Madagascar : Le retour des fantômes de l’histoire

Une fois de plus, Madagascar replonge dans un cycle politique déjà connu. Entre répétition de l’histoire et éveil d’une jeunesse connectée, la grande île questionne encore sa démocratie fragile.

L’armée a pris le pouvoir le 14 octobre 2025, après le départ précipité du Président Andry Rajoelina, mettant fin à plusieurs semaines de tensions politiques. La Cour constitutionnelle a aussitôt constaté la vacance du pouvoir, tandis que l’Assemblée nationale votait sa destitution, ouvrant la voie à une transition militaire. L’épisode ravive le souvenir du 17 mars 2009, lorsque Rajoelina, alors Maire d’Antananarivo, avait conduit un soulèvement populaire contre Marc Ravalomanana, entraînant sa chute. Quinze ans plus tard, les rôles s’inversent, mais le même scénario se dessine. On assiste à un pouvoir contesté, un pays divisé et une transition à nouveau dominée par l’armée, désormais menée par le Colonel Michael Randrianirina, issu du Corps d’administration du personnel et des services techniques (CAPSAT).

Depuis son indépendance, proclamée le 26 juin 1960, Madagascar connaît des alternances interrompues et des transitions forcées marquées par le retour récurrent de l’armée sur la scène politique. Élu en 2018 puis réélu en 2023, Andry Rajoelina a vu son mandat fragilisé par une crise sociale persistante, la hausse du coût de la vie et la défiance d’une jeunesse connectée.

Force de mobilisation

Dans ce contexte, le mouvement Gen Z Madagascar, né sur les réseaux sociaux début 2025, s’est imposé comme une nouvelle force de mobilisation. Rassemblant des milliers de jeunes autour d’exigences de transparence et de responsabilité, il est passé du virtuel à la rue, avant d’être partiellement récupéré par des acteurs politiques.

Ce mouvement s’inscrit dans une dynamique plus large, qui traverse plusieurs régions du monde. Inspiré de mobilisations en Asie, le concept « Gen Z » trouve un écho croissant au Maroc, en Algérie et dans plusieurs pays africains. Il rappelle l’esprit du Printemps arabe de 2011 et les mouvements citoyens nés sur le continent africain comme Y’en a marre au Sénégal (2011), Balai Citoyen au Burkina Faso (2013), Lucha et Filimbi en République démocratique du Congo (2012). Tous traduisent une même aspiration à une gouvernance plus proche des citoyens.

Madagascar semble ainsi renouer avec son histoire tout en entrant dans une ère nouvelle, où la jeunesse numérique tente de transformer la colère en conscience civique. Entre espoir et répétition, la Grande Île se retrouve une fois de plus face à son destin politique, suspendue entre passé et renouveau. L’avenir nous dira si le cap sera maintenu ou si les vieux démons continueront de stopper la marche démocratique malgache.

Production aurifère : Une baisse problématique

Le Mali a enregistré une baisse de 23% de sa production aurifère entre 2023 et 2024. Une baisse consécutive aux tensions entre l’État et la société Barrick Gold, exploitante du gisement de Loulo-Gounkoto. Si cette baisse met le secteur sous tension, c’est aussi une opportunité pour mieux orienter la stratégie minière.

De 65,9 tonnes en 2023, la production aurifère a chuté à 51 tonnes en 2024. Les facteurs de cette baisse sont liés en partie aux tensions persistantes entre l’État et la société canadienne Barrick Gold, qui détient 80% de la mine de Loulo-Gounkoto. Depuis l’adoption du nouveau Code minier, en 2023, l’État entretient un bras de fer avec la compagnie. La mine de Loulo-Gounkoto contribue à environ 25% de la production nationale, avec une production qui a atteint 750 000 onces d’or par an, soit environ 25 tonnes, pour une production moyenne de 60 tonnes. L’arrêt de la plus grande mine a des conséquences sur les recettes de l’État, constituées à environ 25% par le secteur minier.

Pour les observateurs, cette baisse de la production va se poursuivre, parce que les mines qui pourraient combler le déficit n’ont pas encore la capacité de le faire. La mine de Fekola, avec environ 17 tonnes, n’y arrivera pas.

Il faut donc s’attendre à des conséquences sur les recettes fiscales et les emplois, environ 10 000 menacés. C’est pourquoi « il vaut mieux un mauvais arrangement qu’un bon procès », explique un membre de la société civile, pour sortir de cette situation qui impacte aussi négativement les sous-traitants, lesquels n’arrivent plus à honorer leurs engagements envers les banques auprès desquelles ils se sont endettés.

Cette baisse intervient aussi à un moment où le prix de l’or a atteint le niveau historique de 4 000 dollars l’once. Une opportunité dont le pays aurait dû profiter pour doubler les recettes de l’État.

Réorienter la politique minière

D’autres projets en gestation, comme la mine de Kobada, des mines moyennes d’une capacité d’une à deux tonnes d’or ou celle de Morila, pourraient contribuer à maintenir la production aux alentours de 50 tonnes. Mais la non-maîtrise de la production des orpailleurs constitue également un manque à gagner.

Pour tirer davantage parti de ses ressources minérales, le Mali doit mettre en valeur d’autres minerais comme le calcaire, le fer ou encore le lithium, surtout pour assurer la transition énergétique et moins dépendre des carburants.

L’État doit mieux s’impliquer dans la chaîne et ne pas se contenter des impôts et des dividendes qui ne profitent pas aux communautés locales. Une bonne politique consistera donc à se servir des ressources minières comme tremplin pour le développement.

Fatoumata Maguiraga

Mme Rokiatou Diakité : « Donner à chaque fille la chance de briller »

Alors que le Mali consacre le mois d’octobre à la solidarité et à l’inclusion, Mme Rokiatou Diakité, Présidente du Réseau des Femmes Leaders d’Afrique Francophone, appelle à un engagement renouvelé pour les droits des filles. Trente ans après Beijing, elle estime que les promesses doivent enfin se traduire en actions concrètes.

Quel regard portez-vous sur la situation des filles au Mali aujourd’hui ?

Les filles du Mali continuent de faire face à de multiples obstacles pour accéder à leurs droits fondamentaux. L’abandon scolaire, les mariages précoces, les violences basées sur le genre et le manque d’accès à la santé reproductive limitent encore leur plein épanouissement. Près d’une fille sur deux quitte l’école avant le secondaire et dans les zones rurales beaucoup restent enfermées dans des traditions qui freinent leur autonomie. Pourtant, je rencontre chaque jour des filles déterminées, créatives et ambitieuses, qui prouvent que le changement est possible.

Où se situent selon vous les principaux manquements dans la protection de leurs droits ?

Les inégalités persistent, malgré les cadres légaux existants. Le manque de ressources, la faible application des lois et l’insuffisance de données freinent les avancées. Trop souvent, les politiques publiques ne tiennent pas compte de la réalité des filles sur le terrain. L’éducation est la clé : lorsqu’une fille a accès à l’école et à la formation, elle gagne en indépendance et contribue au développement de toute sa communauté. L’enjeu aujourd’hui, c’est de rendre ces droits effectifs et accessibles à toutes.

Vous venez de participer au Sommet des Filles d’Afrique de l’Ouest et du Centre. Qu’en retenez-vous ?

C’était un moment fort. Ce sommet a donné la parole aux filles de la région, leur permettant de partager leurs expériences et leurs aspirations. Elles ont parlé de pauvreté, de violences, mais aussi d’espoir et de leadership. J’ai vu une jeunesse déterminée à ne plus subir, mais à agir. Cette énergie, il faut l’accompagner. Les gouvernements et les partenaires doivent écouter ces voix, intégrer leurs priorités et soutenir leurs initiatives locales.

Trente ans après la Déclaration de Beijing, les progrès sont jugés lents. Pourquoi selon vous ?

Les promesses de Beijing ont inspiré toute une génération, mais les résultats sont fragiles faute de volonté politique et de moyens suffisants. Il est temps de renforcer les budgets consacrés à l’éducation des filles, à la santé reproductive et à la lutte contre les violences. Et, surtout, de garantir leur place dans les espaces de décision. Donner à chaque fille la possibilité d’apprendre, de s’exprimer et de diriger, c’est construire un avenir plus juste et plus fort pour notre pays et pour l’Afrique.

Dialogue doctrinal : Une piste pour la réconciliation nationale ?

Alors que les attaques et les pénuries rappellent la fragilité du pays, l’idée d’un dialogue doctrinal refait surface. Entre réalités sécuritaires et quête de réconciliation, de nombreuses voix appellent à désarmer les esprits avant les armes.

Les longues files devant les stations-service de Bamako reflètent la pénurie de carburant causée par les attaques contre les camions-citernes, paralysant une partie du pays. Cette recrudescence des violences perturbe les échanges économiques et la sécurité des populations, ravivant le débat sur la nécessité d’un dialogue avec les groupes armés.

C’est dans ce contexte que le Professeur Ali Nouhoum Diallo, ancien Président de l’Assemblée nationale, s’est récemment exprimé avec insistance sur la nécessité d’un dialogue doctrinal. Dans une tribune  largement relayée, il appelle à une clarification religieuse conduite par les érudits maliens pour déconstruire les interprétations erronées du Coran qui servent de fondement idéologique aux violences. Selon lui, le retour à la paix passe par la réappropriation du discours religieux et par la parole de ceux qui détiennent l’autorité spirituelle.

L’idée d’un tel dialogue a trouvé un écho particulier lors de plusieurs rencontres nationales, y compris le Dialogue inter-Maliens de 2024, dont le rapport final recommande l’ouverture de discussions doctrinales et communautaires avec toutes les parties, notamment les mouvements armés se réclamant du Jihad.

Les participants y ont vu une étape vers la réconciliation nationale, à condition que le processus soit conduit par des acteurs crédibles et proches du terrain. Des chercheurs jugent cette approche pertinente, mais difficile à mettre en œuvre dans un climat marqué par la méfiance et la fragmentation des acteurs.

Des exemples à dupliquer

Sur le continent, plusieurs pays ont adopté des approches comparables. En Mauritanie, dès 2010 des théologiens ont dialogué avec des détenus radicalisés, permettant à certains de renoncer à la violence et de se réinsérer. En Algérie, la réconciliation nationale après la décennie noire des années 1990 a favorisé des amnisties encadrées et une désescalade durable.

Au Maroc, le programme Moussalaha lancé en 2017 combine rééducation religieuse, accompagnement psychologique et réinsertion socioéconomique. Au Nigeria, Operation Safe Corridor propose un parcours de déradicalisation et de formation professionnelle pour d’anciens membres de Boko Haram. Ces initiatives démontrent qu’un dialogue fondé sur la foi et la raison peut efficacement compléter l’action militaire.

Au Mali, le prêtre allemand Ha-Jo Lohre, enlevé à Bamako en 2022 puis libéré un an plus tard, a partagé son expérience et ses échanges avec de jeunes ravisseurs animés d’un idéal religieux mal compris. Il estime qu’un débat doctrinal mené par des érudits dans les langues locales pourrait les amener à douter de leurs convictions. Il préconise aussi l’usage des médias et des réseaux sociaux pour promouvoir des messages de paix, à l’image des vidéos d’érudits maliens répondant aux discours extrémistes.

Des pistes à explorer

Sur le plan économique, la crise sécuritaire a aggravé les difficultés du pays. Le Président du Conseil national du Patronat, Mossadeck Bally, a récemment souligné les effets de l’insécurité et de la pénurie de carburant, rappelant que la paix ne se conquiert pas par les armes. Il appelle à un dialogue national réunissant gouvernement, secteur privé, société civile et groupes armés pour traiter les causes profondes du conflit et rétablir la confiance. Il estime que la survie du pays passe par une mobilisation collective et une refonte économique et sociale pour combattre la précarité.

Mécanismes endogènes

Pourtant, le ministère des Affaires religieuses, du Culte et des Coutumes dispose d’un Secrétariat permanent chargé d’appliquer la Politique nationale de prévention et de lutte contre l’extrémisme violent et le terrorisme (2021 – 2025). Cette structure forme Imams et enseignants coraniques, promeut la tolérance religieuse et encourage des prêches axés sur la paix et la cohésion sociale, établissant ainsi un cadre institutionnel favorable à un futur dialogue doctrinal.

Ce mécanisme pourrait, en collaboration avec le Haut Conseil islamique et avec l’appui de personnalités indépendantes ou de leaders communautaires respectés, constituer un cadre privilégié pour initier et encadrer ce dialogue doctrinal.

Les appels au dialogue se multiplient parmi les leaders religieux, politiques et économiques, unanimes sur un point : la réponse militaire, bien que nécessaire, ne suffit pas à instaurer une paix durable.

Le dialogue doctrinal s’impose alors comme une voie essentielle pour comprendre et désamorcer l’idéologie de la violence, redonner sens à la foi et restaurer les liens communautaires. En alliant parole religieuse et raison politique, cette approche pourrait restaurer la paix par la connaissance et l’écoute, là où les armes ont échoué.

MD

Projets sanitaires : l’Union européenne appuie la préparation du Mali face aux urgences

Le ministère de la Santé et du Développement social, la Délégation de l’Union européenne au Mali et l’Organisation mondiale de la Santé ont lancé, ce mercredi, une nouvelle initiative destinée à renforcer les capacités nationales de préparation et de réponse aux urgences sanitaires.

Ce projet, financé par la Direction générale de la protection civile et des opérations d’aide humanitaire de l’Union européenne (DG ECHO), s’inscrit dans le cadre du programme SURGE de renforcement de la résilience des systèmes de santé. Il prévoit la création d’une Équipe médicale d’urgence nationale (EMU) capable d’intervenir dans un délai maximal de 72 heures en cas de catastrophe ou d’épidémie.

La Chargée d’affaires de l’Union européenne au Mali, Bettina Muscheidt, a rappelé que cette initiative illustre une priorité humanitaire de l’UE : « accompagner nos partenaires dans la transition entre réponse d’urgence et préparation, afin d’anticiper les crises ». Elle a souligné que ce projet intervient dans un contexte marqué par des défis persistants — insécurité, déplacements de population, épidémies et effets du changement climatique — et qu’il contribuera à une réponse nationale rapide, efficace et coordonnée au bénéfice des populations les plus vulnérables.

La ministre de la Santé et du Développement social, le médecin colonel-major Assa Badiallo Touré, a salué l’appui constant de l’Union européenne et de l’OMS dans le renforcement du système sanitaire malien. Elle a indiqué que cette initiative permettra de mieux structurer les interventions d’urgence, d’assurer la disponibilité des ressources médicales essentielles et de consolider la coordination entre les acteurs de santé publique.

Le projet EMU – Équipes médicales d’urgence couvrira l’ensemble des régions sanitaires du Mali, ainsi que les points d’entrée frontaliers. Sa mise en œuvre, prévue de juin 2025 à juin 2027, vise à renforcer la formation, l’équipement et la préparation opérationnelle des équipes nationales et régionales.

La Mauritanie, le Mali et plusieurs autres pays de la région bénéficient de ce programme dans le cadre d’une approche sous-régionale soutenue par l’Union européenne et l’Organisation mondiale de la Santé.

Lutte contre les cancers féminins : Le Mali progresse mais reste vulnérable

En ce mois d’Octobre Rose, le Mali dresse un état des lieux contrasté de la lutte contre les cancers féminins. Malgré des progrès notables en matière de sensibilisation, de dépistage et de traitement, le pays reste confronté à d’importantes limites structurelles et socio-économiques.

Les cancers du sein et du col de l’utérus demeurent les deux formes de cancer les plus répandues chez les femmes au Mali. En 2020, le pays a recensé plus de 14 000 nouveaux cas de cancers, dont près de 4 400 cas de cancers du sein et du col de l’utérus.

En 2022, ces chiffres ont encore grimpé, avec 2 278 nouveaux cas de cancer du sein et 2 436 cas de cancer du col, selon les données officielles du ministère de la Santé. Cette progression, bien qu’inquiétante, s’explique en partie par l’amélioration du dépistage et une plus grande visibilité des campagnes de prévention menées à l’échelle nationale.

Ces deux cancers, longtemps restés silencieux dans l’espace public, sont désormais au cœur des politiques de santé et des programmes de lutte contre les maladies non transmissibles.

Sensibilisation en hausse

Selon le Dr Madani Ly, cancérologue au Centre international d’oncologie de Bamako et Président de l’association Onco-Mali, les dix dernières années ont marqué un tournant dans la sensibilisation.

« Il y a une avancée énorme sur le plan de la sensibilisation. De plus en plus de femmes ont l’information. Dans presque toutes les structures sanitaires, à Bamako ou à l’intérieur du pays, elles sortent en grand nombre pour se faire dépister. Cela a fait baisser, par exemple, le nombre de cas du cancer du col de l’utérus, parce que beaucoup de lésions précancéreuses ont été dépistées et traitées », affirme-t-il.

Les statistiques confirment cette tendance. En 2024, plus de 91 000 femmes ont été dépistées dans le pays, dont 43 236 pour le cancer du sein et 47 791 pour celui du col de l’utérus.

Parmi elles, 384 cas suspects de cancer du sein ont été enregistrés, dont 134 référés pour un suivi spécialisé. Concernant le col de l’utérus, 751 cas suspects ont été identifiés, aboutissant à 284 biopsies, 394 lésions précancéreuses détectées et 22 cas traités.

« Octobre Rose », une initiative impactante

Cette progression est aussi le fruit des campagnes annuelles « Octobre Rose », initiées par le ministère de la Santé et du Développement social, en partenariat avec l’Office national de la santé de la reproduction (ONASR) et diverses associations de femmes.

Depuis sa première édition, cette campagne vise à informer, dépister et accompagner les femmes à travers des actions concrètes de proximité. Placée sous le thème « Inclusion et engagement pour atteindre les groupes vulnérables », l’édition 2025, organisée du 1er au 31 octobre, ambitionne de toucher un million de femmes, en mettant l’accent sur celles vivant dans des conditions précaires : femmes déplacées, handicapées ou issues de zones enclavées.

Cette campagne s’inscrit dans le thème mondial choisi cette année par l’OMS : « Closing the Care Gap » (Réduire les inégalités d’accès aux soins).

Prise en charge renforcée

Outre les hausses de la sensibilisation et du dépistage, le Mali a aussi accompli des avancées considérables dans la prise en charge. « Il faut noter l’apport du gouvernement du Mali, qui a subventionné en partie depuis des années la chimiothérapie, facilitant ainsi l’accès au traitement, même si cela reste encore largement insuffisant », explique le Dr Madani Ly. Un autre acquis majeur est la création du centre de radiothérapie à l’Hôpital du Mali, offrant des traitements pour les cancers du sein et du col. « Il y a parfois quelques difficultés techniques, mais cela reste une avancée majeure », souligne-t-il.

La formation du personnel médical s’est également renforcée. Selon notre interlocuteur, le Mali compte de nos jours huit oncologues médicaux, qui exercent à Bamako, et de plus en plus de chirurgiens cancérologues et de radiothérapeutes sont formés, tandis que d’autres sont en cours de formation, suscitant un grand espoir de délocalisation du traitement des cancers vers les régions dans les prochaines années.

L’introduction du vaccin contre le papillomavirus humain (HPV) en novembre 2024, soutenue par l’OMS et l’Alliance GAVI, constitue elle aussi un jalon important. Elle vise à réduire à long terme les nouveaux cas de cancer du col de l’utérus, particulièrement chez les jeunes filles âgées de 9 à 14 ans.

MSF en appui

À ces efforts s’ajoute l’appui déterminant de Médecins Sans Frontières (MSF), qui depuis 2018 intervient dans le domaine de la lutte contre les cancers féminins. L’organisation a mis en place des programmes de dépistage et de traitement gratuits du cancer du col de l’utérus et du cancer du sein à Bamako, notamment au Centre de santé de référence de la Commune I.

Grâce à MSF et à son centre d’oncologie pilote, plusieurs femmes ont pu bénéficier d’un dépistage précoce et de soins adaptés. L’organisation contribue également à la formation du personnel soignant, à la fourniture d’équipements de diagnostic et à la mise à disposition de médicaments essentiels.

Ces actions ont permis, selon les données de MSF, de doubler le nombre de diagnostics précoces entre 2019 et 2022 et de réduire sensiblement la part des patientes arrivant à un stade terminal de la maladie.

Des obstacles structurels et sociaux encore tenaces

Malgré ces progrès, les défis restent considérables. Le taux de survie à trois ans du cancer du sein demeure extrêmement faible, estimé à seulement 12,69% selon une étude menée en 2015.

Cette situation s’explique par un diagnostic souvent tardif et par le fait que la majorité des patientes arrivent en soins à un stade avancé de la maladie. Les formes agressives, notamment les cancers triples négatifs, compliquent encore la prise en charge.

Les contraintes logistiques et financières aggravent la situation. « L’une des principales difficultés est d’ordre financier. La chimiothérapie coûte excessivement cher, même si le gouvernement en subventionne une partie », souligne le Dr Ly. Par ailleurs, le Mali ne dispose que d’un seul appareil de radiothérapie et l’accès aux analyses histochimiques et aux laboratoires d’anatomopathologie est très limité.

Les barrières socioculturelles jouent aussi un rôle majeur. « Souvent, les femmes ont peur de se rendre à l’hôpital parce qu’elles craignent la biopsie du sein. D’autres, en raison de la pudeur ou de convictions religieuses, évitent le dépistage du col de l’utérus. Nous devons faire des efforts de sensibilisation pour que ces tabous ne soient plus un frein », insiste le cancérologue.

Ces freins, combinés à la pauvreté et au manque de structures de proximité, expliquent le faible recours au dépistage préventif dans les zones rurales.

Renforcer le financement et décentraliser les soins

Pour améliorer la situation, les experts s’accordent sur plusieurs leviers d’action. D’abord, renforcer le diagnostic précoce et promouvoir une prise en charge multidisciplinaire afin d’assurer un meilleur suivi des patientes. Ensuite, développer l’offre de radiothérapie dans les régions et améliorer l’accès aux analyses histochimiques.

Le Dr Madani Ly plaide également pour un meilleur financement public. « Concernant l’accessibilité au traitement, l’idéal serait d’inclure dans la liste de l’Assurance Maladie Obligatoire les médicaments spécifiques du cancer, qui coûtent très cher. Nous ne gagnerons jamais la bataille contre les cancers sans ce mécanisme », déclare-t-il.

Au-delà de la question des ressources, le renforcement de la formation continue du personnel de santé et la sensibilisation communautaire est indispensable. Car, comme le rappelle le cancérologue, « les avancées sont encourageantes, mais la bataille est loin d’être terminée ».

Mohamed Kenouvi 

Le Mali adhère à l’Accord sur les subventions à la pêche 

Le Mali a déposé le 8 octobre 2025, son instrument d’acceptation de  l’Accord sur les subventions à la pêche de l’OMC, devenant le 114ème membre de l’OMC à le faire. L’Accord sur la pêche entré en vigueur le 15 septembre 2025 vise à assurer la durabilité des ressources en réduisant les subventions pour mettre fin à la surexploitation.

Lors d’une réunion spéciale du Conseil général le 15 septembre, les Membres de l’OMC ont célébré l’entrée en vigueur de l’Accord sur les subventions à la pêche.

Premier instrument multilatéral de l’OMC, il vise à assurer la durabilité environnementale. En interdisant le soutien public aux activités de pêche illégales et à la surexploitation des stocks, il contribue à la protection de la vie marine.

Au cours de cette réunion, la Directrice générale Ngozi Okonjo-Iweala a reçu les instruments d’acceptation de l’Accord de la part du Brésil, du Kenya, du Viêt Nam et de Tonga, portant le nombre total d’acceptations au-delà du seuil des deux tiers des Membres de l’OMC requis pour l’entrée en vigueur de l’Accord.

 

« À un moment où le système commercial international fait face à des défis profonds, l’Accord sur les subventions à la pêche envoie un signal fort : les Membres de l’OMC peuvent œuvrer ensemble, dans un esprit de coopération et de responsabilité partagée, pour apporter des solutions aux défis mondiaux. L’entrée en vigueur de cet Accord rappelle que beaucoup des plus grands défis que nous affrontons se traitent plus efficacement au niveau multilatéral. Les peuples et les nations ont besoin d’un multilatéralisme qui produit des résultats — c’est pourquoi cette journée est si rassurante », s’est réjouie la Directrice Générale de l’OMC.

 

En établissant des règles qui prohibent les formes les plus nuisibles de subventions à la pêche, l’Accord de l’OMC aidera à protéger les stocks de poissons mondiaux et les moyens de subsistance de centaines de millions de personnes qui dépendent de la pêche pour se nourrir, gagner un revenu et être employées.

 

Adopté par consensus lors de la 12ᵉ Conférence ministérielle de l’OMC en juin 2022, les disciplines de l’Accord interdisent les subventions pour la pêche illégale, non déclarée et non réglementée (INN), pour les stocks surexploités, et pour la pêche en haute mer non régulée.

 

En 2021, 35,5 % des stocks de poissons mondiaux étaient surexploités, contre 10 % en 1974. Il est estimé que les subventions à la pêche marine s’élèvent à environ 35 milliards USD par an à l’échelle mondiale, dont près de 22 milliards sont considérées comme nocives, contribuant à l’épuisement des stocks marins.

 

 

 

Mali – Madagascar : les Aigles plient l’affaire, cap sur la CAN 2025

Victoire nette 4–1 à Bamako pour conclure les éliminatoires. Un test décisif avant la Coupe d’Afrique des Nations au Maroc.

Le Mali a dominé Madagascar 4–1, dimanche 12 octobre 2025 au Stade du 26-Mars à Bamako. Le tableau des buteurs malien affichair Lassine Sinayoko (doublé), Néné Dorgelès et Gaoussou Diarra dans les arrêts de jeu, après que J. N’Zi ait réduit l’écart pour Madagascar à la 90ᵉ minute.

Malgré cette victoire, le Mali était éliminé avant la dernière journée. Madagascar totalisait 19 points contre 15 pour les Aigles. Le Ghana, pour sa part, s’est imposé 1–0 face aux Comores et a validé sa qualification pour le Mondial 2026, verrouillant ainsi l’enjeu du haut du groupe.

Le technicien belge Tom Saintfiet, en poste depuis 2024, a utilisé cette rencontre comme un banc d’essai pour ajuster ses choix tactiques à quelques semaines de la CAN 2025. Il a pu tester des associations offensives, faire des rotations et observer la capacité de son collectif à maîtriser les temps faibles.

Pour Madagascar, la défaite brise partiellement les espoirs. Les Bareas comptent désormais sur les résultats d’autres groupes. Leur avenir dépend du classement des meilleurs deuxièmes et d’un mini-tournoi qualificatif qui n’est pas encore défini.

Le Mali tourne désormais ses regards vers la Coupe d’Afrique des Nations au Maroc. Cette dernière rencontre, jouée dans un climat de répétition, aura permis d’éprouver des pistes tactiques et de renforcer la cohésion collective en vue d’un objectif à savoir décrocher enfin un premier titre continental.

France : Sébastien Lecornu reconduit mais déjà fragilisé malgré ses gestes d’ouverture

Le nouveau gouvernement peine à trouver sa stabilité malgré les appels au dialogue. Les gestes d’apaisement du Premier ministre ne suffisent pas à dissiper les menaces politiques qui planent sur Matignon.

Sébastien Lecornu a été reconduit à la tête du gouvernement le 10 octobre 2025, moins d’un mois après la chute de son premier cabinet. Le président de la République lui a renouvelé sa confiance dans un contexte de forte tension parlementaire. Le chef du gouvernement a tenté de composer une équipe plus large, intégrant des personnalités venues du centre droit et du centre gauche, tout en conservant la ligne politique de la majorité présidentielle. Cette ouverture, présentée comme une main tendue, visait à consolider une coalition plus stable et à ramener une forme de sérénité institutionnelle.

Malgré ces ajustements, le climat demeure incertain. Le gouvernement ne dispose toujours pas d’une majorité absolue à l’Assemblée nationale et reste dépendant de soutiens ponctuels. Les discussions engagées avec les différentes formations politiques n’ont pas permis d’aboutir à un accord durable. Les principaux partis d’opposition, notamment la France insoumise et le Rassemblement national, ont réaffirmé leur refus catégorique de toute collaboration. Du côté du Parti socialiste, le dialogue engagé avec Matignon n’a pas débouché sur un compromis. Le PS a maintenu la possibilité d’une motion de censure si ses demandes sur les salaires, la fiscalité et la protection sociale ne trouvaient pas d’écho.

Dans ce contexte, la fragilité du nouvel exécutif reste manifeste. Chaque vote important, à commencer par celui du budget 2026, pourrait devenir une épreuve décisive. Les appels de Sébastien Lecornu à la responsabilité collective n’ont pour l’heure pas inversé la dynamique. L’Assemblée demeure fragmentée, partagée entre des blocs politiques irréconciliables. Les Républicains se montrent divisés, certains élus refusant tout rapprochement tandis que d’autres privilégient une abstention de prudence. Le parti Horizons, dirigé par Édouard Philippe, participe au gouvernement mais conserve une attitude critique, demandant davantage de concertation et de visibilité dans les arbitrages.

La composition du nouveau cabinet illustre cette volonté d’équilibre. Autour de Sébastien Lecornu figurent des ministres issus de Renaissance, du MoDem et d’Horizons, mais aucun représentant des forces d’opposition. Laurent Nuñez conserve l’Intérieur, Roland Lescure reprend l’Économie et Catherine Vautrin s’installe aux Armées. Jean-Noël Barrot, proche d’Édouard Philippe, hérite des Affaires étrangères tandis que Monique Barbut prend la Transition écologique. Cette configuration traduit une ouverture limitée, davantage centrée sur la consolidation du socle présidentiel que sur un véritable élargissement politique.

Les signes d’apaisement envoyés par le Premier ministre n’ont pas suffi à désamorcer les tensions. L’abandon de certaines mesures contestées et les engagements symboliques autour du dialogue social n’ont pas convaincu une opposition qui reste vigilante. Le climat parlementaire demeure tendu, et la possibilité d’une censure n’est pas écartée. Le gouvernement, reconduit à peine installé, évolue dans un équilibre précaire entre concessions mesurées et nécessité de gouverner.

 

Sous la lumière d’un second mandat à haut risque, Sébastien Lecornu tente de préserver l’autorité de l’exécutif tout en évitant une nouvelle crise politique. Le temps dira si ces gestes d’ouverture suffiront à stabiliser un pouvoir en quête de souffle dans un paysage politique plus fragmenté que jamais.

Mali/États-Unis : Bamako réplique à la caution de visa imposée par Washington

Dans un communiqué en date du 11 octobre, le gouvernement malien a dénoncé la nouvelle mesure américaine exigeant une caution de plusieurs milliers de dollars pour les demandeurs maliens de visas B-1 et B-2. Le Mali annonce en réponse l’instauration d’un régime similaire pour les citoyens américains, au nom de la réciprocité diplomatique.

 

Bamako, 12 octobre 2025 — Les relations entre Bamako et Washington traversent une zone de turbulence depuis l’annonce par les autorités américaines d’un programme pilote imposant une caution aux ressortissants maliens sollicitant un visa d’affaires ou de tourisme. Selon la réglementation publiée au Federal Register le 8 octobre, cette caution remboursable, d’un montant variable de 5 000, 10 000 ou 15 000 dollars, sera exigée à compter du 23 octobre dans les consulats américains.

 

Le ministère malien des Affaires étrangères a aussitôt réagi, jugeant la décision américaine « unilatérale » et « contraire aux dispositions de l’accord bilatéral sur les visas de longue durée à entrées multiples », en vigueur depuis 2005. Dans son communiqué, Bamako affirme avoir « pris acte » de la mesure, tout en annonçant « l’instauration d’un programme de visa identique », appliquant aux citoyens américains les mêmes conditions financières et administratives.

 

Du côté américain, le Département d’État justifie cette réforme par la nécessité de lutter contre les dépassements de séjour et de renforcer la conformité des visas temporaires. La mesure s’accompagne d’un nouveau droit baptisé Visa Integrity Fee (VIF), d’un montant de 250 dollars, instauré depuis le 1ᵉʳ octobre 2025 pour la majorité des visas non-immigrants. Le droit de demande standard reste fixé à 185 dollars et la durée de validité à 60 mois à entrées multiples pour les demandeurs maliens.

 

Les titulaires de ces visas devront désormais entrer et sortir des États-Unis exclusivement par les aéroports de Boston (BOS), New York (JFK) ou Washington Dulles (IAD), selon les directives publiées sur Travel.State.Gov.

 

À Bamako, les autorités estiment que cette nouvelle procédure complique inutilement les démarches pour les voyageurs maliens. Le ministère rappelle que le pays « a toujours collaboré avec les États-Unis d’Amérique dans la lutte contre l’immigration irrégulière, dans le respect du droit et de la dignité humaine ». En soulignant sa volonté de maintenir « des relations de coopération fructueuses fondées sur le dialogue et le respect mutuel », le gouvernement malien affirme cependant son attachement au principe de souveraineté et d’équilibre dans ses relations extérieures.

 

Au-delà de l’aspect consulaire, cette controverse illustre la nouvelle dynamique diplomatique engagée par Bamako, qui défend une approche plus affirmée face à ses partenaires traditionnels. Dans un contexte international marqué par le durcissement des politiques migratoires occidentales, la réciprocité décidée par le Mali se veut un signal politique fort : celui d’un État qui entend faire respecter ses accords et traiter d’égal à égal avec ses interlocuteurs.

 

Pour l’heure, aucune réaction officielle n’a encore été publiée par le Département d’État américain ou l’ambassade des États-Unis à Bamako. Mais dans les milieux diplomatiques, l’affaire est suivie de près, tant ses implications dépassent la seule question des visas. Elle met à l’épreuve la solidité d’une coopération ancienne, fondée sur la sécurité, le développement et la mobilité, et ouvre un nouveau chapitre dans la relation entre les deux capitales.

Mort de Boubacar Demougui : un coup dur pour l’État islamique au Sahel  

Le 8 octobre 2025, les Forces armées de l’Alliance des États du Sahel (AES) ont réalisé une frappe aérienne décisive à Inarabane, une localité située au sud-ouest de Ménaka, visant l’État islamique au Sahel (EIS). Cette opération a permis de neutraliser plusieurs responsables de premier plan du groupe, parmi lesquels Boubacar Demougui, chef redouté de la branche locale de l’EIS et principal acteur de la terreur au nord du Mali.

Dans la matinée du 8 octobre, les forces de l’AES ont mené une frappe stratégique, en se basant sur des renseignements fiables et confirmés. Des drones ont ciblé une réunion de commandement de l’EIS dans la zone d’Inarabane. Cette intervention a permis d’éliminer plusieurs responsables de l’organisation, dont Boubacar Demougui, adjoint direct de l’émir Issa Barrey et un acteur central du dispositif militaire du groupe dans la région.
Boubacar Demougui, originaire du nord de Ménaka, dirigeait depuis plusieurs années les opérations sur un large secteur s’étendant de Tidermène à Ikadewan, en passant par Tedjererte. Il était responsable de la gestion logistique des unités combattantes et de la coordination des ressources du groupe. Sa réputation de violence s’est particulièrement renforcée après qu’il ait exécuté, en 2022, Sidi Barka, le président de la société civile de Ménaka, un crime qui avait profondément affecté la population locale.
L’opération a également permis de neutraliser plusieurs de ses lieutenants, dont Ismaël Ould Habib Ould Choghib et Ahmed Ould Alwane Ould Choghib. Ces derniers, également actifs dans la région de Ménaka, étaient impliqués dans de nombreuses exactions contre les civils et dans des enlèvements d’otages, incluant une ressortissante suisse et une autrichienne, capturées entre Agadez et Ménaka. Selon les renseignements, ces individus participaient à une réunion de coordination au moment de l’attaque.
Boubacar Demougui, connu pour sa mobilité et son expertise tactique, était l’un des stratèges les plus redoutés de l’EIS dans la région du Sahel. Il avait pris part à plusieurs attaques majeures, notamment l’embuscade de Tongo Tongo au Niger en 2017, l’attaque du camp d’Indelimane en 2019 et l’assaut sur Labbezanga en 2023. Sa mort est considérée comme un succès militaire majeur par les forces de l’AES, affaiblissant la structure de commandement de l’EIS dans le nord du Mali, déjà fragilisée par les actions militaires récentes menées à Ménaka et à Gao.
Au-delà de son impact militaire, cet événement a une portée symbolique importante dans la lutte psychologique contre les groupes armés. Dans une région marquée par la terreur, l’élimination de l’un des responsables les plus cruels de la violence pourrait bien marquer un tournant. Cependant, les autorités demeurent prudentes. Bien que cette victoire porte un coup sévère à l’appareil de l’EIS, la menace reste présente, les réseaux de soutien restant opérationnels et susceptibles de se réorganiser rapidement.

SAHABA 2025 : ouverture de la 8ᵉ édition à Bamako

Le Salon de l’Habitat de Bamako a ouvert ses portes ce jeudi 9 octobre 2025, sous la présidence du Premier ministre, le Général de Division Abdoulaye Maïga. Placée sous le thème « La résilience face aux crises urbaines », cette 8ᵉ édition, qui se tient jusqu’au 11 octobre, met en lumière les défis du logement et les solutions pour un développement urbain durable.

Organisé par le Gouvernement de la Transition, SAHABA 2025 se veut un cadre d’échanges entre acteurs publics et privés, chercheurs, promoteurs immobiliers, institutions financières et citoyens. L’événement, accueilli au Centre international de conférences de Bamako, vise à encourager la concertation sur l’accès au logement, la planification urbaine et la valorisation des matériaux locaux.

Dans son allocution d’ouverture, le Premier ministre Abdoulaye Maïga a rappelé que le logement constitue un droit fondamental reconnu par l’article 10 de la Constitution du 22 juillet 2023, au même titre que l’éducation, la santé et la protection sociale. Il a souligné la volonté du Gouvernement de rendre ce droit effectif pour chaque Malien, conformément à la lettre de cadrage du Président de la Transition, le Général d’Armée Assimi Goïta.

Le chef du Gouvernement a également évoqué la Politique nationale de la Ville, adoptée en 2014, qui encadre la planification urbaine, la gestion du foncier et la promotion d’un habitat durable. Cette politique s’inscrit dans un contexte de croissance démographique soutenue et d’urbanisation rapide, particulièrement à Bamako et dans les capitales régionales.

Selon le Centre for Affordable Housing Finance in Africa (CAHF), le Mali connaît un déficit important en logements abordables. L’Office malien de l’Habitat (OMH) poursuit plusieurs programmes pour y remédier : en 2024, 1 200 logements ont été mis en vente directe et plus de 12 500 unités sont en cours de cession dans le district de Bamako. Ces efforts s’accompagnent d’une coopération accrue avec la Banque Ouest-Africaine de Développement (BOAD) et d’autres partenaires pour le financement de projets d’habitat social.

Au-delà du logement, SAHABA 2025 sert de plateforme d’innovation. Plusieurs exposants y présentent des solutions techniques pour réduire les coûts de construction et améliorer la durabilité des bâtiments, notamment par l’utilisation de briques stabilisées et de matériaux locaux adaptés aux conditions climatiques.

En clôturant la cérémonie d’ouverture, le Premier ministre Abdoulaye Maïga a réaffirmé la détermination du Gouvernement à promouvoir un habitat digne, accessible et résilient. Il a souligné que la politique du logement doit demeurer un levier de stabilité sociale et un pilier du développement national.

Révision annuelle des listes électorales : Un exercice sans les acteurs politiques

La révision annuelle des listes électorales a démarré le 1er octobre et se poursuivra jusqu’au 31 décembre 2025. Mais cette année, pour la première fois, l’exercice se déroule sans la participation des partis politiques, dissous depuis mai dernier. Une situation qui soulève des questions sur la transparence et l’inclusivité de cette révision.

La révision annuelle des listes électorales (RALE) est une opération inscrite dans la Loi électorale, modifiée par l’Ordonnance N°2024-022 du 31 décembre 2024. Elle confère à l’Autorité indépendante de gestion des élections (AIGE) la responsabilité d’actualiser le fichier électoral, avec l’appui du ministère de l’Administration territoriale et de la Décentralisation.

Concrètement, il s’agit d’inscrire les nouveaux majeurs, de radier les personnes décédées, de corriger les erreurs matérielles et de prendre en compte les changements de résidence ou de circonscription électorale.

L’opération se déroule dans les 845 communes du pays, dans les 7 arrondissements de Bamako et dans 48 missions diplomatiques et postes consulaires à l’étranger.

Les partis politiques absents

Si, sur le plan technique, la RALE 2025 suit son calendrier habituel – du 1er octobre au 31 décembre – le contexte politique actuel la rend particulièrement sensible.

Depuis la dissolution de tous les partis politiques, en mai dernier, aucune formation n’est plus habilitée à participer aux commissions locales de révision, qui regroupaient traditionnellement les représentants de l’administration, de la société civile et des partis. Désormais, seuls les représentants des services techniques et des autorités administratives supervisent les opérations.

Transparence incertaine ?

Ce changement modifie l’équilibre du contrôle citoyen et alimente des inquiétudes sur la transparence du processus. Selon le Premier ministre et ministre de l’Administration territoriale et de la Décentralisation, le Général Abdoulaye Maïga, « toutes les dispositions logistiques et administratives ont été prises pour assurer le bon déroulement des opérations ».

Mais pour de nombreux analystes la réussite et la transparence de la révision des listes ne dépendent pas seulement des moyens techniques et administratifs. « Il faut un contrôle pluraliste du processus, or celui-ci n’existe plus », estime Omar Sidibé, analyste politique. « Même la société civile ne peut pas jouer pleinement ce rôle, car elle n’a ni les moyens logistiques ni la légitimité populaire des formations politiques », affirme-t-il.

De nombreuses conséquences

Selon un autre analyste politique qui a requis l’anonymat, cette absence d’acteurs politiques crée également « un vide démocratique qui affaiblit la crédibilité de la révision ». Il ajoute que « la présence des partis dans les commissions locales permettait une forme de contre-pouvoir et de vigilance citoyenne. Leur exclusion laisse le champ libre à une administration déjà perçue comme dépendante du pouvoir ».

Sur le terrain, plusieurs observateurs craignent également un ralentissement du rythme d’inscription des nouveaux électeurs, notamment dans les zones rurales. Sans les relais locaux des partis, souvent les plus actifs pour mobiliser les citoyens, la sensibilisation à l’inscription pourrait être moins dynamique.

À l’intérieur du pays, des campagnes de sensibilisation ont démarré depuis le 3 octobre dernier dans certaines localités pour encourager la participation massive des populations, mais l’affluence reste timide dans les communes. « Dans notre commune, les gens ignorent même que la révision a commencé », confie une source locale à Douentza. Selon elle, « les partis, malgré leurs défauts, jouaient un rôle-clé de relais entre l’administration et les électeurs ».

Un test pour la crédibilité des futures élections

Dans un contexte de transition prolongée et de désorganisation du champ partisan, la réussite ou l’échec de la révision annuelle des listes électorales en cours, ainsi que dans les années à venir, sans participation des acteurs politiques, pèsera lourd sur la crédibilité des futurs scrutins, même si les élections ne sont envisagées au plus tôt qu’à partir de 2030.

Pour Omar Sidibé, « si l’AIGE parvient à garantir une révision rigoureuse et transparente, ce sera un signal positif. Mais si le processus est opaque, il accentuera la méfiance des citoyens envers les institutions ».

Mohamed Kenouvi

Quand les camions de vidange empoisonnent la route

Chaque jour, à Bamako, on aperçoit des camions chargés de boues de vidange circulant dans les rues, leurs tuyaux mal fermés laissant échapper des effluents nauséabonds avant même d’atteindre les sites de dépotage.

Sur les grands axes comme dans les quartiers périphériques, ces véhicules, censés assainir la ville, laissent derrière eux des traces d’eaux usées mêlées d’odeurs suffocantes. Les passants, les motocyclistes et les automobilistes partagent malgré eux cette contamination de l’air et du bitume, dans une capitale où la densité urbaine rend la situation d’autant plus insupportable.

Selon les données de la Direction nationale de l’Assainissement, Bamako produit plus de 2 000 mètres cubes de boues de vidange par jour, dont une grande partie est évacuée par des opérateurs privés. Mais l’absence de contrôle strict et le manque de centres de traitement fonctionnels conduisent nombre de camions à déverser illégalement leurs charges ou à circuler sans dispositifs d’étanchéité. Ces pratiques exposent la population à des risques sanitaires majeurs tels que la contamination des eaux souterraines, la prolifération bactérienne et l’insalubrité chronique.

Les autorités municipales reconnaissent des difficultés de suivi, notamment liées à l’insuffisance des infrastructures et à la vétusté du parc de véhicules d’assainissement.

En attendant des mesures concrètes, Bamako continue de respirer au rythme des relents d’eaux usées, symbole d’un service public d’assainissement débordé, voire défaillant. Ce désordre visible interroge la capacité collective à faire de la propreté urbaine un droit effectif et non un luxe, dans une ville où la croissance démographique dépasse désormais les moyens de la gestion quotidienne des autorités du District.

MD

Triangle du Balafon : Sikasso s’apprête à vibrer

Le Festival International Triangle du Balafon se tient du 9 au 11 octobre 2025 à Sikasso. Trois jours de spectacles, de compétitions et de débats consacrés au balafon, instrument central de l’Année de la Culture.

La neuvième édition débute ce jeudi après un lancement organisé le 4 octobre au Centre international de conférences de Bamako. Porté par le ministère de l’Artisanat, de la Culture, de l’Industrie hôtelière et du Tourisme, en partenariat avec le Gouvernorat de Sikasso, le festival bénéficie également du soutien des plus hautes autorités du pays. Le thème retenu cette année est « Le Balafon, symbole de la transformation sociale dans un nouvel espace souverain ».

Les pays historiquement associés au Triangle – Mali, Burkina Faso et Côte d’Ivoire – participent à l’événement. La Guinée est également annoncée parmi les délégations. La sélection malienne a retenu la troupe Siguidia à l’issue d’un casting organisé par la Direction nationale de l’Action culturelle le 24 septembre 2025. Parmi les artistes confirmés figure Souleymane Traoré dit Néba Solo, accompagné de l’orchestre régional Kéné Star, déjà présent lors du lancement pour une prestation d’ouverture.

Le programme couvre des compétitions de balafonistes, des concerts, des expositions, des visites de sites culturels et un forum consacré au rôle social du balafon dans la cohésion communautaire. Le jury est composé de personnalités issues des milieux culturels du Mali, du Burkina Faso et de la Côte d’Ivoire.

Les organisateurs ont annoncé un dispositif de récompenses pour valoriser les participants. Ainsi, le Grand prix Lamissa Bengaly est doté de 1 500 000 francs CFA, le prix de l’Intégration de 1 000 000 francs CFA, le prix de la Ville de Sikasso de 750 000 francs CFA. S’y ajoutent un prix spécial de l’AES de 500 000 francs et une prime de participation de 400 000 francs CFA par troupe.

Créé en 2004, le Triangle du Balafon vise à préserver et à promouvoir un patrimoine musical partagé entre plusieurs États ouest-africains. Le festival se présente comme une scène de transmission où se rencontrent maîtres, jeunes talents et publics venus de différentes régions. À Sikasso, la manifestation réunit institutions, acteurs culturels et habitants autour d’une programmation conçue pour favoriser l’échange, la formation et la diffusion des pratiques traditionnelles.

Pour les autorités, ce festival illustre la place accordée à la culture dans l’agenda national en 2025. Au public il offre une occasion de redécouvrir le balafon dans sa dimension sociale et symbolique. Pendant trois jours, Sikasso sera la vitrine d’un patrimoine vivant et d’un dialogue culturel qui transcende les frontières.

MD

Coton : Vers une relance prudente de la filière

La Compagnie malienne pour le développement du textile (CMDT) a lancé la phase d’égrenage de la campagne 2025 – 2026 avec la première balle de coton fibre produite à Koutiala le 30 septembre 2025. Ce démarrage symbolise la relance d’une filière-clé pour les exportations maliennes et les revenus de millions de ruraux.

Pour cette campagne, la CMDT prévoit 672 000 hectares de coton graine, en hausse par rapport à l’an dernier. Le prix d’achat du premier choix est fixé à 300 francs CFA le kilogramme, selon la décision du Conseil supérieur de l’Agriculture du 6 mai 2025. Pour soutenir la filière, l’État subventionne les intrants. Ainsi, le sac de 50 kg d’engrais minéraux revient à 14 000 francs et le kilogramme de semences de maïs hybride à 1 500 francs. Ces mesures visent à contenir les coûts et à préserver la rentabilité des producteurs face aux tensions du marché mondial.

La CMDT, détenue majoritairement par l’État malien, assure la transformation du coton graine en fibre et son acheminement vers les ports d’Abidjan et de Dakar. En 2023 – 2024, le Mali a produit 445 000 tonnes de coton fibre, se plaçant derrière le Bénin (587 000 tonnes) et le Burkina Faso (480 000 tonnes), mais devant la Côte d’Ivoire (320 000 tonnes) et le Tchad (125 000 tonnes). Les prévisions pour 2025 – 2026 tablent sur environ 700 000 tonnes, selon les conditions climatiques et la maîtrise des ravageurs.

Au plan international, le ministre de l’Industrie et du Commerce, Moussa Alassane Diallo, a représenté le Mali à la Journée mondiale du Coton tenue à Rome les 6 et 7 octobre 2025, avant de participer à une réunion du groupe C4+ au Brésil. Ces rencontres ont porté sur la valorisation du coton africain et la recherche d’un meilleur accès aux marchés mondiaux pour les producteurs de la sous-région.

Malgré des perspectives favorables, la filière fait face à plusieurs défis. Les jassides ont déjà touché plus de 2 000 hectares dans le sud du pays. En mars 2025, un incendie à l’usine CMDT de Bamako a détruit 1 026 balles de coton, causant environ 250 millions de francs CFA de pertes. Pour contenir ces impacts, l’État a mobilisé 9,938 milliards pour la lutte phytosanitaire et la sécurisation de la campagne.

La relance du coton malien demeure donc prudente, soutenue par l’investissement public, la résilience des producteurs et une coordination régionale renforcée autour du C4+.

MD

Enseignement primaire et secondaire : Vers une grève générale ?

Depuis la rentrée scolaire du 1er octobre 2025, le climat est tendu dans les écoles. Une grève de 72 heures la semaine dernière, reconduite pour 120 heures, perturbe les cours à Bamako et dans certaines régions. Malgré les engagements du gouvernement, le bras de fer se poursuit et une grève générale plane à l’horizon.

La rentrée 2025-2026 n’a pas commencé sous les meilleurs auspices. Dans les établissements du primaire et du secondaire à Bamako et dans certaines régions, les enseignants observent depuis le 1er octobre un arrêt de travail pour protester contre la suspension des salaires de milliers d’entre eux, enrôlés ou non dans le Système intégré de gestion des ressources humaines (SIGRH).

Le mouvement est initié par certaines coordinations régionales de la Synergie des syndicats de l’éducation signataires du 15 octobre 2016, malgré les engagements pris par le gouvernement à l’issue de la réunion du 30 septembre 2025.

Les autorités avaient formulé plusieurs promesses, notamment le rétablissement immédiat des salaires pour les enseignants disposant de récépissés d’enrôlement, la constitution d’une réserve de fonds au Trésor public pour payer les 6 000 agents concernés et la mise à disposition d’un budget pour le déploiement des équipes d’enrôlement dans les régions.

« Des avancées, mais trop lentes »

La Synergie des syndicats de l’éducation signataires du 15 octobre 2016 s’était donné jusqu’au 10 octobre 2025 pour déclencher une grève générale sur l’ensemble du territoire national si les engagements du gouvernement n’étaient pas tenus.

À deux jours de l’échéance, Ousmane Almoudou, Porte-parole de la Synergie, souligne qu’il y a eu des avancées, mais trop lentes. « Il y a eu un petit progrès sur le terrain, parce que les listes ont été envoyées et que les salaires de certains enseignants sont déjà traités ». Toutefois, poursuit-il, « ces listes partent au compte-gouttes et, à ce rythme, certains enseignants percevront leur salaire alors que d’autres devront encore attendre ».

Le syndicaliste souligne également que les promesses de déploiement des équipes d’enrôlement dans les régions tardent à se concrétiser. « En principe, elles devaient quitter Bamako le lundi, mais cela reste à vérifier », explique-t-il, déplorant le manque de visibilité sur les actions réellement entreprises sur le terrain.

Concernant la question d’une éventuelle accalmie, Ousmane Almoudou est catégorique : « nous allons nous donner jusqu’à la fin de semaine pour analyser les avancées et évaluer l’évolution de la situation. Mais la grève générale annoncée sera toujours d’actualité si tous les enseignants ne perçoivent pas effectivement leurs salaires », prévient le Porte-parole de la Synergie.

Mohamed Kenouvi

Pénurie de carburant : Bamako en panne sèche

Depuis plusieurs semaines, les stations-service maliennes tournent à vide. Dans la capitale comme à l’intérieur du pays, les files s’allongent, les prix flambent et la colère gronde. Entre perturbations sécuritaires et faibles capacités de stockage, la crise du carburant met à genoux une économie déjà fragilisée.

Plusieurs localités du pays sont confrontées depuis quelques semaines à une pénurie de carburant. Des difficultés d’approvisionnement perturbent fortement la distribution de l’essence et du gasoil. L’insuffisance de ces produits, indispensables à la vie économique et sociale, conduit à une flambée des prix et à une forte affluence dans les points de vente. En attendant une sécurisation de l’approvisionnement, les populations craignent une nouvelle crise.

Selon les chiffres de l’Office malien des produits pétroliers (OMAP), la consommation quotidienne moyenne du pays est estimée à 3,5 millions de litres, dont près de 60% destinés à la seule capitale. Cette dépendance logistique accrue explique la rapidité avec laquelle la moindre rupture d’approvisionnement se répercute sur l’ensemble du territoire.

Le 7 octobre 2025, plusieurs stations-service et points informels de vente de carburant sont pris d’assaut par des centaines de citoyens. L’attente est interminable et certains s’impatientent. Écoliers, commerçants ou conducteurs de moto-taxis, ils ont besoin de carburant pour se rendre à l’école, au travail ou pour exercer leur activité. Pendant ce temps, le circuit parallèle fonctionne à plein régime : ceux qui ont flairé une opportunité achètent du carburant pour le revendre plus cher à des usagers sans alternative. Dans certains quartiers de Bamako, notamment à Faladié et à Magnambougou, des revendeurs clandestins exposent désormais leurs bidons à la vue de tous. Les ventes se font à la sauvette, parfois à proximité immédiate des stations-service, sans contrôle ni mesures de sécurité.

Médecin au centre de santé de référence de Kalaban Coro, le Dr Assitan Sidibé observe avec inquiétude le tableau de bord de son véhicule. « la quantité de carburant que j’ai peut m’amener au service. Au retour, si je n’ai pas de carburant, je prendrai si possible un transport en commun », se résigne-t-elle. Comme elle, des dizaines de travailleurs ne savent pas s’ils auront le lendemain de quoi se déplacer. Certains étaient déjà en panne sèche faute d’avoir pu s’approvisionner.

Les hôpitaux et les centres de santé sont parmi les premiers touchés par cette pénurie. Certains établissements ont dû réduire les services de nuit ou recourir à des générateurs alimentés par des réserves limitées.

« Il n’y a plus d’essence », c’est la réponse la plus courante que l’on entend dans les quelques stations encore ouvertes. « Nous attendons du carburant d’ici ce soir », espère un pompiste. Dans celles qui disposent encore de carburant, les files d’attente s’allongent, créant une certaine tension et obligeant les gérants à faire appel aux forces de l’ordre pour éviter les débordements.

Des affrontements ont d’ailleurs été signalés dans plusieurs stations de la rive droite, où des automobilistes, excédés par les longues files, ont exprimé leur colère. Les forces de sécurité ont dû intervenir à plusieurs reprises pour disperser des attroupements.

Cette situation, qui risque de durer encore quelques semaines, impacte fortement la vie des citoyens, déjà éprouvés par la cherté de la vie. Par un effet domino, le prix de certains produits a grimpé en flèche, à l’image du gaz butane, dont la bouteille de 6 kilos revient désormais à 10 000 francs CFA contre 6 000 auparavant. Selon certaines sources, cette flambée pourrait se prolonger si les flux d’importation ne reprennent pas rapidement.

Tension palpable

« C’est seulement ces derniers jours que les citoyens ont touché du doigt le manque. Nous, nous le vivons depuis des semaines » estime un acteur du secteur des hydrocarbures. Depuis les attaques de camions-citernes sur l’axe Kayes – Bamako en septembre 2025, l’approvisionnement du pays est gravement perturbé. Des centaines de camions, bloqués aux frontières, n’entrent plus qu’au compte-goutte et  sous escorte. La faiblesse du stock, qui ne couvre qu’une courte période de consommation, met le marché sous pression.

Pour remédier à la situation, les autorités ont annoncé leur volonté de tout mettre en œuvre pour éviter la rupture. Mais, malgré les assurances, la pénurie redoutée a gagné la capitale. Lors d’un point de presse, le 7 octobre, la Direction générale du Commerce et de la Concurrence a dénoncé les acteurs ne respectant pas les prix plafonds et promis des sanctions. Sur le terrain, cependant, les spéculations persistent. Selon les zones, le bidon d’un litre et demi se négocie entre 2 000 et 4 000 francs CFA.

Conséquence immédiate, les transports en commun – notamment les moto-taxis, très sollicités à Bamako – ont révisé leurs tarifs. Des trajets habituellement facturés 1 000 francs CFA coûtent désormais entre 1 500 et 2 000 francs. « L’essence coûte cher », ses justifient les conducteurs.

Environ 300 camions-citernes sont arrivés en fin de journée le 7 octobre, selon la télévision nationale. Une arrivée qui n’a pas mis fin aux longues files d’attente, visibles dès le lendemain matin dans les stations approvisionnées.

Effets redoutés

Les attaques de citernes ont occasionné des pertes considérables en carburant et en matériel, estimées à plusieurs centaines de millions de francs CFA. À cela s’ajoutent les frais liés aux escortes sécurisées, qui alourdissent encore les coûts de distribution et risquent de provoquer une hausse générale des prix.

Pour l’heure, les tarifs officiels restent fixés à 775 francs CFA le litre de super et 725 francs CFA pour le gasoil, mais le marché informel fait déjà grimper le litre d’essence à plus de 1 300 francs CFA à Bamako. Une nouvelle pression sur le pouvoir d’achat d’une population déjà éprouvée.

Rationnement nécessaire

Dans ce contexte de pénurie, chaque litre de carburant est devenu vital. Le fonctionnement de plusieurs services essentiels, notamment la santé et l’énergie, dépend directement de sa disponibilité. En 2024, les besoins du Mali en carburant avaient été estimés à 500 millions de litres, soit 309 milliards de francs CFA.

Depuis plusieurs semaines, les clients d’Énergie du Mali (EDM) subissent une chute brutale de la fourniture d’électricité : de 12 heures quotidiennes, la moyenne est passée à 6, voire 4 heures, rappelant les lourds délestages du début d’année. Cette absence d’énergie pénalise directement les entreprises et l’économie urbaine.

Pour répartir équitablement les quantités disponibles, les distributeurs s’efforcent de servir d’abord les secteurs prioritaires comme la santé, l’énergie ou les administrations publiques. Une rationalisation rendue difficile par la spéculation. « Le pire, c’est le comportement de certains spéculateurs », déplore un distributeur. « Ils achètent un bidon de 20 litres 15 000 francs CFA en station et le revendent aussitôt  30 000 francs ».

Renforcer le stockage

Avec une consommation annuelle estimée à 1,3 million de m³, le Mali ne dispose que d’une capacité de stockage de 53 853 m³, soit à peine l’équivalent d’un mois de consommation. Cette insuffisance structurelle et les perturbations logistiques expliquent la tension actuelle.

Pour pallier ces difficultés, les autorités envisagent de créer un stock national de sécurité, projet déjà à l’étude depuis plusieurs années. Son objectif : garantir une autonomie minimale de deux à trois mois en cas de crise régionale. Parmi les mesures prioritaires figurent l’élargissement des dépôts de stockage dans les zones stratégiques et la diversification des corridors d’importation, notamment via la Mauritanie.

L’axe Kayes – Bamako, qui représente plus de 50% du trafic national de carburant, reste le principal cordon d’approvisionnement du pays. De sa vitalité dépend la stabilité de toute l’économie.

Fatoumata Maguiraga

Alassane Maïga: « Dépasser la réponse militaire est la seule voie viable vers une paix durable au Sahel »  

Dans cet entretien, l’écrivain et expert en gouvernance Alassane Maïga livre une analyse lucide des causes profondes des crises sahéliennes. Il appelle à repenser la gouvernance, le développement et la justice pour construire une paix durable fondée sur les dynamiques locales.

1. Qu’entendez-vous par « regard détourné » dans votre analyse des conflits sahéliens ?
L’analyse propose une déconstruction des grilles de lecture sécuritaires dominantes, centrées sur la lutte contre le terrorisme, en offrant un regard dépassant la seule menace terroriste. Au Sahel, on évoque souvent le « terrorisme » et les réponses militaires associées. Cette analyse révèle que la concentration exclusive sur la « lutte contre le terrorisme » a laissé dans l’ombre des facteurs historiques majeurs comme des pratiques de gouvernance défaillantes, une centralisation excessive du pouvoir, des inégalités sociales profondes, des manipulations politiques et identitaires, la corruption endémique ainsi que les conséquences des aléas climatiques. Elle invite donc à considérer la complexité sociale, politique et environnementale, plutôt que de se restreindre à des réponses militaires, lesquelles négligent les causes profondes des conflits et risquent souvent d’en aggraver les effets en alimentant des cycles de violence et de méfiance.
2. Quels facteurs profonds expliquent, selon vous, la persistance de l’instabilité dans la région ?
La persistance de l’instabilité dans la région du Sahel ne se limite pas à une simple faiblesse des États ; elle reflète une crise profonde du pacte social, exacerbée par des politiques de développement mal adaptées aux contextes locaux et une marginalisation socio-économique excessive. Cette situation a favorisé l’implantation durable des groupes extrémistes violents ainsi que la diffusion de leurs idéologies radicales. L’échec des approches militaires tient justement à leur incapacité à restaurer une légitimité crédible. En effet, sans une présence étatique soutenue et un accompagnement social solide, les zones temporairement sécurisées retournent rapidement sous le contrôle des groupes armés extrémistes.
3. Comment percevez-vous l’impact de l’AES et du recentrage stratégique vers la Russie, la Chine ou la Turquie ?
L’influence croissante d’acteurs extérieurs tels que la Russie, la Chine ou la Turquie traduit une compétition géopolitique intense qui complique encore davantage la crise au Sahel. La région est aujourd’hui le théâtre d’une lutte féroce où les agendas des puissances étrangères se superposent et s’affrontent, souvent au détriment des populations locales. Un pivot géopolitique vers la Russie semble illustrer une redéfinition des alliances stratégiques dans la région, offrant un appui militaire au risque d’accentuer la violence structurelle. Cette reconfiguration géopolitique fragmente davantage l’espace sahélien et intensifie les tensions régionales, rendant illusoire toute solution strictement locale ou nationale isolée.
4. Quelles pistes concrètes proposez-vous pour construire une paix durable au Sahel ?
Face à ces enjeux, une paix durable au Sahel nécessite de privilégier les mécanismes locaux de résolution des conflits, reconnus comme un capital social essentiel. Plus encore, elle exige une transformation radicale des modèles de gouvernance, bien au-delà de simples ajustements techniques. Elle passera également par la réinvention d’un développement offrant de réelles perspectives, ainsi que par la promotion d’une justice réparatrice et réconciliatrice.
Le chemin vers cette paix sera long et semé d’embûches. Il faut impérativement offrir aux jeunes des perspectives économiques et politiques, protéger les droits des communautés périphériques et promouvoir une décentralisation effective accompagnée d’un transfert réel de pouvoirs aux collectivités locales.
La gouvernance doit s’appuyer sur une articulation harmonieuse entre autorités traditionnelles et institutions modernes, afin de bâtir un système plus légitime et résilient. En résumé, dépasser la réponse militaire pour s’engager résolument dans une reconstruction politique, sociale et économique constitue la seule voie viable vers une paix durable.

E-passeport AES : de nouveaux tarifs avant la suspension annoncée du service

Le gouvernement a adopté de nouveaux tarifs pour le passeport confédéral AES, désormais fixés à 45 000 F CFA pour le service standard et 90 000 F CFA pour le service premium. Cette mesure précède la suspension temporaire de l’enrôlement biométrique, prévue à partir du 11 octobre, le temps d’une modernisation technique.

Réuni en session ordinaire mercredi 8 octobre 2025 au Palais de Koulouba, le Conseil des ministres, présidé par le général Assimi Goïta, a approuvé un décret fixant les nouveaux prix du e-passeport de la Confédération des États du Sahel (AES). Ce document, adopté le 18 avril dernier par les trois pays membres, vise à harmoniser les titres de voyage au sein de l’espace sahélien et répond aux normes de l’Organisation de l’aviation civile internationale en matière de sécurité et de protection des données personnelles.

Le tarif du passeport standard baisse de 55 000 à 45 000 F CFA, tandis que celui du service premium passe de 110 000 à 90 000 F CFA, soit une réduction de 10 000 et 20 000 F CFA respectivement. Cette révision tarifaire s’inscrit dans la volonté des autorités d’encourager la libre circulation des personnes et de renforcer la souveraineté administrative dans le cadre confédéral de l’AES.

Quelques jours plus tôt, le ministère de la Sécurité et de la Protection civile avait annoncé, dans un communiqué daté du 26 septembre, une suspension temporaire du service d’enrôlement pour le passeport biométrique malien. Celle-ci prendra effet le 11 octobre pour le service standard et le 16 octobre pour le service premium, à Bamako, dans les régions et au Consulat général du Mali à Paris. La reprise est prévue au plus tard le 25 octobre 2025, le temps de finaliser une série d’améliorations techniques de la chaîne de production.

Le secrétaire général du ministère, Oumar Sogoba, a souligné que cette suspension est une étape nécessaire pour garantir un service plus fiable et mieux adapté aux exigences internationales. Selon les autorités, cette modernisation, associée à l’introduction du e-passeport AES, illustre la volonté de l’État de doter ses citoyens de documents plus sécurisés et de renforcer l’intégration régionale au sein de l’espace confédéral sahélien.

Bamako : Les divorces en hausse

Le divorce est devenu très fréquent à Bamako, particulièrement chez les jeunes couples, malgré les efforts de médiation de certaines structures d’accueil. Autrefois perçu comme rare et socialement mal accepté, il tend aujourd’hui à se banaliser pour des raisons multiples.

Longtemps le divorce a été mal vu dans la société malienne. Il était peu courant de rencontrer un couple séparé. Les données disponibles montrent désormais une hausse continue des ruptures dans le District de Bamako. Selon des statistiques officielles, plus de 8 130 divorces ont été enregistrés en 2022 dans les 6 communes, contre 6 950 mariages la même année. D’après certaines sources, les tribunaux de la capitale traiteraient plus de 150 dossiers de divorce par semaine. Ces évolutions concernent notamment les jeunes ménages.

Les causes invoquées sont diverses. Des observateurs citent en premier lieu les difficultés financières des foyers, mais aussi les problèmes de communication, les violences conjugales, les incompatibilités durables et les tensions avec la belle-famille. Le sociologue Hama Yalcoye souligne que la transformation des normes sociales a modifié les dynamiques conjugales : « depuis que les parents se sont déchargés du choix de la personne pour leurs enfants, la durée du mariage équivaut à la durée d’un feu d’artifice », estime-t-il. Les mésententes entre belle-fille et beaux-parents alimentent également de nombreux conflits.

Multiples médiations

Malgré la hausse des chiffres, beaucoup de couples tentent d’éviter la séparation en recourant à une médiation avant de saisir la justice. Les centres d’accueil, les services de police, certaines associations et même les parquets privilégient d’abord la conciliation. Deme So, qui offre une assistance juridique gratuite, dit accompagner environ 200 femmes par an et constate une augmentation annuelle de 15 à 20% des demandes liées au divorce. Les femmes sont majoritaires parmi les requérants, selon les structures d’appui. L’Association pour le progrès et le droit des femmes, qui suit des dizaines de cas chaque mois, rappelle que son rôle premier est la médiation. Sa Présidente, Bintou Coulibaly, souligne que l’organisation n’encourage pas d’emblée une action en justice et cherche d’abord à préserver le couple lorsque cela est possible.

Au plan juridique, le Code des personnes et de la famille (2011) encadre les procédures, notamment le consentement mutuel et le divorce pour faute. À Bamako, la hausse des saisines et le recours croissant aux dispositifs d’accompagnement témoignent d’une réalité familiale en évolution. Les acteurs de terrain mettent l’accent sur la prévention, l’information et l’orientation des couples vers des solutions de médiation avant toute décision de dissolution.

Joseph Amara Dembélé

Braquage sur l’axe Ansongo–Labbezanga : des passagers pris pour cibles

Dans la matinée du mardi, la route reliant Ansongo à Labbezanga a de nouveau été le théâtre d’une attaque armée. Des véhicules de transport ont été interceptés par des hommes armés qui ont dépouillé les passagers de tous leurs biens.

Le pont de Kamgala, non loin du village de Bentia dans le cercle d’Ouattagouna, a été le point d’embuscade. Plusieurs cars des compagnies Salim et Sonef Transport, ainsi qu’un minibus assurant la liaison entre le Niger et Gao, ont été arrêtés par un groupe d’hommes lourdement armés.
Les assaillants, organisés et déterminés, ont contraint chauffeurs et passagers à descendre avant de les délester de tout ce qu’ils possédaient. Argent, téléphones, bagages, rien n’a été épargné.
Aucun blessé grave n’a pour l’instant été signalé, mais la peur et le traumatisme restent vifs parmi les victimes. Selon plusieurs témoins, l’attaque a duré quelques minutes seulement, preuve du professionnalisme des assaillants.
Ce nouvel incident rappelle la fragilité de cet axe vital pour les échanges commerciaux et les déplacements entre le Mali et le Niger. Malgré la présence ponctuelle des forces de sécurité, les convois restent vulnérables à ces opérations de pillage.
Les populations locales appellent à un renforcement urgent des patrouilles et à une sécurisation permanente de cette route, considérée comme un poumon économique pour toute la région de Gao.

Tournoi UFOA-A : Le Mali écrase le Libéria 6-0 pour son entrée en lice

Les Aiglonnets ont parfaitement lancé leur aventure continentale. Devant leur public, ils ont surclassé le Libéria pour débuter la compétition sur les chapeaux de roues.

Le tournoi qualificatif de la zone UFOA-A U17 a démarré sur un véritable festival offensif du Mali. Opposée au Libéria le dimanche 5 octobre au Stade Mamadou-Konaté de Bamako, la sélection malienne a livré une prestation magistrale conclue par une victoire éclatante six buts à zéro. Dès les premiers instants, les jeunes Aiglonnets ont imposé une domination sans partage, confisquant le ballon et dictant le rythme du jeu face à un adversaire dépassé. L’efficacité offensive s’est illustrée par des enchaînements précis et une finition clinique, traduisant la qualité du travail réalisé en amont de la compétition.

Ce succès inaugural permet aux Maliens de prendre la tête du groupe A et d’envoyer un signal fort à leurs futurs adversaires, la Gambie et la Guinée-Bissau, également engagées dans cette poule. Organisée à Bamako du 3 au 18 octobre, cette phase zonale revêt une importance capitale puisqu’elle offre aux deux finalistes un ticket pour la prochaine Coupe d’Afrique des nations U17. Portée par le soutien de son public et une génération particulièrement talentueuse, la sélection malienne confirme ainsi ses ambitions de qualification tout en affirmant son statut de favorite à domicile.

France : Nouvelle déconvenue pour Macron après la démission de Lecornu

Emmanuel Macron fait face à une nouvelle crise politique. Moins d’un mois après sa nomination, Sébastien Lecornu a présenté sa démission ce lundi 6 octobre, plongeant l’exécutif dans une nouvelle phase d’incertitude.

À seulement vingt-sept jours de son arrivée à Matignon, Lecornu tire déjà sa révérence, incapable de surmonter les obstacles politiques qui bloquent l’action gouvernementale. Sa nomination, intervenue le 9 septembre pour succéder à François Bayrou, devait incarner un nouveau souffle après une succession de chefs de gouvernement depuis 2017 : Édouard Philippe, Jean Castex, Élisabeth Borne, Gabriel Attal, Michel Barnier puis Bayrou lui-même. Mais cette démission express vient s’ajouter à la longue liste des déconvenues d’Emmanuel Macron, désormais confronté à une instabilité chronique au sommet de l’État.

Lecornu a invoqué l’absence de conditions politiques favorables et l’impossibilité de construire une majorité stable dans un Parlement fragmenté. Sa volonté de gouverner sans recourir systématiquement à l’article 49.3, censée favoriser le dialogue, s’est heurtée à l’intransigeance de plusieurs groupes d’opposition. Le manque de renouvellement de son équipe gouvernementale, trop proche de la majorité présidentielle, a également suscité de vives critiques. Les Républicains ont menacé de retirer leur soutien, tandis que d’autres partenaires politiques ont dénoncé l’absence de vision claire.

Cette démission, survenue ce lundi 6 octobre, est un revers majeur pour Emmanuel Macron qui voit s’effriter, une fois de plus, l’autorité de son exécutif. Elle souligne l’incapacité de l’Élysée à maintenir la stabilité gouvernementale et pose la question de la stratégie à adopter pour sauver la fin du quinquennat. À l’heure où les réformes majeures sur les retraites, la transition énergétique ou la politique migratoire sont encore sur la table, le chef de l’État se retrouve contraint de repenser en urgence son dispositif politique, alors même que l’hypothèse d’un nouveau remaniement se profile déjà.

Konna : Ousmane Kampo libéré sain et sauf

Après plus de quatre mois de captivité, le maire de Konna, Ousmane Kampo, a été libéré le 4 octobre 2025. Enlevé en mai dernier dans la région de Mopti, il est désormais sain et sauf, au grand soulagement de sa famille et de la population.

L’élu communal, connu sous le nom de Naaba, avait été enlevé le 25 mai 2025 alors qu’il se trouvait dans ses champs de riz à Konna. Sa disparition avait profondément marqué cette commune située dans une zone stratégique du centre du Mali, régulièrement touchée par des attaques et des enlèvements. Son retour met fin à une longue période d’incertitude pour les habitants, qui avaient multiplié les prières et les démarches pour obtenir sa libération.

Les autorités locales ont confirmé la nouvelle le 4 octobre en soirée, sans toutefois fournir de précisions sur les conditions exactes de la libération. Aucune information officielle n’a été communiquée sur d’éventuelles négociations ou interventions particulières. Le maire a retrouvé sa famille et s’apprête à reprendre ses fonctions à la tête de la commune.

Cette libération intervient dans un contexte sécuritaire toujours fragile dans la région de Mopti, où les enlèvements demeurent fréquents. Plusieurs civils, élus et militaires restent encore entre les mains de groupes armés. Le 24 septembre dernier, une vidéo diffusée par le Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans montrait une soixantaine de soldats maliens et burkinabés retenus en otage, demandant à leurs gouvernements de tout faire pour leur libération.

Le retour d’Ousmane Kampo est perçu comme un soulagement dans un centre du Mali encore éprouvé par la violence. Il symbolise l’espoir de voir d’autres otages recouvrer bientôt la liberté et de restaurer progressivement la stabilité dans les communes rurales de la région.

 

Deux personnalités majeures disparaissent le même jour

Le jeudi 2 octobre 2025, deux figures de premier plan de la vie publique malienne sont décédées à quelques heures d’intervalle. Il s’agit de Me Hassane Barry, avocat de renom, ancien ministre et acteur influent de la communauté peule, et de Cheikh Abdoul Djalil Haïdara, guide spirituel, ancien député de Ségou et promoteur de la chaîne Ségou-TV.

Selon un communiqué du Barreau du Mali, Me Hassane Barry est décédé à son domicile à Bamako. Juriste reconnu, il a marqué plusieurs décennies par son expertise et son rôle actif dans la défense des droits. Il a occupé des fonctions ministérielles sous la présidence d’Alpha Oumar Konaré (1992-2002), avant d’être nommé ambassadeur du Mali en Angola, fonction qu’il a exercée du 12 mars 2012 au 2 septembre 2014. Son parcours ne s’est pas limité aux sphères gouvernementales : il a été un acteur clé de l’association Tabital Pulaku, dédiée à la promotion de la culture et de la solidarité peule. Son décès représente une perte importante pour le monde juridique et pour l’ensemble de la communauté nationale.
Le même jour, Cheikh Abdoul Djalil Haïdara a trouvé la mort lors d’une attaque armée sur l’axe Tigui–Konobougou, alors qu’il se rendait de Ségou vers Fana. L’incident s’est produit aux environs de 16 heures, lorsqu’il a tenté de dépasser un véhicule intercepté par des assaillants. Son véhicule a été la cible de tirs à bout portant, et il est décédé sur place. L’information a été confirmée par plusieurs sources locales ainsi que par un communiqué officiel du ministère des Affaires religieuses, publié le 3 octobre.
Cheikh Abdoul Djalil Haïdara était une personnalité influente dans les domaines religieux et politique. Fils du respecté Cheikh Mansour Haïdara, il avait consacré sa vie à la transmission des valeurs spirituelles et à la promotion de la paix et de la cohésion sociale. Il a également siégé à l’Assemblée nationale durant la 5e législature (2013-2018), après avoir été élu député sous les couleurs du RPM, avant d’être réélu en 2020 lors des élections législatives de la 6e législature. Son action ne se limitait pas à la politique et à la religion : il avait fondé Ségou-TV, une chaîne régionale destinée à valoriser les initiatives locales et à donner une tribune aux acteurs communautaires. Il s’était aussi distingué par des investissements significatifs dans des projets sociaux, humanitaires et religieux.
Les deux décès ont suscité une onde d’émotion dans tout le pays. Le Barreau du Mali a rendu hommage à Me Hassane Barry, saluant « une vie dédiée à la justice, à la défense des droits et au service de l’État ». Le ministère des Affaires religieuses a, pour sa part, salué « un homme dont l’existence fut consacrée à la foi, à la cohésion et à la paix sociale ». Plusieurs organisations politiques, associations communautaires et institutions religieuses ont présenté leurs condoléances aux familles endeuillées.
Ces disparitions marquent la fin du parcours de deux hommes dont les contributions ont profondément marqué l’histoire récente du Mali. Leur héritage politique, juridique, religieux et social continuera d’inspirer les générations à venir.

Nouvelles règles fiscales : l’État mise sur les mines et la consommation

Le Conseil des ministres tenu le 3 octobre 2025 sous la présidence du général d’Armée Assimi Goïta a adopté un projet de décret fixant de nouveaux taux dans le cadre de l’Impôt spécial sur certains produits. Cette décision s’inscrit dans la continuité des réformes engagées depuis 2023 pour moderniser le système fiscal, renforcer les recettes publiques et rendre l’environnement économique plus attractif pour les investisseurs.

 

Le dispositif de l’Impôt spécial sur certains produits, créé par un décret de septembre 2022 et élargi par une ordonnance en mars 2025, voit ainsi son champ d’application étendu et adapté aux évolutions de plusieurs secteurs clés. La révision adoptée concerne notamment les bouillons alimentaires, les produits miniers et le tabac, trois catégories dont l’importance stratégique se traduit à la fois par leur poids économique et leur potentiel de mobilisation de recettes. L’objectif affiché est double : augmenter les ressources budgétaires intérieures et créer un climat fiscal plus favorable à l’investissement dans des domaines considérés comme prioritaires.

 

Le secteur minier se trouve au cœur de cette réforme. Avec plus de 80 % des exportations nationales représentées par l’or et une contribution avoisinant 8 à 10 % du produit intérieur brut, il constitue l’un des piliers de l’économie. Les autorités ont annoncé une ambition claire : porter les recettes minières à environ 1,2 milliard de dollars d’ici mars 2025, notamment grâce à une meilleure taxation des produits extraits et exportés. Cette orientation s’accompagne d’efforts accrus pour recouvrer les arriérés fiscaux, qui ont déjà permis de récupérer près de 500 milliards de francs CFA auprès des compagnies opérant dans le pays.

 

Au-delà des mines, la réforme s’intéresse aussi aux produits de consommation courante. L’introduction de bouillons alimentaires, de cosmétiques et d’autres biens transformés dans le champ d’application de l’impôt vise à élargir l’assiette fiscale tout en garantissant une meilleure régulation du marché. Cette évolution devrait se traduire par une hausse des recettes liées à la consommation intérieure, un levier important dans un contexte où la demande nationale progresse rapidement sous l’effet de la croissance démographique.

 

La révision de la fiscalité minière et de l’Impôt spécial sur certains produits constitue également un signal adressé aux investisseurs. Les autorités souhaitent créer un environnement plus stable, lisible et attractif, tout en renforçant le contrôle sur les filières stratégiques. Dans un contexte marqué par des besoins budgétaires élevés pour financer les politiques publiques et les infrastructures, cette réforme apparaît comme un instrument central de la stratégie économique nationale.

 

L’adaptation du cadre fiscal reflète enfin une volonté plus large de diversification des sources de revenus de l’État et d’autonomisation financière. En misant à la fois sur l’exploitation de ses ressources naturelles et sur la fiscalité de la consommation, le pays cherche à consolider ses finances publiques et à soutenir une croissance plus soutenable, en phase avec ses priorités économiques et sociales.

 

 

Cheick Oumar Diallo : « Mali 3.0 est une rupture nécessaire et non un slogan »

Dans cette interview, Cheick Oumar Diallo, homme politique et auteur du livre Mali 3.0, expose les réformes qu’il propose pour transformer le Mali. Il insiste sur la nécessité d’une rupture avec l’ancien système et sur l’importance d’une responsabilité collective pour le pays. Propos recueillis par Massiré Diop.

Dans Mali 3.0, vous appelez à une rupture avec l’ancien système. Quelles réformes prioritaires proposez-vous ?

La rupture que je propose est une nécessité historique, non un slogan. Elle passe par trois réformes-clés : la gouvernance, pour mettre fin à l’impunité et assurer une gestion transparente des ressources publiques ; la réforme institutionnelle, pour rapprocher l’État des citoyens et soutenir les initiatives locales et la réforme économique, axée sur la souveraineté alimentaire et énergétique, pour réduire notre dépendance extérieure. Ces réformes nécessitent une volonté politique forte et l’implication citoyenne, car aucun changement durable ne peut se faire sans l’adhésion collective.

Vous insistez sur un sursaut citoyen. Comment susciter ce réveil, surtout chez les jeunes, souvent désillusionnés ?

Il faut parler vrai aux jeunes, qui savent que le Mali ne leur offre pas les opportunités qu’ils méritent. Le sursaut citoyen naîtra d’une confiance retrouvée, en les écoutant, en valorisant leurs initiatives et en leur donnant un rôle réel. Leur offrir des perspectives concrètes dans l’emploi, la formation, l’entrepreneuriat ou l’innovation les incitera à s’engager. C’est ce souffle nouveau que Mali 3.0 appelle de ses vœux.

L’éducation occupe une place centrale dans votre vision. Comment en faire un vrai levier de souveraineté et de développement aujourd’hui ?

L’éducation est le socle sans lequel toutes les réformes resteront vaines. Il ne s’agit pas seulement de construire des écoles, mais de repenser les contenus et les objectifs pour former des citoyens conscients de leur histoire, fiers de leur culture et capables d’innover. Investir dans la formation technique, scientifique et numérique est essentiel pour maîtriser nos ressources, créer nos entreprises et sortir de la dépendance. L’éducation doit devenir notre première arme de souveraineté.

Vous évoquez la responsabilité collective. Quel rôle doivent jouer les citoyens, les élites et la diaspora dans ce Mali 3.0 ?

Chacun doit contribuer à la reconstruction nationale. Les citoyens doivent s’engager, défendre l’intérêt commun et refuser la corruption. Les élites doivent donner l’exemple en plaçant le service à la Nation avant les intérêts personnels. La diaspora, force de compétences et de financements, doit être pleinement impliquée comme acteur du changement. Mali 3.0 est une œuvre collective que l’État ne peut mener sans la mobilisation de toutes ses forces vives.

Monétique : Un cadre d’échanges pour relever les défis

Bamako abritera le premier Salon monétique national du Mali (SAMONAM) du 9 au 10 octobre 2025. L’événement réunira les principaux acteurs du secteur autour des enjeux liés aux paiements électroniques dans l’espace UEMOA, dans un contexte d’expansion rapide des transactions numériques.

Ce premier salon réunira non seulement les banquiers, les fintechs, les entreprises et les régulateurs, mais aussi les étudiants et le grand public autour du thème : « La sécurisation des paiements électroniques : enjeux et défis dans l’UEMOA ». Il vise à vulgariser la monétique interbancaire, à favoriser un dialogue entre acteurs autour des nouvelles technologies et à encourager une adoption plus large des moyens de paiement électroniques. Leur utilisation s’inscrit dans une dynamique mondiale de transformation économique, avec pour objectifs la réduction de la circulation du cash, la rapidité des opérations et la sécurisation des transactions.

Dans l’espace UEMOA, le développement de la monétique est également considéré comme un levier d’inclusion financière. Toutefois, sa mise en œuvre reste confrontée à de nombreux défis, que les participants entendent examiner.

Évolution et enjeux

Le tableau de bord du GIM-UEMOA révèle que fin 2023 l’activité monétique concernait 122 établissements connectés à la plateforme interbancaire sur les 128 membres du réseau. Ces établissements ont émis 8 004 173 cartes bancaires en circulation, 79,2% adossées à un compte bancaire et 20,8% prépayées. Toujours selon la BCEAO, 96,7% de ces cartes respectent les normes internationales de sécurité PCI-DSS.

Les infrastructures ont également progressé, puisque le nombre de Guichets automatiques bancaires (GAB) a augmenté de 2,26% pour atteindre 4 214 unités, tandis que les Terminaux de paiement électronique (TPE) ont connu une hausse de 10,46%, passant de 13 814 à 15 259 appareils.

La valeur des transactions monétiques a atteint 16 886 milliards de francs CFA en 2023 contre 12 432 milliards en 2022. Au Mali, le nombre de cartes en circulation s’est élevé à 529 816, soit 6,62% de l’ensemble de l’UEMOA, avec 537 GAB et 611 TPE recensés. Sur la même période, la valeur totale des transactions monétiques a atteint 1 143 milliards de francs CFA.

Autre avancée majeure, le lancement de la Plateforme interopérable du Système de Paiement Instantané (PI-PSI), le 30 septembre. Elle permettra aux banques, institutions de microfinance et émetteurs de monnaie électronique d’effectuer des opérations instantanées et interopérables. Cependant, la faible connectivité, le manque d’éducation financière ou encore un cadre réglementaire parfois inadapté continuent de freiner l’accès à l’innovation technologique en la matière.

Coupe du Monde U20 2025 : L’Afrique mal embarquée

Le Mondial U20 2025, qui se déroule au Chili depuis le 27 septembre dernier, tourne mal pour les sélections africaines. Après deux défaites consécutives, l’Égypte est quasiment éliminée, tandis que le Nigeria et l’Afrique du Sud, battus d’entrée, jouent déjà leur avenir. Seul le Maroc tire son épingle du jeu.

Le début de la Coupe du monde U20 2025 ne sourit pas au continent africain. L’Égypte, doublement battue, est au bord du gouffre. Les Pharaons juniors ont d’abord chuté face au Japon (2-0) le 27 septembre, avant de s’incliner à nouveau contre la Nouvelle-Zélande (2-1) le 30 septembre. Avec 0 point en 2 sorties, leur troisième match, prévu le 3 octobre contre le Chili, pays hôte, ressemble déjà à une mission impossible. Même en cas de victoire, leurs chances de qualification restent très minces.

Le Nigeria, de son côté, a également mal entamé son tournoi. Opposés à la Norvège pour leur entrée en lice, les Flying Eagles juniors ont concédé un but sur penalty dès la 16ème minute, signé Rasmus Holten, et n’ont jamais réussi à revenir, s’inclinant 1-0. Cette entame complique sérieusement leurs ambitions dans un groupe dense.

L’Afrique du Sud n’a pas été plus chanceuse. Face à une solide équipe de France, les Amajita ont résisté mais ont fini par céder 2-1 lors de leur première sortie.

Deuxième journée sous haute tension

Seul le Maroc a offert un sourire au football africain en battant l’Espagne 2-0 lors de son premier match. Les Lionceaux de l’Atlas jouaient le 1er octobre leur deuxième rencontre face au Brésil, un choc qui faisait office de test grandeur nature. Une victoire pouvait confirmer leur statut de sérieux outsider.

Pendant ce temps, les autres représentants africains n’ont plus droit à l’erreur. L’Égypte joue sa survie contre le Chili et le Nigéria est contraint de relever la tête lors de sa prochaine sortie, le 2 octobre face à l’Arabie saoudite, qui s’est également inclinée face à la Colombie lors de sa première rencontre.

Quant à l’Afrique du Sud, elle doit impérativement réagir après sa défaite contre la France. Les champions d’Afrique en titre affrontaient le 2 octobre la Nouvelle-Calédonie, humiliée 9-1 par les États-Unis lors de la première journée. Sur le papier, l’occasion était belle pour décrocher une première victoire et se relancer dans la course à la qualification.

Mohamed Kenouvi