? Seul l’avenir nous le dira, mais je pense que la réponse est oui.

 

Se pose ensuite la question de savoir si la Chine accomplirait actuellement un bond en avant par rapport aux États-Unis. Dans l’affirmative, cela signifie-t-il que les structures autoritaires verticales descendantes (que James A. Robinson et moi-même avons qualifiées d’« institutions extractives ») pourraient égaler voire surpasser les fonctionnements ascendants dans la stimulation de l’innovation ?

 

J’ai tendance à penser que le contrôle du haut vers le bas entrave l’innovation, comme l’affirmons Robinson et moi-même dans Why Nations Fail. Si le succès de DeepSeek semble remettre en cause cette affirmation, il est loin de prouver que l’innovation dans le cadre d’institutions extractives peut être aussi puissante ou durable que dans le cadre d’institutions inclusives. DeepSeek s’appuie en effet sur plusieurs années d’avancées aux États-Unis (et dans une certaine mesure en Europe). Toutes ses méthodes de base ont été mises au point aux États-Unis. Les modèles basés sur un ensemble d’experts et l’apprentissage par renforcement ont été développés au sein d’instituts de recherche universitaires il y a plusieurs dizaines d’années, et ce sont les géants technologiques américains qui ont créé les modèles Transformers, le raisonnement par chaîne de pensée et la distillation.

 

L’accomplissement de DeepSeek réside du côté de l’ingénierie : la capacité à combiner les mêmes méthodes de manière plus efficace que les sociétés américaines. Reste à savoir si les entreprises et instituts de recherche chinois parviendront à franchir l’étape suivante en proposant des techniques, produits et approches qui changeront réellement la donne.

 

DeepSeek semble par ailleurs se distinguer de la plupart des autres entreprises chinoises spécialisées dans l’IA, qui produisent généralement des technologies pour l’État ou au moyen de fonds publics. Sachant que l’entreprise (issue d’un fonds spéculatif) a dans un premier temps opéré sous les radars, sa créativité et son dynamisme se poursuivront-ils maintenant que DeepSeek est sous les feux de la rampe ? Quoi qu’il arrive, la réussite d’une seule entreprise ne saurait être considérée comme la preuve irréfutable de la capacité de la Chine à surpasser des sociétés plus ouvertes en matière d’innovation.

 

Une autre question intervient, de nature géopolitique. La saga DeepSeek signifie-t-elle que les contrôles américains à l’exportation et autres mesures visant à freiner la recherche chinoise en matière d’IA ont échoué ? La réponse à cette question n’est pas claire non plus. Bien que DeepSeek ait entraîné ses derniers modèles (V3 et R1) sur des puces plus anciennes et moins puissantes, l’entreprise pourrait encore avoir besoin de puces plus puissantes pour réaliser de nouvelles avancées et passer à l’échelle supérieure.

 

Quoi qu’il en soit, il apparaît désormais clairement que l’approche américaine à somme nulle était inapplicable et malavisée. Une telle stratégie n’a de sens que si vous considérez vous diriger vers l’intelligence artificielle générale (des modèles capables d’égaler les êtres humains dans n’importe quelle tâche cognitive), et que celui qui atteindra le premier cette intelligence artificielle générale jouira d’un immense avantage géopolitique. En nous accrochant à ces hypothèses – dont aucune n’est nécessairement justifiée – nous avons empêché une collaboration fructueuse avec la Chine dans de nombreux domaines. À titre d’exemple, si un pays produit des modèles qui améliorent la productivité humaine ou nous permettent de mieux gérer l’énergie, cette innovation sera bénéfique pour les deux pays, surtout si elle est largement utilisée.

 

À l’instar de ses équivalents américains, DeepSeek aspire à développer l’IAG, et la création d’un modèle dont la formation est nettement moins coûteuse pourrait changer la donne. Pour autant, l’accomplissement d’une réduction des coûts de développement par des méthodes connues ne nous conduira pas miraculeusement à l’IAG au cours des prochaines années. La question reste ouverte de savoir si l’IAG est atteignable à court terme (celle de savoir si elle est souhaitable étant encore plus discutable).

 

Même si nous ne connaissons pas encore tous les détails concernant la manière dont DeepSeek a développé ses modèles, et même si nous ignorons ce que sa réussite apparente signifie pour l’avenir de l’industrie de l’IA, une chose est sûre : le nouveau venu chinois a brisé l’obsession du secteur technologique pour la mise à l’échelle, et a sans doute ébranlé son excès de confiance.

 

Daron Acemoglu, lauréat du prix Nobel d’économie en 2024 et professeur d’économie au MIT, est coauteur (avec Simon Johnson) de l’ouvrage intitulé Power and Progress : Our Thousand-Year Struggle Over Technology and Prosperity (PublicAffairs, 2023).

 

Project Syndicate, 2025.
www.project-syndicate.org

Retards de paiement : Les prestataires miniers alertent

Asphyxiés par des délais de paiement excessifs, les prestataires miniers locaux peinent à honorer leurs charges. L’Association des Commerçants et Prestataires Miniers du Mali (ACPM) appelle les autorités à réguler ces pratiques pour éviter un effondrement du secteur.

Alors que les fournisseurs étrangers sont payés en avance, les entreprises locales attendent parfois plusieurs mois, voire plus d’un an, avant de recevoir leur dû. Une inégalité flagrante que dénonce Aliou Traoré, président de l’ACPM. « Nous sommes payés après des mois d’attente, alors que les fournisseurs étrangers perçoivent leur argent immédiatement. C’est une forme d’appauvrissement organisé ».

Ce retard met en péril l’ensemble de la chaîne économique locale. Outre les pénalités fiscales et les intérêts bancaires qui s’accumulent, les entreprises sont dans l’incapacité de payer leurs employés à temps. « Beaucoup d’entreprises locales doivent des mois de salaire à leurs travailleurs, faute de trésorerie. Pourtant, elles ont de l’argent, mais il est bloqué entre les mains des mines et des fournisseurs étrangers », déplore Traoré.

Coup fatal pour le contenu local

Ces retards de paiement remettent en cause la politique du contenu local, censée favoriser les entreprises nationales dans l’industrie minière. « Aujourd’hui, une société locale ne peut plus honorer une commande minière sans mettre en péril son équilibre financier. Si rien ne change, nous allons assister à la disparition des prestataires nationaux », alerte l’ACPM.

En effet, entre la commande, la fabrication, l’acheminement et l’intégration dans les stocks des mines, il faut déjà compter 12 à 16 semaines avant même le début du délai de paiement contractuel. Une attente insoutenable qui empêche les entreprises locales d’être compétitives et menace directement l’économie nationale.

Face à l’urgence, l’ACPM appelle les autorités à prendre des mesures concrètes pour mettre fin aux délais de paiement abusifs imposés aux prestataires locaux. Elle recommande la mise en place d’un audit des pratiques de paiement dans le secteur minier, l’adoption d’un décret ou d’un arrêté ministériel fixant un délai maximal de 30 jours pour les paiements, ainsi que l’instauration de pénalités financières aux sociétés minières qui ne respecteraient pas ces obligations.

« Aux États-Unis, les entreprises qui ne paient pas dans les délais sont sanctionnées. Pourquoi pas chez nous ? » questionne Traoré. Sans intervention rapide, les entreprises locales continueront à souffrir, fragilisant l’économie et le secteur minier.

MD

Gilles Yabi : « La CEDEAO doit saisir cette crise comme une opportunité de réforme »

Gilles Yabi, chercheur et fondateur de WATHI, analyse les défis actuels en Afrique de l’Ouest. Dans cet entretien exclusif, il évoque l’avenir de la CEDEAO après le départ du Mali, du Burkina Faso et du Niger, la lutte contre le terrorisme sans les forces occidentales, l’impact des régimes militaires sur la sécurité, la crise sahélienne et l’immigration clandestine, ainsi que l’influence croissante de nouveaux partenaires comme la Russie, la Chine et la Turquie. Propos recueillis par Massiré Diop

Quel avenir pour la CEDEAO après le retrait du Mali, du Burkina Faso et du Niger ?

La CEDEAO reste économiquement puissante grâce à des pays comme le Nigeria, qui représente plus de 60% du PIB régional, mais son affaiblissement politique est indéniable. Ce départ compromet l’intégration régionale et accentue les tensions. Toutefois, cette crise peut être une opportunité pour réformer l’organisation et renforcer son efficacité.

Comment les États sahéliens peuvent-ils faire face à la menace terroriste sans les forces occidentales ?

L’instabilité politique causée par les coups d’État fragilise la lutte contre le terrorisme. Bien que les militaires au pouvoir promettent une meilleure réponse sécuritaire, l’absence de coordination avec des experts civils limite leur efficacité. Une stratégie intégrée, impliquant civils et militaires, est essentielle pour stabiliser durablement la région.

Les changements de régimes successifs au Sahel ont-ils renforcé ou affaibli la lutte contre le terrorisme ?

Les coups d’État perturbent la continuité des politiques sécuritaires. Si un gouvernement militaire peut théoriquement être plus efficace qu’un régime civil défaillant, la marginalisation des experts et l’absence d’une vision globale affaiblissent la réponse sécuritaire. Une gouvernance inclusive reste indispensable.

Quels sont les effets de la crise sahélienne sur l’immigration clandestine vers l’Europe ?

L’insécurité pousse les populations à se déplacer, mais majoritairement à l’intérieur de leur pays ou vers des États voisins. L’immigration vers l’Europe est surtout liée aux difficultés économiques et aux réseaux de migrants établis. Réduire ce phénomène nécessite une approche globale, au-delà des seuls enjeux sécuritaires.

Comment la montée en puissance de nouveaux partenaires redéfinit-elle l’équilibre géopolitique au Sahel ?

La Russie, la Chine et la Turquie ne sont pas de nouveaux acteurs en Afrique, mais leur influence croissante reconfigure les rapports de force. Leur présence offre des alternatives aux pays sahéliens, mais accroît aussi les rivalités géopolitiques. Sans vision stratégique propre, ces nations risquent de rester dépendantes d’intérêts étrangers plutôt que de renforcer leur souveraineté et leur développement.

Avortement médicalisé : Un droit reconnu mais peu appliqué au Mali

Le 26 octobre 2004, le Mali a ratifié le Protocole additionnel à la Charte africaine des droits de l’Homme et des peuples relatif aux droits des femmes. Aussi appelé Protocole de Maputo, ce texte reconnaît des droits spécifiques aux femmes, dont celui « à la santé et au contrôle des fonctions de reproduction ». Il autorise notamment l’avortement médicalisé, mais la mise en application de plusieurs dispositions de ce texte continue d’être un défi majeur.

La Charte africaine des droits de l’Homme et des peuples est entrée en vigueur le 27 juin 1986. Le 11 juillet 2003, les pays africains ont adopté un Protocole additionnel à la Charte africaine relatif aux droits de la femme. Sur les 55 pays africains, 44 l’ont ratifié jusqu’en juin 2023. Ce protocole compte 32 articles et consacre 24 droits spécifiques des femmes, notamment le droit à la vie, à la dignité, le droit de vivre à l’abri de la violence sexuelle et le droit au divorce.

Parmi les innovations, le texte reconnaît en son article 14 le « droit à la santé et au contrôle des fonctions de reproduction ». Il engage les États à assurer le respect et la promotion de ces droits, qui comprennent le droit d’exercer un contrôle sur la fécondité, le libre choix des méthodes contraceptives ou encore le droit d’être informée de son état de santé, ainsi que de celui de son partenaire, en particulier en cas d’infections sexuellement transmissibles, y compris le VIH/SIDA.

Le Protocole de Maputo invite les États à protéger notamment « les droits reproductifs des femmes, particulièrement en autorisant l’avortement médicalisé en cas d’agression sexuelle, de viol, d’inceste et lorsque la grossesse met en danger la santé mentale et physique de la mère ou la vie de la mère ou du fœtus ».

Le principe énoncé à l’article 14 du Protocole de Maputo institue un « avortement sécurisé » et vise à combattre l’avortement clandestin. Il obéit à des conditions de fond et de forme. L’article 14 évoque des conditions limitatives et admet l’avortement dans ces cas. Sur la forme, pour procéder à l’interruption volontaire de grossesse (IVG) médicalisée, il faut un personnel formé dans le cadre du protocole. L’avortement doit être pratiqué par un personnel qualifié (médecin, sage-femme, infirmier) et doit se faire selon les normes et les directives imposées par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et le gouvernement. Cependant, l’autre aspect qui n’est pas explicitement mentionné par le Protocole de Maputo est l’âge de la grossesse.

Selon certains chercheurs, l’avortement sécurisé peut intervenir dans un délai de 3 à 5 mois. L’âge de la grossesse pour un avortement sécurisé varie de 3 à 5 mois (entre 12 et 20 semaines). Un débat qui n’est pas tranché par le protocole mais qui est pris en charge par la législation malienne, qui interdit l’avortement quel que soit l’âge de la grossesse.

Application incomplète

En ratifiant le Protocole de Maputo, le Mali s’est engagé à protéger les droits des femmes, y compris en matière de santé reproductive. Cependant, la mise en œuvre de ces engagements reste incomplète.

En 2016, l’Association malienne pour le progrès et la défense des droits des femmes (APDF) et l’Institute for Human Rights and Development in Africa (IHRDA) ont saisi la Cour africaine des droits de l’Homme et des peuples, estimant que le Code malien des personnes et de la famille de 2011 violait plusieurs dispositions du Protocole de Maputo, notamment concernant l’âge minimum du mariage, le consentement au mariage et le droit à l’héritage. En 2018, la Cour a ordonné au Mali de réviser ce code pour le conformer à ses obligations internationales. À ce jour, cette révision n’a pas été effectuée.

Concernant les mutilations génitales féminines (MGF), bien que le Protocole de Maputo appelle à leur interdiction, le Mali n’a pas encore adopté de législation nationale prohibant explicitement cette pratique. Selon l’Enquête Démographique et de Santé au Mali 2012-2013, 88,1% des femmes âgées de 15 à 49 ans ont été excisées par des praticiens traditionnels, et 71,9% des femmes et 79,1% des hommes pensent que les MGF doivent perdurer.

En matière de santé reproductive, le Protocole de Maputo prévoit l’accès à l’avortement médicalisé dans certaines situations, telles que le viol, l’inceste ou lorsque la poursuite de la grossesse met en danger la santé de la mère ou du fœtus. Cependant, au Mali, l’avortement reste largement criminalisé et les services d’avortement sécurisé sont limités, contribuant à un taux élevé d’avortements non sécurisés.

Malgré la ratification du protocole, le Mali n’a pas pleinement aligné sa législation nationale sur ses engagements internationaux et des efforts supplémentaires sont nécessaires pour protéger efficacement les droits des femmes.

Dépénaliser ?

Le nouveau Code pénal malien, adopté en décembre 2024, interdit l’avortement « quel que soit le moment de la grossesse », « hormis pour des motifs thérapeutiques » ou de « mise en danger de la santé et de la vie de la mère ou du fœtus ». Comme le Protocole de Maputo, il envisage l’avortement sécurisé et médicalisé. Cependant, on peut noter une divergence dans les deux approches. Alors que le protocole envisage une dépénalisation, la législation malienne maintient l’avortement comme une infraction.

Le Code pénal malien, dans ses articles 321-19 à 321-21 et le Protocole de Maputo en son article 14 abordent la question de l’avortement sous des angles différents. Bien qu’une convergence partielle se dessine avec la prise en compte de la santé physique et mentale de la femme, des écarts notables subsistent, notamment concernant l’accès élargi à l’interruption volontaire de grossesse (IVG) et l’approche juridique adoptée.

Le Code pénal malien (Loi n° 2024-027) prohibe l’avortement en règle générale, sauf dans des cas exceptionnels définis à l’article 321-19. L’interruption volontaire de grossesse n’est autorisée que lorsque la vie de la femme est en danger, que la grossesse est issue d’un viol ou d’un inceste, ou lorsque la santé physique ou mentale de la femme est menacée (article 321-20).

Toute interruption de grossesse pratiquée en dehors de ces cas est passible de sanctions. L’article 321-20 prévoit cinq ans d’emprisonnement, une amende d’un million de francs et une interdiction de séjour de dix ans pour toute personne pratiquant un avortement illégal. En cas d’usage de fraude, de contrainte ou de violence, la peine est portée à dix ans de réclusion. Si l’avortement entraîne le décès de la femme, la sanction peut aller jusqu’à vingt ans d’emprisonnement.

Les professionnels de santé sont particulièrement visés par la législation. L’article 321-21 punit les médecins, sage-femmes et autres praticiens qui pratiqueraient un avortement hors du cadre légal, avec des peines pouvant aller jusqu’à cinq ans d’emprisonnement et une interdiction d’exercer.

Le rapport alternatif sur les droits de l’enfant, produit par le Centre pour le droit et les politiques en matière de santé reproductive (CRLP) et l’Association des juristes maliennes (AJM), révèle que 46% de la population malienne a moins de 15 ans et que les adolescentes âgées de 15 à 19 ans contribuent pour près de 14% à la fécondité totale des femmes. De plus, 42% des adolescentes ont commencé leur vie féconde, avec 34% ayant déjà eu un enfant et 8% étant enceintes pour la première fois. Le taux de fécondité des adolescentes de 15 à 19 ans est de 199 pour 1 000, tandis que 94% des femmes en âge de procréer ont été victimes de mutilations génitales. Ces chiffres soulignent l’importance de la santé sexuelle et reproductive dans cette tranche d’âge. D’autant que, comme l’ajoute le rapport, la sexualité des mineures se déroule de façon clandestine : lorsqu’elles contractent une grossesse, une grande majorité a recours à l’avortement clandestin, pratiqué dans des conditions sanitaires et hygiéniques inappropriées.

Dans une approche plus permissive, le Protocole de Maputo, texte juridiquement contraignant adopté sous l’égide de l’Union africaine et ratifié par le Mali, pose une vision plus ouverte et protectrice des droits des femmes à son article 14. Il reconnaît aux femmes le droit de contrôle sur leur santé reproductive et demande aux États d’assurer un accès sécurisé à l’avortement dans les cas suivants : mise en danger de la vie de la femme, atteinte à la santé physique ou mentale de la femme, grossesse résultant d’un viol ou d’un inceste, malformation grave du fœtus.

Là où le Code pénal malien limite les conditions d’accès à l’IVG, le Protocole de Maputo élargit la liste des motifs légitimes en y incluant les malformations graves du fœtus, critère absent de la loi malienne. De plus, ce texte encourage les États à garantir un accès sécurisé à l’IVG, ce qui vise à lutter contre les avortements clandestins et leurs conséquences sanitaires.

Fatoumata Maguiraga

Tchad : Fermeture de la dernière base française

Lors d’une cérémonie officielle, le 30 janvier dernier, l’armée française a procédé à la rétrocession de sa dernière base militaire au Tchad, la base aérienne Sergent-Adji-Kossei, située à N’Djamena, la capitale du pays. Cette base était le dernier vestige d’une présence militaire française dans le pays, un engagement qui durait depuis plusieurs décennies. La remise de cette installation stratégique à l’armée tchadienne est l’aboutissement d’un processus de redéfinition des accords de défense entre les deux nations.

La présence militaire française au Tchad remonte à l’indépendance de ce dernier en 1960, lorsqu’un accord de défense a été signé entre la France et son ancienne colonie. Ce pacte a permis à la France de maintenir une présence militaire au Tchad pour garantir la sécurité et stabiliser le pays face aux menaces internes et externes. Au fil des décennies, cette relation s’est consolidée avec plusieurs interventions militaires, la plus notable étant l’Opération TACAUD en 1969, lancée pour soutenir le gouvernement tchadien contre les rebelles. Cette présence militaire s’est ensuite intensifiée, notamment au cours des conflits internes et des guerres civiles qui ont déstabilisé le pays.
Durant les années 1980 et 1990, la France est intervenue à plusieurs reprises pour soutenir le régime du président Hissène Habré, puis celui d’Idriss Déby, qui est arrivé au pouvoir en 1990. Ces interventions ont été essentielles pour maintenir une stabilité fragile et contrer les rebelles et groupes armés.
Au Tchad, cette présence a été renforcée par des interventions militaires à plusieurs reprises, particulièrement durant les périodes de guerre civile et de troubles internes. Un exemple marquant est l’Opération Barkhane, lancée en 2014, qui visait à lutter contre les groupes jihadistes au Sahel, avec le Tchad comme l’un des principaux contributeurs. Les troupes françaises ont utilisé le Tchad comme une base d’opérations centrale pour mener des actions contre les terroristes dans la région.
Cependant, cette relation militaire entre la France et le Tchad a pris un tournant après l’annonce, en novembre 2024, par le président tchadien Mahamat Idriss Déby, de la fin de l’accord de coopération de défense avec la France. Cet accord était jugé « obsolète » et « suranné » par le gouvernement tchadien, qui a estimé que le pays devait désormais prendre en charge sa propre sécurité. La remise de la base aérienne Sergent-Adji-Kossei à l’armée tchadienne le 30 janvier 2025 marque donc la fin d’une ère de coopération militaire étroite.
Le Tchad était l’un des derniers bastions de la France dans la région, où l’armée française a déployé ses troupes dans le cadre de l’opération Barkhane. Cette opération, qui a impliqué jusqu’à 5 000 militaires, a pris fin en novembre 2022, après près de dix ans d’engagement. La fermeture de la base de N’Djamena marque ainsi la fin d’une époque pour la France, qui a vu son rôle militaire dans le Sahel se réduire progressivement.
Le retrait des forces françaises du Tchad intervient dans un contexte plus large de retrait des troupes françaises de plusieurs pays du Sahel, notamment du Mali, du Burkina Faso et du Niger, où les gouvernements ont exprimé leur souhait de voir les troupes françaises quitter leurs territoires. Cette réorientation fait écho à un sentiment vif dans certains pays africains qui souhaitent une redéfinition de leurs partenariats de défense avec la France.
La rétrocession de la base de N’Djamena intervient après plusieurs mois de tensions diplomatiques entre la France et ses partenaires africains. Le président Déby a souligné que cette rétrocession n’indiquait pas la fin de la coopération avec la France, mais qu’elle permettait à son pays de prendre en charge de manière plus autonome sa propre sécurité. « Nous serons désormais responsables de notre propre sécurité », a précisé le ministre tchadien de la Défense.
Bien que ce geste symbolise la fin de l’ère des interventions directes, le Tchad et la France ont convenu de maintenir des partenariats en matière de formation et d’équipements militaires, pour soutenir les efforts de sécurité du pays sans une présence militaire directe.

Inondations : Au moins 71 écoles sous les eaux à Gao et Tombouctou

Le Conseil des ministres, dans sa session du mercredi  29 janvier, a abordé les répercussions des inondations dans les régions de Gao et de Tombouctou, ainsi que la mise en œuvre d’un plan d’action pour la gestion des servitudes et lits des marigots dans le district de Bamako. Cette réunion, présidée par le président de la Transition, a permis de passer en revue les mesures concrètes à prendre pour atténuer les impacts de ces catastrophes naturelles sur les populations.

Le ministre de l’Éducation nationale a présenté au Conseil des ministres une mise à jour sur la situation des écoles inondées à Gao et Tombouctou. Le pays fait face à un phénomène inhabituel de montée des eaux le long du Fleuve Niger, affectant des localités dans ces régions. Au total, 71 écoles, relevant de cinq Centres d’Animation Pédagogique des Académies d’Enseignement de Gao et de Tombouctou, ont été impactées par les inondations, perturbant ainsi l’accès à l’éducation pour de nombreux élèves.
Pour assurer la continuité des activités pédagogiques malgré cette situation, le gouvernement a mis en place des mesures d’urgence. Des tentes ont été installées pour servir d’espaces d’apprentissage temporaires, permettant aux élèves de poursuivre leur scolarité dans des conditions adaptées. Par ailleurs, un redéploiement des élèves vers des établissements voisins a été organisé afin d’éviter une rupture prolongée de l’enseignement.
Les autorités locales et nationales se sont engagées à soutenir les établissements scolaires touchés en fournissant des équipements et en facilitant la mobilité des élèves et des enseignants, afin de minimiser l’impact sur la qualité de l’enseignement dans ces régions déjà fragilisées par les aléas climatiques.
Le lendemain, jeudi 30 janvier 2025, le Comité interministériel de gestion des crises et catastrophes s’est réuni sous la présidence du Premier ministre, le Général de Division Abdoulaye Maïga. L’un des principaux points à l’ordre du jour était le Plan d’actions pour la libération des servitudes et des lits des marigots du district de Bamako. Ce plan vise à réduire les risques d’inondation dans la capitale en libérant les servitudes des cours d’eau. L’occupation des lits des marigots et des cours d’eau par des habitations et infrastructures est une source majeure de risques d’inondations dans la région.
Les sous-commissions créées dans le cadre de ce plan ont travaillé sur plusieurs axes. Ils ont notamment mis l’accent sur la sensibilisation et la communication auprès des populations, pour expliquer les enjeux liés à la gestion des marigots. Des mesures concrètes ont également été prises pour accompagner les personnes concernées, en prévoyant des démolitions, ainsi qu’un suivi post-démolition afin de garantir l’efficacité des opérations.
Le Premier ministre a salué les efforts des sous-commissions, soulignant notamment les progrès réalisés en matière de réhabilitation et d’assainissement. Il a insisté sur l’importance d’un financement adéquat pour garantir la mise en œuvre complète du plan, appelant à une action rapide et coordonnée pour éviter de nouvelles catastrophes liées aux inondations.

Solidarité : Canal + Mali offre des kits scolaires aux élèves de l’école de l’île Dialagoum

Dans le cadre de son programme Canal + Impact, visant à accompagner les populations démunies à travers toute l’Afrique par le biais d’actions solidaires, Canal + Mali a procédé, ce 30 janvier 2025, à la remise de kits scolaires aux élèves de l’île Dialagoum, située en plein cœur de Bamako.

Au total, 300 kits scolaires comprenant des sacs, des cahiers, des livres, des stylos, entre autres, ont été offerts aux élèves, afin de soulager leurs parents dans la prise en charge de leur éducation. En plus des kits scolaires, le personnel de Canal+ Mali a rassemblé des vêtements, qui ont également été remis aux enfants.
« Nous serons à vos côtés. Tant que cela nous est possible, nous allons vous aider. Ce n’est qu’un début et d’autres actions suivront », a promis Idrissa Diallo, directeur général de Canal+ Mali.
Pour sa part, Broulaye Konaté, directeur de l’école de l’île Dialagoum, s’est dit animé d’une joie indescriptible en raison de la sélection de son école pour bénéficier de ce don.
« Qui connaît la situation actuelle du pays sait combien un geste de ce genre est hautement symbolique et très important », a-t-il souligné, précisant que cette aide permettrait aux parents de fournir des kits scolaires à leurs enfants dans le besoin et qu’elle vient également en appui aux efforts de l’école.
La cérémonie de remise, qui a mobilisé l’ensemble des élèves de l’école dans une ambiance festive, s’est clôturée par une visite guidée de l’école, notamment des différentes salles de classes et des autres activités de formation sur l’île.
L’école de l’île Dialagoum a été créée en 2017 par l’association Karama, avec à sa tête Mme Marie Garnier, qui, lors de ses promenades sur le fleuve, avait constaté que beaucoup d’enfants, surtout ceux des riverains, passaient leur temps à pêcher, tandis que leurs semblables partaient à l’école.
Centre d’apprentissage au départ, l’école a obtenu un statut public en 2022. En plus de l’enseignement classique du programme national, les élèves bénéficient de l’enseignement dans deux autres domaines, à savoir la protection de l’environnement et la transmission des savoirs locaux.
Mohamed Kenouvi

AES/CEDEAO : Un tournant dans les relations régionales

Ce mercredi 29 janvier 2025 marque le premier anniversaire de l’annonce par les pays de l’AES de leur sortie de la Communauté Économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO). Cette date acte également le retrait officiel du Burkina Faso, du Mali et du Niger de l’organisation ouest-africaine. Cette décision, résultant d’une série de tensions politiques et sécuritaires, modifie profondément le paysage régional.

La décision des trois pays de quitter la CEDEAO est le point culminant de plusieurs mois de détérioration des relations avec l’organisation. En 2022 et 2023, la prise de pouvoir par des coups d’État a exacerbé les divergences avec l’institution régionale. La CEDEAO, traditionnellement soucieuse de défendre la stabilité démocratique, a adopté des mesures de rétorsion, allant jusqu’à imposer des sanctions économiques et diplomatiques à l’encontre des trois pays.
Le retrait de ces États est donc perçu comme une réponse directe à la pression exercée par la CEDEAO, mais aussi comme une tentative d’affirmer leur autonomie face à une organisation qu’ils estiment ne pas répondre adéquatement aux défis internes qu’ils rencontrent, notamment en matière de sécurité et de gestion politique.
Bien que ces trois pays aient cessé d’être membres de la CEDEAO, l’organisation a opté pour une approche mesurée, prévoyant une période de transition de six mois, allant du 29 janvier au 29 juillet 2025. Durant cette période, certaines dispositions restent en place pour éviter des perturbations majeures dans les échanges régionaux.
Parmi ces mesures, on trouve la reconnaissance des documents d’identité, y compris les passeports et cartes d’identité portant le logo de la CEDEAO, pour les citoyens des pays concernés. Les échanges commerciaux entre ces pays et les autres membres de la communauté continuent sous les termes du Schéma de libéralisation des échanges (SLEC). De même, les citoyens des trois pays conservent leur droit de circuler sans visa, une mesure qui permet de maintenir un minimum de fluidité dans les relations humaines et économiques au sein de la région.
Cependant, ces mesures ne sont que temporaires. Il est clair que la CEDEAO cherche à éviter une rupture totale. L’organisation a en effet souligné sa volonté de poursuivre le dialogue avec les trois pays et d’envisager des modalités de coopération futures, bien que cela dépende de l’évolution de la situation politique et sécuritaire.
Le retrait de la CEDEAO représente un défi majeur pour le Burkina Faso, le Mali et le Niger, tant sur le plan économique que social. Les sanctions économiques imposées par la CEDEAO avaient déjà perturbé les échanges commerciaux et les investissements dans ces pays. Reste à savoir si la fin de la participation à l’organisation n’entraînera pas une aggravation de ces difficultés.
La suspension des programmes d’aide régionaux et des projets d’infrastructure initiés par la CEDEAO pourrait avoir des répercussions significatives, notamment dans la lutte contre l’insécurité et le terrorisme. En 2023, l’économie du Burkina Faso a enregistré une croissance modeste de 3,2 %, après une performance particulièrement faible de 1,8 % en 2022, selon la Banque Mondiale. Toutefois, cette reprise reste fragile en raison des perturbations causées par l’insécurité, qui ont entraîné environ 8 500 décès liés aux conflits en 2023. De plus, la pauvreté reste élevée, touchant 43,2 % de la population en 2021/22. La situation humanitaire reste également critique, avec plus de 2 millions de personnes déplacées et environ 2,3 millions de personnes confrontées à une insécurité alimentaire grave. En revanche, pour le Mali, les données de la Banque Mondiale montrent que l’extrême pauvreté a atteint 19,1 % en 2022, exacerbée par l’envolée des prix et la faible croissance économique. Bien que la libre circulation des personnes et des biens puisse aider à atténuer certains impacts économiques, elle ne compensera pas entièrement les effets de la suspension des programmes d’infrastructure avec des menaces sur l’accès aux marchés et le développement local.
En tout état de cause, ce retrait du Burkina Faso, du Mali et du Niger constitue aussi une épreuve pour la CEDEAO, une organisation qui prône l’intégration régionale et la coopération sur de nombreux fronts, y compris la sécurité, les échanges commerciaux et la gouvernance. Cette situation révèle en même temps les limites de l’influence de la CEDEAO lorsqu’elle est confrontée à des changements politiques internes significatifs dans ses États membres.
L’une des grandes interrogations réside dans la capacité de la CEDEAO à maintenir son rôle de médiateur en Afrique de l’Ouest. Le blocage actuel illustre les fractures qui existent au sein de l’organisation, entre ceux qui défendent une ligne plus autoritaire et ceux qui préconisent une approche plus conciliatrice. Si l’intégration économique demeure une priorité pour la CEDEAO, la gestion des tensions internes pourrait sérieusement compromettre la cohésion de l’ensemble.
Le retrait des trois pays de la CEDEAO pourrait marquer le début d’une nouvelle dynamique régionale. Bien que les discussions soient encore en cours, il apparaît que les pays concernés chercheront de nouvelles alliances pour compenser les impacts liés à leur retrait de la CEDEAO. Les relations avec des puissances extérieures, comme la Chine ou la Russie, pourraient se renforcer, notamment dans le domaine économique et militaire.
De son côté, la CEDEAO devra repenser sa stratégie vis-à-vis de l’AES, tout en tentant de rétablir un dialogue avec les trois pays, sans renoncer à ses principes de gouvernance démocratique. Le mois de juillet 2025 sera décisif pour déterminer si un rapprochement est possible ou si la séparation sera définitive.

FIGIC-AES : La première édition prévue du 25 au 28 février 2025 à Ouagadougou

La première édition du Festival international de la gastronomie et de l’identité culturelle des pays de l’AES (FIGIC-AES) se tiendra du 25 au 28 février 2025 à Ouagadougou au Burkina Faso. Pour annoncer les couleurs de l’évènement, le comité d’organisation du Festival a tenu une conférence de presse le 24 janvier dernier  à Bamako.

Avec pour objectif global de promouvoir la richesse culinaire et culturelle des pays de l’AES afin de stimuler le développement économique et renforcer la cohésion sociale et améliorer l’attractivité touristique de la région, le FIGIC-AES vise également à mettre en valeur les traditions culinaires des pays de l’AES pour leur reconnaissance internationale,  sensibiliser les professionnels de la restauration aux pratiques durables et écoresponsables et positionner la cuisine de l’ AES comme un atout majeur  de l’offre touristique régionale.

Le Festival veut par ailleurs  renforcer les compétences des acteurs locaux du secteur de la gastronomie, promouvoir la « parenté à plaisanterie » en tant que pratique culturelle pour la paix et la cohésion sociale et stimuler l’excellence et la créativité culinaire à travers une compétition dédiée.

Placée sous le thème : « Gastronomie et traditions : vecteurs de cohésion et de développement durable dans l’espace AES », cette première édition du FIGIC-AES prévoit des compétitions  culinaires, des ateliers de formation ainsi que des rencontres culturelles et artistiques.

« Le FIGIC-AES 2025 est bien plus qu’un simple rendez-vous gastronomique  et culturel . Il constitue un véritable carrefour d’échanges et de rencontres, un creuset où se tissent les liens de fraternité et de coopération à travers notre héritage culinaire et culturel commun », a indiqué Olivia Bayala, Coordinatrice du comité d’organisation du Festival qui avait à ses côtés, Mme Oumou Traoré, initiatrice du Festival international de la cuisine africaine de Bamako (FICAB) et Mme Iro Sadia Maiga, promotrice du Festival des grillades de Niamey.

Après les échanges avec la presse, le Comité d’organisation a convié les hommes de média à la dégustation de différents mets des 3 pays de l’AES, un avant-goût des plats qui seront au rendez-vous  lors du festival à Ouagadougou.

Le FIGIC-AES est né de la fusion des expertises et expériences de plusieurs évènements emblématiques tels que le Festival international de la gastronomie de Ouagadougou (FIGO), célébrant l’art culinaire burkinabé, le Festival international de la cuisine africaine de Bamako (FICAB) mettant en avant les traditions culinaires maliennes et le Festival des grillades de Niamey, soulignant la richesse des saveurs nigériennes.

Mohamed Kenouvi

Processus DDR : Une nouvelle phase pleine d’enjeux

Lors de son discours de Nouvel An, le 31 décembre 2024, le Président de la Transition, le Général d’Armée Assimi Goïta, a annoncé une initiative majeure visant le désarmement de 3 000 miliciens d’autodéfense. Cette démarche s’inscrit dans le cadre des efforts continus pour renforcer la sécurité et promouvoir la réconciliation nationale, même si sa mise en œuvre parait très compliquée.

L’annonce du Président Goïta intervient dans un contexte où le Mali cherche à consolider la paix et à restaurer l’autorité de l’État sur l’ensemble de son territoire. Le processus de Désarmement, Démobilisation et Réinsertion (DDR) est une composante essentielle de cette stratégie, visant à intégrer d’anciens combattants dans les structures étatiques ou à faciliter leur réinsertion socio-économique.

Selon les détails fournis, sur les 3 000 miliciens concernés, 2 000 seront intégrés au sein des Forces Armées Maliennes (FAMa) après une formation adéquate, tandis que les 1 000 restants bénéficieront de programmes de réinsertion dans la vie civile, avec un accompagnement pour la mise en place de projets facilitant leur intégration socio-économique.

Il est à noter que le chiffre de 3 000 miliciens correspond à celui annoncé lors de l’opération de DDR – Intégration accélérée mise en œuvre dans le cadre de l’Accord issu du processus d’Alger. Lors de cette précédente initiative, près de 1 800 ex-combattants issus des mouvements armés signataires de l’Accord avaient été intégrés dans les rangs des FAMa. Cette similitude numérique soulève des questions quant à la nouveauté de l’actuelle initiative et à la possibilité qu’il s’agisse d’une reconduction des objectifs précédents.

Composition et efficacité des nouvelles Commissions DDR

La mise en place de nouvelles Commissions DDR et d’intégration héritées de celles établies pour l’application de l’Accord, dénoncé par les autorités maliennes fin janvier 2024, suscite des interrogations. Le remplacement de la plupart des anciens membres, souvent expérimentés et issus des FAMa et des ex-combattants, par de nouveaux commissaires considérés comme novices dans le domaine, pose la question de l’efficacité de ces structures. Les anciens membres, ayant une meilleure connaissance du terrain et des acteurs, étaient perçus comme capables de mener à bien une mission aussi complexe.

Identification des groupes concernés

Un autre point d’interrogation concerne la nature et l’identité des groupes armés désignés comme « milices » sélectionnés. Aucune précision n’a été apportée quant à savoir s’il s’agit de groupes d’autodéfense tels que Dan Na Ambassagou, de terroristes, de mouvements armés de l’ex-Accord restés fidèles à l’État, ou encore de jeunes de Gao ayant accepté en 2013 de remettre leurs armes à l’opération Serval en son temps, moyennant une intégration dans le processus DDR, ce qui n’est jamais arrivé jusqu’ici, causant une grande frustration parmi ces jeunes. Cette absence de clarté alimente les spéculations et les inquiétudes quant à l’efficacité et à l’équité du processus.

Quid de l’accompagnement des partenaires?

Par ailleurs, la conduite d’un processus DDR est notoirement coûteuse et contraignante, comme en témoignent les expériences d’autres pays confrontés à des situations similaires. L’ancienne opération bénéficiait de l’accompagnement de partenaires internationaux tels que la MINUSMA. Le nouveau processus semble être conduit exclusivement par les autorités maliennes, ce qui pose la question des moyens financiers et logistiques disponibles pour mener à bien cette initiative, surtout dans un contexte où le pays fait face à de nombreux défis et priorités.

L’annonce du désarmement des milices a suscité des réactions mitigées au sein de la population et des observateurs. Certains saluent l’initiative comme un pas important vers la paix et la stabilité, tandis que d’autres expriment des réserves quant à sa mise en œuvre effective et à son impact réel sur le terrain. La réussite de ce processus dépendra en effet en grande partie de la transparence dans l’identification des groupes concernés, de la compétence des nouvelles Commissions DDR, de la disponibilité des ressources nécessaires et de la capacité des autorités à instaurer un climat de confiance avec l’ensemble des parties prenantes.

Plus qu’un défi logistique, ce processus représente une occasion unique de réinventer les fondements de la paix et de la réconciliation nationale. Pour qu’il soit couronné de succès, il faudra transformer cette vision en réalité, en tenant compte des leçons du passé et des attentes de l’ensemble des parties prenantes.

Massiré Diop

Donatien Kanga : « La lutte contre la désinformation, un défi urgent à relever »

Donatien Kanga, expert en fact-checking et Président du Cadre de concertation entre organisations de la société civile et médias en Afrique de l’Ouest, a partagé son analyse sur les défis posés par la désinformation à l’ère numérique. Propos recueillis par Massiré Diop

Comment évaluez-vous la lutte contre ce qu’on appelle le « Triptyque MDM »  ( Mésinformation, Désinformation et Malinformation) ?

C’est un combat complexe et de longue haleine. La technologie a transformé l’écosystème informationnel, facilitant la diffusion de l’information tout autant que celle de la désinformation. Cette lutte est devenue une urgence internationale, nécessitant des actions à tous les niveaux : individuel, communautaire, national, régional et international.

Pourquoi observe-t-on parfois une certaine réserve de la part des États dans cette lutte ?

Il ne s’agit pas de réserve, mais plutôt de prudence. Les États réagissent activement lorsque la désinformation menace leur stabilité. Cependant, il est nécessaire d’élever la prise de conscience générale pour considérer ce phénomène comme une priorité nationale indépendamment des menaces immédiates.

Quels facteurs favorisent la propagation de la désinformation dans notre environnement ?

Plusieurs facteurs contribuent à cette propagation. D’abord les évolutions technologiques rendent la création et la diffusion de contenus accessibles à tous, même sans formation journalistique. Ensuite, la viralité des réseaux sociaux permet une diffusion rapide et massive de l’information, rendant difficile la distinction entre le vrai et le faux. Enfin, dans des contextes où l’oralité prédomine et où le taux d’analphabétisme est élevé, la distinction entre information vérifiée et rumeur est souvent floue.

Quel est l’impact de la culture de l’oralité et de l’analphabétisme sur la désinformation ?

Dans des sociétés à tradition orale et au taux d’analphabétisme élevé, les individus ont tendance à considérer toute information provenant d’un écran comme véridique, sans esprit critique. Cette situation est exacerbée par l’accès généralisé aux technologies numériques.

Quelles sont les principales stratégies de lutte ?

La lutte repose sur trois axes principaux : développer des outils technologiques pour détecter la désinformation, former les citoyens à l’esprit critique et aux compétences numériques et établir des lois équilibrées qui protègent contre la désinformation tout en préservant la liberté d’expression.

Y a-t-il de l’espoir face à ce fléau ?

Malgré les défis, il y a de l’espoir grâce à l’engagement des acteurs nationaux et régionaux. Des initiatives collaboratives, comme le Cadre de consultation entre organisations de la société civile et médias, montrent que des actions concertées peuvent renforcer l’intégrité de l’information.

Lutte contre le terrorisme :   L’AES dévoile sa stratégie et interpelle la communauté internationale

Lors de la réunion publique de haut niveau du Conseil de sécurité des Nations Unies consacrée à la lutte contre le terrorisme en Afrique, tenue le 24 janvier 2025, l’Ambassadeur et Représentant permanent du Mali auprès des Nations Unies, M. Issa Konfourou, a présenté la vision stratégique de la Confédération des États du Sahel (AES). Cette entité regroupe le Burkina Faso, le Niger et le Mali, trois pays en première ligne face aux violences terroristes dans la région sahélienne.

Prenant la parole au nom de l’AES, M. Konfourou a souligné que la lutte contre le terrorisme, au-delà d’une priorité régionale, constitue une menace pour la paix et la sécurité internationales. « Le terrorisme ne se limite pas à déstabiliser nos nations. Il met en péril des vies innocentes et compromet l’avenir de nos sociétés. Nous devons unir nos efforts dans un esprit de solidarité et de responsabilité partagée », a-t-il affirmé, appelant à une réponse coordonnée et ambitieuse.
L’Ambassadeur a détaillé une stratégie globale reposant sur plusieurs axes prioritaires. Il a insisté sur l’importance d’un soutien accru aux initiatives africaines, dans le respect de la souveraineté et des priorités des États sahéliens. Il a également plaidé pour une coopération renforcée en matière de renseignement et une lutte efficace contre le financement du terrorisme, soulignant le rôle des réseaux criminels transnationaux dans le trafic d’armes et de drogues. M. Konfourou a mis en avant une approche intégrée alliant développement économique et sécurité, en insistant sur la prévention, la déradicalisation et la réinsertion des populations vulnérables. Enfin, il a rappelé l’urgence de fournir des équipements modernes, des formations adaptées et une assistance logistique aux forces sahéliennes, qui se battent courageusement malgré des moyens limités.
En mettant en lumière ces axes, M. Konfourou a évoqué les succès récents de l’AES, notamment la neutralisation de chefs terroristes, la destruction de bases ennemies, la reconquête de territoires, le retour des populations et la réouverture des écoles. Ces avancées confirment la pertinence d’une approche coordonnée et souveraine, mais elles demeurent insuffisamment reconnues dans les rapports des Nations Unies, a-t-il regretté.
M. Konfourou a également dénoncé l’ingérence de certains États étrangers dans la crise sahélienne. Il a accusé la France et l’Ukraine de soutenir ou de faciliter indirectement les groupes terroristes opérant dans la région, ce qui compromet les efforts légitimes de stabilisation. Il a appelé à une condamnation ferme de ces pratiques par les Nations Unies, insistant sur l’importance du respect de la souveraineté et de la non-ingérence dans les affaires intérieures des États sahéliens.
Malgré ces défis, les violences continuent de provoquer des déplacements massifs de populations. Le Mali comptait, en septembre 2024, plus de 378 000 déplacés internes, tandis que le Burkina Faso enregistre plus de 2,1 millions de personnes déplacées. Le Niger, quant à lui, fait face à 352 000 déplacés, majoritairement dans les zones frontalières. Ces chiffres traduisent une crise humanitaire croissante, en dépit des efforts des États sahéliens.
Parallèlement à la stratégie exposée par l’AES, les trois pays membres ont récemment annoncé la mise en place d’une force conjointe de 5 000 soldats. Cette initiative vise à coordonner les efforts militaires et à sécuriser les zones les plus touchées par les violences terroristes. Dotée de moyens modernes, cette force incarne la volonté des dirigeants sahéliens de prendre en main leur propre sécurité.
M. Konfourou a lancé un appel pressant à la communauté internationale. « Nous remercions nos partenaires pour leur soutien, mais nous avons besoin d’un engagement robuste et cohérent. Cette lutte est un défi commun et nécessite une réponse collective. L’AES continuera d’œuvrer pour une paix durable, dans le respect de la souveraineté de ses membres », a-t-il déclaré, tout en s’inclinant devant la mémoire des victimes du terrorisme.
Ce discours marque l’affirmation de la Confédération des États du Sahel comme acteur central dans la lutte contre le terrorisme en Afrique, tout en réaffirmant son exigence de justice et de reconnaissance sur la scène internationale.

Coly Energy Mali : Un nouveau chapitre pour le secteur énergétique malien après l’ère TotalEnergies

Le 23 janvier 2025, le Premier ministre malien, le Général de Division Abdoulaye Maïga, a reçu une délégation de Coly Energy Mali, nouvel acquéreur des activités de TotalEnergies au Mali. Cette rencontre, conduite par René Hounsinou, nouveau président du Conseil d’administration de Coly Energy, visait à présenter officiellement la nouvelle direction et à confirmer la continuité opérationnelle de l’entreprise.

Coly Energy Mali, en partenariat avec Benin Petro SA, étend désormais ses opérations au Mali, au Bénin et en Côte d’Ivoire. Cette expansion stratégique vise à renforcer la présence de l’entreprise dans le secteur énergétique ouest-africain.

Coly Energy Mali se positionne comme un acteur clé dans la distribution de produits pétroliers dans la région.

Cette acquisition s’inscrit dans le cadre de la stratégie globale de TotalEnergies visant à réévaluer et à optimiser son portefeuille d’actifs. Ces dernières années, le groupe a procédé à plusieurs cessions d’actifs non stratégiques à travers le monde. Par exemple, en 2020, TotalEnergies a vendu ses activités au Libéria et en Sierra Leone à Conex Oil & Gas Holdings Ltd., représentant une valeur totale de plus de 400 millions de dollars US. En 2023, le groupe a également cédé plus de 2 000 stations-service en Europe au Canadien Couche-Tard pour un montant de 3,4 milliards d’euros.

Cependant, le retrait de TotalEnergies du marché malien s’inscrit dans un contexte particulier. Sousle actuel régime, le Mali a mis fin aux avantages fiscaux qui étaient auparavant accordés aux entreprises étrangères. Ces contrats, jugés « léonins » par les autorités, permettaient aux multinationales de ne payer leurs impôts que dans leur pays d’origine, privant l’État malien de revenus fiscaux considérables. Cette décision a poussé TotalEnergies à revoir ses opérations au Mali, menant à leur cession au profit de Coly Energy Mali.

Les détails financiers de la transaction entre TotalEnergies et Coly Energy Mali n’ont pas été rendus publics. Le montant de la cession reste donc confidentiel à ce jour.

Engagement envers les employés et perspectives d’avenir

Un point notable de cette acquisition est l’engagement de Coly Energy Mali à maintenir l’ensemble des 1 109 employés de TotalEnergies au Mali, assurant ainsi une continuité opérationnelle et sociale. Cette démarche a été saluée par le Premier ministre malien, qui y voit une initiative alignée avec les objectifs économiques du pays.

Cette situation marque une étape significative dans le paysage énergétique malien, avec l’arrivée de Coly Energy Mali en tant que nouvel acteur majeur. Les observateurs suivront de près l’évolution de cette entreprise et son impact sur le marché régional.

2025 : Le Mali en quête de renouveau culturel

Lors de son discours à la Nation à la veille du Nouvel an, le Président de la Transition, le Général Assimi Goïta, a décidé de faire de 2025 « l’année de la Culture ». Une initiative saluée par de nombreux acteurs qui espèrent ainsi faire sortir ce secteur de l’ombre.

Placée sous le signe du « Mali Kura », cette démarche entend renforcer l’unité nationale en valorisant le patrimoine culturel, facteur-clé de cohésion et de résilience face aux crises. C’est ainsi que deux activités-phares, les États généraux de la Culture et la 3ème Journée de la souveraineté retrouvée, ont été organisées. Les autorités voulaient ainsi afficher leur volonté de replacer la culture au cœur de l’identité nationale.

Cependant, pour transformer ce symbole en réalité tangible, des efforts plus audacieux sont nécessaires. Déclarer 2025 « année de la Culture » est un premier pas, mais il doit s’accompagner d’un programme culturel structuré et porté par le ministère de la Culture en étroite collaboration avec les opérateurs et acteurs culturels. Ce programme ne peut se limiter à des manifestations ponctuelles ou à des annonces médiatiques. Il doit intégrer tous les secteurs, du tourisme à l’éducation, en passant par la diplomatie et l’économie.

De plus, la culture doit devenir une priorité transversale dans les politiques publiques. Chaque département ministériel doit incorporer cette ambition dans ses actions quotidiennes. Les dirigeants doivent montrer l’exemple en adoptant un comportement qui reflète les valeurs et traditions qu’ils souhaitent promouvoir. Il s’agira ainsi d’insuffler un véritable renouveau, où la culture ne sera pas une thématique isolée, mais un moteur de transformation sociale et économique.

Si les autorités veulent que cette année soit gravée dans l’histoire, elle devra être portée par des actes forts, qui marqueront l’esprit et le cœur de chaque Malien. Pour le moment, nous n’en sommes pas encore là.

Massiré Diop

Compétitions CAF 2024-2025 : Le piètre bilan des clubs maliens

C’est une campagne africaine à oublier pour le Djoliba AC et le Stade malien de Bamako. Éliminés dès la 5ème  et avant-dernière journée, les deux représentants du Mali ont tous terminé à la dernière place de leur groupe, en Ligue des Champions et en Coupe CAF.

Dur apprentissage pour le Djoliba AC en Ligue des Champions. Pour leur toute première participation à la phase finale de cette compétition continentale, les Rouges de Hèrèmakono sont complètement passés à côté du tournoi. 2 matchs nuls, 4 défaites, aucune victoire et aucun but marqué en 6 rencontres, avec 12 buts encaissés. Tel est le bilan statistique du Djoliba AC. Largement battus lors de leur entrée en lice face à l’Espérance de Tunis (4-0), les Champions du Mali en titre ont ensuite enchainé deux matchs nuls (0-0) à domicile face au Pyramyds FC et à Sagrada. Après 2 nouvelles défaites lors des 3ème et 4ème journées, les protégés du coach Mamadou Demba Traoré ont été éliminés. Alors qu’il était attendu pour sauver l’honneur, ne serait-ce qu’en inscrivant 1 but dans la compétition, le Djoliba AC a sombré lors du dernier match, étrillé 6-0 par les Égyptiens de Pyramids FC.

Contrairement au Djoliba AC, le Stade malien de Bamako avait bien débuté sa campagne en Coupe CAF en s’imposant (2-0) devant les Sud-africains de Stellenbosch. Mais les Blancs de Bamako ont déçu lors du reste du parcours. Match nul en déplacement (1-1) face au CD Lunda Sull et défaite (0-1) à domicile contre le même adversaire, pourtant largement à leur portée. La double confrontation contre la RS Berkane a aussi tourné à l’avantage des Marocains et les Sud-africains ont pris leur revanche à domicile lors de la 5ème journée, synonyme d’élimination du Stade Malien. À l’arrivée, 1 victoire, 1 match nul, 4 défaites, 3 buts marqués et 6 encaissés.

Impréparation

Bien qu’elle soit difficile à digérer, la sortie précoce des clubs maliens des coupes interclubs de la CAF n’est pas surprenante et s’explique par certains facteurs, dont  le manque de préparation des équipes dû à un démarrage très tardif du Championnat national de 1ère division.

Par ailleurs, la différence de niveau entre les clubs maliens et leurs adversaires à l’échelle continentale est très importante. Le chemin semble encore long pour renouer avec le succès dans les compétitions africaines, à l’instar du sacre du Stade malien en Coupe CAF en 2009.

Mohamed Kenouvi

 

Assistance humanitaire : Plus de 6 millions de personnes dans le besoin en 2025

Lancé le 21 janvier 2025, le Plan de réponse humanitaire 2025 pour le Mali vise à fournir une assistance d’urgence à 4,7 millions de personnes ciblées sur les 6,4 millions au total dans le besoin. Pour atteindre cet objectif, la communauté humanitaire et le gouvernement du Mali appellent à la mobilisation de 771,3 millions de dollars.

Le plan cible principalement les personnes les plus touchées par les crises humanitaires et ayant des besoins critiques dans des secteurs-clés tels que la protection, l’éducation, la sécurité alimentaire, la santé, la nutrition, le logement et les articles ménagers de base, ainsi que l’eau, l’assainissement et l’hygiène.

Sur les 6,4 millions de personnes identifiées dans le besoin, 54% sont des enfants, 46% des femmes et 15% des personnes vivant avec un handicap. Les pourcentages sont les mêmes pour les 4,7 millions de personnes ciblées.

Objectifs stratégiques

Le Plan de réponse humanitaire 2025 vise deux principaux objectifs stratégiques. Le premier est de  sauver et de préserver la vie et la dignité des populations ayant des besoins critiques dans les zones touchées par des chocs, à travers une assistance multisectorielle d’urgence adéquate répondant à leurs besoins vitaux, avec une attention particulière aux personnes âgées, handicapées, enfants, femmes et survivants de VBG.

Le 2ème objectif stratégique est de garantir un accès minimal et équitable aux services sociaux de base aux personnes vulnérables, à travers une assistance multisectorielle adaptée à leurs besoins pour renforcer leurs capacités à prévenir, faire face et se relever des chocs.

Pour l’année 2025, les zones géographiques prioritaires pour les interventions humanitaires restent concentrées dans les régions du Centre et du Nord du pays, où la persistance des conflits continue de fragiliser les conditions de vie des populations et de complexifier les opérations d’assistance.

En 2024, seuls 38% du financement requis dans le cadre du Plan de réponse humanitaire ont été mobilisés. Malgré ce manque de financement et les contraintes d’accès, les partenaires humanitaires ont fourni une aide vitale à 1,8 million de personnes parmi les plus vulnérables, y compris celles vivant dans les zones les plus éloignées.

Khassim Diagne, Coordinateur par intérim de l’action humanitaire au Mali, espère un meilleur taux de financement en 2025. « Il est urgent que l’ensemble de la communauté humanitaire et les donateurs renouvellent leur engagement à répondre aux besoins humanitaires fondamentaux », souligne-t-il.

Mohamed Kenouvi

Bekaye Cissé : « La création de contenus numériques en langues locales reste essentielle pour favoriser l’adoption d’Internet par les Maliens ».

Bekaye CISSE est ingénieur Systèmes, Réseaux et Sécurités Informatique. Il est le président de la Commission Technique ISOC Mali. Il nous donne son regard sur la nouvelle Politique Nationale de Développement de l’Economie Numérique (2025-2029), les conditions de sa mise en œuvre et les acquis et perspectives d’internet au Mali.

 

Quel est votre  regard sur la Politique Nationale de Développement de l’Économie Numérique ?

La mise en place d’une Politique Nationale de Développement de l’Économie Numérique au Mali marque une étape importante dans la transformation numérique du pays. Ce document stratégique vise à positionner le Mali comme un hub technologique en Afrique de l’Ouest et à faire du numérique un levier de croissance économique et de développement social dans un environnement de maîtrise de la souveraineté numérique.
La PNDEN 2025-2029 présente une vision modernisée qui intègre des avancées technologiques telles que l’intelligence artificielle et la robotique. Elle met l’accent sur l’innovation, la cybersécurité et la connectivité. Cette nouvelle politique a pour objectif de construire une économie numérique inclusive, en phase avec les réalités du Mali, et de favoriser la création d’un environnement propice à l’émergence de start-ups.
Les objectifs ambitieux de la politique sont alignés avec les défis du développement du Mali et les tendances mondiales en matière de digitalisation.

 

 Quels sont les défis à relever pour sa réalisation ?
Pour que le Mali tire parti de la révolution numérique afin de construire une économie numérique forte et inclusive, la nouvelle politique nationale de développement de l’économie numérique doit être ambitieuse et inclusive, en s’attaquant à des défis clés tels que l’investissement dans les infrastructures, l’accès à l’internet haut débit, le développement du capital humain avec des compétences numériques, l’inclusion numérique avec l’accès universel au haut débit, la gouvernance, la cybersécurité, la protection des données ainsi que l’intelligence artificielle et la robotique.
La réussite de cette politique dépendra également  d’une collaboration étroite entre tous les acteurs du secteur numérique, y compris le gouvernement, le secteur privé, la société civile et les partenaires au développement

 

Quels sont les acquis et les perspectives du développement d’Internet au Mali ?

Le développement de l’internet au Mali a connu une croissance significative ces dernières années, apportant de nombreux avantages. Toutefois, il reste des défis à relever pour tirer pleinement parti de ce potentiel.
Ces dernières années, les taux de pénétration d’Internet ont augmenté régulièrement, offrant à un nombre croissant de Maliens un accès à l’information, y compris aux médias et aux services en ligne. Les réseaux sociaux jouent un rôle de plus en plus important dans la vie sociale et politique des Maliens, facilitant la communication et la mobilisation.
Les investissements dans les infrastructures de télécommunications ont permis d’améliorer la couverture du réseau, en particulier dans les zones urbaines.
Le secteur numérique est en plein essor, créant de nouvelles opportunités d’emploi et stimulant la croissance économique.

Pour l’avenir, l’objectif reste d’étendre la couverture Internet à l’ensemble du pays, en particulier dans les zones rurales, afin de réduire la fracture numérique.
Améliorer la qualité des services, en termes de vitesse et de stabilité, pour répondre aux besoins croissants des utilisateurs.
La création de contenus numériques en langues locales reste essentielle pour favoriser l’adoption d’Internet par les Maliens.
Le renforcement de la protection des données personnelles et la lutte contre la cybercriminalité sont des enjeux majeurs pour garantir un développement sûr et durable de l’internet.
Promouvoir l’e-gouvernement pour développer les services administratifs en ligne afin de simplifier les procédures et améliorer l’efficacité de l’administration.
L’accès à une électricité stable et fiable est essentiel au bon fonctionnement des équipements informatiques.
Un cadre réglementaire clair et approprié est nécessaire pour encourager les investissements et promouvoir la concurrence.

 

 

Digitalisation : Une évolution aux multiples enjeux

Annoncée par les autorités en juin 2024, la digitalisation de l’administration constitue un vaste chantier destiné à moderniser l’administration publique et à offrir aux citoyens des services plus accessibles et plus efficaces. Enclenché depuis quelques années, ce processus de transformation numérique vient de se doter d’une Politique nationale et de son Plan d’action « Mali 2029 ». Occasion de faire le point sur les avancées et les défis à relever.

Le 19 juillet 2024, le Programme de digitalisation des moyens de paiement et des services publics a été lancé. Déployé à Bamako pour sa phase pilote, il devrait progressivement s’étendre à toutes les régions et aux représentations diplomatiques. Le programme inclura tous les services de manière progressive. Cette digitalisation vise à améliorer la transparence des processus administratifs et à renforcer la confiance des citoyens. Destinée à lutter contre la fraude et la falsification des documents administratifs, l’initiative doit permettre une amélioration de l’accessibilité des services publics. En outre, la digitalisation doit améliorer la performance de l’administration et permettre à l’État de réaliser des économies d’échelle grâce à la mise en place d’une administration électronique.

L’élaboration de la nouvelle Politique nationale de développement de l’économie numérique s’inscrit dans la continuité de « Mali numérique 2020 », dont l’évaluation a révélé certaines limites. En effet, le taux d’exécution global était de 27,30%, soit 18 actions menées à terme sur les 66 programmées, avec un taux de mobilisation des ressources de 24,24%, soit 54,5 milliards de francs CFA sur les 224,792 prévus. La nouvelle politique vise donc à insuffler une dynamique renouvelée pour répondre aux défis actuels à travers la digitalisation, afin d’assurer transparence, efficience et célérité de l’action publique.

Dès le 22 juillet 2024, le coup d’envoi du paiement digital pour les services de l’état-civil a été donné. Au Mali, l’enregistrement des naissances a connu des progrès significatifs, mais des disparités persistent, nécessitant la poursuite des efforts pour relever les défis. Depuis 2022, les initiatives du gouvernement pour numériser l’enregistrement des naissances sont accompagnées par l’UNICEF. Ce processus s’est concrétisé par la mise en place d’une plateforme regroupant les principaux évènements de l’état-civil (naissance, mariage, décès). La plateforme constitue une première entièrement dédiée répondant aux besoins des usagers, aux normes internationales et au cadre légal. Le système pilote mis en place dans 10 zones regroupe les centres d’état-civil, les structures de santé et les tribunaux. La mise en œuvre effective de cette étape permettra d’accélérer les efforts vers l’enregistrement universel, notent les acteurs.

Le 16 janvier 2025, le Système Intégré de Gestion des Dossiers Judiciaires (SIG-DJ) a été lancé par le ministre en charge de la Justice et celui en charge de l’Économie Numérique. Le SIG-DJ, conçu par l’Agence des Technologies de l’Information et de la Communication (AGETIC), est un outil innovant. Il constitue une étape importante dans la modernisation des services publics pour mieux servir les usagers. La phase pilote de déploiement de cet outil, qui s’étendra sur deux ans, doit aboutir à la délivrance en ligne de documents comme les extraits de casiers judiciaires ou les certificats de nationalité et permettre une gestion optimisée des dossiers judiciaires. Ces services permettront d’alléger les démarches administratives et de renforcer l’accessibilité aux services de la justice, en particulier pour les populations des zones éloignées.

Actuellement, le Mali compte plus de 500 structures interconnectées, avec notamment des applications collaboratives, de visioconférence, de courrier, d’archivage, de e-conseil et de e-cabinet, ainsi que plus de 3 000 km de fibre optique aux niveaux central et déconcentré.

Dans le cadre de la gestion et de la promotion du nom de domaine du Mali (.ml), le département en charge de l’Économie numérique a procédé à l’enregistrement ou au renouvellement de 10 555 noms de domaine, ainsi qu’à la mise en place d’une plateforme d’enregistrement, de renouvellement et de paiement des noms de domaine en ligne.

Perspectives prometteuses

Au début de l’année 2024, le nombre d’utilisateurs d’Internet a été évalué à 7,8 millions de personnes, avec un taux de pénétration d’Internet de 33,1%. Ainsi, malgré des perspectives prometteuses pour le secteur, les investissements dans les infrastructures restent nécessaires pour améliorer la qualité et la couverture des services. Ces investissements doivent également stimuler la croissance économique en facilitant l’accès aux services numériques, à travers une couverture universelle qui est encore un objectif lointain.

Pour 2025, le département de l’Économie numérique annonce plusieurs chantiers. Parmi eux, le renforcement du cadre juridique et règlementaire de la certification et de la signature électronique, l’adoption, la vulgarisation et la mise en œuvre du document de Politique nationale de développement de l’économie numérique, ainsi que l’acquisition de la plateforme de signature électronique. L’adoption de la stratégie nationale de cybersécurité est également envisagée.

La modernisation de l’administration devrait se poursuivre avec l’extension de l’Intranet de l’administration à 15 nouvelles régions administratives. Le développement d’applications et d’interfaces d’accès aux informations sur l’état-civil, la déclaration et le paiement des impôts et la plateforme d’alphabétisation sont également prévues en 2025. La construction d’un centre de données (Data Center tiers 3) et le déploiement de la fibre optique (618 km) entre Niono et Tombouctou et (250 km) entre Gao et Labbezanga sont également à l’ordre du jour.

Combler le gap

La digitalisation a enregistré des acquis, notamment un soutien aux infrastructures et l’existence de plateformes de paiement mobile des services publics, constituant une dynamique d’intégration positive du numérique, estime Mohamed Doumbia, membre du regroupement « Immersia », qui œuvre dans le domaine de l’Intelligence Artificielle (IA).

Cependant, le secteur reste à développer et doit promouvoir le « contenu local ». Il est important de développer les compétences au niveau local afin de répondre aux besoins. Cela signifie que même si le secteur du numérique offre des possibilités importantes, il a également besoin de ressources humaines de qualité pour assurer sa promotion. Ce développement doit s’appuyer sur des infrastructures de pointe  répondant aux normes internationales. Pour asseoir une économie numérique, le financement de la recherche et de l’innovation est indispensable, mais cela demeure un défi majeur.

Le Mali accuse un retard dans ce domaine et pour combler le gap il est nécessaire d’encourager l’investissement à travers un partenariat public-privé, suggère M. Doumbia. Cela pourra permettre d’attirer des capitaux. Étant donné qu’il s’agit d’investissements à risque, il est crucial que l’État offre des garanties au secteur privé pour s’impliquer, d’où l’importance du partenariat. Il faut aussi profiter du boom de l’IA pour réaliser un bond qualitatif. Les retards dans certains domaines comme l’éducation ou la santé peuvent être corrigés grâce au numérique. En termes de recherche et de développement, au-delà de reprendre ce qui a déjà été développé ailleurs, il faut « tropicaliser » les recherches et les adapter à notre contexte grâce à des solutions locales. Pour relever ce défi, les chercheurs doivent collaborer, car cette collaboration est cruciale. « Il y a une révolution qui est en marche et le Mali ne doit pas rester en marge », conclut M. Doumbia.

Fatoumata Maguiraga

Lancement des passeports de l’AES : opportunités et défis pour la Confédération des États du Sahel  

Dans un communiqué rendu public, ce jeudi 23 janvier 2025, le Président de la Confédération des États du Sahel (AES), le Général d’Armée Assimi Goïta, a annoncé la mise en circulation des passeports de l’AES à compter du 29 janvier 2025. Cette initiative s’inscrit dans le cadre de la feuille de route de l’AES visant à renforcer l’intégration régionale et à faciliter la libre circulation des citoyens des États membres.

L’Alliance des États du Sahel, créée le 16 septembre 2023 par le Mali, le Burkina Faso et le Niger, a évolué en une confédération lors de son premier sommet en juillet 2024. Cette transformation vise à renforcer la coopération entre les pays membres pour faire face aux défis communs, notamment la menace des groupes djihadistes et les crises socio-économiques.
La mise en circulation du passeport de l’AES représente une avancée significative pour l’intégration régionale. Ce document vise à harmoniser les titres de voyage au sein de l’espace confédéral et à faciliter la mobilité des citoyens des pays membres à travers le monde. Cette initiative symbolise également la volonté des États membres de renforcer leur souveraineté et de consolider leur coopération après leur retrait de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO).
Toutefois, plusieurs défis se posent dans la mise en œuvre des passeports de l’AES. D’abord, leur reconnaissance internationale sera essentielle pour garantir la liberté de mouvement des citoyens, nécessitant des négociations diplomatiques pour éviter des restrictions de voyage. Ensuite, la coordination logistique représente un autre défi majeur, impliquant la mise en place d’un système biométrique sécurisé et la distribution efficace des passeports à l’ensemble des citoyens concernés. Enfin, les implications économiques de cette transition, notamment sur la libre circulation des biens et des personnes avec les pays voisins après le retrait de la CEDEAO, devront être évaluées et des mesures adaptées prises pour limiter les impacts négatifs sur les échanges commerciaux.
La réussite de cette initiative dépendra de la capacité des États membres de l’AES à surmonter ces défis. Une approche concertée et une collaboration étroite avec les partenaires internationaux seront essentielles pour assurer le succès de ce projet ambitieux. Le lancement des passeports de l’AES pourrait également servir de catalyseur pour d’autres projets d’intégration régionale, tels que la création d’une banque d’investissement commune et le développement d’infrastructures partagées comme annoncé lors de la rencontre des ministres en charge du développement des trois pays, tenue à Bamako du 14 au 17 janvier 2025.
La mise en circulation des passeports de l’AES à partir du 29 janvier 2025 marque une étape importante dans le processus d’intégration des États du Sahel. Bien que des défis subsistent, cette initiative témoigne de la détermination des pays membres à renforcer leur coopération et à promouvoir la libre circulation de leurs citoyens.

Rokia Traoré libérée en Belgique : fin d’une bataille juridique transfrontalière

La chanteuse malienne Rokia Traoré, âgée de 50 ans, a été libérée ce mercredi 22 janvier 2025 d’une prison belge, selon ses avocats. Cette libération fait suite à une série d’événements juridiques complexes liés à une dispute pour la garde de sa fille avec son ancien partenaire belge, Jan Goossens.

En mars 2020, Traoré avait été arrêtée en France sur la base d’un mandat d’arrêt européen émis par la Belgique, l’accusant de ne pas avoir respecté une décision judiciaire concernant la garde de sa fille. Après une libération conditionnelle, elle avait quitté la France pour le Mali, défiant ainsi les ordres de rester sur le territoire français jusqu’à la fin de la procédure d’extradition. En octobre 2023, un tribunal belge l’avait condamnée par contumace à deux ans de prison en lien avec cette affaire.
En juin 2024, Traoré avait été de nouveau arrêtée en Italie, suite à un mandat d’arrêt européen, et extradée vers la Belgique en novembre 2024, où elle avait été incarcérée à la prison de Haren, à Bruxelles. Sa libération ce 22 janvier 2025 intervient après qu’un accord a été trouvé entre les parties concernées, permettant à Traoré et à Goossens de revoir leur fille, actuellement résidente au Mali. Une audience est prévue en juin 2025 à Bruxelles pour examiner la mise en œuvre de cet accord et entendre les plaidoiries des deux parties.
Rokia Traoré est reconnue internationalement pour sa contribution à la musique africaine et a servi comme ambassadrice de bonne volonté pour le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) de 2016 à 2018. Sa situation juridique complexe met en lumière les défis liés aux différends transfrontaliers en matière de garde d’enfants, notamment lorsque des décisions judiciaires de différents pays entrent en conflit.

Élimination des clubs maliens en compétitions africaines : une remise en question nécessaire

Les 18 et 19 janvier 2025 ont marqué la fin de l’aventure africaine pour les deux principaux clubs maliens engagés dans les compétitions continentales. Le Djoliba AC et le Stade Malien de Bamako ont été éliminés respectivement de la Ligue des Champions de la CAF et de la Coupe de la Confédération, suite à des performances décevantes lors de la 6ᵉ et dernière journée de la phase de groupes.

Le samedi 18 janvier 2025, le Djoliba AC s’est lourdement incliné face aux Égyptiens de Pyramids FC sur le score sans appel de 6 à 0. Cette rencontre, disputée au 30 June Stadium au Caire, a vu les Maliens subir la domination de leurs adversaires tout au long du match. Les buts de Pyramids FC ont été inscrits par Sodiq Awujoola (3′), Marwan Hamdi (11′), Mostafa Fathi (54′), Ramadan Sobhi (61′ sur penalty), Abdelrahman Magdi (67′) et Youssef Obama (78′). Cette défaite cinglante a scellé le sort du Djoliba AC, qui termine la phase de groupes avec 2 points, issus de deux matchs nuls et quatre défaites, sans aucune victoire à son actif.
Le dimanche 19 janvier 2025, le Stade Malien de Bamako recevait le CD Lunda-Sul d’Angola au Stade 26 Mars. Malheureusement, les locaux se sont inclinés 1 à 0, le seul but de la rencontre ayant été inscrit par Joca à la 24ᵉ minute. Cette défaite à domicile reflète une campagne continentale décevante pour le Stade Malien, qui achève la phase de groupes avec une victoire, un match nul et quatre défaites, totalisant 4 points.
Les éliminations précoces du Djoliba AC et du Stade Malien de Bamako dévoilent des lacunes tant sur le plan technique que managérial. Ces contre-performances soulignent le besoin urgent de réformes structurelles au sein des clubs maliens pour améliorer leur compétitivité sur la scène continentale. Il est essentiel pour ces équipes de renforcer leurs structures organisationnelles et d’investir dans le développement des talents locaux. Une approche stratégique et une meilleure préparation pourraient leur permettre de rivaliser plus efficacement lors des prochaines éditions des compétitions africaines.

Biennale artistique et culturelle : Tombouctou célèbre l’Année de la Culture 2025

Lors de sa session ordinaire du 17 janvier 2025, le Conseil des Ministres a adopté un projet de décret visant à institutionnaliser la Biennale artistique et culturelle, activité emblématique née en 1970. Cet événement s’inscrit dans le cadre de l’Année de la Culture, proclamée par le Président de la Transition, le Général Assimi Goïta, lors de son discours à la nation du 31 décembre 2024.

Depuis sa création en 1970, la Biennale artistique et culturelle est un espace d’expression des diversités artistiques et culturelles du Mali. Elle contribue à promouvoir le vivre-ensemble, tout en mettant en lumière les savoir-faire locaux et en renforçant le dialogue intercommunautaire. Pour cette édition, Tombouctou accueillera artistes, artisans, écrivains et chercheurs, offrant une vitrine exceptionnelle à la richesse culturelle de cette région mythique.
Des préparatifs en cours dans la cité des 333 saints
Rappelons Tombouctou sera l’hôte de l’édition 2025 après Mopti l’année passée. En effet, Tombouctou, ville historique classée au patrimoine mondial de l’UNESCO, sera l’épicentre de cette grande célébration nationale.
La Cité des 333 Saint se prépare activement à accueillir l’événement. Depuis la passation officielle du flambeau à la région, les autorités locales, soutenues par les populations et la diaspora, ont mobilisé plus de 30 millions de francs CFA pour garantir le succès de la Biennale. Ces fonds serviront à financer la réhabilitation des infrastructures, notamment les lieux de spectacles et les espaces d’exposition, ainsi que l’organisation des nombreuses activités prévues.
Les spectacles artistiques incluront des danses traditionnelles, des ballets régionaux, des performances théâtrales et des concerts de musique moderne et traditionnelle. Des expositions d’artisanat et d’arts visuels permettront de valoriser les talents locaux, tandis que des conférences et ateliers porteront sur la préservation et la modernisation du patrimoine culturel.
Un levier économique et culturel pour la région
Outre son impact culturel, la Biennale aura des retombées économiques significatives pour Tombouctou et ses environs. En attirant des milliers de visiteurs nationaux et internationaux, l’événement stimulera le secteur touristique, redynamisera les industries créatives et favorisera la création d’emplois locaux. Les artisans et artistes auront également l’opportunité d’accéder à de nouveaux marchés et de renforcer leur visibilité.
Dans un contexte marqué par des défis sécuritaires et socio-économiques, cette Biennale représente un symbole de résilience et d’espoir pour la région. L’Année de la Culture proclamée pour 2025 reflète une volonté politique visant à renforcer la cohésion sociale et promouvoir la culture comme pilier de développement durable. Le Président Goïta a affirmé que cet événement national constitue une étape importante dans la refondation culturelle et sociale du Mali.
Des perspectives internationales
Comme mentionné dans les analyses publiées par Africa Income, la Biennale 2025 contribuera à positionner le Mali sur la scène internationale en tant que leader culturel en Afrique de l’Ouest. En plus de favoriser la coopération culturelle, elle renforcera l’image de Tombouctou comme carrefour de civilisations et lieu emblématique de dialogue entre les cultures.
Les bénéfices attendus ne se limitent pas au seul Mali. L’événement aura une portée régionale et mondiale, attirant des partenaires, des mécènes et des acteurs culturels désireux de participer à cette célébration unique. Ce rendez-vous marquera une nouvelle étape dans la valorisation du patrimoine malien, tout en réaffirmant l’importance de la culture comme vecteur de paix et de stabilité.
Tombouctou 2025 ne sera pas seulement un festival, mais un message fort de résilience, de diversité et de créativité, porté par une nation fière de son histoire et résolument tournée vers l’avenir.

Discours religieux : Quand les mots attisent la discorde et menacent la paix sociale

Depuis plusieurs années, le Mali, pays historiquement connu pour sa tolérance interreligieuse, est confronté à une recrudescence de discours religieux polémiques. Ces prêches, souvent amplifiés par les réseaux sociaux, exaspèrent les tensions et fragilisent la cohésion sociale.

Des figures influentes telles que Mahi Ouattara, Abdoulaye Koïta ou le Révérend Michel Samaké ont récemment été convoquées par les juridictions, accusées d’incitation à la haine ou d’avoir tenu des propos offensants envers certaines confessions. Ces affaires reflètent les défis auxquels fait face le pays pour préserver l’harmonie entre ses différentes communautés religieuses.

Selon un document de l’ambassade des États-Unis au Mali publié en 2021, avec une population de plus de 22 millions d’habitants composée à 95% de Musulmans, majoritairement sunnites de rite malékite, et à 5% de Chrétiens (deux tiers catholiques, un tiers protestants), le Mali a toujours misé sur le dialogue interreligieux pour maintenir son unité. Cependant, les récentes dynamiques sociales et politiques, combinées à une utilisation intense des technologies numériques, amplifient les fractures et exacerbent les tensions.

Pourtant, le pays dispose d’un cadre légal robuste pour assurer la coexistence des confessions. La Constitution de 2023 consacre la laïcité de l’État tout en respectant les croyances religieuses. L’article 32 précise que la laïcité « ne s’oppose pas à la religion et aux croyances », mais vise à promouvoir le vivre-ensemble. En parallèle, l’article 1er interdit toute discrimination religieuse, tandis que l’article 14 garantit la liberté de pensée, de conscience et de culte.

Le Code pénal renforce ces principes à travers des dispositions spécifiques. L’article 242-1 punit tout propos ou acte portant atteinte à la liberté de conscience ou incitant à une discrimination religieuse d’un emprisonnement de sept ans et d’une interdiction de séjour de dix ans. L’article 255-1, quant à lui, condamne l’apologie du terrorisme, particulièrement lorsqu’elle attise les tensions interconfessionnelles.

Des références internationales pour renforcer la tolérance

Le Mali est également signataire de plusieurs conventions internationales protégeant la liberté religieuse. Parmi celles-ci figurent entre autres la Déclaration universelle des droits de l’Homme (1948), qui consacre la liberté de pensée, de conscience et de religion (article 18), le Pacte international relatif aux droits civils et politiques (1966), qui réaffirme ce droit en insistant sur la liberté de manifester sa religion individuellement ou collectivement, la Déclaration sur l’élimination de toutes les formes d’intolérance et de discrimination fondées sur la religion (1981) et la Convention relative aux droits de l’enfant (1989), dont l’article 14 garantit aux enfants la liberté religieuse tout en respectant le rôle des parents.

Ces instruments renforcent les engagements du Mali en faveur d’un climat de tolérance et d’égalité entre toutes les confessions.

Les médersas : un pilier éducatif sous pression

Les médersas, ou écoles coraniques, jouent un rôle central dans l’éducation religieuse au Mali. Elles représentent environ 16% des établissements scolaires, avec plus de 3 000 écoles accueillant environ 400 000 élèves. Ces institutions, bien qu’essentielles pour la transmission des valeurs islamiques, font face à des défis importants. Dans certaines régions, le manque de supervision permet la propagation de discours radicaux ou l’enseignement d’idéologies extrémistes.

Pour y remédier, le ministère des Affaires religieuses a lancé des initiatives visant à mieux encadrer ces écoles. Des formations pour les maîtres coraniques axées sur la tolérance et la coexistence pacifique ont été mises en place. De plus, des modules éducatifs sur la paix et le respect des diversités ont été introduits dans certains programmes scolaires. Ces efforts cherchent à renforcer le rôle positif des médersas dans la société.

Les conséquences de la radicalisation sur les communautés

Entre 2021 et 2024, les activités des groupes armés dans les régions du nord et du centre ont eu des conséquences dramatiques sur l’éducation. Selon le rapport du Cluster Éducation Mali publié fin 2024, l’insécurité persistante a entraîné la fermeture de 1 792 écoles, affectant environ 537 600 élèves et 10 752 enseignants. Cette crise éducative est alimentée par des discours religieux polémiques qui, en déshumanisant ou en diabolisant « l’autre », justifient le recours à la violence contre des groupes perçus comme des menaces. Le rapport « La Fabrique de l’islamisme » et les travaux d’Open Edition Books confirment que ce type de rhétorique, combiné aux tensions sociales et politiques, facilite la montée de l’extrémisme violent. Cette dynamique offre aux groupes radicaux un terreau fertile pour recruter des partisans, exacerbant davantage les tensions et l’instabilité dans le pays.

Selon le Rapport 2021 de l’Aide à l’Église en Détresse (AED), la liberté religieuse est menacée dans un pays sur trois, avec des violations notoires dans 62 pays parmi les 196 étudiés. Le Mali fait partie de ces nations où la liberté religieuse est compromise, principalement en raison de l’expansion du terrorisme et des tensions intercommunautaires. Cette situation illustre les défis auxquels le pays est confronté pour garantir la coexistence pacifique entre les différentes communautés religieuses

Des lieux de culte chrétiens, bien que minoritaires, ont également été pris pour cible. De plus, plusieurs attaques et enlèvements de religieux, Musulmans et Chrétiens, ont été signalés, alimentant un climat de peur et de méfiance entre les communautés. Ces tensions soulignent l’impact direct des discours polarisants sur la cohésion sociale.

Discours de haine en ligne : une menace amplifiée par le numérique

Avec 7,82 millions d’internautes en 2024, soit un taux de pénétration de 33,1%, et 2,15 millions d’utilisateurs de réseaux sociaux, selon DaraReportal, le Mali fait face à une utilisation grandissante des technologies numériques. Cependant, ces plateformes deviennent également des espaces privilégiés pour la diffusion de discours clivants et haineux. Les algorithmes des réseaux sociaux favorisent souvent les contenus polémiques, créant des « chambres d’écho » qui renforcent les croyances extrémistes.

Par ailleurs, le Pôle national de lutte contre la cybercriminalité s’efforce de réguler ces discours en ligne, mais il manque de moyens techniques et financiers. De plus, des campagnes de sensibilisation, souvent menées par des ONG locales, visent à éduquer les utilisateurs sur les dangers des contenus extrémistes et à promouvoir un usage responsable des plateformes numériques.

Des exemples régionaux pour inspirer le Mali

Certains pays africains offrent des modèles réussis pour encadrer les discours religieux. Au Maroc, le Haut Conseil des Oulémas supervise les prêches et veille à ce qu’ils respectent les principes d’un Islam modéré. Depuis 2005, plus de 12 000 Imams y ont été formés pour diffuser des messages de tolérance. Le Sénégal, quant à lui, dispose du Conseil National des Imams et Oulémas, qui joue un rôle similaire en encourageant des sermons prônant la paix et la coexistence pacifique. À l’international, l’ambassade des États-Unis au Mali soutient des initiatives de dialogue interreligieux et des formations en médiation ayant bénéficié à plus de 500 participants en 2021 pour renforcer la cohésion sociale et contrer l’extrémisme violent. Ces exemples montrent qu’un encadrement institutionnel rigoureux peut prévenir la radicalisation et renforcer la cohésion sociale.

Les initiatives nationales pour promouvoir la paix

Pour contrer les discours haineux et prévenir l’extrémisme, le gouvernement a mis en place plusieurs initiatives. Le Plan d’action national pour la prévention de l’extrémisme violent (2021 – 2025) constitue une réponse stratégique aux causes profondes de la radicalisation. Ce plan s’appuie sur l’éducation, le dialogue interreligieux et le renforcement des institutions locales. Malgré l’énorme travail abattu, cette initiative fait face à plusieurs limites objectives. Le Plan d’action national pour la prévention de l’extrémisme violent au Mali présente plusieurs failles, notamment une coordination insuffisante entre les acteurs impliqués, des ressources financières et humaines limitées et un contexte sécuritaire instable marqué par des violences persistantes. De plus, bien que l’engagement communautaire soit essentiel, la mobilisation effective des populations locales reste un défi. Ces facteurs limitent l’efficacité et la portée du plan dans la lutte contre l’extrémisme violent.

Parallèlement à cette initiative, le Projet Alternatif Redevable pour Lutter contre l’Extrémisme Radical (PARLER), lancé en 2022, forme les leaders religieux à diffuser des prêches modérés. De plus, le Cadre de concertation interreligieux, actif depuis 2021, organise des forums pour désamorcer les tensions et encourager la compréhension mutuelle entre les confessions.

Le Mali dispose d’un cadre juridique solide et de nombreuses initiatives pour faire face aux défis posés par les discours religieux polémiques. Cependant, leur mise en œuvre nécessite une meilleure coordination entre l’État, les institutions religieuses et la société civile. En s’inspirant de modèles régionaux et en mobilisant tous les acteurs, le pays peut renforcer sa résilience et préserver son identité de nation tolérante et inclusive.

Massiré Diop