G5 Sahel: 414 millions d’euros de financement

Les chefs d’État et de gouvernement réunis ce vendredi à Bruxelles se sont engagés à l’issue de la conférence des donateurs à mobiliser 414 millions d’euros pour le G5 Sahel.

Trente-deux chefs d’État et de gouvernement ont participé ce vendredi à Bruxelles à la conférence des donateurs pour le G5 Sahel.

« Au total, avec les contributions des autres donateurs, 414 millions d’euros ont été mobilisés vendredi pour la force (du G5 Sahel). Cela va bien au-delà des attentes », a annoncé la représentante de la diplomatie européenne Federica Mogherini. L’enjeu financier est essentiel pour la montée en puissance de cette force de 5 000 hommes appelée à combattre le djihadisme et à apporter la stabilité dans le Sahel. Les difficultés « à boucler le budget » sont une source d’irritation pour les pays du Sahel qui pointent un manque de solidarité de la communauté internationale face à un enjeu sécuritaire qui dépasse selon eux le Sahel. Le président du Mali Ibrahim Boubacar Keita ne s’est d’ailleurs pas privé pour le rappeler lors d’une récente interview avec le journal ‘’Le Monde’’. « Nous souhaitons que les ressources promises soient débloquées le plus rapidement possible », appelle Mahamadou Issoufou, chef d’Etat du Niger et président en exercice du G5 Sahel.  « L’effort financier doit être rendu pérenne, 480 millions d’euros sont nécessaires pour la première année, mais 75 millions d’euros devront ensuite être mobilisés chaque année, en sachant que nous ne savons pas combien de temps va durer ce combat » ajoute-t-il.

À ce stade, outre les 100 millions d’euros de l’Union européenne, les États membres du G5 (Niger, Mali, Burkina Faso, Mauritanie, Tchad) se sont engagés chacun à hauteur de 10 millions, la France à neuf millions, l’Arabie saoudite et les Émirats Arabe-Unis respectivement à 100 et 30 millions d’euros et les Pays-Bas cinq millions. Les États-Unis ont eux promis 60 millions de dollars d’aide bilatérale. « Mais à ce jour, seulement 50 millions d’euros, ceux engagés par l’UE en juillet, ont été débloqués » déplore Federica Moghereni.

« Au Sahel, le combat que nous menons contre le terrorisme, nous le menons non seulement pour le Sahel mais aussi pour le monde, par conséquent l’Union européenne et la communauté internationale doivent être solidaires avec le Sahel », a souligné le président du Niger, Mahamadou Issoufou.

Ibrahim Maïga : « La Force conjointe G5 Sahel est un outil parmi d’autres au service d’un projet politique… »

 

Alors que la force conjointe du G5 Sahel vient d’entamer sa deuxième opération, « Tonnerre », des groupes djihadistes, au Nord et au Centre du Mali, envisagent de se mutualiser pour la combattre. Ibrahim Maiga, chercheur à l’Institut d’études de sécurité, répond aux questions de Journal du Mali sur la capacité de nuisance de ces groupes et propose des pistes pour « assécher » la menace.

Ces derniers mois, des sources sécuritaires occidentales et sous-régionales évoquent la présence dans le Nord du Mali de djihadistes venus de  Libye et de Syrie. Ces informations sont-elles à prendre au sérieux ?

Il est important d’indiquer que ces informations été relayées dès 2015 par les habitants de certaines localités du Nord du Mali. La faiblesse structurelle de la plupart des États sahéliens fait de cette région une destination attractive pour des groupes armés en perte de vitesse au Moyen-Orient. De plus, la situation spécifique du Mali commande une extrême vigilance. Il faut se rappeler que les premiers « djihadistes » provenaient de pays voisins et que la crise de 2012 tirait en partie sa source du reflux de combattants du théâtre libyen, sans minimiser les causes internes qui ont facilité le délitement de l’État.

La sortie récente du Président IBK sur le sujet montre que cette information est prise au sérieux au plus haut niveau politique. Mais les chefs d’État devraient en premier lieu s’inquiéter de la tendance au recrutement au sein des populations locales et trouver les moyens d’assécher ces groupes.

Deux groupes actifs dans le Nord et le Centre du pays, aux idéologies différentes, envisagent de mener ensemble des attaques contre la force conjointe du G5 Sahel et les « mécréants ». Qu’est-ce qui motive cette stratégie ?

La création du Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (GSIM, fusion d’Ansar Dine, d’Al Qaida au Maghreb islamique, de la Katiba Macina et d’ Al Mourabitoune), en mars  2017 – deux mois après la décision actant la mise sur pied de la Force conjointe du G5 Sahel – avait déjà démontré la capacité des groupes « djihadistes » à se regrouper pour faire face à un ennemi commun. Une alliance entre le GSIM et l’État islamique dans le grand Sahara (EIGS) semble avant tout répondre à des objectifs tactiques.

Constituerait-elle une menace d’envergure ?

En dépit de leurs divergences, ces groupes évoluent peu ou prou dans le même espace. Avec le déploiement progressif de la force conjointe du G5 Sahel, une alliance circonstancielle peut apparaître comme une option intéressante. Sans avoir une idée précise des effectifs de ces groupes, il est possible d’affirmer qu’ils sont largement en dessous de ceux des armées de la région. Un accroissement des capacités, une mutualisation des moyens et un partage d’expériences sont les risques les plus immédiats. Sur le terrain, il est intéressant de noter que les dynamiques locales permettent souvent une forme de collaboration entre membres de différents groupes armés « djihadistes » sans que cela ne soit formalisé.

La force sous-régionale a-t-elle les moyens de combattre un ennemi qui se dilue dans une zone aussi vaste ?

L’opérationnalisation de la FC – G5S est confrontée à d’importants défis, dont la question du financement et la qualité des ressources humaines. Car, malgré l’activisme diplomatique des États sahéliens, les promesses s’élèvent à 278 millions d’euros (192 milliards de francs CFA), sur le montant de 423 millions d’euros (278 milliards de francs CFA) nécessaire à la première année de fonctionnement. Cette incertitude, combinée à l’absence d’un mécanisme de financement pérenne, ne permet pas d’envisager des opérations d’envergure pour instaurer la confiance entre les forces de défense et les populations. Parlant des ressources humaines, de nombreux rapports et études soulignent l’impact de certaines méthodes « brutales » sur le recrutement de combattants par les groupes « djihadistes ». Les réformes des secteurs de la sécurité dans plusieurs pays et les initiatives de formation de certains acteurs internationaux doivent être poursuivies. L’avenir de cette force sera tributaire de la capacité des États sahéliens, avec leurs partenaires régionaux et internationaux, à trouver des réponses à ces défis dans la durée.

La force conjointe du G5 Sahel pourra-t-elle venir à bout du terrorisme dans cet espace et y a-t-il un risque d’enlisement ?

Répondre par l’affirmative reviendrait à prétendre qu’une opération militaire, à elle seule, pourrait résoudre cette problématique. Toutes les études, y compris celle menée par l’Institut d’études de sécurité au Mali en 2016, démontrent que le terrorisme prospère dans un environnement caractérisé par l’absence de justice, les inégalités sociales et l’absence d’un État utilitaire. La FC-G5S devrait donc surtout être vue pour ce qu’elle est : un outil parmi d’autres au service d’un projet politique d’intégration de populations longtemps marginalisées.

La force française Barkhane, bien équipée, ne s’est-elle pas finalement essoufflée, cinq ans après le début de son intervention au Mali ?

Barkhane, qui couvre cinq pays du Sahel et compte environ 4 000 hommes, coûte 1 million d’euros (656 millions de francs CFA) à la France par jour, pour des résultats mitigés et des pertes en vies humaines. Sa présence est de plus en plus remise en cause par les populations sahéliennes, en particulier au Mali. Par conséquent, même si la France se défend de promouvoir la FC-G5S pour se désengager, elle pourrait revoir son dispositif en réduisant considérablement son empreinte sur le terrain.

 

G5 Sahel : réunion pour accélérer son opérationnalisation

Dirigeants européens et africains se sont retrouvés mercredi en France pour accélérer la mise en œuvre de la force régionale du G5 Sahel face aux djihadistes qui gagnent du terrain.

Le président français Emmanuel Macron, qui ne cessait ces derniers temps de pointer du doigt la lenteur dans la mise en place du G5 Sahel, a invité les cinq pays qui composent la force et des partenaires afin « d’avancer plus vite sur le financement  et de structurer le volet militaire », selon les mots de la ministre française des armées, Florence Parly. « La guerre contre le terrorisme n’est pas encore gagnée, c’est pourquoi nous lançons cette coalition, assurer la victoire militaire au Sahel, c’est aussi se prévenir d’attentats sur notre sol » a affirmé le président français Emmanuel Macron, après la rencontre avec ses homologues. Il s’est fixé comme objectif d’accentuer la mobilisation autour de la force afin qu’elle puisse enregistrer des victoires militaires dès le premier semestre 2018. L’Arabie Saoudite qui avait annoncé fin novembre apporter 100 millions de dollars au G5 Sahel, a réitéré cette promesse. Egalement présent au sommet, les Emirats Arabe Unis se sont eux engagés à apporter 30 millions de dollars à la force. « Nos amis des pays du Golfe nous apportent un soutien conséquent, nous sommes  conscient au G5 Sahel que le temps nous ait compté, nous savons qu’avec ce qui s’est passé au Moyen-Orient, la fin de la guerre en Syrie, il y aura un reflue vers le Sahel, et nous ne voulons pas que ce qui n’a pu se faire là-bas, puisse se produire chez nous » s’est exprimé le chef de l’Etat malien et président en exercice du G5 Sahel, Ibrahim Boubacar Keita.

Le président Macron, a annoncé qu’une nouvelle réunion de soutien financier à la force est prévue le 23 février 2018 à Bruxelles, et cette fois-ci elle sera ouverte à tous pays qui souhaitent participer.

G5 Sahel : Le signal du départ ?

 

51 millions d’euros. C’est à cette hauteur que Washington a enfin décidé de contribuer à l’opérationnalisation de la Force conjointe du G5 Sahel. Ce don est le fruit de tractations et de négociations âpres entre Washington et les alliés du G5 Sahel, notamment l’UE et particulièrement la France, pour laquelle l’organisation est plus que bienvenue dans une zone sahélienne où elle semble être seul acteur.

Depuis la création de cette opération régionale, lors du sommet des chefs d’État de février 2017, le G5 Sahel peine à obtenir le financement de 250 millions d’euros dont il a besoin pour être opérationnel selon les estimations de la France, contre 423 millions avancés par les Sahéliens. Son volet militaire vise à confier aux armées nationales le travail qu’effectuent les contingents étrangers dans la zone.

Même si l’initiative a été saluée par la communauté internationale, Washington, dès juin 2017, avait refusé d’accorder au G5 Sahel un statut onusien. Pourtant, les États-Unis qui se trouvent aujourd’hui face à leurs responsabilités après la mort récente de quatre de leurs soldats sur le sol nigérien, ont proposé le lundi 30 Octobre une coopération bilatérale avec l’opération régionale. Washington témoigne encore une fois de sa confiance limitée en l’ONU, en optant pour cette forme de relations. L’annonce a été faite par Ty Tillerson, qui a cependant assuré que ce financement avait pour but de « renforcer nos partenaires régionaux dans leur combat pour assurer la sécurité et la stabilité face au groupe djihadiste État islamique et aux autres réseaux terroristes. C’est un combat que nous devons gagner, et cet argent va jouer un rôle-clé pour y parvenir ».

Pour les diplomates des cinq États sahéliens, avant cette somme encore hypothétique, c’est le soutien moral unanime, tant recherché, qui vient afin d’aboutir, quand bien même le ministre malien des Affaires étrangères plaide pour un soutien de l’ONU, la seule option qui permettrait selon lui de « garantir la prévisibilité et la pérennité des ressources, ainsi que le soutien opérationnel à la force conjointe ».

Le soutien financier des États-Unis, qui s’ajoute au 108 millions d’euros déjà promis par l’Union Européenne et la France, est de bon augure avant la réunion des donateurs qui aura lieu mi-décembre à Bruxelles. Quant au déploiement de la force conjointe, qui avait été initialement annoncé pour fin octobre, « il aura lieu mi-novembre », assure Cheick Oumar Coulibaly, un diplomate malien.

 

IBK à l’ONU : « La détérioration de la situation sécuritaire au Mali a eu un impact négatif sur la mise en œuvre de l’Accord».

 

Avancée de l’accord de paix, situation sécuritaire au Mali et dans le Sahel, force du G5 Sahel, migration, le président de la République du Mali, Ibrahim Boubacar Keita, a évoqué de nombreux sujets à la tribune de l’ONU, lors de la 72ème assemblée générale des Nations-Unies. Voici ce qu’il faut en retenir.

Durant les premières lignes de son discours, il a tenu a rappelé que depuis sa prise de fonction en 2013, il n’a cessé d’œuvrer en faveur de la paix au Mali. « Je n’ai cessé de m’investir pour porter rapidement la paix et la sécurité à mon peuple à un niveau acceptable, pour créer les conditions véritables d’une vie décente au bénéfice de toutes les populations maliennes et pour améliorer notre environnement de vie ».  Le président IBK a également exprimé sa satisfaction sur l’état d’avancement du processus de paix qu’il juge « satisfaisant ». « A la date d’aujourd’hui, les autorités intérimaires et les collèges transitoires, deux éléments clés de l’Accord, sont opérationnels dans les cinq régions du nord du Mali… je me réjouis particulièrement de la dynamique actuelle qui vise le retour définitif de l’administration à Kidal » soutient-il.

N’occultant pas les difficultés qui ralentissent la mise en œuvre de l’accord de paix, IBK a exprimé sa gratitude envers les Nations-Unies pour les résolutions portant sur le renouvellement du mandat de la MINUSMA et sur un régime de sanctions contre « ceux qui entravent la mise en œuvre de l’accord ».

Il a profité de la tribune qui lui était accordée, pour juger de l’état de la situation sécuritaire au Mali et dans le Sahel jugé « préoccupante » et profité par la même de plaider pour un financement plus conséquent en faveur de la force du G5 Sahel. « Je voudrais appeler votre attention sur quelques défis qui jalonnent l’opérationnalisation et le maintien de la force. Au nombre de ces défis, figure en bonne place, la mobilisation du financement intégral de la force. C’est donc l’occasion pour moi d’inviter tous les pays amis et les organisations internationales partenaires à la conférence internationale de planification des contributions à la Force, prévue en décembre 2017 à Bruxelles ». Il a annoncé que les premières opérations de la force débuteront en octobre 2017.

Concernant le brûlant sujet de la migration, le président dit « pleinement appuyer le processus qui vise l’adoption en 2018, d’un pacte mondial pour des migrations sûres, régulières et ordonnées ». Il a toutefois tenu à saluer « la contribution substantielle de la diaspora malienne au développement économique, scientifique, culturel et social du Mali ». « Cette diaspora constitue à la fois notre fierté et notre richesse » appuie-t-il.

En premier publicitaire pour le Mali, IBK, a présenté avec fierté l’assainissement du cadre macro-économique du pays avant de lancer une invitation à « tous » pour venir faire le pari du Mali les 7 et 8 décembre prochain, à Bamako.

 

 

Contre le terrorisme, sortir du « tout sécuritaire »

En un peu plus d’une décennie, le Mali comme le Sahel, est devenu l’un des points les plus chauds des conflits armés en Afrique et fait l’expérience, de façon inédite, du terrorisme, qui gagne du terrain. Les pays du G5 Sahel tentent de répondre à ces menaces en mettant sur pied une force commune pour combattre les groupes djihadistes, qui utilisent notamment le Nord Mali comme base de repli. Alors que cette force est en passe de devenir opérationnelle, des voix s’élèvent contre cette énième réponse sécuritaire et plaident pour une analyse plus profonde des causes des conflits qui ne soit pas uniquement axée sur le tout sécuritaire.

Le Mali, dont une partie importante du territoire échappe au contrôle de l’État, est une zone durement touchée par la crise sécuritaire sahélienne, où les conflits armés à grande échelle sont récurrents et la violence très répandue. Le principal facteur responsable de cette situation préoccupante serait, selon certains observateurs, si on devait le résumer en un seul mot, « l’injustice », rendue permanente ou persistante par son corollaire politique : État en déficit, mal gouvernance, corruption, crises alimentaires successives, frustrations accumulées. « Il y a une grande masse de la population qui est là, dans une situation désastreuse. D’année en année, les choses s’aggravent. Donc, à mesure que l’injustice grandit, il y a des réactions violentes et différentes forces qui essaient de tirer profit de cela », explique Moussa Tchangari, Secrétaire général d’Alternative Espaces Citoyens, à Niamey et membre de la Fondation Frantz Fanon. Les djihadistes profitent de ce « terreau favorable » créé par ces injustices pour islamiser le conflit, utiliser les frustrations pour recruter indéfiniment et attirer l’Occident dans le piège de l’intervention. « Les terroristes sont aussi des gens révoltés, qui pensent avec leurs actions pouvoir apporter un changement qui aille dans le sens de leur propre agenda politique», poursuit le chercheur.

Erreurs et stratégies Cette situation, qui échappe au contrôle de l’État, est gérée par les forces étrangères de la communauté internationale, installées dans le pays, qui doivent aider à trouver une solution. « Dans cette crise, la communauté internationale a au moins 40 ans de retard », lance le Dr Bakary Sambé, enseignant-chercheur, coordonnateur de l’Observatoire des radicalismes et conflits religieux en Afrique et directeur du think tank Timbuktu. « Dans les années 70, elle n’avait pas les moyens de fournir de l’aide à l’Afrique, frappée par la sécheresse, à cause du choc pétrolier qui touchait l’Europe et les États-Unis. Les pays vendeurs de pétrole ont utilisé la prédication et l’humanitaire pour s’implanter au Sahel. Puis, dans les années 80, la communauté internationale a commis une deuxième erreur, d’appréciation. Elle a imposé aux pays des politiques d’ajustements structurels, qui voulaient dire en quelque sorte : investissez le moins possible dans l’éducation, la santé, etc. et les puissances dites islamistes sont venues carrément occuper le terrain, via des centres culturels, des écoles, des services sociaux de base, pendant que l’État tentait de faire face au défi du déficit d’État. 40 ans après, la communauté internationale élabore des stratégies Sahel pour combattre les terrorismes, alors qu’ils sont là depuis 40 ans. La situation conflictuelle est en partie due à ces deux erreurs », affirme l’enseignant-chercheur.

Armes contre idéologie Toujours est-il que pour faire face à la situation sécuritaire au Mali et dans le Sahel, les pays du G5 (Mauritanie, Tchad, Mali, Niger et Burkina Faso), soutenus par la France, se sont « unis face au terrorisme » et tentent de mettre sur pied une force régionale conjointe, qui comptera 5 000 militaires des cinq pays. Son centre de commandement a été inauguré le samedi 9 septembre, à Sévaré, par le chef de l’État malien, mais son financement, 450 millions d’euros annuels, peine toujours à être bouclé. Le premier bataillon de cette force dite du G5 devrait être opérationnel dès le mois de septembre et les premières opérations militaires transfrontalières menées dès le mois d’octobre. Pour autant, l’efficacité de cette énième force censée combattre le terrorisme au Sahel est loin de convaincre. « La façon dont on pose le problème n’est pas la bonne. On pense qu’on le résoudra avec une force militaire qui aura des moyens. Nos pays font fausse route. Il y a beaucoup de choses à destination de la population qui ne coûtent pas autant d’argent et qu’il faut faire. Il faut commencer par tout ce qui dépend de nous, ce pour quoi on a déjà les moyens, qui ne coûte pas d’argent mais demande de la volonté. Pourquoi ne commence-t-on pas d’abord par ça, au lieu de s’épuiser à obtenir le soutien de la communauté internationale quand on n’a pas celui de son peuple ? Ça montre vraiment le décalage », observe Moussa Tchangari. Pour le Dr Bakary Sambé, il faut privilégier les approches multiples et non seulement se concentrer sur le recours à la force pour résoudre un problème aux racines profondes. « Si la solution militaire était une solution pour combattre le terrorisme, il n’y aurait plus de Talibans en Afghanistan, alors que Trump veut y retourner. Il n’y aurait plus de djihadistes au Nord du Mali. Vous savez, je n’ai jamais vu une idéologie défaite par les kalachnikovs », conclut, sceptique, l’enseignant-chercheur.

 

FCG5Sahel: Nouvelle étape pour la concrétisation

On attendait depuis le sommet de juillet dernier un acte fort marquant la mise en oeuvre de la Force Conjointe du G5 Sahel. Ce dernier est arrivé le samedi dernier à Sévaré avec l’inauguration par le président en exercice du G5 Sahel du Poste de commandement.

La ville de Sévaré, située a quelques kilomètres de Mopti, au centre du Mali, est également stratégique dans le dispositif de défense du territoire du Mali par les forces armées maliennes et leurs alliés. Elle abrite donc depuis le samedi 9 septembre 2017, un autre symbole de la coopération entre les forces, sous-régionales cette fois-ci, pour assurer la sécurité, lutter contre le terrorisme, les trafics et la criminalité transfrontalière. Voulue par les cinq pays de la sous-région : Mauritanie, Mali, Burkina Faso, Niger et Tchad, la Force conjointe devrait être à terme composée de 5 000 hommes et fonctionner avec des ressources issues des pays concernés et leurs partenaires. Pour abriter le commandement de la Force, dirigée par le Malien Didier Dako, des locaux ont été mis à disposition, premier pas vers une opérationnalisation qui avance. Le président malien Ibrahim Boubacar Keïta a montré son optimisme face à cette étape et a assuré l’engagement ferme de ses pairs de rendre actives très rapidement les unités de cette « Force » pour assurer la sécurité et la stabilité de leurs pays.

Le QG du G5 sera en contact permanent avec des armées des cinq pays membres. Mali, Mauritanie, Niger, Burkina Faso et Tchad vont mobiliser ensemble quelque 5 000 militaires au total pour lutter contre les terroristes dans l’espace qu’ils partagent au Sahel. A en croire le Commandant de la Force, le déploiement d’un premier contingent devrait se faire d’ici la fin de l’année et le gros des troupes seront sur zones en 2018.

A noter que, outre Sévaré, la force devrait comprendre trois PC : l’un pour l’ouest de la zone à N’Beiketial, près de Nema, en Mauritanie, le deuxième pour le centre, à Niamey au Niger, et le troisième pour l’est à Wour, dans le Tibesti tchadien.

La Belgique réaffirme son engagement au Mali

Le vice premier ministre et ministre des Affaires Etrangères Belge a séjourné au Mali du 28 au 29 août 2017. L’occasion de renforcer la coopération bilatérale entre les 2 pays et aussi de solliciter le soutien du Mali à la Belgique pour l’obtention d’un siège non-permanent au Conseil de Sécurité.

Cette visite de 2 jours qui est la deuxième visite officielle du ministre belge Mr Didier Reynders, a été marquée par les rencontres avec les plus hautes autorités du pays, en l’occurrence le président de la République Ibrahim Boubacar Keïta, mais aussi des visites sur le terrain à Koulikoro où le ministre a rendu visite aux militaires européens et maliens du camp militaire de cette région. Sur le plan sécuritaire, environ 200 soldats belges sont présents sur le sol malien et ce sont des Généraux de l’armée belge qui commandent les troupes de la MINUSMA et de l’EUTM (la mission européenne de formation de l’armée malienne).

Le ministre malien des affaires étrangères Mr Abdoulaye Diop, souhaite en tout cas la poursuite de cet « accompagnement de la Belgique, aussi sollicité dans le cadre du soutien européen pour l’opérationnalisation de la force du G5 Sahel », selon le ministre. Et la tenue à Bruxelles à la mi-décembre de la conférence des donateurs, préconisée par la résolution 23-59 du conseil de sécurité est, à cet effet, une bonne occasion.

Le ministre belge a, quant à lui, annoncé la signature de plusieurs accords bilatéraux dans le domaine du transport aérien et de la défense. « Nous allons appuyer toutes les initiatives car nous sommes convaincus qu’il faut rétablir l’autorité de l’État sur l’ensemble du territoire en sachant que les zones frontalières sont particulièrement délicates avec leur lot de trafics », a indiqué Mr Reynders.

Outre la lutte contre le djihadisme au Sahel, la crise migratoire est également l’un des sujets d’intérêt commun entre la Belgique et le Mali, pays de migration.

Sur la candidature belge au Conseil de Sécurité, le ministre malien des Affaires étrangères Mr Abdoulaye DIOP, a réaffirmé que le soutien du Mali ne fera pas défaut.

Le ministre belge a annoncé, au cours de sa visite, que l’actuel bureau diplomatique de la Belgique serait prochainement élevé au rang d’ambassade. Après l’étape malienne, le ministre Belge a poursuivi sa visite au Tchad où il s’est rendu les 29 et 30 août 2017.

Polémique autour de la visite du président IBK à Ouagadougou

Le Président de la République IBK s’était rendu le mardi 15 août 2017 au Burkina Faso pour témoigner de sa solidarité après l’attentat du dimanche à Ouagadougou qui a fait 18 victimes. Ce déplacement apparait normal, mais il a fait polémique par le fait qu’à Douentza et à Tombouctou, le lendemain, le terrorisme à fait aussi des victimes, sans qu’IBK ne se déplace sur le terrain.

L’attentat du dimanche dernier qui a fait 18 morts au Café restaurant Aziz Istanbul de Ouagadougou a motivé le déplacement du président IBK dans la capitale burkinabé. Le geste était fort et symbolique. Il s’agissait de témoigner de son soutien à son homologue Roch Marc Christian Kaboré et au peuple burkinabé en des moments aussi tragiques. Sur place, IBK a déclaré que « le G5 sahel est uni dans ces circonstances » face au terrorisme. Il a en outre visité avec son homologue, les décombres du restaurant Aziz Istanbul. Pour Ibrahim Boubacar Keita, « le doux temps de l’insouciance est terminé » et que «  nous sommes obligés d’accepter aujourd’hui, qu’à tout moment nous pouvons être agressés » a t-il souligné. Quoi de plus normal qu’un président aille s’incliner devant la mémoire des victimes d’un fléau devenu mondial et en plus s’il s’agit du Burkina, pays frontalier et membre du G5 Sahel. Seulement, la même barbarie qui a arraché la vie à des innocents n’a pas épargné le Mali.

Tombouctou et Douentza Au lendemain de l’attaque d’Ouagadougou, lundi 14 août, le camp de la Minusma à Douentza au centre du Mali, a subi une attaque terroriste qui a coûté la vie à (1) un soldat des casques bleus et à (1) un autre de l’armée malienne. Quelques heures plutard, c’est le camp de la mission internationale des Nations unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA) à Tombouctou qui a été pris pour cible. Là aussi des victimes à l’issu des combats ont été déplorées. Neuf personnes, toutes maliennes, ont trouvé la mort dans cette attaque contre la mission onusienne. En dénombrant tout les morts dans les deux attaques y compris les assaillants, les pertes seraient de 19 morts. Sur les réseaux sociaux, certains internautes reprochent au président son «  manque de considération » aux morts du Mali. En se rendant dans ce pays voisin, IBK s’est attiré, comme le plus souvent ces derniers temps, le mépris de ceux qui pensent qu’ils auraient pu rendre hommage à « ceux qui sont morts en défendant la patrie ». Le premier ministre Idrissa Abdoulaye Maiga et le Représentant spécial du secrétaire général de Nations unies, Mahamet Saleh Annadif, ont effectué le déplacement le 15 août dans la ville de 333 saints pour constater les dégâts et témoigner leur solidarité et soutien aux blessés et aux forces en présence. Une fausse note pour le président IBK dont la côte de popularité a considérablement baissé depuis 2013.

« Le terrorisme au Sahel, conséquence de la prévarication érigée en mode de gouvernance »

Le chroniqueur de Lemonde.fr, Laurent Bigot, souligne la prédation des élites ouest-africaines et l’aveuglement – voire l’approbation – de la communauté internationale.

 Lorsque les médias parlent du Sahel, c’est pour évoquer la menace terroriste sous toutes ses formes – une menace bien réelle, comme l’ont récemment montré l’attentat à Ouagadougou, le 13 août, ou les attaques contre les Nations unies au Mali, le lendemain. C’est également le cas pour les autorités françaises, qui communiquent abondamment sur le sujet afin de vanter et de justifier le déploiement de l’opération militaire « Barkhane » dans la bande sahélo-saharienne (BSS en langage militaire). Or le sujet central du Sahel n’est pas celui-là.

Le terrorisme, ou plutôt la montée en puissance des groupes armés dans le Sahel, est la conséquence d’une grave crise de gouvernance qui touche toute l’Afrique de l’Ouest. Cette crise de gouvernance se caractérise par une disparition de l’Etat au service des populations, car l’Etat moderne est privatisé par les élites politiques à leur profit. Cette privatisation – Jean-François Bayart parle de patrimonialisation – s’est accélérée ces dernières années pour atteindre un niveau tel que, désormais dans les pays sahéliens, les populations sont livrées à elles-mêmes, plus aucune entité (Etat ou autre) n’étant chargée d’une forme d’intérêt général.

C’est particulièrement le cas au Mali, au Niger et en Mauritanie. Ces Etats ont tous en commun un système politique miné, accaparé par une élite prédatrice dont les méthodes ont non seulement porté l’estocade à ce qu’il restait de l’Etat et de son administration, mais en plus ont fait entrer au cœur même du pouvoir le crime organisé. La conquête du pouvoir et sa conservation ne sont perçues que comme un accès à une manne intarissable.

Les dégâts des ajustements structurels

Les Etats sahéliens ont été fragilisés, dans les années 1980, par les ajustements structurels imposés par le Fonds monétaire international (FMI) et la Banque mondiale au nom du libéralisme doctrinaire ambiant. Il fallait « dégraisser » la fonction publique, dont les secteurs les plus « gras » étaient l’éducation et la santé. Quelle politique « visionnaire » pour une zone qui allait subir quinze ans plus tard un choc démographique sans précédent dans l’histoire de l’humanité !

Le Niger est aujourd’hui le pays qui a le taux de fécondité le plus élevé au monde, soit plus de sept enfants par femme. Le Mali n’est pas loin derrière, avec un peu moins de sept. Ce n’est plus une bombe à retardement, c’est une bombe qui a déjà explosé et dont les dégâts sont en cours d’estimation. Serge Michailof rappelle dans son remarquable livre Africanistan que le secteur manufacturier au Niger crée 5 000 emplois par an quand le marché de l’emploi doit absorber chaque année 200 000 jeunes…

Le secteur de l’éducation est sinistré. Les classes du primaire dans les quartiers populaires de Niamey ont des effectifs habituels proches de la centaine d’élèves, avec des enseignants si peu formés qu’une part importante ne maîtrise pas la langue d’enseignement qu’est le français. Au Sénégal, pourtant un pays qui se maintient mieux que les autres, le système éducatif est dans un tel état que le français, langue d’enseignement, recule au profit du wolof. Si la promotion des langues dites nationales est incontestablement un enjeu, aujourd’hui leur progression est d’abord le signe de la faillite du système d’enseignement.

Que dire des systèmes de santé ? Le niveau des soins est accablant. L’hôpital de Niamey est un mouroir. L’accès aux soins est un parcours du combattant semé d’étapes successives de corruption. Les cliniques privées fleurissent dans les capitales ouest-africaines pour une clientèle privilégiée, mais le peuple doit se contenter de soins qui relèvent plus des soins palliatifs que curatifs. Il faut dire que les élites politiques n’en ont cure, elles se font soigner à l’étranger et scolarisent leurs enfants dans les lycées français (hors de prix pour le citoyen lambda, une année de scolarité pouvant représenter plusieurs années de salaire minimum) ou à l’étranger.

Des élections grossièrement truquées

Précisons à leur décharge qu’étant donné les dégâts causés par les ajustements structurels et la démographie actuelle, aucun Etat ouest-africain ne peut désormais relever sur ses seules ressources propres les défis de l’éducation et de la santé. Le rapport sénatorial sur la politique française d’aide au développement au Sahel (« Sahel : repenser notre aide au développement », juin 2016) rappelle un chiffre vertigineux : de 2005 à 2035, le Mali devra multiplier par 11 ses dépenses en la matière. La solidarité internationale pourrait en effet contribuer à financer ce type de dépenses, mais on butte sur le problème structurel qu’est la patrimonialisation ou la privatisation de l’Etat.

Aujourd’hui, les budgets de l’Etat sont exécutés en dépit du bon sens avec l’aval du FMI et de la Banque mondiale, qui froncent parfois les sourcils quand les ficelles de la prévarication deviennent trop grosses (on pense à la fâcherie de six mois des institutions de Bretton Woods, en 2014, après les surfacturations massives des marchés de défense au Mali, l’aide ayant repris sans qu’aucune procédure judiciaire n’ait été ouverte ni les méthodes changées…). Quand on sait que plus de 50 % du budget d’investissement de ces Etats proviennent de l’aide publique internationale, on peut légitimement s’interroger sur la désinvolture avec laquelle la communauté internationale gère l’argent du contribuable.

Cependant, l’irresponsabilité du système international de développement (Nations unies et coopérations bilatérales) est tel que cet argent est déversé sans aucun souci de rendre des comptes. Le critère de performance utilisé par l’Union européenne en la matière est le taux de décaissement. L’objectif est de dépenser les budgets. Savoir si cela est efficace et conforme à l’objectif fixé importe peu. Pour les autorités bénéficiaires, cette absence de responsabilité a développé un réflexe d’assistanat, le premier geste étant de tendre la main avant d’envisager quelque action que ce soit. Ensuite, c’est de se répartir la manne de l’aide, et ce d’autant plus facilement que les contrôles sur la destination finale et l’efficacité sont des plus légers.

Les élites politiques ont depuis une vingtaine d’années fait de la prévarication le mode de gouvernance le plus répandu. La démocratisation qui a suivi la vague des conférences nationales au début des années 1990 n’a rien empêché. Nombre d’élections qui se sont tenues depuis n’ont guère été sincères, parfois grossièrement truquées (deux cas d’école parmi tant d’autres : l’élection d’Alpha Condé en 2010 en Guinée, élu au second tour alors qu’il n’a fait que 17 % au premier tour et son adversaire 40 %, et celle de Faure Gnassingbé en 2015 au Togo, durant laquelle le dépouillement était environ à 40 % quand les résultats ont été proclamés…).

Tout cela avec l’approbation de la communauté internationale et les chaleureuses félicitations des différents chefs d’Etat français. La lettre de François Hollande adressée au président nigérien Issoufou en 2016 est un modèle du genre. Féliciter un président élu au second tour avec plus de 92 % des voix alors que son opposant principal a fait campagne depuis sa prison, c’est osé. Le monde occidental se targue d’être le défenseur de la cause des peuples en promouvant la démocratie, mais les peuples africains n’ont vu qu’une chose : ce monde occidental soutient les satrapes africains sans aucune considération pour les populations qui en subissent les dramatiques conséquences.

La politique financée par le narcotrafic

Cette situation dans le Sahel est un terreau propice au développement d’idéologies radicales et la lutte armée devient un horizon séduisant pour une partie de la jeunesse qui sait que, hors de l’émigration vers l’Europe ou de l’affiliation aux groupes armés, point de salut. L’affaissement de l’Etat dans les pays sahéliens s’est accéléré avec la montée en puissance des divers trafics en zone sahélo-saharienne et notamment avec le trafic de cocaïne en transit vers l’Europe.

La vie politique de ces Etats s’est financée auprès de narcotrafiquants notoires qui n’ont pas hésité à prendre la place du généreux guide libyen Kadhafi. C’est ainsi qu’un conseiller du président malien Amadou Toumani Touré (2002-2012) était un trafiquant notoire, aujourd’hui reconverti au Burkina Faso. C’est aussi l’affaire emblématique du Boeing chargé de cocaïne qui se pose en 2009 dans le désert malien et dont le déchargement a été supervisé par un officier supérieur de l’armée malienne, aujourd’hui général. L’un des principaux soutiens financiers du parti du président nigérien Issoufou était Chérif Ould Abidine (décédé en 2016), dont le surnom était « Chérif Cocaïne »…

La frontière entre l’Etat et le crime organisé s’est estompée progressivement, laissant les populations livrées à leur sort. L’islam radical s’est répandu comme un modèle alternatif à la démocratie, laquelle est perçue par une part grandissante de la population comme une escroquerie idéologique visant à maintenir en place des kleptocraties. Le réarmement moral passe désormais par l’islam dans sa version la plus rigoriste (et étrangère aux pratiques confrériques du Sahel), soutenu par une classe politique qui a utilisé la religion pour faire du clientélisme.

Les groupes armés dits djihadistes tels qu’Al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI) ou Ansar Dine, qui eux-mêmes recourent volontiers aux réseaux et aux pratiques mafieux, évoluent désormais dans un environnement de moins en moins hostile. Quand j’entends parler de terrorisme djihadiste au Sahel, je pense souvent à un magicien qui, pour réaliser son tour, attire l’attention du public avec la main droite et réalise son tour avec la main gauche. Le terrorisme, c’est la main droite. La réalité du tour, la main gauche, c’est la grave crise de gouvernance dont personne n’ose parler.

Les Etats sahéliens ont parfaitement compris tout le bénéfice qu’ils pouvaient tirer de notre peur du terrorisme djihadiste : Jean-François Bayart parle de « rente diplomatique de la lutte contre le terrorisme ».Moyennant un discours engagé contre le terrorisme et l’autorisation pour l’armée française d’opérer sur leur territoire, ces dirigeants ont compris qu’ils ne seraient pas du tout inquiétés pour les graves dérives de gouvernance. La communauté internationale reproduit la même erreur qu’en Afghanistan lorsqu’elle avait soutenu le régime indécemment corrompu de Hamid Karzaï, ce qui n’avait fait que renforcer les Talibans et accélérer le rejet par la population des forces étrangères.

Rôle trouble des services algériens

A cette cécité sur les causes profondes, ajoutons celle relative au rôle joué par les services de sécurité algériens. Comment le mouvement d’Iyad Ag Ghali a-t-il été financé ? Où se replient Iyad et ses combattants ? Comment se fait-il que Mokhtar Belmokhtar sillonne en toute impunité la zone depuis vingt ans ? Des questions qui trouvent des réponses dans la complicité d’une partie des services de sécurité algériens.

Je me souviens d’un entretien à Bamako en 2009 avec Ahmada Ag Bibi, député touareg, à l’époque bras droit d’Iyad Ag Ghali et resté depuis lors proche du chef d’Ansar Dine. Il me disait que lorsque AQMI s’est installé en 2006-2007 dans l’Adrar des Ifoghas (Nord-Mali), Iyag Ag Ghali et ses hommes l’ont combattu. Le soutien logistique algérien dont bénéficiait Iyad Ag Ghali depuis des années s’est immédiatement interrompu. Il en a déduit que s’attaquer à AQMI, c’était s’attaquer à une partie des services de sécurité algériens. Il a donc composé.

Ahmada Ag Bibi a conclu cet entretien en me disant que l’Algérie poursuivait au Sahel sa guerre de décolonisation contre la France. Il a ajouté qu’il ne comprenait pas comment la France n’avait pas saisi que l’Algérie la considérait toujours comme un ennemi. Au cours de ma vie de diplomate, j’ai pu constater, en effet, l’angélisme dont fait preuve la France à cet égard. C’est troublant.

On pourrait aussi parler des autorités des pays sahéliens qui négocient des pactes de non-agression avec ces groupes armés. C’est le cas de la Mauritanie, comme l’attestent des documents saisis par les Américains lors du raid mené contre Oussama Ben Laden en 2011 au Pakistan.

Bref, résumer la situation sécuritaire du Sahel à sa seule dimension « terroriste » est un raccourci dangereux car il nous fait tout simplement quitter la réalité du terrain.

Le destin du Sahel ne nous appartient pas

Il ne peut y avoir d’ébauche de solutions sans un constat de vérité. Si ceux qui prétendent contribuer à la solution se racontent des histoires dès l’étape du constat, comment l’élaboration de réponses aux défis du Sahel pourrait-elle être un processus pertinent ? La communauté internationale tombe dans le même aveuglement qu’elle a savamment entretenu pendant cinquante ans sur la question de l’aide au développement.

Refusant de regarder une réalité qui dérange, on s’obstine dans des réponses qui n’ont aucun impact durable sur les réalités. Aujourd’hui, nous pensons l’Afrique depuis des bureaux et des salons de ministères ou de grandes organisations internationales dont la déconnexion avec la réalité est effrayante. Plus grave encore, notre réflexion repose sur des postulats inconscients qui pourraient expliquer notre manque d’humilité.

Et si la solution était que nous cessions de vouloir tout gouverner ? Quel est ce postulat intellectuel qui consiste à considérer comme admis que nous avons la solution aux problèmes du Sahel ? Pour ma part, je pense que la solution est entre les mains des peuples concernés. Il est temps de mettre les dirigeants de ces pays face à leurs responsabilités et qu’à leur obsession d’accroître leur patrimoine personnel se substitue enfin celle de s’occuper de leur propre pays.

J’entends souvent dire que nous ne pouvons pas ne rien faire. Ah bon ? Pouvez-vous le démontrer ? Accepter que la solution puisse se mettre en place sans nous, est-ce à ce point inacceptable pour notre cerveau d’Occidental ? Des milliers d’heures de réunions dans les ministères et organisations internationales pour parler du Sahel, avec, 99 % du temps, aucun représentant de ces pays et, 100 % du temps, sans aucun point de vue des populations concernées, est-ce la bonne méthode ? Ne pourrions-nous pas accepter l’idée que nous ne savons pas ? Ne pourrions-nous pas accepter que le destin du Sahel ne nous appartient pas ?

Ou alors, si nous estimons en être coresponsables, accordons aux pays du Sahel la même coresponsabilité sur la gestion de notre propre pays. La relation serait ainsi équilibrée. Mais sommes-nous prêts à recevoir des conseils venus du Sahel ? Les trouverions-nous pertinents ? Pas plus que les populations sahéliennes lorsqu’elles nous entendent disserter sur leur sort…

Le chef de la Minusma face à la presse

Après le renouvellement de son mandat le 29 juin 2017, la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali a tenu une conférence de presse, mardi 18 juillet, à la Maison de la presse à Bamako. Animée par le représentant spécial du Secrétaire général des Nations Unies au Mali et chef de la MINUSMA M. Mahamat Saleh Annadif, accompagné d’une délégation dont son adjointe Madame Mbaranga Gasarabwe . L’objectif de cette conférence était d’informer la presse sur les priorités stratégiques du nouveau mandat de la Mission consacré dans la résolution 2364 du Conseil de Sécurité de Nations Unies.

Intervenant au Mali depuis 2013 par la  résolution 2100 du 25 avril de la même année, le conseil de sécurité de Nations Unies a renouvelé encore une fois le mandat de la mission le 29 juin dernier.

C’est suite à ce renouvellement que le secrétaire général des Nations Unies a souhaité échanger avec la presse sur le mandat de la Minusma, la situation actuelle qui sévit dans le pays, le processus de paix encours et autres développements connexes qui concernent le pays.

Le chef de la MINUSMA a remercié la presse pour avoir répondu à l’invitation, et a situé le contexte dans lequel cet échange intervient. Pour lui, l’échange intervient après trois semaines du renouvellement du mandat de la MINUSMA, il intervient aussi au moment où l’Accord pour la paix et la réconciliation issu du processus d’Alger a dépassé ses deux ans. La rencontre intervient également après la résolution 2359 qui annonce la mise en place d’une force conjointe des pays du G5 Sahel, une force saluée par le conseil de sécurité des Nations Unies, selon son représentant spécial.

Les éléments novateurs dans le nouveau mandat de la MINUSMA sont entre autres : la volonté des chefs d’Etat du G5 sahel à mettre en place une force conjointe soulignée pour la première fois dans la résolution, le processus électoral au Mali et le soutien réaffirmé par la résolution aux Forces de Défenses et de Sécurité Maliennes en lui donnant un soutien conséquent. « La MINUSMA est entrain de finaliser un protocole qui la liera avec les Forces de Défenses et de Sécurité Malienne », ajoute le représentant spécial.

Concertant le retour de l’Administration à Kidal prévu ce 20 juillet, M. Annadif estime que l’Accord a accusé un retard énorme. «  L’accord pour la paix et la réconciliation se définit par un certain nombres d’actions à mener pendant la période intérimaire, parmi lesquelles le retour de l’administration à Kidal. Il y a eu énormément de retard pour mettre en place ces mesures, qui sont des mesures pour restaurer la confiance, parmi lesquelles les autorités intérimaires et ce qui s’ensuit » a souligné le chef de la MINUSMA. « Mais depuis un certain temps les parties maliennes ont un cadre formel pour discuter entre elles. Le CSA intervient seulement quand il y a des blocages a précisé M.Annadif.

Les affrontements entre la CMA et la Plateforme interviennent aussi alors que le retour de l’Administration était prévu pour ce 20 juillet à Kidal. « Les discussions continuent entre les mouvements et le gouvernement pour annoncer un cessez-le-feu et acter de façon définitive ce chronogramme. » Le représentant spécial tout en reconnaissant la lenteur dans la mise en œuvre de l’Accord, regrette que les deux ans soient écoulés sans qu’on puisse installer les mesures intérimaires. Mais de même le secrétaire général reste optimiste même s’il estime l’Accord complexe et difficile. « Tant qu’il y a des discussions, tant que le dialogue existe on peut dépasser ces difficultés » temporise t-il. Pour lui la crise du Nord n’est pas née en 2012, c ‘est depuis les années 60 qu’elle existe. « l’Accord de paix est parrainé pour la première fois par la communauté internationale et tous les pays voisins du Mali », assure M. Annadif

Le commandant de la force a fait état de la nature du soutien de la MINUSMA aux Forces des Défenses et de Sécurité Malienne. Il y aura un partenariat avec les forces de défenses et de sécurité maliennes, des opérations, la coordination des opérations, échange de renseignements, soutien logistique, soutien à la formation et à l’entraînement, évacuation médicale etc.

Le chef de la MINUSMA a rappelé que la MINUSMA n’a pas pour mission de lutter contre le terrorisme. Elle a une mission de stabiliser. La force du G5 Sahel qui aura pour mission de lutter contre le terrorisme, contre la criminalité organisée et le trafic de drogue est une décision africaine et qui a été soutenue par le Secrétaire général des Nations Unies. Mais les attentes par rapport aux financements n’ont pas été comblées par le conseil de sécurité de l’ONU.

Sur le sujet qui divise le plus les Maliens aujourd’hui, le représentant spécial du secrétaire général parlant de la constitution dira que « la constitution c’est un débat interne aux Maliens » , « mais depuis quelques temps nous avons constaté qu’il y a deux camps qui ont commencé à se former ». C’est dans ce cadre que la MINUSMA a discuté avec la majorité présidentielle et les parties de l’opposition démocratique pour renouer le dialogue et trouver un consensus autour de la constitution. « Nous suivons les débats, nous essayons d’apaiser la tension » a indiqué M. Annadif. Il a aussi évoqué l’impartialité de la MINUSMA entre les groupes armés «  quand vous êtes accusés par les uns et les autres cela veut dire que vous faites votre travail de façon impartiale » a-t-il souligné.

M. Annadif n’a pas manqué d’évoquer le terrorisme qui ne connaît pas de frontière. Pour lui  «  La lutte contre le terrorisme est un phénomène plus complexe » et « sa réponse devrait être collective » a-t-il martelé. Répondant aux manques des sanctions vis-à-vis de ceux qui violeraient l’Accord, le chef de la MINUSMA pense que les sanctions constituent le dernier recours.

Annadif a appelé a « sauvegarder l’Accord avec beaucoup de précaution » car dira t-il les problèmes maliens sont un problème politique, la crise malienne n’a pas de solutions militaires.

Berlin et Paris lancent l' »Alliance pour le Sahel »

La France et l’Allemagne ont lancé officiellement jeudi « l’Alliance pour le Sahel », une initiative visant à faciliter les échanges entre bailleurs internationaux pour accélérer l’aide au développement dans cette région en proie à l’instabilité politique, économique et sécuritaire.

Cette alliance « vise à améliorer l’appui des partenaires au développement à la région afin de contribuer efficacement et plus largement à la stabilisation et à l’élimination de la pauvreté », peut-on lire dans un texte conjoint diffusé à l’issue d’un conseil des ministres franco-allemand à l’Elysée.

L’objectif de cette entité soutenue par l’Union européenne est de permettre le développement des zones rurales, de créer de l’emploi pour la jeunesse, d’améliorer les infrastructures énergétiques et de renforcer la gouvernance, poursuit le texte.

L’aide se déclinera en quatre grands axes : éducation-formation, agriculture, gouvernance-justice et lutte contre le changement climatique.

Depuis son arrivée au pouvoir, Emmanuel Macron a insisté à plusieurs reprises sur l’importance du développement dans la région où quelque 4.000 soldats militaires français sont engagés dans l’opération antiterroriste Barkhane.

Lors de son déplacement à Bamako le 2 juillet, le chef de l’Etat a notamment annoncé 200 millions d’euros d’aide au développement pour les pays du G5 Sahel ces cinq prochaines années.

Interventions « trop  fragmentées »

L’Alliance pour le Sahel vise « à regrouper nos initiatives communes en matière de développement, à les ouvrir à tous nos partenaires européens », explique-t-il dans un entretien publié dans Ouest France jeudi. « Nous étions trop fragmentés dans nos interventions, nos interlocuteurs étaient trop étatiques. »

« Nous allons financer des projets, sur le terrain, ensemble. L’Alliance pour le Sahel, c’est le pilier du développement qui vient compléter notre pilier de défense commune », ajoute-t-il.

L’accent, soulignent Paris et Berlin dans leur texte commun, doit être mis sur le rétablissement de la sécurité, de la justice, de l’Etat de droit, de la cohabitation pacifique des communautés, de la fourniture des services de base, la création d’opportunités d’emploi pour la jeunesse.

Des dialogues réguliers et communs seront organisés avec les pays du Sahel, avec un premier groupe de bailleurs – sans exclusive –, l’Union européenne et ses Etats membres (France, Allemagne, et les autres pays souhaitant participer), le Groupe Banque mondiale, la Banque africaine de développement et le PNUD.

L’initiative sera pilotée par une instance de dialogue de haut niveau entre les partenaires au développement et les pays du Sahel, qui se réunira annuellement, soit dans la région ou dans un des pays contributeur à tour de rôle.

Après concertation, les bailleurs identifieront avec les pays bénéficiaires « les actions innovantes qui sont déjà significatives sur le terrain » et accepteront de « recourir aussi systématiquement que possible à des mécanismes de délégation réciproque (MRI) ».

G5 Sahel : Michel Goya, « La vraie question, c’est l’articulation avec les autres forces »

 

La force conjointe du G5 Sahel devrait être opérationnelle à l’automne prochain, bien que son financement soit loin d’être bouclé et que plusieurs questions subsistent quant à son mandat et son opérationnalisation. Michel Goya, stratégiste, analyste et historien militaire, ancien officier dans l’armée de terre française, breveté de l’Ecole de guerre, analyse pour le Journal du Mali cette nouvelle force inter-africaine qui devra combattre le terrorisme dans les cinq pays du Sahel.

La force conjointe du G5 ne dispose ni des fonds ni de l’équipement nécessaire à son fonctionnement. Son opérationnalisation est-elle possible pour l’automne prochain ?

L’opération Barkhane,  4 000 soldats sur l’ensemble des pays du G5 Sahel, coûte entre 500 et 600 millions d’euros par an. C’est autant que les budgets de défense des pays du G5 du Sahel réunis. Le fonctionnement d’un équivalent africain, même doté de moyens moins sophistiqués, ne peut pas être financé par ces Etats. Il faudra trouver les financements adéquats auprès de donateurs comme des organisations régionales ou des nations comme la France ou les Etats-Unis. C’est un processus long et complexe, par ailleurs régulièrement remis en question. Le financement est toujours le talon d’Achille de toutes les forces inter-africaines. Il est probable qu’il en sera de même cette fois d’autant plus qu’on ne connaît pas très bien le mandat de la nouvelle force, ce qui rend plus difficile la justification des aides. La force sera officiellement qualifiée d’opérationnelle à l’automne mais il est peu probable qu’elle le soit pleinement.

Comment cette force militaire devrait-elle être équipée et organisée pour bien fonctionner ?

Une force militaire n’est pas un objectif en soi mais un instrument au service d’une stratégie. Or, on ne sait pas très bien en réalité à quoi va servir cette force. S’agit-il d’une force d’appoint ou de substitution à Barkhane ? La France a-t-elle poussé à sa création pour augmenter l’efficacité générale de la lutte contre les organisations djihadistes ou simplement pour se dégager ? Une force de 5 000 hommes, voire de 10 000, comme on l’évoque à terme pour l’ensemble du Sahel, ne peut être qu’une force d’intervention. Elle doit disposer d’un état-major, de renseignements, de moyens aériens, terrestres et de transport. Surtout, elle doit disposer de troupes et là on ne sait pas très bien qui va les fournir. S’il s’agit de troupes nouvelles, il faudra un effort conséquent de formation et d’équipement dans des pays dont les forces armées sont déjà en flux tendus. Si ce sont, plus probablement, des forces déjà existantes, on ne voit pas très bien la différence avec la situation actuelle, les forces des pays du G5 Sahel étant déjà régulièrement engagées ensemble et avec les forces françaises pour lutter contre les groupes djihadistes.

Ces armées africaines pourront-elles facilement travailler ensemble ?

Elles travaillent déjà ensemble. On a même déjà une bonne expérience de l’emploi de forces interafricaines, régionales ou sous mandat de l’ONU. La force d’intervention conjointe multinationale qui regroupe des unités béninoises, camerounaises, nigériennes, nigérianes et tchadiennes pour lutter contre Boko Haram est très efficace. La difficulté pour coordonner l’action de différentes armées est technique. Il faudra donc un état-major commun qui est prévu pour être installé en position centrale, à Sévaré au Mali, et des moyens de communication communs, un des points faibles habituels des forces africaines. Il faut également une doctrine commune d’emploi des forces et un minimum de cohérence opérationnelle, en plus de la confiance mutuelle.

Quels sont les grands défis qui attendent cette force conjointe du G5 Sahel ?

Le défi tactique consiste à empêcher les groupes djihadistes de constituer des bases ou d’évoluer en forces importantes à l’intérieur du G5 Sahel. La menace, sans être éradiquée, sera ainsi maintenue à un niveau qui pourra être traité par d’autres forces et par d’autres services, la force de ces groupes n’étant pas seulement militaire. La vraie question, c’est l’articulation avec les autres forces présentes dans la zone, comme la MINUSMA, à laquelle elle pourra peut-être se substituer efficacement en récupérant les crédits qui y sont consacrés et un certain nombre de moyens, et surtout la force française Barkhane. Dans l’idéal, on pourrait envisager une fusion avec un commandement commun mais qui ne soit pas un subterfuge de la France pour se désengager.

 

 

 

Le sommet du G5 Sahel met en place sa riposte contre le terrorisme

Ce dimanche 2 juillet, au Palais de Koulouba à Bamako, les chefs d’États G5 Sahel ( Mali, Niger, Burkina Faso, Mauritanie, Tchad ) étaient réunis autour du président français Emmanuel Macron pour lancer l’opérationnalisation de la force conjointe du G5 qui aura la charge de combattre le terrorisme transnational, le trafic de drogue et d’être humains. Lors de ce sommet, le président français a précisé le soutien de la France en termes de sécurité et de développement, réaffirmant son plein engagement envers les pays du Sahel dans la bataille contre le terrorisme.

La principale attente du sommet extraordinaire du G5 Sahel qui s’est ouvert ce dimanche 2 juillet à Bamako, était l’annonce par le président français du soutien qu’il entend donner à cette force conjointe, pour le moment encore au stade du papier et qui devrait être effective à l’automne prochain. Problème majeur pour cette force encore balbutiante, les financements, qui à part l’engagement de l’Union européenne à hauteur de 50 millions, peine à arriver pour totaliser les 423 millions d’euros estimés pour son fonctionnement. Une conférence des donateurs doit se tenir dans les prochains mois pour lever des fonds et lors du sommet, le président IBK a annoncé, que chaque pays de G5 Sahel cotisera à hauteur de 10 millions aux financements de la force conjointe.

Lors de son discours d’ouverture, le président Macron a confirmé le soutien de la France aux pays du G5 Sahel pour lutter contre le terrorisme « dans un esprit de partenariat et d’exigences réciproques ». Concrètement, avec le soutien français, la force conjointe du G5 Sahel bénéficiera d’un soutien opérationnel accru de l’opération Barkhane, en conseil et assistance et surtout d’un accompagnement de la force française au combat. Il a aussi promis l’envoi de 70 véhicules tactiques, de matériel de communication et d’interopérabilité des forces, du matériel de protection pour les hommes ainsi qu’un soutien à la mise en place de centre de préparation à l’engagement opérationnel pour le Burkina Faso, le Niger et le Mali, enfin un renforcement structurel de la coopération entre la France et les pays du G5 Sahel. « Notre engagement au Sahel c’est désormais 50 % de notre coopération de sécurité et de défense dans le monde, parce que c’est ici que se joue la sécurité du continent africain et plus largement la sécurité de notre planète » a-t-il souligné, précisant que « la force conjointe G5 ne se substitue ni se se confond à Barkhane où à la Minusma, elle vient en appui de la Minusma et de Barkhane ».La France restera d’ailleurs engagée au Mali au sein de l’opération « Barkhane », « aussi longtemps qu’il le faudra », pour gagner la bataille contre le terrorisme à ajouté le président français. Cet engagement militaire de la France représentera, « plus de 8 millions d’euros » qui seront consacrés au Sahel d’ici la fin de l’année 2017.

Le président Macron a aussi indiqué qu’il avait « bon espoir que le 13 juillet lors du Conseil franco-allemand à Paris avec la chancelière allemande, nous puissions annoncer des engagements communs autour de cette alliance ».

Il a rappelé que ce sera « aux armées de convaincre que la force G5 est efficace pour être au rendez-vous et entraîner nos partenaires, c’est l’exigence réciproque que nous nous devons ». Il a aussi demandé au pays du G5 Sahel de mener « des réformes institutionnelles et des efforts de gouvernance, appelés par vos populations ».

Au-delà des annonces sécuritaires, le président Macron a aussi fait des annonces concernant « le second défi » que représente le développement. L’aide de la France en termes de développement s’articulera sur 4 axes : des actions en faveur de l’éducation et de la formation, un soutien à l’agriculture et au pastoralisme, la lutte contre les changements climatiques et enfin sur la gouvernance et la justice. L’agence française de développement (AFD) mettra 200 millions d’euros sur 5 ans pour mener à bien différentes actions visant au développement des pays du G5. L’AFD nommera aussi un directeur régional de la région Sahel basé à Ouagadougou pour coordonner ces actions. Nos « efforts de sécurité sont inutiles s’ils ne s’appuient pas sur des actions de développement » a indiqué Mr Macron, démontrant par des annonces fortes, lors de ce sommet extraordinaire du à Bamako, la grande détermination de la France d’être aux côtés des pays du G5 Sahel pour remporter cette bataille contre le terrorisme.

G5 Sahel : les enjeux du sommet

Dimanche 2 juillet 2017, le Mali accueille les chefs d’État du G5 Sahel et le président français Emmanuel Macron pour un sommet sur les questions de sécurité et de développement, les deux piliers de l’organisation sous-régionale. À l’ordre du jour, l’opérationnalisation de la force conjointe, voulue par les Africains et soutenue par la France.

Après avoir obtenu la « bénédiction » de l’Union africaine, un financement de l’Union européenne et le feu vert à travers une résolution du Conseil de sécurité des Nations unies, la FC-G5S est parée pour quitter le registre du virtuel. Avec le soutien d’un partenaire de taille, la France. Cette dernière a en effet soutenu le projet devant ses pairs et c’est grâce à son implication que les États-Unis, fort réticent face à ce énième poste de dépenses sur le continent, ont finalement adopté la résolution 2359 entérinant la création de la force sous réserve de quelques amendements liés à ses modalités de fonctionnement.

C’est en effet ces dernières qui soulèvent le plus de questions. La résolution onusienne est très claire : c’est « aux États du G5 Sahel qu’il incombe de donner à la FC-G5S les ressources dont elle a besoin ». Ce qui est plutôt mal parti, si l’on en croit les récentes déclarations du président tchadien, dont le pays contribue à travers un gros contingent, à l’effort de paix au Mali et dans les pays voisins en proie à la menace Boko Haram. «Tout cela coûte excessivement cher et, si rien n’est fait, le Tchad sera malheureusement dans l’obligation de se retirer », a menacé Idriss Deby Itno, dans un entretien accordé à des médias français, le 26 juin. Un message entendu du côté de Paris où le succès de cette force comporte également plusieurs enjeux. La présence du Président Macron sur le sol malien pour la deuxième fois en moins de 3 mois l’illustre à souhait.

Enjeux français Aider ses partenaires africains dans l’opérationnalisation rapide de cette force permettra à la France de maintenir son leadership en tant qu’acteur de premier plan dans la zone, tant militairement que politiquement. Mais aussi et surtout d’offrir une porte de sortie aux 4 000 soldats français engagés dans l’opération Barkhane, que l’Elysée n’a aucune envie de voir s’enliser dans ce qui apparait aux yeux des analystes comme « le bourbier malien ».

Basée sur le sol et sous commandement malien, la FC-G5S y sera déployée en premier, dans la zone du centre du pays, à la frontière avec le Burkina Faso, selon des sources militaires. Il convient de rappeler que le nombre d’hommes a été réduit de moitié par le filtre du Conseil de sécurité, passant de 10 000 à 5 000 hommes. Réalisme des diplomates ? Ou balle dans le pied de ce nouveau-né dont on attend encore le premier cri ? On espère l’entendre retentir dès le sommet de Bamako, le 2 juillet prochain.

 

G5 Sahel : Le Conseil de sécurité dit non au projet de résolution

L’adoption de la résolution autorisant la force du G5 Sahel a été bloquée à cause de problèmes financiers. Les Etats Unis d’Amérique et le Royaume Uni se disent opposés à tout financement de cette opération par les Nations Unies. La force militaire virtuellement créée par les pays du G5 Sahel pour lutter contre le terrorisme dans leurs espaces, va devoir franchir un obstacle de taille avant de prendre fonction.

La France a soumis, vendredi 9 juin, au Conseil de sécurité de l’ONU, un projet de résolution visant à autoriser le déploiement de la force commune du G5 Sahel. Laquelle est composée d’un effectif de 10000 Hommes venus respectivement de la Mauritanie, du Niger, du Burkina Faso, du Tchad et du Mali (qui abrite l’Etat-major). Cette force conjointe, qui a été validée en février dernier par ces pays membres, bénéficie de l’appui surtout en logistique de l’Opération Barkhane. Mais aussi d’un appui financier de l’Union européenne qui a décidé de l’accompagner à hauteur de plus de 32 milliards FCFA afin de rendre ce déploiement effectif à court terme. La force du G5 sahel a aussi besoin d’un mandat du conseil de sécurité, voire un appui financier et politique du conseil de sécurité de l’ONU.

L’adoption d’une  résolution validant la force G5 Selon ce projet de Résolution, cette force militaire pourrait utiliser tous les moyens nécessaires pour «combattre le terrorisme, le trafic de drogue et le trafic de personnes». C’était sans compter l’opposition des Américains et des Britanniques qui estiment, toutefois, que ce mandat délivré à la force du G5 Sahel manque de précisions.

Ce soutien politique et juridique que la France espérait avoir auprès des Nations-Unies se trouve confronté à la réticence des Américains et des Britanniques. Ceux-ci reconnaissent, certes, le bien-fondé de cette force anti-djihadiste en instance mais ils refusent pour l’heure de lui voter une Résolution, histoire de ne pas être obligés de mettre la main aux portefeuilles pour son financement.

Les Etats-Unis préféreraient une simple déclaration du Conseil, plutôt qu’une Résolution.

« Nous soutenons le principe d’une conjointe du G5 sahel comme important exemple potentiel des efforts africains pour combattre l’extrémisme. Mais une résolution du conseil de securité n’est pas toujours la seule, ni la plus sage des résolutions pour offrir un soutien politique » a indiqué un diplomate américain cité par l’AFP. Et d’ajouter : « Nous trouvons le mandat de cette force beaucoup trop large, manquant de précision ». Les Etats-Unis ont suggéré que le Conseil de sécurité apporte son soutien à la force G5 Sahel via un communiqué plutôt que par une résolution.

Andrew Lebovich : « cette force commune du G5 Sahel reste à construire »

Alors que le force conjointe du G5 Sahel, forte de 10 000 hommes, se met petit à petit en place, Journal du Mali s’est entretenu avec le chercheur américain Andrew Lebovich, spécialiste du Sahel, sur l’immense défi que représente la lutte contre la banditisme et le terrorisme transnational et la sécurisation des frontières.

Andrew Lebovich

Les frontières d’un pays comme le Mali peuvent-elles vraiment être surveillées et sécurisées efficacement ?

La sécurisation des frontières reste un défi énorme. Je ne vais pas dire qu’il s’agit d’une impossibilité, mais ça nécessiterait un gros travail et des ressources en troupes, renseignement, transport et surveillance du territoire, ce qui est à peu près inimaginable pour l’instant, si on prend en compte les limites des forces régionales et les limites opérationnelles des forces françaises sur le territoire. De plus, un effort visant à verrouiller les frontières impactera beaucoup la vie des civils au Mali et dans les pays voisins, avec d’autres conséquences.

Est-ce qu’une approche seulement militaire et policière est la solution pour la gestion de ces frontières ?

Même si la gestion des frontières demande un effort militaire et policier, il n’y aura jamais une solution purement militaire pour les conflits et tensions multiples au Mali. Actuellement, même l’accord d’Alger est bien insuffisant pour traiter les problèmes politiques, sociaux, communautaires et économiques qui prévalent dans le Nord et le Centre du Mali. Une réponse coercitive à la gestion des frontières pourrait réduire le flux des armes et des combattants, mais les problèmes sont avant tout à l’intérieur des pays mêmes, pas seulement sur les frontières.

Comment les organisations criminelles et les groupes extrémistes violents conceptualisent les frontières et le territoire de l’État ?

Dans les régions sahéliennes et sahariennes, il y a une longue tradition de commerce et de déplacements sur des distances énormes pour travailler, échanger, etc. Ces déplacements sont même nécessaires pour la vie de ces régions. Ils font partie intégrante de l’existence dans ces zones. Les groupes criminels et extrémistes aussi, transitent à travers les frontières et ces zones immenses pour tisser leurs réseaux, faire du commerce, et échapper aux pressions gouvernementales.

Comment réinstaurer ou améliorer l’autorité de l’État sur la gestion des frontières dans les 5 régions du Nord ?

En théorie le gouvernement est en train de se réinsérer dans ces régions, mais en réalité la présence du gouvernement reste quasiment ou totalement inexistante. Il faut quand même donner des clarifications sur quelques points : dans plusieurs localités, le gouvernement n’est pas présent depuis longtemps ou même n’a jamais été vraiment présent, et dans d’autres, la présence gouvernementale a souvent mené à des exactions ou de l’extorsion des populations locales. Donc, la tâche n’est pas seulement de faire venir le gouvernement malien, mais de reconstruire (ou bien construire) l’État. Un État qui peut établir la justice et la sécurité et qui ne menace pas les populations civiles. Ceci ne veut pas dire que les groupes armés ont raison ou sont considérés comme meilleurs, mais c’est seulement une manière de dire que ce n’est pas qu’une question de « réinstaurer » l’État.

Avec la création d’une force conjointe du G5 Sahel, peut-on dire que le Mali et ses voisins sont enfin parvenus à une approche commune concernant la sécurité des frontières ?

D’un côté, il faut saluer les efforts pour travailler ensemble sur les questions qui touchent aux pays de la sous-région, mais on est loin d’une approche commune. Même si les pays du G5 sont largement d’accord sur des thèmes plus larges, les compositions des pays, leur histoire, leurs capacités et leurs stratégies pour traiter ces questions restent souvent très différentes. Cette force commune du G5 Sahel reste à construire, les compositions, stratégies et limites de cette force à définir.

Cette force conjointe du G5 Sahel forte de 10 000 hommes aura aussi la charge de
lutter contre les trafics qui financent notamment le terrorisme. Pensez-vous qu’elle pourra s’y attaquer efficacement ?

Même si certains trafics peuvent financer en partie les groupes armés, le fait d’y faire face demande un effort intégré qui va non seulement perturber les commerces licites et semi-licites, mais aussi avoir un grand impact sur les communautés qui vivent de l’argent généré par ces trafics. L’approche de l’Europe en particulier, comme avec la migration, est d’étouffer les mouvements sans réfléchir suffisamment sur l’impact de cette répression et de ces interdictions sur la vie sociale, politique, et économique dans ces localités. Si le commerce et la vie des populations sont fortement perturbés par les forces militaires, il faut une réflexion profonde sur l’impact de ces interventions et mettre en place un accès égal au travail, aux opportunités, à la vie des populations. De plus, ces trafics sont souvent ancrés ou fonctionnent avec l’appui ou le consentement des forces de sécurité et les gouvernements eux-mêmes.

 

 

Le général Didier Dacko à la tête de la force du G5 Sahel

Le général de division Didier Dacko, chef d’état-major général des armées du Mali, a été nommé mercredi commandant de la Force conjointe du G5 Sahel en gestation, a-t-on appris de source officielle.

Il est remplacé à son poste par le général de brigade M’Bemba Moussa Kéita, indique un communiqué publié à l’issue du Conseil des ministres présidé par le président malien Ibrahim Boubacar Kéita.

La création d’une force conjointe pour le groupe G5 Sahel, de 10.000 hommes provenant des pays membres (Burkina Faso, Mali, Mauritanie, Niger, Tchad), constitue une des priorités de cette organisation.

Pour le déploiement de cette force, l’Union européenne a accordé au G5 Sahel 50 millions d’euros.

Le général Dacko est considéré par la population malienne comme « un homme pétri d’expériences », qui a acquis une réputation de meneur de troupes et de guerrier intrépide sur plusieurs fronts militaires au Mali, notamment en 2012 durant la crise du nord et dans la libération des villes occupés par l’ennemi.

Le général Dacko avait été nommé au poste de chef d’état-major général des armées le 29 juin 2016, en remplacement du général Mahamane Touré parti à la retraite.

Le G5 Sahel sera bien doté de 50 millions d’euros pour lutter contre le terrorisme

Les ministres des Affaires Etrangères des pays du G5 du Sahel sont réunis ce lundi à Bamako pour coordonner la lutte antiterroriste menée par leurs forces armées, dans un contexte où les groupes djihadistes montent en force et redoublent d’attaques meurtrières dans toute la région. L’UE apportera une aide de 50 millions d’euros pour le déploiement de cette force conjointe du G5 Sahel

Plusieurs sujets concernant la lutte contre l’extrémisme au Sahel figurent au programme de la rencontre du G5 Sahel (Burkina Faso, Mali, Mauritanie, Niger et Tchad). Mais un point particulier doit être passé au crible par les ministres réunis à Bamako. Il s’agit de la force militaire commune qui sera chargée de la lutte contre les milices djihadistes au Sahel.

Les premières informations font état d’une subdivision en deux parties de cette force multilatérale. Les ministres préfèrent qu’une partie de la force commune soit composée d’unités destinées uniquement à la lutte contre les bandes terroristes.

La seconde et non moins importante assurera des missions de nature policière. Les effectifs de cette dernière auront pour objectif principal la lutte contre le trafic de drogue, d’armes et d’être humains. Ils seront probablement au front de la lutte contre l’immigration clandestine, sachant que les pays du Sahel sont devenus ces dernières années les plus grands pourvoyeurs de migrants clandestins pour l’Europe.

La force conjointe sera dotée d’un effectif avoisinant les 10 000 hommes devant couvrir toute la zone commune aux cinq pays concernés. Néanmoins une attention particulière sera accordée à la région du Liptako Gourma, située à la frontière entre le Mali, le Niger et le Burkina Faso et qui a été le théâtre de nombreuses attaques de groupes islamistes armés ces derniers mois.

Les pays du G5 Sahel ont besoin de 50 millions d’euros de l’Union européenne (UE) pour mettre en place cette force multinationale et s’attaquer efficacement à cette menace transfrontalière. Selon nos informations, l’UE par la voix de la Haute Représentante/Vice-Présidente Federica Moghérini, soutiendra le déploiement de la force conjointe du G5 Sahel avec une enveloppe de 50 millions d’euros pour sa mise en place effective.

Ces pays occupant une vaste zone de 5 millions de km2 carrés pour une population globale de 65 millions d’habitants,font aujourd’hui face à la menace sécuritaire avec la prolifération de groupes terroristes. Ils sont confrontés à plusieurs défis dont l’avancée du désert, le changement climatique, le fort taux de prévalence de pauvreté, le chômage des jeunes et les problèmes sécuritaires liés au terrorisme et à la criminalité transfrontalière.

Force conjointe G5 Sahel : du bon pied

Les conditions se réunissent petit à petit pour la mise en œuvre de cette force qui devrait associer les armées des pays membres du G5 Sahel.

Prévue pour être un dispositif offensif et de stabilisation, la force commune aux pays du G5 Sahel (FC-G5S), Burkina Faso, Mauritanie, Mali, Niger, Tchad, devrait permettre de faire face aux menaces sécuritaires, à savoir le terrorisme, la criminalité transnationale organisée et l’immigration clandestine. Sa mise en œuvre a rapidement été transformée en projet, objet d’un processus d’élaboration et de validation qui a connu son aboutissement avec la décision de la 679è réunion du Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine (CPS, partenaire central dans la mise en œuvre de la force) du 13 avril 2017 à Addis Abeba, qui a validé le Concept stratégique d’opérations (CONOPS) de la FC-G5S.

C’est en février 2017 que les dirigeants des 5 pays, réunis en conférence ordinaire des chefs d’États du G5 Sahel, ont décidé de la mise en place dans l’immédiat de la force conjointe, la question du mandat ayant été soulevée par le président en exercice du G5, le Malien Ibrahim Boubacar Kéïta. En attendant une résolution des Nations unies définissant ce dernier, l’Union africaine a d’ores et déjà endossé la création de la FC-G5S qui sera « déployée dans les prochaines semaines », assure une source sécuritaire.

Mutualisation C’est le maître mot de cette force. D’abord entre les armées des différents pays membres du G5 Sahel. Ensemble, elles vont effectuer des opérations militaires afin de combattre et d’empêcher une expansion des activités des groupes terroristes et des réseaux de criminalité transfrontalière organisée, conduire des patrouilles, prévenir tout transfert d’armes et de soutien à ces groupes et réseaux, et mener des actions dans les domaines du renseignement, de la protection des droits humains et de la communication. Cette force travaillera sur le terrain avec les autres forces nationales et étrangères déjà déployées sur le terrain. « Nous étudions actuellement quel soutien nous apporterons à la future opération du G5 Sahel », déclarait le 19 mai à l’issue de sa visite au Mali le secrétaire général adjoint des Nations unies en charge des opérations de maintien de la paix. Pour Jean-Pierre Lacroix, le mandat de la FC-G5S « sera différent de celui de la MINUSMA. Il convient de bien organiser la circulation entre les forces ». « Ce n’est pas un exercice nouveau pour nos forces », précisait le diplomate.

En ce qui concerne le financement de cette force, il est tributaire des partenaires du G5, même s’il est prévu que les États y contribuent. C’est cette dépendance qui est le principal défi auquel sera confrontée la FC-G5S, car elle pourrait « réduire largement la marge de manœuvre des pays qui ont besoin pourtant d’agir dans l’urgence », déplore un diplomate tchadien. L’action offensive des armées concernées urge en effet sur le terrain, ce dernier étant de plus en plus le théâtre d’actions meurtrières attribuées aux groupes terroristes et au banditisme transfrontalier, mais aussi de leur mainmise sur des pans entiers de territoires, comme c’est le cas dans le centre et le nord du Mali.

 

 

G5 Sahel : une force conjointe d’ici la fin de l’année

La rencontre pour le comité de pilotage stratégique et technique du projet d’appui au G5 sahel pour la sécurité du sahel  s’est tenue le 3,4 et Mai à Bamako. Il y a été annoncé que la création d’une nouvelle force conjointe regroupant cinq pays à que savoir le Mali, la Mauritanie, le Burkina Faso, le Niger et le Tchad, sera opérationnelle avant la fin 2017.

À la fin du sommet extraordinaire du G5 Sahel, les cinq chefs d’Etat ont donné une conférence de presse en présence du président en exercice de l’Union africaine et invité spécial du G5 Sahel, Alpha Condé de la Guinée.

Au cours de ce point de presse, le président en exercice a qualifié le Sommet de Bamako d’évènement important au regard de la dégradation de la situation sécuritaire dans le nord du Mali. Il s’agira pour l’organisation commune, qui regroupe le Tchad, le Burkina, la Mauritanie, le Mali et le Niger, d’endiguer le fléau du terrorisme et du trafic humain et de drogue, pour parvenir à la stabilité régionale.

Le sommet s’est engagé à faire face aux menaces en mutualisant les efforts afin de parvenir aux objectifs de paix, sécurité et développement. Il a également pris acte de mesures immédiates pour sécuriser les frontières et mettre en place des projets structurants. Il a annoncé la création de la compagnie Air Sahel qui dispose déjà de ses premiers appareils.

Le président Ibrahim Boubacar Keïta, désigné nouveau président en exercice de l’organisation, a remercié ses pairs du G5 Sahel pour leur solidarité et leur confiance avant de revenir sur le développement du processus d’Alger et de sa mise en œuvre de l’Accord handicapée par un certain nombre d’obstacles. Il a fait cas d’actes plus odieux  les uns que les autres dans l’ensemble de la région.

Par ailleurs, les partenaires du G5 Sahel se sont engagés à accompagner les ambitions de l’organisation au double plan de la sécurité et du développement. Il s’agit entre autres de l’accompagnement du Conseil de sécurité à travers une résolution autorisant la mise en place d’une force régionale. Selon le ministre des affaires Etrangères Abdoulaye Diop, l’Union Européenne (UE) et le G5 sahel ont fait un pacte, pour diverses raisons à savoir la sécurisation des personnes et de leurs biens, la lutte contre la drogue, le trafic d’armes et d’être humain. L’UE et le G5 sahel ont un même but, celui de renforcer la lutte contre le terrorisme, la criminalité transfrontalière pour qu’enfin nos pays avancent. Il est prévu une rencontre entre le chef de la diplomatie européenne,  Féderica Mogherini, les ministres des affaires étrangères des pays membres du G5 sahel à Bamako le 6 juin prochain.

Le Sahel ne sera plus un « no man’s land » accessible aux hors-la-loi

Le ministre des Affaires étrangères du Mali Abdoulaye Diop a affirmé qu’une approche globale élaborée en collaboration avec les organisations régionales et internationales permettra d’assécher les sources de l’instabilité.

L’heure est à l’action, voire, à l’efficacité après de bien profondes réflexions sur la pacification d’un Sahel embrasé, soutient le ministre des Affaires étrangères malien, Abdoulaye Diop.

Interrogé par Anadolu sur l’actualité et le devenir d’une bande sahélo-saharienne embrasée, sinon d’une terre de prédilection de malfaiteurs de tout acabit, le ministre répond que les fondements d’une paix durable ont été presque jetés.

« Le Communiqué final du Sommet G5 Sahel de Bamako (06 février dernier) réaffirme clairement la volonté des Etats sahéliens de renforcer l’espace commun de concertation et d’échange en matière de sécurité. Ce, en décidant de nouvelles initiatives opérationnelles, particulièrement la mise en place immédiate de la Force Conjointe du G5 Sahel. cette Force aura pour mission de lutter contre le terrorisme et la criminalité transnationale organisée », explique Diop.

Regroupant le Mali, le Tchad, la Mauritanie, le Niger et le Burkina Faso, le G5 Sahel encore appelé « G5S » est un cadre institutionnel de coordination et de suivi de la coopération régionale en matière de politiques de développement et de sécurité. Il a été créé en février 2014.

Cette Force conjointe en gestation consolidera, dit-il, les opérations militaires transfrontalières déjà engagées, afin de combattre et d’empêcher une expansion des groupes terroristes et des réseaux criminels transnationaux.

Assécher les sources du mal passe également par l’opérationnalisation de la Plateforme de coopération en matière de sécurité (PCMS), et du projet de règlement portant sur l’organisation et le fonctionnement du Collège sahélien de sécurité du G5 Sahel. Ces mesures ont été approuvées par le Sommet, se félicite encore Diop.

Pour lui, la mise en place imminente du dispositif de communication informatisé et sécurisé, prévu par le G5 pour faciliter l’échange d’informations et l’établissement du Centre sahélien d’analyse des menaces et d’alerte précoce (CSAMAP), sont « les clés de l’efficacité dans la lutte contre le terrorisme et la criminalité transnationale organisée ». C’est qu’ils permettront de mieux identifier, puis, de neutraliser les extrémistes terroristes et les narcotrafiquants qui profitent de la porosité des frontières largement incontrôlées, pour sévir dans « un no man’s land propice à leurs activités » destructrices.

L’impératif d’une approche globale

Plaidant, par ailleurs, pour une approche globale, le ministre assure que son pays est plus que jamais déterminé à mieux coordonner avec ses partenaires régionaux et internationaux pour un meilleur développement économique et social d’une des régions les plus exposées aux affres de la pauvreté. Une région qui subit, de surcroît, les conséquences de l’instabilité qui secoue certains pays voisins, dont la Libye.

« Depuis la chute du régime du Colonel Mouammar Kadhafi, le 20 octobre 2011, la Libye est devenue un incubateur de terroristes. Ces derniers ont fait de la région du Sahel un sanctuaire en se livrant à un trafic d’armes et de munitions. Ils ont ainsi causé une insécurité grandissante dans les pays de la région, y compris le Mali », se désole-t-il.

La voie du sauvetage? Elle n’est pas difficile à repérer, mais nécessite la conjugaison de tous les efforts, dit-il : « Le G5 Sahel devra désormais allier sécurité et développement, en œuvrant à la concrétisation des stratégies intégrées des Nations Unies et de l’Union Africaine (UA). La Feuille de route G5 Sahel-UE aidera aussi à remédier aux problèmes de sécurité, et aux difficultés politiques et socio-économiques de la région». La Banque mondiale (BM) et la Banque africaine de développement (BAD), ayant fait part de leur soutien.

A la question de savoir s’il y a moyen de lutter contre l’instrumentalisation pratiquée par quelques groupes armés et extrémistes, ciblant des groupes ethniques tels que les Peuls (peuples éleveurs évoluant le long de la bande sahélo-saharienne), le ministre répond qu’une approche globale déjà approuvée verse dans ce sens.

« Le Cadre stratégique pour la relance économique et le développement durable (CREDD 2016-2018), vise à mettre en œuvre rapidement des mesures de modernisation institutionnelle, pour obtenir des résultats tangibles en matière de sécurité et de gouvernance, en vue de garantir le bien-être de tous les Maliens, sans exception », précise-t-il.

La décentralisation et le développement territorial, socle d’une paix durable

Revenant, au demeurant, sur l’Accord de paix d’Alger de juin-juillet 2015, signé entre Bamako, les groupes armés pro-pouvoir et la Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA), le ministre fait savoir que la 15e session du Comité de Suivi de l’Accord (CSA), tenue à Bamako le 10 février 2017, a débouché sur des recommandations concrètes visant à redynamiser le processus de mise en œuvre de l’Accord.

Parmi ces recommandations, la mise en place d’un « Cadre de concertation permanent de haut niveau entre les parties concernées » (ce cadre de concertation sera élargi à la Médiation Internationale), la mise en place des Autorités intérimaires au niveau des régions entre le 13 et le 20 février 2017 et le démarrage des patrouilles mixtes à Gao (Nord), lundi 20 février 2017, entre autres.

Pour un meilleur contrôle de tout le territoire national, des initiatives ont été prises par le gouvernement pour la relance du processus de décentralisation. Laquelle décentralisation stimulera, selon lui, le rôle des régions dans le développement territorial.

Le Mali a les moyens de ses ambitions, affirme le ministre. « Les richesses dont regorgent notre sol sont en mesure de répondre aux attentes des populations, à condition de réinstaurer la paix et la cohésion sociale », assure-t-il.

En 2012, le Nord du Mali était tombé sous le contrôle de groupes terroristes et de rebelles indépendantistes touaregs, avant que cette alliance ne soit rompue aux dépens de ces derniers. Une intervention internationale, toujours en cours, a chassé ces groupes terroristes alors que le statut administratif et politique des régions septentrionales a été défini dans un accord de paix, conclu grâce à la médiation de la communauté internationale, entre l’Etat malien et la plupart des groupes armés présents dans le Nord.

Toutefois, des poches terroristes persistent dans le nord et le centre du pays, où des attaques contre casques bleus, militaires maliens ou chefs locaux sont régulièrement enregistrées.

Alpha Barry : « La sécurité au Mali, c’est aussi la sécurité au Burkina »

Présent à Bamako à l’occasion du sommet du G5 Sahel, le ministre des Affaires étrangères, de la coopération et des Burkinabè de l’extérieur a accordé une interview à Journal du Mali. Alpha Barry aborde les enjeux sécuritaires de l’espace commun et l’engagement du G5.

Les réunions du G5 Sahel concernent habituellement les questions de défense. Pourquoi celle de Bamako a-t-elle été élargie aux ministres des Affaires étrangères ?

Les ministres des Affaires étrangères sont assez importants dans ce genre de dispositif. On a mis en place, récemment à Niamey, une force mixte de sécurisation des frontières et pour son fonctionnement, il y a un plaidoyer à faire au niveau international. Ce plaidoyer ne peut être effectué que par les ministres des Affaires étrangères qui sont quotidiennement en contact avec les amis et partenaires. La plupart des ministres des Affaires étrangères sont également en charge de la coopération internationale, donc nous sommes en relation avec les pays donateurs ou des institutions internationales pour les mobiliser à la cause de nos pays, car le G5 n’est pas que sécurité.

Quelles sont les autres missions du G5 Sahel ?

Il ne saurait y avoir de sécurité sans développement. C’est pourquoi, les chefs d’État des cinq pays ont décidé de conjuguer leurs efforts en créant le G5 Sahel avec pour objectif de coordonner les politiques et stratégies de développement et de sécurité dans le but de faire de ces pay un espace économiquement intégré, socialement prospère et culturellement riche.

Pourquoi la création d’une force mixte entre le Mali, le Burkina et le Niger, membres du G5 ?

La force mixte est une déclinaison du côté opérationnel du G5. Les pays du champ s’organisent pour faciliter la poursuite contre les terroristes, ce qui signifie que les pays membres peuvent désormais mener des opérations le long de leur frontière pour contrer les différentes menaces qui se présentent à eux.

Il a été question en fin 2016 du retrait d’une partie du contingent burkinabè déployé au sein de la MINUSMA. Où en est-on ?

La sécurité du Mali, c’est aussi celle du Sahel et du Burkina. Nous avons le plus gros contingent de la MINUSMA avec deux bataillons qui font 1 760 hommes. C’est un devoir pour le Burkina de participer à la sécurisation du Mali. Le seul retrait que nous faisons c’est le retrait de notre bataillon du Darfour. Au Mali, nous avons parlé de redéploiement des forces burkinabè. Seulement deux compagnies vont se détacher pour s’installer à Douentza dans la région frontalière au Burkina.

 

 

Barkhane : « Nous allons chercher les terroristes là où ils sont »

Alors que s’est achevé, lundi 6 février, le sommet extraordinaire du G5 Sahel où les chefs d’État du Mali, Niger, Mauritanie, Tchad et Burkina Faso, ont convenu d’une mutualisation des efforts pour mieux sécuriser et gérer les zones de frontières et de la mise en place d’une force conjointe régionale, pour faire face à un ennemi commun, le terrorisme. Au Mali, la lutte contre cette menace ne faiblit pas. L’opération Filidjo à Gao ainsi que les opérations que la force Barkhane mène à Kidal et dans sa région, ont commencé à donner des résultats. Le Lieutenant-colonel Philippe de la force Barkhane est revenu, pour le Journal du Mali, sur les dernières opérations de la force française en coordination avec les forces maliennes et sur la création de ces forces, mixtes ou conjointes, qui devraient permettre peu à peu une reprise en main sécuritaire dans la région.

Les opérations menées à Gao dans le cadre de l’opération Filidjo et à Kidal, ont permis d’effectuer des arrestations et de saisir du matériel qui pourrait fournir de précieux renseignements. À Kidal, la maison de Iyad Ag Ghaly, chef d’Ansar Dine, a été perquisitionnée le 28 janvier dernier, une première depuis 4 ans, pourquoi maintenant et qu’y avez-vous trouvé ?

Tout d’abord, il y a une limite dans ce que je peux vous répondre concernant cette question. Si je vous dis réellement pourquoi nous avons fouillé cette maison, je compromets la sécurité des opérations. Donc, de manière générale quand nous montons une opération, c’est que nous avons des renseignements qui nous laissent penser que l’opération qui va être menée va être rentable.

Qu’entendez-vous par « rentable » ?

C’est-à-dire que soit on va trouver quelque chose, le genre de chose que l’on cherche, ou alors, cette action va empêcher des groupes armés terroristes de se réimplanter de manière durable dans un endroit, parce que l’on va perturber leur réseau de soutien, leurs informateurs etc. En l’occurrence, on est plus dans cette logique-là en ce qui concerne l’opération à Kidal. En agissant dans cette maison, on a perturbé potentiellement son réseau, Nous avons trouvé dans cette maison des choses qui nous intéressent et que nous sommes en train d’exploiter.

Donc cette opération a été fructueuse ?

Tout à fait et ce qui nous fait aussi penser que cette opération a été fructueuse, ce sont les réactions que vous allez certainement évoquer dans votre prochaine question.

Justement, à Kidal ainsi qu’à Gao, certains se sont élevés contre des pratiques douteuses de la force lors de certaines perquisitions, notamment la saisie de bijoux ou d’argent, qui n’ont pas un réel intérêt dans le cadre de la lutte contre le terrorisme, pourquoi ces saisies ?

Il faut savoir que nous avons des indicateurs qui nous laissent à penser que nos actions sont très bien perçues, que ce soit pour l’opération Filidjo à Gao ou à Kidal, nous sommes particulièrement soucieux de la perception que peut avoir la population de notre action. À Gao, il y a en effet une somme d’argent qui a été saisie à des fins d’enquête et tant que nous n’avons pas la certitude que cet argent est honnête ou malhonnête, en lien ou pas avec le terrorisme, l’argent est mis quelque part sous séquestre en attendant les résultats de l’enquête. Je vous parle de très fortes sommes qui parce qu’elles étaient importantes nous ont alerté. Concernant les bijoux, la fouille de la maison de la personne à laquelle vous avez fait référence a été effectuée par des équipes spécialisées comprenant des gendarmes. À l’issue de la fouille, il y a un compte-rendu qui est fait, un procès-verbal qui liste les ressources que l’on a saisies. Si après enquête, on s’aperçoit qu’il n’y a rien à en tirer, on les rend. Dans le procès-verbal de l’opération de Kidal, il n’est en aucun cas marqué qu’on a saisi des bijoux.

Donc ces accusations visaient à discréditer le travail de la force, selon vous ?

Ce que je comprends, c’est que parce qu’on dérange les réseaux des groupes armés terroristes, on nous accuse de tous les noms. On a rapidement entendu, ici ou là, qu’après l’opération de Kidal, on avait volé des bijoux et comme ça n’a pas marché, le lendemain ils ont fait dire que nous avions violenté une petite fille. Une photo de cette même jeune fille, souriante avec ses parents et des éléments de Barkhane a d’ailleurs totalement démenti ces accusations.

Le mois de janvier a été un mois particulièrement sanglant, avec l’attaque du camp MOC, ainsi que de nombreuses attaques au nord et au centre du Mali. Est-ce que l’action de la force Barkhane est plus difficile, plus complexe, dans le contexte actuel où les attaques terroristes semblent se multiplier ?

Tout dépend qu’elle est le prisme que l’on prend, si on s’intéresse au mois de janvier, avec le nombre de morts et ceux du MOC, c’est vrai que le bilan est peu positif. Cependant quand on regarde la situation qui prévalait lors de la crise malienne avec la descente des groupes armés terroristes vers Bamako, qui a pu être stoppé et la situation que l’on connaît aujourd’hui, il y a quand même une nette différence. L’État malien est revenu dans certaines de ces villes, notamment à Gao, à Tombouctou et globalement la situation a beaucoup progressé. L’ennemi réagit à nos opérations et aux opérations de l’armée malienne et trouve des failles qui nécessitent de nous adapter. C’est un peu l’histoire du glaive et du bouclier, c’est-à-dire que lorsque nous effectuons des actions qui nous mènent à de très bons résultats, une fois que l’ennemi a compris comment nous avons mené notre opération, ils se réadaptent, c’est comme cela qu’ils utilisent des IED (engins explosifs improvisés – NDLR -) qu’ils placent sous nos convois. Ce qui est sûr, c’est que Barkhane s’adapte en permanence, pour justement être imprévisible et continuer à les perturber.

Votre base provisoire dans la zone d’Abeibara, connue pour être un sanctuaire terroriste, à été démontée, est-ce à dire que votre travail contre le terrorisme dans cette zone a été un succès et ne craignez-vous pas que les djihadistes qui ont été chassés se reconstituent ailleurs comme au centre du Mali par exemple ?

Le PAT (Point d’Appui Temporaire) d’Abeibara servait à notre effort dans le cadre de l’opération Septentrion qui avait pour but de réduire durablement la présence terroriste dans cette région. Une opération ça se prépare, ça se conduit et ensuite il faut l’arrêter. Une fois que l’on a considéré que les résultats étaient obtenus, on a démonté le point d’appui, qui était une base temporaire de départ. Pour répondre à votre question, oui il y a une réarticulation de la force qui va se réorienter vers le centre du Mali, pour des raisons évidentes de sécurité, je ne peux, évidemment, vous dire où.

N’est-ce pas un peu le problème de la force Barkhane, d’évoluer dans un immense territoire avec un nombre insuffisant d’hommes pour mener à bien ces opérations de sécurisation ?

Barkhane ne peut pas être partout tout le temps avec 4000 hommes déployés sur 5 pays, ce n’est pas possible dans une zone grande comme l’Europe, on ne peut pas être partout. Par contre nous cherchons à être où l’on veut et quand on le veut, c’est important, notamment dans le dimensionnement de la force. Nous avons des avions, des hélicoptères etc. donc de manière assez fulgurante nous pouvons basculer, par exemple, de Gao à Kidal, de Kidal à Madama au Niger, etc. On est dans une zone où l’ennemi se joue des frontières où ils essaient de se trouver des planques, ils jouent à cache-cache en quelque sorte et nous nous allons les chercher là où ils sont, comme ils changent d’endroit, nous changeons aussi d’endroit. Ils ont besoin de financement, de soutien, ils ne vivent pas de manière évanescente, et nous cherchons à perturber durablement leurs réseaux.

En parlant de financement, il est clair que l’une des sources de financement du terrorisme dans la région est le trafic de drogue, certains mouvements armés sont notoirement connus pour participer à ses trafics. Pourquoi la force Barkhane n’agit-elle pas contre ces trafics qui représentent une manne financière pour les groupes terroristes ?

La mission de Barkhane n’est pas de lutter contre le trafic de drogue. La mission de Barkhane c’est de veiller à ce que ces réseaux terroristes ne se reforment pas, pour cela notre action est régulière pour éviter toutes résurgences et préparer le terrain pour les forces maliennes quand elles réinvestiront ces zones. Nous n’avons pas vocation à lutter contre le trafic de drogue parce qu’il y a d’autres missions qui sont chargées de le faire.

Cette mission est assurée par une autre force française ?

Non, je ne crois pas.

Après 3 ans d’opérations, la force Barkhane est-elle en train de s’enliser comme on peut l’entendre ici où là, notamment chez certains observateurs et dans les médias ?

Avant de vous répondre, j’aimerais faire une parenthèse. Il y a parfois des formules journalistiques qui sur le papier font bien mais qui en fait ne représentent pas tellement la réalité et ne sont pas ancrées dans le réel. Je constate, qu’il y a pas mal de commentateurs dont quelques-uns dans les salons parisiens qui présentent le verre à moitié vide et ils ont des arguments pour le faire que je ne remets pas en cause. Mais à la force Barkhane, nous voyons le verre à moitié plein et surtout nous voyons qu’il se remplit alors qu’il y a quelques années, il était totalement vide. Aujourd’hui, ce verre continu à se remplir à un rythme qui parfois devrait forcer l’admiration des commentateurs.

À quel niveau constatez-vous ces progressions qui viennent un peu contredire l’impression globale ?

Je prends un exemple, la défense européenne n’est jamais arrivée à un même niveau d’interopérabilité, de volonté de travailler en commun que les Africains dans cette zone-là aujourd’hui. Il y a 3 ans les armées de la sous-région s’ignoraient totalement et n’avaient pas vocation à travailler ensemble. Aujourd’hui on planifie des opérations ensemble. L’opération Garikou a été préparée en commun avec le Mali, le Niger et Barkhane. On a échangé du renseignement et on a opéré ensemble. Cette opération est exemplaire et a montré ce vers quoi il faut tendre. Je vois cette coopération d’une manière très positive. Ils travaillent aux coudes à coudes avec nous car ils ont compris qu’il y avait un ennemi commun et que cet ennemi se défie des frontières et même en joue. Aujourd’hui, il y a des pays de la sous-région qui ont accepté ce qu’on appelle le droit de poursuite, c’est à dire qu’une force armée a le droit de traverser une frontière pour poursuivre l’ennemi sur le territoire d’un état souverain, c’est conceptuellement quelque chose qui serait difficile à admettre en Europe. Ici, ils le font et au plus au niveau. En début de semaine à Bamako le sommet du G5 Sahel à développer ça et c’est formidable.

La mise en place de ces forces, tripartite pour la zone Liptako-Gourma et conjointe pour le G5 Sahel, sonne-t-elle un retrait progressif de la force Barkhane ?

Cette force conjointe est plutôt une très bonne nouvelle. Disons que c’est exactement le but à atteindre de ce que l’on poursuit. Barkhane n’a pas vocation à durer éternellement. À terme, dans l’idéal, il faudrait que Barkhane se retire et que cette force conjointe prenne le relais et que les Africains puissent s’approprier leur propre sécurité.

G5 Sahel : mutualisation des efforts et mise en place d’une force régionale

Les ministres de la sécurité, de la défense des affaires étrangères du G5 sahel,dimanche 5 février et les chefs d’États du G5, ce lundi, ont travaillé sur les questions de sécurité et du développement dans le Sahel. Au terme de ce sommet extraordinaire, les cinq Chefs d’États ont donné une conférence de presse en présence du Président en exercice de l’Union Africaine et invité spécial du G5 Sahel, Alpha Condé de la Guinée.

Au cours de ce point de presse, le président en exercice a qualifié le Sommet de Bamako de grande importance au regard de la dégradation de la situation sécuritaire dans le nord du Mali. Il s’agira pour l’organisation commune qui regroupe le Tchad, le Burkina, la Mauritanie, le Mali et le Niger d’endiguer le fléau pour parvenir à la stabilité régionale.

Le sommet s’est engagé à faire face aux menaces en mutualisant les efforts afin de parvenir aux objectifs de paix, sécurité et développement. Il a également pris acte de prendre des mesures immédiates pour sécuriser les frontières et mettre en place des projets structurants. Il a annoncé la création de la compagnie de l’organisation dénommée Air Sahel et qui dispose déjà de ses premiers appareils.

Le président Ibrahim Boubacar Keïta désigné nouveau Président en exercice de l’organisation a rendu un hommage appuyé au président en exercice de l’Union africaine Alpha Condé qui a pris part à la fin des travaux du sommet en sa qualité de Président de l’Union Africaine et Invité spécial au Sommet du G5 Sahel. Le président malien a remercié ses pairs du G5 Sahel pour leur solidarité et leur confiance avant de revenir sur le développement du processus d’Alger et de sa mise en œuvre handicapée par un certain nombre de goulots. Il a fait cas des actes les uns plus odieux que les autres dans l’ensemble de la région.

Le Président mauritanien a insisté sur la vision économique de l’organisation qui passe par des projets structurants, la lutte contre l’insécurité, le trafic de drogue et l’immigration clandestine. Le Président Abdel Aziz a également évoqué les entraves juridiques et matérielles qui affectent les ambitions de l’organisation.

Quant au Président Issoufou Mahamadou du Niger, il s’est réjoui des résultats du sommet qui a donné l’occasion de faire le point sur la mise en œuvre des différentes initiatives sur le Sahel dont celles du G5, de l’UE et des Nations unies.

Les partenaires du G5 Sahel se sont engagés à accompagner les ambitions de l’organisation au double plan de la sécurité et du développement. Il s’agit entre autres de l’accompagnement du Conseil de sécurité à travers une résolution autorisant la mise en place d’une résolution pour la mise en place d’une force régionale.

Les Chefs d’Etat du G5 Sahel ont donc tous conscience que la souveraineté du Mali est indiscutable et non négociable tel que réaffirmé par les résolutions de toutes les grandes organisations internationales. Ils ont également conscience que tout doit être consenti pour la mise en œuvre effective de l’Accord pour la paix et la réconciliation nationale avec les efforts du Gouvernement et des autres partenaires.

Le prochain sommet du G5 Sahel se tiendra dans un an au Niger.

G5 Sahel : Vers la création d’un réseau biologique

Doté d’un laboratoire mobile dédié à la détection de la maladie du virus Ebola et d’autres agents pathogènes dangereux depuis décembre 2014, le Mali en collaboration avec l’Allemagne souhaite créer un réseau biologique qui couvrira les pays du G5 Sahel.

La République Fédérale allemande s’est engagé à promouvoir la création d’un réseau de laboratoires mobiles dans la région du G5 Sahel (Burkina Faso, Mauritanie, Niger, Mali et Tchad) en février prochain. Dans ce projet qui vise à renforcer les capacités de diagnostic des laboratoires mobiles au niveau régional, le Mali occupe une place prépondérante : l’antenne du réseau pourrait être construite sur place à Bamako au centre Merieux. Pour Bakary Diarra, Secrétaire Général du ministère de la santé et de l’hygiène publique, ce nouveau projet est salutaire car il permet également le renforcement de la coopération régionale en matière de bio-sûreté par le transfert de compétence pour le diagnostic d’agents hautement pathogènes comme ce fut le cas de la maladie du virus Ebola. En d’autres termes, le réseau permettra d’améliorer la sécurité des populations et d’apporter une réponse rapide en cas d’infection pandémique.

Du 20 au 21 septembre prochain, plusieurs cadres du secteur de la santé de chacun des Etats du G5 Sahel sont attendus à Bamako pour le lancement officiel du projet. Le mois suivant, c’est-à-dire en octobre, un scientifique par pays du G5 Sahel et deux nouveaux scientifiques maliens seront formés pars des experts maliens et allemands sur les méthodes de diagnostic moléculaire et sérologique. « Nos experts ont déjà formé par le passé des experts ivoiriens face aux risques de contamination d’Ebola », se rappelle le professeur Souleymane Diallo, Directeur du Centre d’Infectiologie Charles Merieux (CICM). En novembre, troisième et dernière étape du projet, les scientifiques formés seront invités à observer et à assister au déploiement du laboratoire mobile sur le terrain.
On rappelle que le Mali dispose d’un laboratoire mobile dédié à la détection de la maladie du virus Ebola et d’autres agents pathogènes dangereux depuis décembre 2014. L’ensemble des équipements de ce laboratoire est conditionné dans des cantines et peut être transporté vers les régions éloignées.

Abdoulaye DIOP: « c’est une guerre asymétrique où vous ne voyez presque pas l’ennemi »

JDM – L’hebdo : Où en est la coopération entre les pays du G5 Sahel sur la lutte anti-terroriste et quels moyens vont être mis en oeuvre ?

Nous avançons. Le mois dernier, il y a eu une rencontre à  N’Djamena entre les ministres de la Défense et les chefs d’états-majors pour discuter des contours de la force des pays du G5 que nous voulons mettre en place : des brigades avec une centaine d’éléments par pays pour constituer des unités spéciales mobiles légères, sur le modèle espagnol, dans le cadre de la lutte contre le terrorisme.

Un calendrier a-t-il été déterminé ?

C’est le ministre de la Défense qui est chargé de la question de l’opérationalisation de cette force. Mais je crois que ce ne sera pas le même schéma que dans les institutions régionales, où l’on veut faire ces choses-là  dans 1 à  5 ans. C’est une question à  laquelle il faut répondre maintenant. Les ministres ont décidé d’un cap. Ils vont se rencontrer pour pouvoir le mettre en place. Nous espérons que tout cela se fera le plus tôt possible.

Le partage de renseignement entre ces différents pays est-il effectif ?

Pas suffisamment. Il y a l’unité de fusion qui existe, il y a les services de renseignements qui se rencontrent, mais il faut que nous intensifions ces échanges entre nos pays. De façon informelle, je sais qu’il y a beaucoup d’échanges de renseignements sur les mouvements de ces groupes, mais il faut maintenant qu’on le fasse de façon systématique. Car c’est une guerre asymétrique o๠vous ne voyez presque pas l’ennemi. Le renseignement est extrêmement important dans cette lutte contre le terrorisme