Union européenne : L’ambassadeur au Mali fait le point

Par la voix de son nouvel ambassadeur au Mali, l’Union européenne a annoncé le 20 novembre la livraison très prochaine de blindés à la Force G5 Sahel. Le diplomate belge Bart Ouvry n’a pas précisé le nombre de blindés, ni même quand ils arriveront, mais il a assuré qu’ils seront là pour un appui sur le terrain, miné à de nombreux endroits par des engins explosifs improvisés (IED). Reconnaissant la lenteur dans l’effectivité des aides promises à la force conjointe, Bart Ouvry a assuré que les leçons ont été tirées afin que « la deuxième phase » des aides se passe au mieux. « Nous avons compris le problème et nous insistons désormais pour que les commandes soient livrées dans les délais voulus par nos partenaires ». L’ambassadeur de l’UE au Mali a également profité de l’occasion, un déjeuner avec la presse, pour se pencher sur le climat actuel de défiance à l’égard des forces étrangères. « Je comprends les critiques et l’impatience, mais je plaide également pour l’analyse, afin de trouver la solution la plus équilibrée qui soit », a-t-il souhaité. Il a affirmé que les Occidentaux n’avaient pas « d’obscurs » intérêts en Afrique. Au contraire, a-t-il ajouté, « nous avons des problèmes en commun, comme la lutte contre les groupes terroristes » ou encore le refus de la déstabilisation d’un nouveau pays, après la Libye et la Syrie, et les conséquences que cela a engendré en Europe et ailleurs.

Tout sur l’album « Le Monde est chaud » de Tiken Jah sorti le 17 mai 2019

L’artiste ivoirien Tiken Jah Fakoly a signé son retour le 17 mai 2019 avec « Le monde est chaud », un album qui revient sur le quotidien des populations et les défis politiques sur le continent et ailleurs.

Que l’on s’accorde ou pas sur la vision de l’artiste, du haut de ses cinquante ans Tiken a su garder son engagement, à travers des accords et des messages toujours aussi forts et poignants. Avec des textes qui racontent le quotidien des africains.

L’artiste ivoirien fan de reggae signe son retour avec un nouvel album « Le monde est chaud », sorti le 17 mai 2019. Une dizaine de titres, comme depuis le début de son engagement, il y a 32 ans, dénoncent ou pointent du doigt les problématiques du continent et du monde. Des textes qui vont des préoccupations politiques aux défis économiques, en passant par le développement durable et les problématiques sociales et environnementales. « L’artiste des générations » fait son entrée avec le titre-phare « Le monde est chaud » en compagnie du rappeur originaire des Comores Soprano, pour dénoncer « l’inaction des dirigeants du monde » face au réchauffement climatique et aux souffrances des populations.

Tiken Jah nous dit pourquoi Soprano dans ce nouvel Album

Comme il y a 12 ans pour le titre « Ouvrez les frontières », Soprano l’accompagne dans le projet écologique qu’il porte en bandoulière dans un flow qui risque de ne pas laisser indifférente la jeunesse, principale cible du message.

Ce 11ème album de Tiken Jah, qui vient s’ajouter à une longue liste d’œuvres et d’initiatives, dénonce, propose, enseigne et réclame au nom du peuple. On y trouve des titres aussi différents que complémentaires, comme No no no, Écologie, Dieu nous attend ou encore sur des sujets d’actualité, comme Libya, qui fait un flash back sur les images d’esclavage rendues publiques par les médias en 2017.

Tiken Jah Fakoly sur le titre Libya: « Pour moi c’était important de prévenir les candidats à cette aventure (…) »

Parlant des traversées périlleuses en quête de l’Eldorado du vieux continent, le messager dénonce l’immigration, en demandant aux enfants d’Afrique « pourquoi fuyons-nous? », en affirmant avec détermination et espoir « notre devoir, c’est d’affronter toutes les difficultés afin de réserver une autre Afrique à nos enfants ».

                                                                       Pourquoi nous fuyons?

L’album, entièrement enregistré en Côte d’Ivoire, marque particulièrement le retour au pays natal de l’artiste et un enracinement dans les méandres de sa culture, avec en langues locales ouest africaines. « Le monde est chaud » est un album très rasta, bercé par le reggae, où la liberté réside dans le sens que nous donnons aux textes de Tiken. Pour la suite, l’actualité de l’artiste va être essentiellement marquée par des concerts jusqu’en 2020.

Tiken sur la Particularité de cet album

Après un an, le bilan de Macron est négatif pour les Français

Une majorité de Français (55%) dresse un bilan «négatif» de l’action d’Emmanuel Macron après un an de pouvoir, contre 45% qui jugent le bilan positif, selon une enquête du Centre de recherches politiques de Sciences Po (Cevipof), réalisée par Ipsos-Sopra Steria avec Le Monde et la Fondation Jean Jaurès.

Très négatif sur le social, la santé, l’immigration…

L’action d’Emmanuel Macron pour ce qui est du pouvoir d’achat et de la réduction des inégalités sociales est jugée particulièrement sévèrement, 78% des Français estimant qu’elle va dans le mauvais sens.

Ils sont à peine moins sévères pour ce qui est du système de santé, 72% jugeant que l’action présidentielle va dans le mauvais sens, tout comme pour le système de retraite (70%) et la maîtrise de l’immigration (66%).

Le bilan est plus légèrement négatif pour la lutte contre l’insécurité (53% jugent que l’action menée va dans le mauvais sens), la réforme de l’éducation (51%) et la lutte contre le chômage (51), tandis que les électeurs sont très partagés sur l’amélioration du fonctionnement de la vie politique (50%).

Seules quatre thématiques emportent l’adhésion: la politique étrangère, qui va «dans le bon sens» pour 63% des Français, l’aide aux entreprises (61%), l’Union européenne (60%) et la lutte contre le terrorisme (57%).

« Président des riches »                                                                                        

Confortant l’image d’un «président des riches» brandie par l’opposition, les Français estiment à 76% que la politique menée «profite avant tout aux catégories aisées», et seulement 16% qu’elle bénéficie «à l’ensemble des Français» (contre 5% qui la voient favorables aux catégories populaires et 3% aux classes moyennes).

L’accusation de privilégier les urbains trouve également un écho chez les deux tiers (67%) des personnes interrogées, qui jugent que les «Français qui vivent dans des grandes villes» sont les principaux bénéficiaires de la politique gouvernementale (contre 28% pour l’ensemble des Français, 3% pour les habitants des périphéries des villes, 2% pour les habitants des petites villes ou zones rurales).

Enfin sur une échelle de 0 à 10 allant de «très à gauche» à «très à droite», Emmanuel Macron est jugé bien plus droitier que centriste, avec une note moyenne de 6,7.

Les électeurs estiment certes à 73% que l’action menée est conforme aux engagements de campagne, mais ils contestent la méthode: 49% jugent que «les mesures annoncées sont trop nombreuses, il faut aller plus lentement pour s’assurer que les lois soient bien pensées».

« Gouvernement autoritaire »

En outre, 55% des électeurs jugent que M. Macron et son gouvernement «sont trop autoritaires» et «ne laissent pas assez de temps à la négociation .

La hausse de la CSG (57%), la limitation de la vitesse à 80 km/h sur les routes secondaires (49%), la réforme de l’ISF (33%) et la diminution de l’APL (26%) sont les plus citées parmi les mesures suscitant le plus de mécontentement.

La réforme de la SNCF (32%), la réforme de la taxe d’habitation (29%), la réforme des institutions (27%) et l’interdiction du glyphosate (27%) sont les mesures les plus citées parmi celles qui satisfont le plus les personnes interrogées.

Si globalement 57% des Français n’apprécient pas son action (contre 43% qui l’apprécient), sa personnalité est appréciée par 50% des électeurs.

Peu estiment que d’autres feraient mieux

Pour ce qui est de l’avenir, les Français sont plutôt pessimistes: 43% pensent que leur situation personnelle sera moins bonne à la fin du quinquennat (contre 40% qui attendent une situation inchangée et 17% meilleure). A l’échelle du pays, ils sont en revanche 39% à tabler sur une meilleure situation (32% inchangée, 29% une moins bonne situation).

Malgré ce bilan plutôt mitigé, Emmanuel Macron bénéficie d’un paysage politique peu séduisant: seulement 14% des Français estiment que le leader de LFI Jean-Luc Mélenchon ou la présidente du FN Marine Le Pen feraient mieux que lui, un chiffre qui tombe à 8% pour le président de LR Laurent Wauquiez et 4% pour le premier secrétaire du PS Olivier Faure.

Samy l’exilé veut sensibiliser contre l’immigration clandestine

 

Samy l’exilé, c’est le nom de scène de ce passionné  de musique au parcours atypique. Après une « mésaventure » et quelques années passées en Algérie, il retourne au Mali et travaille actuellement comme livreur de pizzas. Durant ses heures libres, il écrit et compose ses chansons. Même s’il rêve de faire la musique de façon professionnelle, son objectif reste de sensibiliser les jeunes comme lui, tentés un jour par l’immigration clandestine.

« Ma contribution à la jeunesse, c’est de la conseiller de ne pas se laisser tenter par l’immigration clandestine », explique d’emblée Abdoul Salam Kéïta alias Samy l’exilé, né en Côte d’Ivoire de parents Maliens. Après des études écourtées, il décide comme de nombreux jeunes dans sa situation de « tenter l’aventure ». La Tunisie, la Libye et l’Algérie où il séjourne durant 4 ans sans papiers et sans une situation stable. «  Je suis revenu après 4 ans, ça n’allait pas. J’ai vu beaucoup de frères se faire massacrer. Le problème des Africains c’est les Africains d’abord », ajoute t-il non sans amertume.

Fan de musique, depuis son plus jeune âge. « La musique c’est un virus que j’ai attrapé depuis l’école. A Abidjan, je jouais avec un groupe. Maintenant, je joue seul », confie Samy. Avec les moyens du bord, il réussit à sortir un premier album  de 12 titres en février 2018. Avec l’afro bit comme genre, l’album connaît un accueil  plutôt mitigé. «  Sans soutien ce n’est pas évident », comment t-il.   Faire une carrière dans la musique, oui,  mais  ce qui intéresse Samy c’est surtout  sensibiliser.  Les jeunes Africains, car Samy « se sent partout chez lui en Afrique.»

Et grâce à quelques partenariats avec les ministères des Maliens de l’extérieur, de la Jeunesse et de la Culture, il participe à des tournées de sensibilisation et invite les jeunes à abandonner leur ambition d’immigration clandestine. «  C’est mieux de travailler ici. » outre ce thème, l’artiste « rend aussi hommage à la femme » et aborde les thèmes de la relation de l’Homme avec la religion, avec ses semblables. A  25 ans, Samy qui gagne sa vie pour le moment en vendant des pizzas à Bamako, entend bien se perfectionner dans la musique. « Je suis contacte les grands pour apprendre auprès d’eux.» Un de ses projets immédiats, outre les tournées avec les ministères c’est d’enregistrer une chanson collective avec environ 15 autres artistes, sur l’immigration clandestine.

Alpha Blondy : « Seule une armée de l’Union africaine peut régler le problème du Mali »

De passage à Bamako dans le cadre de la Rentrée Littéraire, l’artiste de renommée mondiale, Alpha Blondy a accordé une interview exclusive au Journal du Mali. Toujours très engagé, portant un discours panafricaniste, le reggae man ivoirien reste fidèle à lui-même et s’exprime sans détour.

Vous reprochez très souvent à nos chefs d’État d’adopter une posture attentiste, que recommandez-vous pour que cela ne soit plus le cas ?

Comment voulez-vous vous faire respecter lorsque vous avez toujours la posture du mendiant ? Surtout que si nous étions de vrais pauvres, j’aurai compris, mais c’est nous qui rendons les autres riches, alors pourquoi en plus devons-nous avoir une attitude de mendiant. Cette posture de mendiant étatique doit s’arrêter. Il faut que nos dirigeants aient de l’épaisseur. Au-delà de cela nous avons un syndrome de Stockholm en Afrique qui fait que les Africains sont les premiers à s’attaquer à toute œuvre africaine. Parce que l’Africain a été déconstruit. Ils ont par exemple mis dans la tête de nos femmes qu’elles seraient belles avec des perruques, des poils de cadavres, ceci fait partie d’une stratégie de déconstruction de l’homme africain. Maintenant il existe un temps pour tout, et ce temps est révolu. Nos frères africains doivent savoir qu’ils sont beaux et intelligents et non bêtes. Dieu a fait de l’Afrique une terre riche, il faut donc à un moment donné que nos chefs aient de l’épaisseur pour les exploiter. Ils ne sont pas parfaits certes, mais aucun président ne l’est. Tous les pays du monde connaissent des problèmes.

Cela devrait être compliqué, vous-même estimez que 90% de nos présidents sont des marionnettes

Mais oui. La main qui donne est toujours au-dessus de la main qui reçoit. Nos présidents que nous élisons, ce n’est pas à l’Occident de les dicter ce qu’ils doivent faire. C’est à nous qu’ils doivent être redevables et non à eux.

Il faudrait une certaine indépendance pour cela?

Ça viendra. J’aime bien cette nouvelle Afrique. Elle est consciente. Quand tu as écouté les présidents Alpha Condé, Alpha Oumar Konare, Nana Akufo-Addo ou encore Paul Kagamé, tu sens que les choses sont en train de changer. Ils se sont réveillés, et c’est ce que nous voulons, pas des béni oui-oui. Si l’Union africaine n’a pas réagi suite à l’assassinat de l’un de ses membres (Kadhafi), ils peuvent venir assassiner un autre président en toute impunité. L’Union africaine doit se faire respecter.

Le président ghanéen pourrait être un exemple à suivre ?

Je suis en admiration totale devant le président ghanéen. Ce qu’il dit est vrai. Avez-vous déjà vu une télévision africaine aller interviewer un président français. Jamais. Mais la réciprocité n’est pas respectée. Tous les jours pratiquement, ce sont les médias occidentaux qui viennent s’entretenir avec nos présidents, très souvent en les posant des questions très embarrassantes. Tout cela doit s’arrêter. Lorsque des journalistes des médias africains feront des interviews avec les présidents occidentaux, là, le respect va s’installer.

Vous plaidez également pour une force africaine pour régler les conflits du continent

Comment un contient aussi grand est incapable d’avoir une coalition militaire ? La souveraineté se protège et de nos jours, elle se fait militairement. Si tu prends des éléments de l’armée malienne, nigériane, marocaine, ainsi de suite, et que des abeilles attaquent le Nord du Mali,  leur riposte fera que ceux qui vont un jour vouloir attaquer le pays à nouveau réfléchirons par deux fois avant de le faire. Il faut que l’Afrique montre ses muscles. La souveraineté se mérite, elle se protège.

Jugez-vous l’intervention française au Mali salutaire ?

Elle ne l’est pas. Cela ne fait qu’augmenter la redevabilité. Tu me dois, c’est grâce à moi que ton pays existe aujourd’hui. C’est grâce à moi que tu es au pouvoir. Cela ne peut et ne doit plus continuer

Vous êtes sensible à la question des immigrés africains, quel message aimeriez-vous lancer à cette jeunesse malienne ou africaine, à ces candidats au départ ?

On m’a souvent demandé de dire aux jeunes d’arrêter de partir. Tous les jours depuis que nous sommes petits, on nous rabâche que la France est belle. Il a étudié en France, donc il est bien. On préfère Canal à nos chaines africaines. On nous a fait croire depuis tout jeune, que, tout ce qui vient de là-bas est bon. C’est donc tout à fait normal que les jeunes veuillent y aller. Pour nos jeunes, le lavage de cerveaux commence par le cinéma. En Occident, le cinéma africain est appelé cinéma calebasse. De fait, les jeunes préfèrent les films américains ou encore français.

Même l’information, pour en attester sa véracité en Afrique, il faut dire que cela vient de RFI. Et donc si c’est RFI qui le dit, c’est que c’est vrai. C’est la mentalité actuelle. Donc si quelque part les jeunes veulent partir, voyez-vous-même. Et ils ne pourront pas arrêter le flot, 1000 pourraient mourir, que 2000 entrerons. L’Afrique c’est l’enfer et l’Occident c’est le paradis, c’est toujours le discours que l’on nous sert. Dans ce cas, ils peuvent tout essayer, mais ils ne pourront pas les arrêter. C’est le retour de boomerang. Ils ne montrent aucune bonne image de l’Afrique. Si des médias occidentaux viennent à Bamako pour faire un reportage, ce n’est pas les hôtels qu’ils vont montrer, ce n’est pas la beauté du pays, ce qui peut rendre le Malien fier, vous ne verrez rien de tout cela. Ils iront dans un quartier précaire, prendre une personne très frustrée, or des pauvres il y en a dans tous les pays du monde, et c’est à cette personne qu’ils donneront la parole. Pourquoi toujours véhiculer cette image rétrograde de l’Afrique. Pour des reportages en Amérique, ce ne sont pas les tueurs que vous verrez, mais les gratte-ciels, Miami, pourquoi ce n’est pas le cas chez nous?

Il faut un repositionnement de l’Afrique, une reconstruction de l’homme africain afin qu’il commence à s’aimer et non à se renier, lui et sa culture. Donc ni Alpha Blondy, ni Ibrahim Boubacar Keita, ni Alassane Ouattara, ni même Emmanuel Macron ne pourront arrêter cette immigration.

L’Afrique a pourtant beaucoup de potentiels ?

En Occident tout est fait. Ici tout reste à faire. Nous avons besoin de nos cerveaux. Ils disent tous que l’avenir c’est l’Afrique. Vous trouvez normal que nous ayons des Cheick Modibo Diarra, des grands techniciens qui travaillent dans les  structures à l’étranger, et que 60 ans après l’indépendance, nous soyons incapables de fabriquer un vélo. Les plus intelligents sont revenus au pays. Ils se sont rendu compte qu’ils étaient esclaves là-bas, mais un esclave qui est instruit, conscient de son niveau, retourne là où il est utile.

Vous avez été ambassadeur de l’ONU pour la paix en Côte d’Ivoire, qu’est-ce qui selon vous permettrait au Mali d’aller vers une paix véritable ?

Tous les feux ne s’éteignent pas avec de l’eau. Souvent des pare-feu sont nécessaires. Allumer des feux pour bloquer le grand feu. Il faut que l’Union africaine ait sa force, nous n’aurons plus besoin que la France vienne garantir la souveraineté de nos États. Seule une armée de l’UA peut régler le problème du Mali une fois pour toute.  L’État malien seul ne pourra pas, car des mains invisibles s’amuseront à avancer des pions.  L’UA doit absolument, impérativement créer une force d’intervention. Ce n’est pas envoyé 500 soldats qui fera évoluer la situation, mais plutôt 200.000 soldats, et là vous pourrez discuter d’homme à homme. C’est ça la solution.

 

Immigration clandestine : une solution africaine très attendue

 

 

 

Partir ou rester ? Telle est le dilemme auquel font face les Etats Africains dans la lutte contre l’immigration clandestine. Si beaucoup de jeunes finissent par partir, laissant les gouvernements impuissants, des solutions existent pourtant. Il s’agit entre autres de créer et offrir des opportunités de travail aux jeunes, les sensibiliser sur les dangers de l’immigration clandestine, favoriser la réinsertion et la réintégration des expulsés…

 

Joint au téléphone depuis le Centre de détention TarickSika à Tripoli, où ils ont été identifiés la veille par une délégation de l’ambassade du Mali, celui que nous appelons X est l’un des 69 rescapés Maliens du naufrage survenu le 7 janvier dernier sur la Méditerranée. « J’aurais pu y rester comme les autres. C’était vraiment atroce », témoigne-t-il. La trentaine, X parait terrifier par l’horreur dont il a été témoin et qui, sans nul doute, le marquera à jamais. « Certains ont peur rien que d’entendre parler de « la mort », mais savoir qu’on pourrait mourir soi-même aujourd’hui est un sentiment encore plus terrifiant », raconte-t-il d’une voix tremblante.

 

Bien que le Mali soit l’un des rares pays africains qui se soit doté d’une Politique nationale de migration (PONAM), en septembre 2014, pour lutter contre l’immigration clandestine, le taux de migrants décédés sur la Méditerranée continue de grimper. A ce jour, les 120 milliards de francs CFA prévus pour son fonctionnement peinent à être mobilisés par le gouvernement. C’est du moins l’avis de Ousmane Diarra, président de l’association malienne des expulsés : « Rien n’a été fait, rien ne sera malheureusement fait tant que sa mise en œuvre ne sera pas effective ». A cela, Dr Boulaye Keita, conseiller technique au ministère des Maliens de l’Extérieur et de l’Intégration africaine, répond : « Nous rencontrons certes des difficultés mais, la politique nationale de migration est bien fonctionnelle et le département fait son possible pour relever les défis ».

 

Les causes de l’immigration clandestine sont connues : le rêve européen, la misère familiale, les effets des réseaux sociaux, les conflits dans les pays de départ … Moins attirés par l’Europe qu’ils ne sont chassés de leur propre pays par un climat politique très souvent volatile, les jeunes africains désespérés par les conflits fuient des régimes autocratiques où les violences et persécutions sont nombreuses. Cela ne date pas d’aujourd’hui, car depuis les années 90 on observe une augmentation sensible des départs de jeunes migrants vers l’Europe.

 

« Les migrations existent depuis toujours. Et elles continueront à exister, à cause des changements climatiques, de l’évolution démographique, de l’instabilité, des inégalités croissantes, des marchés du travail et de la volonté de mener une vie meilleure… », soulignait en septembre 2017, António Guterres, Secrétaire général de l’ONU lors de la présentation de son rapport annuel sur les travaux de l’organisation.  « La réponse passe par l’instauration d’une coopération internationale qui aidera à encadrer les migrations… », avait-il ajouté.

 

En attendant, des centaines d’individus continuent chaque jour de braver les dangers de la Méditerranée devenue un gigantesque cimetière qui ne dit pas son nom. Que faire donc face à une telle tragédie sans frontière ?

 

Dans un rapport publié en juillet 2017 (1), l’ONG Amesty International, par la voix de son directeur pour l’Europe, John Dalhuien, avait tiré sur la sonnette d’alarme : « Si le second semestre 2017 est à l’image du premier et qu’aucune disposition d’urgence n’est prise, 2017 est en passe de devenir l’année la plus meurtrière pour la route migratoire la plus meurtrière du monde ». Et de préciser que le nombre de migrants décédés ou disparus en Méditerranée, le plus souvent par noyade ou asphyxie sur des canots de fortune, était de 2 247. Cette alerte a donné le ton dans la prise des décisions pour lutter contre l’immigration clandestine. L’Union Européenne, devenue aujourd’hui le premier continent d’immigration, a également mis en place et renforcé plusieurs moyens de lutte dits ‘’traditionnels’’ : la coopération policière (une réussite au Maghreb), le renforcement de l’Agence Frontex (2), les assistances économiques aux Etats qui reconstruisent une démocratie politique, les accords de réadmission…

 

Malgré tous ces efforts, force est de constater que la victoire dans la lutte contre l’immigration clandestine n’est pas pour demain. C’est pourquoi des solutions nouvelles pourraient être avancées, certes par l’UE mais surtout par ses partenaires, notamment les pays africains : les pays de départ des migrants qui sont directement concernés par le problème. Mais, comment y arriver ? Pour beaucoup d’experts, dans les pays africains le problème est beaucoup plus institutionnel que financier, comme l’attestent les mesures prises jusque-là par l’UE, soit 300 millions d’euros en 2017 pour le fonctionnement de Frontex et 224 millions d’euros dédiés au fonctionnement de EUROSUR (3) pour la période de 2014 à 2020.

 

« L’aide seule ne suffit pas pour résoudre le problème (…) C’est une question de leadership, c’est une question de gouvernance », a précisé MahmatHassane, politologue tchadien sur les antennes de RFI. En d’autres termes, les Etats africains doivent repenser la lutte contre l’immigration clandestine. C’est pourquoi en 2014 lors d’un sommet à Bruxelles, NkosazanaDlamini-Zuma, ancienne présidente de la Commission de l’Union africaine a proposé que «si nous nous concentrons sur la formation de nos populations, investissons sur elles, elles n’auront pas à venir via Lampedusa, elles viendront en avion et seront bien accueillies ».

 

Il est évident que l’une des causes principales de l’immigration clandestine dans les Etats africains est le manque de travail, chose qui pousse les jeunes sur le chemin du départ. Au Mali, l’Etat a fait d’énorme investissements pour la réintégration et la réinsertion des migrants expulsés. C’est du moins l’avis du Dr Boulaye Keita, « le gouvernement a investi plus de 11 milliards pour financer des projets soumis par certains migrants : 29 projets en 2015, 24 en 2016 et 24 en 2017. Malheureusement, on ne peut pas donner du travail à tous en même temps », reconnait-il. Même si c’était le cas les candidats à l’immigration arrêteraient-ils de prendre la mer. Pour Bréma Ely Dicko, sociologue malien, la réponse est non « même si on développait le Mali pour en faire les Etats Unis d’Afrique, les gens vont partir ». S’il est vrai que le développement n’empêche pas le départ, le problème de l’immigration clandestine va donc au-delà d’un seul Etat prit individuellement. Pour plus d’impacts, il faudrait que les Etats africains s’associent. « Cela passe par la création et la mise en œuvre d’une politique nationale au niveau de l’Union africaine », ajoute Ousmane Diarra. Une politique nationale à l’échelle continentale qui permettrait de sensibiliser les candidats au suicide sur les dangers de l’immigration clandestine, d’accompagner le développement des Etats africains, d’inciter et d’encourager la diaspora à revenir investir au pays et de créer des emplois pour les jeunes Africains.

Aujourd’hui encore, beaucoup d’Etats africains peinent à mettre en place une véritable politique d’insertion des jeunes en valorisant les métiers du secteur informel afin de lutter contre le chômage des jeunes. Toutes choses qui pourraient considérablement réduire le nombre de candidats au suicide sur la Méditerranée si ces Etats se donnaient les moyens de « (…) poursuivre les activités de sensibilisation des populations africaines sur la migration irrégulière, puis, décourager toute tentative à la migration des jeunes africains tout en participant à leur encadrement », recommande Mickael Kouassi, président du Réseau africain de soutien aux actions du Président Mahamadou Issoufou (RASAMI) au Niger. Pour y arriver, ces Etats doivent penser à valoriser et à promouvoir ledit secteur. Autrement dit, la mécanique, la menuiserie, la maçonnerie, le commerce sont entre autres des métiers du secteur informel qui pourraient énormément contribuer à réduire le nombre de candidats à l’immigration.  Au Sénégal, une enquête de terrain a montré l’importance grandissante que prennent les formations à la gestion et à l’entrepreneuriat en vue d’aider les travailleurs autonomes et les responsables de petites et moyennes entreprises à mieux structurer et développer leurs activités. Ces types de formation pourraient également servir à former les candidats à l’immigration et permettre à ceux-ci d’obtenir un travail décent dans leur pays respectif. Naturellement, ils renonceront pour la plupart à prendre la mer.

 

 

 

 

Liens

1-​https://www.amnesty.org/fr/latest/news/2017/07/central-mediterranean-death-toll-soars-as-eu-turns-its-back-on-refugees-and-migrants/

2-​http://frontex.europa.eu

3-​http://frontex.europa.eu/intelligence/eurosur/

 

 

De l’immigration à l’entrepreneuriat

À peine sept mois après son retour au pays natal, Alain Christian Mboena, un migrant camerounais, est parvenu à s’installer et à créer des emplois pour les jeunes du pays. Ambitieux, il a commencé ses activités sans financement quelconque.

Cette réalisation est le fruit de ses expériences vécues à travers l’immigration dans plusieurs pays, Émirats Arabes unis, l’Inde et l’Iran. Ces pays visités ont été une source d’inspiration et une prise de conscience. Titulaire d’un doctorat en sciences de gestion et création des entreprises il avait décidé d’aller à l’eldorado. « Je me suis retrouvé cuisinier dans les hôtels à l’étranger, en déphasage avec ma formation initiale. C’est ainsi que j’ai pris la résolution de revenir au Cameroun », a-t-il explique Alain Christian Mboena

Retour au bercail

Une fois de retour au pays natal, en avril 2017, il consacre tout son temps à l’exploitation des feuilles et des arbres. Alain Christian disposait d’une bonne expérience dans le domaine de la pharmacopée traditionnelle. Les produits de ce secteur sont à base de sève des arbres, de racines, de feuilles et de certaines plantes. Il dispose d’une unité de transformations de ses produits, dans un quartier de Yaoundé. « Je me suis résolu d’entrer en brousse pour les transformer et fabriquer les produits de beauté, les boissons diététiques », relate Alain Christian Mboena.

Le jeune entrepreneur emploie plusieurs jeunes de la localité. Il travaille en parfaite collaboration avec une association dénommée, Fonds Social pour l’Emploi (FSE). Cette association est reconnue par l’État camerounais. Elle cultive des champs de maïs, de piment, de poivres, et des arbres fruitiers pour l’aider dans la recherche médicinale. « Au moment des récoltes 90 ℅ des revenus leur appartiennent. Le champ de poivre a permis à l’un des jeunes du village [ Biyaga : NDLR de réunir 500 000 francs CFA », confie un proche d’Alain Christian.

Le retour d’Alain Christian au Cameroun a été une opportunité d’emplois pour plusieurs jeunes, ainsi, il affirme « je ne regrette pas d’être rentré au Cameroun. Aujourd’hui, j’ai de quoi nourrir ma famille et mettre d’autres personnes à l’aise ».

Nouveau revers pour le décret anti-migrants de Trump

 Depuis janvier 2017, la justice américaine bloque le décret anti-immigration du Président américain. Pour la troisième fois, un magistrat hawaïen a jugé que le décret anti-immigration « établie une discrimination fondée sur la nationalité » qui est proscrite par « les principes fondateurs de cette nation ».

 Ce décret qui visent à interdire aux ressortissants de sept pays de faire des demandes de visas n’est ainsi toujours pas en vigueur. Ce qui permet aux ressortissants du Yemen, de la Syrie, de la Libye, de l’Iran, de la Somalie et du Tchad d’obtenir toujours des visas d’entrée sur le territoire américain. Le juge a toutefois rendu applicable la mesure visant les citoyens de la Corée du Nord et les responsables gouvernementaux du Venezuela.

La Maison Blanche a très vite déclaré que ce jugement « porteur d’erreurs dangereuses, sape les efforts du président pour protéger la population américaine », tout en affirmant sa confiance au système judiciaire.   

Un appel devrait être vite interjeté par la Maison Blanche. Le bras de fer continue…

 

 

 

Migration des adolescents: le dilemme de l’intégration suisse

Ce sont chaque année quelques centaines d’adolescents qui arrivent sur le sol suisse. Les uns fuyant l’insécurité, les autres la misère dans leurs pays. Ils partagent tous un même idéal : bénéficier de l’asile afin de commencer une nouvelle vie. Cependant, les réalités de l’intégration finissent par se transformer en obstacles pour beaucoup. Ils n’abandonnent pas pour autant leurs rêves. A l’âge de la majorité (18 ans), beaucoup sont expulsés. Tour d’horizon dans la vie de ces jeunes garçons et filles, qui ne demandent qu’à intégrer dans une société suisse où les procédures d’intégration sont de plus en plus difficiles.

 

Vêtu d’un pantalon jean et d’un t-shirt aux longues manches, F. échange quelques mots en Français avec son enseignante. Un exercice plutôt difficile pour ce jeune érythréen de 19 ans. Depuis deux ans qu’il est arrivé en Suisse, tout semble bien se passer pour lui. Comme la majorité des migrants, il a emprunté les voies connu de tous les migrants affricains dont le rêve est d’atteindre l’Europe. En deux ans, il a traversé le Soudan, la Libye et l’Italie où il refuse de faire une demande d’asile, « je voulais aller en Angleterre ou en Suisse », justifie-t-il. Arrivé dans la confédération helvétique sans aucun document, F. atterrit dans un foyer du canton de Vaud, en Suisse romande, où il est pris en charge en tant que mineurs non accompagnés (MNA), terme qui désigne les enfants ou adolescents migrants qui arrivent à la frontière Suisse sans représentation légale.

Entre 2010 et 2015, le Secrétariat d’État aux migrations (SEM) estime qu’environ 5000 MNA, venus pour la majorité d’Afghanistan, de l’Erythrée, de Syrie ou de pays d’Afrique de l’Ouest comme la Côte d’Ivoire ou la Guinée Conakry, ont été accueillis par la Suisse.

Si les raisons de la migration ont en commun la pauvreté et l’instabilité structurelle, « se cache de façon récurrente et omniprésente les problématiques de discrimination et inégalité des genres, les conflits ethniques et la violence, ou encore la perte de l’un ou des deux parents », écrit en 2016 Depallens Villanueva, Médecin au CHUV (Centre hospitalier universitaire) de Vaud, où elle s’occupe des MNA.

Le parcours Suisse. 

Une fois sur le sol Suisse, les MNA sont pris en main. C’est une obligation pour le pays car deux textes de lois défendent la protection des mineurs en Suisse; le premier est la loi de protection des mineurs qui s’applique dans les 26 cantons que compte la Suisse, et la seconde est la Convention internationale des droits de l’Enfant (CIDE). Ces lois privilégient l’intérêt supérieur des enfants. Une grande responsabilité donc pour l’Etat qui les accueille.

C’est pourquoi les structures d’accueil organisent une prise en charge adaptée aux besoins de ces adolescents. Il s’agit de fournir aux MNA l’accès au logement, un soutien éducatif, une formation, des soins somatiques ou psychologiques adaptés. Toutes choses censées placer ces adolescents dans de meilleures conditions de vie. Mais, les réalités et les structures peuvent varier d’un canton à un autre avec une grande disparité. Celles conçus pour accueillir les adolescents étant très souvent surchargés, les mineurs sont placés généralement dans des structures pour adultes. Une situation qui pose d’importantes questions légales et éthiques. « Que faire? Il faut bien les loger quelque part non? », s’interroge une éducatrice du canton de Fribourg, l’un des trois cantons bilingues de la Suisse.

Dans cet établissement vaudois d’accueil des migrants (EVAM), cohabitent 66 adolescents soit 56 garçons et 10 filles, trois d’entre eux viennent de l’Afrique de l’Ouest dont deux de la Guinée Conakry et un de la Côte d’Ivoire. Au foyer depuis sept mois, il n’est plus en contact avec sa famille vivant à Yamoussoukro, au centre de la Côte d’Ivoire. Personne ne sait s’il est mort ou vivant : « c’est mieux ainsi », lâche-t-il, un peu gêné. Un peu plus méfiant, D., venu de la Guinée, n’accepte pas vraiment d’échanger tout de suite. Il confiera plus tard qu’il se méfie, car « tout le monde dit qu’ils vont nous renvoyer chez nous », confie-t-il. Une crainte légitime : la Suisse n’accorde presque pas d’asile aux ressortissants des pays de l’Afrique de l’Ouest. Les raisons sont simples : « Leurs vies ne sont pas en danger dans ces pays », explique une autre source proche des services de migration. H., un autre jeune guinéen, semble avoir perdu tout espoir et confie son regret d’avoir choisi la Suisse comme pays d’asile : « Si seulement j’avais su », lâche-t-il, le regard dans le vide.

Dans un autre foyer, les MNA venus de l’Afrique de l’Ouest affirment tous avoir fui leur pays pour des raisons familiales. Certains pour éviter de se marier, d’autres parce qu’ils sont constamment indexés comme des bons à rien.

Depuis 2015, la Suisse ne cesse de recevoir des MNA, seuls quelques heureux élus auront une chance d’obtenir l’asile. Pour cette éducatrice, il s’agit majoritairement d’Erythréens, d’ Afghans et de Syriens, « compte tenu de la situation sécuritaire plutôt alarmante dans ces pays où les droits humains sont constamment violés», explique-t-elle.

 

Le dilemme de la protection
Dès qu’il a soufflé sa dix-huitième bougie, F., a quitté le foyer. « Je me suis pris une chambre quelque part dans la ville », explique-t-il, souriant. A l’âge de la majorité, tout « MNA » quitte le foyer qui l’a accueilli. Le loyer, l’assurance, le transport, sont pris en charge par sa structure d’accueil. Une somme forfaitaire de 370 francs suisse, soit environ 200 000 francs CFA, lui est également allouée par mois en attendant la décision du SEM sur la demande d’asile, qu’il a introduite dès la semaine de son arrivée en Suisse. Les MNA sont aidés dans les procédures administratives par un référent, un soutien dans les démarches qu’ils auront à faire. La demande d’asile de F. ayant été refusée en décembre dernier par le SEM, celui-ci, grâce à l’aide du foyer, a fait appel de la décision. S’il n’obtient pas de réponse positive, il perdra automatiquement les avantages qui lui sont actuellement accordés. Puisqu’il a un permis provisoire, F. ne sera pas expulsé de Suisse, il recevra une aide d’urgence lui permettant de survivre. Chose difficile, car il sera presque impossible pour lui de se trouver un emploi sans un permis de travail délivré seulement quand l’étranger existe légalement.

La décision du SEM est imminente car la transition du MNA au statut de majeur à son 18ème anniversaire coïncide très souvent avec une décision de renvoi. Dans un communiqué de presse datant de juin 2017, le SEM annonce qu’en 2015, la Suisse a été le pays qui a réalisé le plus grand nombre de renvois vers d’autres États. Ce sont 60 000 personnes qui ont été frappées d’une telle décision depuis 2009, toujours selon le SEM.

« Les renvois sont appliqués de manière totalement aveugle, automatique et systématique », commente Émilie Touillet, membre du collectif R [1] (?), «  l’absurdité et la violence des situations sont éloquentes » ajoute-t-elle. Or, la Suisse a la possibilité d’examiner les motifs des personnes en situation de vulnérabilité, comme ces adolescents, surtout quand ils sont renvoyés vers des États qui n’ont pas la possibilité de les accueillir dans la dignité; généralement en Italie ou en Grèce. Les MNA sont protégés en attendant d’avoir 18 ans, et ils sont ensuite expulsés parfois en plein milieu d’une formation.

En attendant d’obtenir une réponse  positive du SEM sur leur demande d’asile en Suisse, les 66 jeunes du foyer de L’EVAM attendent impatients et confiants, contrairement aux adolescents venus de la Guinée et de la Côte d’ Ivoire, dont les chances de rester en Suisse demeurent très minces. 

Règlement Dublin

« Le SEM n’y peut rien, c’est le règlement Dublin », explique Émilie Douillet lors d’une conférence de presse organisée par la société civile le 13 juin, à Lausanne, pour appeler les autorités à mieux « protéger les réfugiés vulnérables ». Ce genre de réponse est, selon elle, la réaction des autorités à chaque interpellation directe sur le terrain. Une grande majorité de la société civile continue néanmoins de se rassembler pour dire « Non à l’application aveugle du règlement Dublin » qui représente aujourd’hui le point de discorde entre les autorités cantonales et la société civile.

Il s’agit d’un texte normatif de l’Union européenne consacré au règlement juridique du droit d’asile en vertu de la Convention de Genève (art. 51). Il régit la situation des étrangers qui formulent une demande d’asile dans un pays et sont interpellés dans un autre pays de l’Union européenne. Dans la pratique, le texte pose de nombreux problèmes, car l’étranger qui arrive par exemple en Suisse est aussitôt refoulé vers le pays où il a fait sa demande d’asile pour la première fois.

Vu le trajet des migrants, ils sont très souvent refoulés vers l’Italie et la Grèce, où les foyers d’accueil débordent déjà de monde. Une situation qui révolte Nicolas Margot, médiateur Église-Réfugiés : « Nous sommes consternés en voyant des personnes pleines de potentiel, qui pourraient facilement suivre un chemin d’intégration et qui perdent des mois voire des années de leur vie, ballotées d’un pays à un autre », regrette-t-il. La Suisse est l’un des pays qui appliquent le plus strictement la procédure Dublin, bien que l’accord prévoie des marges de manœuvre prévues par le paragraphe 17 du préambule du règlement Dublin III. Cet article stipule: « Il importe que tout État membre puisse déroger aux critères de responsabilité, notamment pour des motifs humanitaires et de compassion, afin de permettre le rapprochement de membres de la famille, de proches ou de tout autre parent et examiner une demande de protection internationale introduite sur son territoire ou sur le territoire d’un autre État membre, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères obligatoires fixés dans le présent règlement ». C’est dire que la Suisse peut faire usage de la clause discrétionnaire, qui offre la possibilité à chaque État d’examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas. Concernant l’évaluation des critères de renvoi, Magaly Hanselmann, Secrétaire romande de l’Entraide Protestante Suisse (EPER) [2], explique «qu’il est impossible de savoir quand le SEM fait application de la clause discrétionnaire ».

Perspective de vie

Sandra Muri est enseignante dans une classe d’accueil au groupe scolaire des Bergières, à Lausanne. Elle enseigne la connaissance suisse à 13 MNA depuis presqu’une année. Ici, se côtoient plusieurs nationalités. Neuf des adolescents sont en famille, c’est à dire qu’ils vivent avec un parent en Suisse. Les quatre autres, tous des Erythréens, vivent au foyer. Cette classe d’accueil est l’un des droits les plus prisés de ces adolescents, où la race et la nationalité n’a pas d’importance. Ici, ils peuvent s’amuser, se côtoyer et échanger malgré leur bas niveau en français. Tous semblent renaître dans cette atmosphère. Une fois dehors, le constat est différent. A 15 ans, O. est un féru de football. Un sport qu’il pratique avec gaieté. Son talent ne plaît pas à tout le monde : « Après chaque victoire contre les élèves en classe normale, ils nous disent d’aller apprendre à mieux parler en français avant de venir jouer au football », déplore-t-il. Dans la cour de l’école, les élèves en classe d’accueil se regroupent, isolés des autres. « On ne veut pas se mélanger à eux parce qu’ils nous manquent de respect », lâche cette adolescente syrienne. « En plus ils sont racistes ».

A Lausanne le racisme n’est pas pratiqué ouvertement. Beaucoup de personnes ont cependant des préjugés vis-à-vis des personnes étrangères. Une situation qui pousse beaucoup d’adolescents à limiter leurs fréquentations. Dans cette classe de treize personnes, seul un adolescent venu du Portugal affirme avoir des amis suisses. Les autres préfèrent s’en passer.

Tous souhaitent cependant trouver une famille d’accueil avec laquelle ils partageront de bons moments. C’est soit une personne ou une famille qui accepte de prendre un MNA comme un membre de sa famille sans que ce dernier ne soit logé chez elle. C’est l’exemple de Z. Ce jeune afghan passe le week-end avec N. et son époux, devenus depuis quelques mois sa famille d’accueil. « C’est quelqu’un de super. Un peu timide mais très sympa », témoigne N. Contrairement à Z., beaucoup n’ont pas encore de famille d’accueil. Le canton de Vaud enregistre environ 180 parrainages contre seulement 5 dans le canton de Fribourg. Autant les réalités au niveau de chaque canton diffèrent les unes des autres, autant beaucoup de personnes hésitent encore à s’approcher des MNA.

Pendant ce temps, à Lausanne, F. a aménagé dans son nouvel appartement. Il apprend à faire la cuisine et à faire le ménage. Il évite autant que possible les dépenses futiles afin de pouvoir économiser car, dit-il, « on ne sait jamais ». Conscient que sa nouvelle demande d’asile peut être refusée une fois de plus, il tente donc de mettre toutes les chances de son côté. Ses économies pourraient lui payer sa prochaine destination ou servir à acheter des cadeaux pour sa famille, s’il venait à être expulsé en Erythrée.

 

Migrants: Paris veut créer des centres d’enregistrement au Niger et au Tchad

La France envisage de créer des centres d’enregistrement pour les demandeurs d’asile au Niger et au Tchad. Pour l’Élysée, il s’agit d’empêcher les demandeurs d’asile de prendre des « risques inconsidérés » en Libye et en mer Méditerranée. Il ne s’agit pas de « limiter le flux » des réfugiés qui débarquent en France, précise-t-on, toujours de source officielle.

A l’Élysée, on parle de « postes avancés » de l’Ofpra, l’Office français de protection des réfugiés, pour faire le tri entre réfugiés politiques et migrants économiques.

Ce serait là, dans ces missions, avant même qu’ils ne quittent le continent africain, que les uns pourraient déposer une demande d’asile en France, et les autres, se faire expliquer pourquoi il faut faire demi-tour.

 Pour Paris, il s’agit d’abord de s’attaquer aux filières qui convoient des Africains par milliers en Europe.

Le président Emmanuel Macron a dénoncé la semaine dernière les routes de migrations économiques, qui « nourrissent les passeurs, le grand banditisme, parfois le terrorisme ».

La France est déjà en relation avec les autorités au Niger et au Tchad, deux pays où elle espère ouvrir des bureaux que l’Ofpra qualifie de « missions de protection ». Une délégation française est attendue, en septembre, à Niamey et à N’Djamena.

Après les critiques de l’Italie, qui lui reproche de faire cavalier seul en Libye, Paris semble opérer un changement de cap. Lundi, le patron de l’Ofpra, Pascal Brice, a rencontré Nathalie Loiseau, ministre chargée des Affaires européennes, pour discuter, a-t-elle précisé sur son compte Twitter, « de la révision du régime d’asile européen commun »

Abdelkader Messahel : l’immigration clandestine africaine “menace la sécurité nationale”

L’Algérie est en train de prendre « des mesures urgentes » pour faire face au phénomène de la migration qui « menace la sécurité nationale », a déclaré, ce lundi 10 juillet, le ministre des Affaires étrangères, Abdelkader Messahel.

 « Des réseaux organisés sont derrière ce flux massif de migrants clandestins », a accusé le ministre, selon le compte rendu de l’agence officielle. « Une mafia organisée dont font partie des Algériens encadre les opérations d’émigration clandestine vers l’Algérie », a ajouté M. Messahel, en soulignant les liens entre les réseaux de trafic d’êtres humains avec les groupes terroristes et le crime organisé. « Nous suivons de très près ce phénomène et l’Algérie est devenue un pays de destination pour les migrants clandestins subsahariens », a-t-il ajouté.

« Il est de notre devoir, en tant que gouvernement et en tant qu’Algériens de défendre la souveraineté nationale et notre sécurité, c’est notre droit », a lancé Messahel dont les déclarations interviennent après les propos violents tenus samedi par Ahmed Ouyahia sur les migrants subsahariens. Des propos qui ont suscité des critiques de la part des ONG de défense des droits de l’Homme et de plusieurs partis politiques algériens. Des critiques auxquelles Messahel a répondu : « L’Algérie n’a de leçon à recevoir de personne ».

Le gouvernement demeure « vigilant » sur la question de l’immigration clandestine, a-t-il ajouté. « Les Algériens sont connus pour leur hospitalité, mais ils sont jaloux de leur souveraineté nationale », a ajouté Messahel. « Les lois algériennes interdisent l’immigration clandestine », a encore rappelé le chef de la diplomatie algérienne, en précisant que « 20 millions d’Africains » se déplacent illégalement en Afrique à cause de « la durée du climat, du chômage, des conflits » et trouvent des difficultés à se rendre en Europe, en « raison de la fermeture des accès ». Il a ajouté aussi qu’il y a « 5 000 Africains » dans les rangs des groupes terroristes dans le monde, ce qui est « un chiffre énorme ».

3 questions à Famagan Konaté, Chercheur sur les questions de migration

 

Pourquoi cette augmentation de la migration clandestine féminine ?

Deux raisons principales : le regroupement familial et la recherche de l’argent. Les femmes contribuent beaucoup à l’économie de leurs familles restées au pays. Au Mali, la migration est un phénomène traditionnel mais évolutif, en ce sens qu’elle s’adapte au gré des opportunités et des contraintes. Les routes migratoires se modifient aussi. Nous avons des Maliennes qui se trouvent aujourd’hui en Asie, aux États-Unis, en Australie. Aucun continent n’est exempt de la migration malienne.

Quels problèmes posent cette migration ?

Vous avez le harcèlement sexuel, les viols… Ces femmes sont vraiment courageuses, surtout quand elles empruntent la route du désert. Elles sont confrontées à plus de dangers que les hommes. Elles sont rançonnées par les forces de sécurité, elles doivent également faire avec les malfrats et les passeurs qui ne sont pas des enfants de cœur. Ce sont des aspects qu’on n’ose pas beaucoup aborder dans les migrations.

Quelles alternatives pour mettre fin à cette migration ?

La situation économique du Mali ne permet pas de retenir les Maliens au pays. Il faut créer les conditions et le goût de rester. Tant que la situation socio-économique ne s’améliore pas, quelles que soient les politiques mises en œuvre, elles seront vouées à l’échec. La situation de l’emploi ne va pas, la situation alimentaire non plus et les signes de sécheresse font qu’aujourd’hui nous assistons impuissants à ces situations.

Passeurs de migrants : Les vendeurs de rêve

Pour entamer le voyage vers l’Europe, il faut forcément passer par eux. Ils connaissent les routes, les acteurs dans les pays de destination pour faciliter l’arrivée et l’intégration. En principe. Car aujourd’hui, les passeurs se révèlent être de véreux hommes d’affaires qui se livrent à un business qui met en danger la vie des milliers de candidats à l’émigration.

Au premier contact, il parait réticent, même au téléphone. C’est pourtant seulement par ce biais qu’il accepte de nous parler. « Ce ne sont pas des choses dont on peut parler au téléphone. Je suis une personne très pointilleuse, et il y a beaucoup à dire », déclare notre contact, dont la voix laisse deviner un homme d’âge mûr. Pour obtenir l’entrevue, nous avons sollicité son concours pour « un ami gambien désireux d’aller en Italie ». « Je conseille à toutes les personnes que j’aide à partir de ne pas emmener d’argent avec eux. Une fois sur la route, les Touaregs peuvent les dépouiller de tous leurs biens », poursuit-il, nous expliquant tout de go les consignes données à ses « clients ».

Le business, il l’a commencé en organisant les départs de ses neveux. Une cinquantaine, annonce-t-il sans ambages, qui sont désormais tous en Italie. « C’est un travail à risque donc je ne prends que des personnes qui m’ont été proposées par des connaissances proches », nuance-t-il. Il serait, selon lui, à la tête d’un réseau dont les ramifications s’étendent jusqu’en Libye. « J’ai deux intermédiaires à Gao. L’un travaille avec la MINUSMA. Il connait bien l’Algérie, il y va tout le temps ». Pour l’étape Gao-Algérie, comptez 36 000 francs CFA, le tronçon étant difficile. « Les Algériens font beaucoup de contrôle. Des fois, ils vont même au-delà de leurs frontières », explique le passeur. En cas de complication, il assure que son « gars » prend entièrement en charge et à ses frais, le logement et la nourriture. Son deuxième contact serait un chauffeur qui assure le voyage vers Tamanrasset à 115 000 francs CFA.

Dans le meilleur des mondes « Il faut au minimum prévoir 1 million de francs CFA pour le voyage. Ça devrait suffire mais il se pourrait qu’il y ait des contretemps », poursuit notre interlocuteur. À l’en croire, tout est fait pour un voyage sans risque : pick-up tout confort et bateaux haut de gamme, hébergement et restauration… Bien loin des images de migrants abandonnés dans le désert sans eau ou entassés par centaines sur des pneumatiques. Pour le passeur, les horreurs rapportées par les rescapés sont « des cas isolés qui ne le concernent guère ». « C’est ceux qui n’ont pas les fonds nécessaires pour payer leur voyage, qui décident de travailler en Algérie ou en Libye. C’est là qu’ils subissent toutes ces souffrances », argumente-t-il.

 

Immigration féminine : Pour une vie meilleure

27 850 personnes sont arrivées par la mer en Europe depuis le début de l’année 2017, selon l’Organisation internationale pour les migrations (OIM). 655 autres sont mortes ou portées disparues en voulant tenter la traversée. Malgré ces chiffres sinistres, ceux qui tentent l’aventure sont de plus en plus nombreux. Parmi eux, un nombre croissant de femmes accompagnées ou non de jeunes enfants. Quête d’une vie meilleure pour elles-mêmes mais surtout pour leur progéniture, prise de risque, les migrantes jouent le tout pour le tout et en paient un prix souvent plus lourd que celui des hommes.

Faire témoigner une migrante n’est pas chose aisée. Les langues se délient difficilement, voire pas du tout. Le sujet est tabou, en parler est gênant, voire dangereux. Malgré cette omerta, une Malienne accepte de nous narrer son histoire. Semblable à celle de milliers d’autres femmes, venues d’Afrique, du Moyen-Orient, par le désert ou par la mer. Une histoire d’espoir, minée par les privations et les drames, le compromis et la suspicion, même quand le voyage est fini. « Nos appels sont surveillés, donc je ne serai pas longue, je n’ai pas encore de documents solides, je ne veux pas de problème », lance celle que nous appellerons M., en guise d’introduction. Son périple débute à Bamako le 18 septembre dernier. Depuis la capitale malienne, elle gagne Gao à près de 1 200 km. « À Bamako, l’intermédiaire que j’ai a rencontré, a fait une copie de mon passeport et c’est aussi lui qui m’a payé mon billet ». Une fois arrivée à la cité des Askia, elle est prise en charge par une autre personne. « J’y ai passé deux jours, attendant d’autres qui comme moi voulaient partir. C’est lorsque notre nombre s’est étoffé que nous avons fait route vers le Niger ». À Agadez, une personne qui semble appartenir aux bureaux de l’OIM dans la région vient la voir pour la dissuader de continuer son voyage et lui propose des solutions alternatives. « L’intermédiaire m’a lancé un méchant regard et m’a fait des remontrances en me disant de rester bien sagement dans mon coin si je voulais que mon voyage se passe bien », se souvient-elle. Dans l’extrême nord nigérien où il fait très chaud, elle reste une semaine avant de faire route vers la Libye. « Nous dormions entassés à plusieurs dans des chambres délabrées au milieu des bestioles. Certaines femmes, par crainte de se faire agresser, faisaient leurs besoins à l’intérieur même de la pièce ».

Trajet périlleux Ils sont une vingtaine dans un pick-up à s’engouffrer dans le vaste désert libyen. La promiscuité et l’inconfort sont totaux. « Nous (les femmes, ndlr) étions assises les unes sur les genoux des autres sur la banquette arrière, les hommes étaient à l’arrière ». Attachés entre eux à l’aide de cordes avec un gros nœud tout autour du véhicule pour les empêcher de tomber. Certains d’entre eux sont au bord de l’asphyxie. « La route est difficile et pleine de secousses, beaucoup criaient de douleur à l’arrière mais le chauffeur n’y prêtait aucune attention. La soif est le plus grand défi. La tentation de vider sa bouteille d’un trait est grande mais on s’abstient pour pouvoir en profiter plus tard ». Après presque deux jours de course, les passagers sont priés de bien vouloir continuer à pied. Une marche d’une quinzaine de kilomètres dans un paysage de dunes et de sables épais à perte de vue jusqu’à la ville libyenne de Sahba. Après y avoir passé quelques jours, le groupe gagne Tripoli situé à 700 km de là. « Ça ne ressemble plus à rien. On ne voit que des bâtiments en ruine et des impacts de balles sur presque tout », se souvient M. Un véritable no man’s land où sévissent plusieurs groupes armés depuis la crise de 2011, qui se livrent eux aussi au trafic de migrants. « La déstabilisation de la Libye a eu pour conséquence l’accroissement du trafic. Avec Kadhafi, on n’entendait même pas parler de migrants », analyse Ousmane Diarra, président de l’Association malienne des expulsés (AME).

À Tripoli, ils passent trois semaines cachés dans un entrepôt, dans des conditions exécrables. « Comme nourriture on avait droit à du fromage, du pain et une petite bouteille d’eau. Le soir c’était tout le temps ou presque des pâtes », raconte M. C’est la dernière étape avant la traversée vers l’Europe, étape tout aussi difficile que les précédentes. Entre la surcharge des embarcations, la fragilité de celles-ci face aux flots de la Méditerranée, mais aussi avec la violence. « Ceux qui partent n’ont le plus souvent qu’une vague idée des véritables dangers. Les passeurs sont de plus en plus violents et les femmes, plus fragiles, sont souvent l’objet de violences sexuelles », explique le Dr Brema Ely Dicko, chef du département de sociologie et anthropologie de l’Université des Lettres et des Sciences humaines de Bamako (ULSHB). Pour embarquer à destination de l’Italie, à 300 km des côtes libyennes, il faut payer 700 000 francs CFA. Ceux qui ne les ont pas se font battre, certains sont torturés… « Nous étions près d’une centaine dans le bateau. On se collait du mieux qu’on pouvait. On pouvait sentir l’eau sur nous. Il faisait très froid, nos maigres couvertures ne suffisaient pas », raconte M. dont la voix faiblit à l’autre bout du fil. Avec elle à bord, vingt autres femmes, dont trois sont enceintes. « J’avais beaucoup de peine pour elles. C’est mon sort qui me préoccupait avant tout, mais être enceinte et dans ces conditions c’est difficile. Avant d’embarquer, ils nous avaient dit de crier dès que nous apercevrions les côtes italiennes et que les Européens viendraient nous sauver ». C’est ce qui arriva après huit heures passées en mer : un bateau norvégien de l’opération Triton (pour la surveillance et le sauvetage) les a récupérés pour les conduire vers les côtes siciliennes.

Visage féminin « Il y a autant de femmes qui émigrent que d’hommes. Dans les statistiques mondiales, les femmes seraient même un petit peu plus nombreuses », assure le Dr Dicko. Au Mali, elles seraient 30 à 35% toujours selon le sociologue. « La première cause des départs étaient dans le cadre d’un regroupement familial. Maintenant elles partent toutes seules dans l’espoir de s’assurer des lendemains meilleurs en Occident ». Quatre millions de Maliens au moins vivent  à l’étranger, selon le ministère des Maliens de l’extérieur. Mais ce nombre est loin d’être exhaustif et ne prend pas en compte les migrants irréguliers. « 87% des femmes partent pour des raisons économiques et elles sont pour la plupart adultes et analphabètes », explique Mariam Traoré qui s’occupe des questions du genre au Centre d’information et de gestion des migrations (CIGEM). M. colle à ce profil. Après son divorce, elle a longtemps mûri et préparé son voyage. Trois années lui auront été nécessaires pour rassembler les fonds qui allaient financer son projet. « J’ai trois enfants que j’ai confiés à leur grand-mère. C’est pour eux que j’ai pris le risque de partir. C’est à la femme divorcée de supporter le plus souvent la charge de ses enfants, surtout si le père est polygame. Je veux leur offrir une meilleure vie que j’en ai eu », conclut-elle. Son périple est loin d’être terminé. Notre interlocutrice qui se trouve actuellement dans un centre de la Croix-Rouge en Italie, ne compte que les jours qui la séparent d’une nouvelle opportunité de prendre le large. Pour l’Allemagne, cette fois-ci : c’est l’eldorado qu’elle s’est choisi.

 

Nouveau naufrage en Méditerranée: 146 disparus, selon l’unique survivant

Quelque 146 migrants sont portés disparus après un nouveau naufrage au large de la Libye, selon le récit livré mercredi à l’ONU par le seul survivant, un jeune Gambien secouru apparemment par hasard en mer.

Ils venaient du Nigeria, de Gambie ou encore du Mali, il y avait parmi eux cinq enfants et plusieurs femmes enceintes, a raconté cet adolescent de 16 ans à un représentant du Haut commissariat de l’ONU pour les réfugiés (HCR) à l’hôpital de Lampedusa, l’île italienne la plus proche des côtes libyennes.

Le canot est parti dimanche ou lundi de Sabrata, dans le nord-ouest de la Libye, mais a commencé à prendre l’eau au bout de quelques heures. Le jeune Gambien a raconté avoir survécu en s’agrippant à un bidon d’essence.

C’est un navire militaire espagnol de l’opération européenne anti-passeurs Sophia qui l’a tiré de l’eau, avant qu’une vedette des gardes-côtes italiens vienne le conduire dans la nuit à Lampedusa.

Selon les premiers éléments recueillis par l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), il a été repéré presque par hasard par le navire espagnol.

« Cela démontre qu’il y a peut-être des naufrages dont nous ne saurons jamais rien, parce que les embarcations coulent sans laisser de trace », a déclaré à l’AFP Flavio di Giacomo, porte-parole en Italie de l’OIM.

Depuis le début de l’année, au moins 590 migrants sont morts ou disparus au large de la Libye, selon un bilan de l’OIM établi avant ce naufrage.

– 1.100 migrants secourus –

La semaine dernière, l’ONG espagnole Pro-Activa Open Arms avait découvert deux canots vides et en partie coulés, laissant redouter des dizaines de disparus puisque les passeurs entassent en général entre 120 et 140, parfois beaucoup plus, sur ces embarcations de fortune.

Un bateau de l'ONG espagnole Pro-Activa Open Arms, le 12 octobre 2016 au large de la Libye / AFP

Un bateau de l’ONG espagnole Pro-Activa Open Arms, le 12 octobre 2016 au large de la Libye / AFP

Le bilan de l’OIM ne prend cependant pas en compte ces disparus, estimant qu’au moins l’un des canots pourrait avoir été celui d’un naufrage la veille dans les eaux libyennes, dans lequel il y avait eu 54 survivants et 66 disparus.

Le danger ne freine cependant pas les départs: les gardes-côtes italiens ont annoncé avoir coordonné le secours de plus de 1.100 migrants entre mardi et mercredi matin au large de la Libye.

Ces derniers font actuellement route vers la Sicile, où ils porteront le total des arrivées cette année en Italie à plus de 24.000, soit une forte augmentation par rapport aux années précédentes.

Selon les ONG, cette accélération des départs serait due à la dégradation des conditions de vie des migrants en Libye et à la crainte, attisée par les passeurs, d’une prochaine fermeture de cette route maritime vers l’Europe.

Rome chercher en effet à renforcer sa coopération avec Tripoli pour tenter de s’assurant que les migrants soient intercepté avant d’atteindre les eaux internationales et conduits dans des camps avant d’être raccompagnés dans leur pays.

Cette stratégie suscite l’inquiétude des organisations de défense des droits de l’Homme, qui dénoncent les conditions effroyables en Libye pour les migrants d’Afrique sub-saharienne et rappellent que 40% de ceux qui arrivent en Italie et demandent à y rester pour raisons humanitaires obtiennent actuellement gain de cause.

Migrants ou conflits: des murs toujours plus nombreux dans le monde

A l’instar du mur anti-immigration voulu par Donald Trump à la frontière mexicaine, de multiples barrières s’élèvent dans le monde, en réponse à des inquiétudes sécuritaires ou pour endiguer les flux migratoires.

Quelque 70 murs existent de par le monde, contre seulement une dizaine il y a un quart de siècle, à la chute du mur de Berlin, selon la chercheuse Elisabeth Vallet, de l’université de Québec.

USA-Mexique: de la clôture au mur 

Donald Trump a signé, cinq jours après son arrivée à la Maison Blanche, un décret lançant la construction d’un mur anti-immigration de 1.600 km à la frontière mexicaine. Un projet qu’il entend faire financer par son voisin du Sud, qui ne veut pas en entendre parler.

Une clôture barbelée existe déjà sur plus d’un tiers des 3.000 km de frontière. Sa contruction, achevée en 2010, avait été décidée par le président George W. Bush. Surnommée « Tortilla curtain » (rideau de tortillas), cette barrière métallique de plus de cinq mètres de haut est équipée de projecteurs et de caméras. Quelque 18.500 agents patrouillent à la frontière.

Floraison en Europe 

– FRANCE: Face aux tentatives répétées de migrants de rejoindre clandestinement le Royaume Uni, les autorités françaises ont installé à Calais (nord) depuis l’été 2015 des clôtures grillagées protégeant, sur 30 kms, le port et, sur 40 kms, le tunnel sous la Manche.

Par ailleurs, depuis l’automne 2016, un mur de quatre mètres de hauteur et d’un kilomètre de long empêche, sur la rocade portuaire, les migrants de grimper sur les camions en route vers l’Angleterre. Il a été financé par la Grande-Bretagne à hauteur de 2,7 millions d’euros.

– HONGRIE: Le gouvernement conservateur de Vikor Orban a érigé en septembre 2015 une clôture barbelée de quatre mètres de haut sur les 175 km de sa frontière avec la Serbie, avant d’en construire une autre à la frontière croate.

Dans la foulée, plusieurs autres pays européens ont fait de même à leurs frontières: la MACEDOINE avec la Grèce, la SLOVENIE avec la Croatie et l’AUTRICHE avec la Slovénie.

– BULGARIE: En 2014, une clôture barbelée a été installée par la Bulgarie à sa frontière avec la Turquie, principal point d’entrée terrestre des migrants. Cette barrière s’étend désormais sur 176 km.

– GRECE: en 2012, les Grecs ont édifié une double barrière barbelée d’une hauteur de 2,5 à 3 mètres, à la frontière avec la Turquie, sur quelque 11 km.

– MAROC-ESPAGNE : sur la côte nord marocaine, les enclaves espagnoles de Ceuta et Melilla, seules portes d’accès terrestre à l’Europe pour les candidats à l’immigration, sont entourées de barrières grillagées d’une longueur d’une dizaine de kilomètres chacune. A Melilla, les clôtures comptent par endroits des barbelés et lames tranchantes, en dépit des dénonciations d’ONG. Les images de migrants prenant d’assaut ces barrières ont fait le tour du monde.

Des murs et des conflits 

– ISRAEL-CISJORDANIE : En juin 2002, à la suite d’une vague d’attentats palestiniens, les Israéliens ont commencé à installer une barrière, suivant plus ou moins le tracé de la « ligne verte » entre Israël et la Cisjordanie. Avec des murs de béton de parfois neuf mètres de haut, elle se trouve à 85% en Cisjordanie et isole 9,4% du territoire palestinien, dont Jérusalem-Est occupé et annexé. Achevée aux deux tiers, elle doit atteindre à terme environ 712 km, selon l’ONU.

D’autres séparations existent aux frontières avec la JORDANIE, la SYRIE, la BANDE DE GAZA et L’EGYPTE.

– ARABIE SAOUDITE – IRAK : Les Saoudiens, face à la menace du groupe Etat islamique, ont complété en 2014 un mur de sable existant par une barrière de protection et un système de surveillance électronique sur 900 kilomètres, dans le désert à la frontière irakienne.

– INDE – PAKISTAN: L’Inde a construit une clôture le long des 742 km de la Ligne de contrôle faisant office de frontière avec le Pakistan, au niveau de la région disputée du Cachemire, ainsi que sur les 230 km de frontière internationalement reconnue.

Par ailleurs, une clôture barbelée de 2.700 km a été érigée par New Delhi le long de la frontière avec le Bangladesh, contre l’immigration clandestine et la contrebande.

– COREES: En dépit de son nom, la zone démilitarisée (DMZ) entre les deux Corées est l’une des frontières les plus militarisées au monde, truffée de miradors et de mines. Cette ligne de démarcation de 250 km le long du 38e parallèle matérialise la frontière, selon des termes fixés à la fin de la guerre de Corée (1950-1953).

– MAROC – SAHARA OCCIDENTAL : Un mur de sable fortifié de 2.700 km est érigé, depuis les années 1980, entre les territoires sous contrôle marocain (80%) et les zones sous contrôle de la République arabe sahraouie démocratique, proclamée par le Front Polisario (20%).

– IRLANDE DU NORD: A Belfast, les murs de séparation en béton, métal et grillages érigés à partir de 1969 divisent encore, 19 ans après la signature des accords de paix, les quartiers catholiques et protestants de la ville. Le gouvernement s’est engagé en 2013 à les détruire sous dix ans.

– CHYPRE: Divisée à la suite de l’invasion turque de 1974, l’île méditerranéenne est séparée par une ligne de cessez-le-feu longue de 180 km, ponctuée de murs de béton, de barbelés et d’obstacles divers.

Trump incendie le Premier ministre australien

Le président américain aurait eu un échange houleux avec le chef du gouvernement de Canberra au sujet d’un accord sur l’accueil des migrants conclu avec Obama.

Donald Trump a incendié le Premier ministre australien Malcolm Turnbull lors d’un échange téléphonique houleux le weekend dernier au sujet d’un accord sur l’accueil de migrants forgé avec Canberra par l’administration Obama, selon le Washington Post. Les révélations du quotidien américain, mercredi, sont venues contredire le récit que M. Turnbull avait fait de cette conversation.

Le Premier ministre australien avait affirmé lundi que Donald Trump s’était engagé, en dépit de sa politique migratoire très restrictive, à honorer l’accord conclu par l’administration Obama portant sur l’accueil de plus d’un millier de réfugiés relégués par l’Australie dans des camps offshore controversés.

 Conversation abrégée

Le Washington Post rapporte de son côté que le nouvel occupant de la Maison blanche a brutalement abrégé samedi au bout de 25 minutes l’échange avec son interlocuteur qui devait durer une heure. L’Australie est un des alliés les plus proches des Etats-Unis. Juste avant, il a selon le quotidien américain affirmé à M. Turnbull que, des quatre conversations téléphoniques qu’il avait eues ce jour-là avec des dirigeants étrangers, celle-là avait été «de loin la pire».

M. Trump a notamment affirmé selon le Post à M. Turnbull qu’il allait «se faire tuer» sur le plan politique avec cet accord, et accusé l’Australie de chercher à exporter «les prochains terroristes de Boston». Des sources gouvernementales australiennes citées par l’Australian Broadcasting Corporation ont affirmé que l’article du Post était «correct en substance».

Démenti du 1er ministre

M. Turnbull s’est de son côté dit «déçu» que les détails présumés de cette conversation «très franche et directe» aient été révélés. «Mais je tiens à faire une observation: l’information selon laquelle le président m’aurait raccroché au nez n’est pas correcte», a déclaré le Premier ministre jeudi à la radio 2GB. «La conversation s’est achevée de façon courtoise.»

Reste que lundi, M. Turnbull avait devant les journalistes «remercié le président américain pour son engagement à respecter (l’)accord» sur la prise en charge des migrants des camps de rétention de l’île de Manus, en Papouasie-Nouvelle-Guinée, et de Nauru, minuscule île du Pacifique.

Après les révélations du Washington Post, M. Trump s’est cependant lâché sur cet accord dans un tweet: «Vous y croyez ? L’administration Obama a accepté de prendre des milliers d’immigrés illégaux à l’Australie. Pourquoi? Je vais étudier cet accord stupide».

Un engagement «pris»

Malgré ce commentaire, M. Turnbull ne s’est pas démonté: «l’engagement qu’a pris le président pendant cette conversation a été pris et il a été confirmé par son porte-parole un jour ou deux après.» Le porte-parole de la Maison blanche Sean Spicer avait en effet confirmé mardi que l’accord serait maintenu.

Nombreux étaient ceux qui craignaient que M. Trump, qui vient de signer un décret interdisant temporairement aux ressortissants de sept pays à majorité musulmane de fouler le sol américain, ne revienne sur cet accord, tant il s’attache depuis son investiture à détricoter la politique de son prédécesseur.

Cet accord qualifié d’«exceptionnel» avait été annoncé en novembre. Il porte sur la réinstallation aux Etats-Unis d’un millier de migrants parqués par l’Australie dans des camps offshore. Contrairement à ce qu’a tweeté M. Trump, l’accord ne porte pas sur des immigrés illégaux. Le ministre australien de l’Immigration Peter Dutton avait indiqué qu’il concernait les seuls migrants ayant obtenu le statut de réfugiés.

La question des réfugiés est éminemment controversée en Australie, pays qui mène une politique extrêmement dure à l’égard des étrangers tentant d’atteindre clandestinement son territoire.

Devenir hongrois, le parcours semé d’embûches d’un Africain

Quand Marcelo Cake-Baly est arrivé en Hongrie en 1976 depuis la Guinée-Bissau, il n’imaginait pas les obstacles qu’il aurait à affronter pour obtenir la nationalité hongroise. Quarante ans plus tard, les choses ne se sont pas arrangées, comme en témoigne une fiction dont il incarne le personnage principal.

Déjà salué par la critique comme un film majeur, le long-métrage « Le Citoyen », qui sort en Hongrie jeudi, retrace les difficultés d’un réfugié africain pour obtenir la citoyenneté dans ce pays ouvertement hostile à toute immigration.

Tourné juste avant la vague qui a vu des centaines de milliers de migrants transiter par l’Europe centrale en 2015, le film rappelle que les autorités hongroises n’ont jamais facilité l’intégration des étrangers, avant même le durcissement insufflé par le Premier ministre conservateur Viktor Orban.

Dans la scène d’ouverture, Wilson, le personnage principal, est prié de revenir « dans un an » après avoir échoué à l’examen de citoyenneté, lequel implique notamment de connaître par coeur les détails de la Constitution et de l’histoire médiévale hongroises.

Pour Marcelo Cake-Baly, 58 ans, cette fiction est un reflet de son propre itinéraire.

Arrivé en Hongrie communiste à l’âge de 18 ans après avoir été enfant-soldat dans son pays, le jeune homme y apprend le hongrois, une langue particulièrement difficile, et effectue de brillantes études, couronnées par un doctorat en économie.

Recruté par une banque, il perd son emploi à la chute du Rideau de fer en 1989 car il n’a pas la nationalité magyare. Il sera finalement naturalisé en 1994, après avoir réussi les tests.

Docteur et conducteur de tram Jamais cependant il ne retrouvera un emploi à la mesure de ses qualifications, du fait, estime-t-il, de sa couleur de peau.

« J’ai fait l’objet de tellement de rejet sur le marché de l’emploi que j’ai ravalé ma fierté. Aujourd’hui, je ne saurais même plus dire où se trouve mon diplôme de docteur, au fond d’un tiroir sans doute », confie-t-il à l’AFP.

Marcelo Cake-Baly retrouve une certaine sécurité professionnelle en 2005, quand il décroche un poste de conducteur de tram à Budapest.

C’est ainsi qu’il est remarqué par Roland Vranik, le réalisateur du « Citoyen ». « Un jour, un inconnu me saute dessus à la fin de mon service et me demande si je voudrais jouer dans un film sur des réfugiés. J’ai tout de suite dit oui », témoigne-t-il.

Roland Vranik reconnaît ne pas avoir eu l’embarras du choix dans son casting : « Il n’est pas évident de trouver un Africain d’âge moyen qui parle couramment hongrois ».

Le visage déterminé de son poulain s’affiche aujourd’hui dans les rues de Budapest pour la promotion du film. Une vision rare en Hongrie, un pays de 10 millions d’habitants où les Africains d’origine, au nombre de 5.000, ne représentent que 0,05% de la population et sont rarement mis à l’honneur.

Fumée dans la figure Marié à une Hongroise et père de trois grands enfants, Marcelo Cake-Baly dit avoir remarqué une dégradation de l’attitude de certains Hongrois depuis le lancement de campagnes anti-migrants par le gouvernement.

« Récemment, quelqu’un m’a soufflé sa fumée dans la figure à un arrêt de bus en me disant qu’il aurait mieux valu que je me noie en mer comme les autres », témoigne-t-il.

Mais « la majorité des gens sont amicaux », estime Marcelo Cake-Baly, qui reconnaît tout de même devoir résister parfois à la tentation de brandir son passeport hongrois.

Dans la fiction, Wilson est lui aussi l’objet de plus de bienveillance de la population que d’hostilité. Travaillant comme vigile, il est élu « employé de l’année » par ses collègues, et est épaulé dans ses démarches par son patron. Mais l’administration est têtue.

Roland Vranik souligne n’avoir pas voulu faire de film politique. « Ce qui m’intéressait, c’était le parcours d’un réfugié africain vulnérable cherchant à s’intégrer en Hongrie, et pour qui tout ce qui compte, c’est de parvenir à nourrir sa famille ».

Adam Kovats, un étudiant de 22 ans rencontré lors d’une avant-première du film à Budapest, se félicite de ce que « les réfugiés et les Hongrois y apparaissent dans toute leur complexité, loin du stéréotype du +bon+ réfugié et de l’Européen raciste ».

Immigration : l’Allemagne manie la carotte et le bâton

L’attentat du 19 décembre dernier, ayant fait 12 morts, a laissé l’Allemande groggy. La politique d’immigration de Mme Merkel, qui brigue un quatrième mandat, a été fortement critiquée. Berlin manie la carotte et le bâton : elle veut suspendre son aide aux pays qui ne veulent pas reprendre leurs ressortissants déboutés de sa demande d’asile en Allemagne.

« Ceux qui ne coopèrent pas suffisamment ne peuvent pas espérer bénéficier de notre aide au développement ». Ces propos sont de Sigmar Gabriel, Vice-chancelier allemand et président du parti social-démocrate, interrogé le week-end dernier par le magazine Der Spiegel. Une idée que n’a pas manqué de soutenir le ministre de l’Intérieur Thomas de Maizière, membre du parti conservateur. La présidente Angela Merkel continue de faire les frais de sa politique d’immigration. Ainsi, l’Allemagne menace de suspendre son aide aux pays, notamment ceux du Maghreb, qui refusent  de reprendre leurs ressortissants ayant vu leur demande d’asile refusée.

Le 19 décembre dernier, à Berlin, un attentat est survenu et a fait 12 morts. Le présumé auteur était Anis Amri, d’origine tunisienne qui plus est. Ce dernier, il y a plusieurs mois, avait été débouté de sa demande d’asile mais n’avait pu être renvoyé dans son pays. On pourrait penser que cette décision est un avertissement à destination de la Tunisie, qui avait refusé de reconnaître la nationalité de l’auteur présumé de l’attentat, mettant ainsi les autorités allemandes dans l’impossibilité de le renvoyer. Le cas de Amri est tout sauf isolé, puisque nombreux sont les ressortissants nord-africains qui se retrouvent dans la même situation : ils ne peuvent obtenir l’asile en Allemagne.  Le cas de Anis Amri a été un précédent fâcheux, qui a d’ailleurs amené le gouvernement Merkel a introduire des changements, notamment en plaçant en rétention des étrangers, selon le ministre de la Justice Haiko Maas, considérés comme des islamistes qui n’ont pu avoir l’asile avant de les expulser. Aujourd’hui mardi, cette proposition devait être au cœur de sa rencontre avec le ministre de l’Intérieur Thomas de Maizière.

L’attentat du 19 décembre a été un coup dur pour Angela Merkel, qui brigue un quatrième mandat. Elle a essuyé des critiques virulentes en provenance de la droite populiste allemande, Alternative pour l’Allemagne (AFD), qui a estimé que la menace islamiste « a été importée de manière systématique et irresponsable au cours de l’année et demie écoulée ».

 

 

Politique des migrants au Mali : entre corruption et contrôle

La perméabilité des frontières maliennes a toujours permis une libre circulation des personnes à travers les différents territoires nationaux. Le nouveau régime frontalier exigé par l’Union européenne est aujourd’hui appliqué et assuré par les services de police locaux, remettant en questions le système qui prévalait et favorisant la corruption de ces mêmes services de police envers les voyageurs.

Depuis quelque temps, il y a eu des efforts des pays européens pour faire respecter les accords de réadmission au Mali. Cependant, jusqu’à présent, l’intérêt de l’État malien de participer activement au retour de ses propres citoyens sur le territoire malien à été faible. Entre 2007 et 2009, la France a essayé d’appliquer un accord de réadmission avec le Mali et aussi d’ancrer le principe de « migration choisie ». Des progrès en ce sens, sous la présidence Sarkozy, ont été vécus par les Maliens comme une provocation. Des associations de d’expulsés et la Confédération syndicale CSTM s’étaient mobilisées, à ce sujet, via des manifestations devant l’ambassade française et contre une visite d’État du président Sarkozy, à l’époque. Au final l’accord de réadmission n’avait pas été signé.

Le Mali a participé au processus de Rabat lancé en 2006, ainsi qu’au dialogue entre l’Union européenne (UE) et l’Alliance pour la Migration, le Leadership et le Développement (AMLD). Un accord de migration avec l’Espagne a été conclu seulement en 2009 – combiné avec l’engagement de l’Espagne d’assurer l’accès légal des Maliens au marché du travail espagnol. Toutefois, cette promesse a coïncidé avec le début de la crise économique en Espagne, faisant stagner tout intérêt pour le signature d’accord de réadmission, intérêt qui n’a pas augmenté depuis du point de vue du Mali.

Le 11 décembre 2016, un communiqué conjoint de l’État malien avec l’UE a été adopté, réaffirmant l’intention de prendre des mesures pour lutter contre la migration dite « irrégulière » et la participation active du pays au retour de citoyens maliens.

Avec le sommet de La Vallette, l’objectif de la mise en œuvre des accords de réadmission avec le Mali est poussé, au niveau de l’UE, avec une nouvelle vigueur. En février 2016, la Commission européenne prépara un « ensemble d’incitations » à destination du Mali comportant les sous-points suivants:

– Soutien politique (sécurité)

– Soutien au processus de paix au Mali ainsi qu’à la lutte contre le terrorisme et à la lutte contre la radicalisation et l’extrémisme violent.

– Soutien dans le domaine de la gestion des frontières et du contrôle des frontières, ainsi que dans la modernisation de l’état civil.

– Fournir des fonds du Trésor de l’UE à la fois pour des projets conçus pour lutter contre les causes des réfugiés et pour les migrations, ainsi qu’une «gestion améliorée des migrations» et de la lutte contre les «réseaux criminels».

– L’utilisation de l’aide au développement par l’UE et ses États membres pour inciter le gouvernement malien à agir sur la base du dialogue.

Le document de l’UE souligne, en divers endroits, la dépendance de l’État malien à l’égard des fonds européens de développement et l’engagement militaire des États de l’UE, par l’intermédiaire des troupes étrangères présentes sur le territoire malien, comme la force Barkhane et la MINUSMA. Le document indique que l’UE utiliserait la dépendance militaire, politique et économique du Mali pour forcer le pays à accepter ces accords de réadmission.

La pression croissante de Bruxelles Selon une décision des chefs d’État et de gouvernement de l’UE du 21 octobre 2016, le Mali devra remplir, dès que possible, un «partenariat pour la mobilité». La visite d’Angela Merkel le 9 octobre 2016 avait cette finalité. Un mois plus tard, le commissaire européen à l’immigration et le ministre italien des Affaires étrangères étaient également à Bamako, pour traiter de ce sujet.

Le gouvernement malien est plongé dans un profond dilemme: d’un côté la pression de l’UE est croissante, alors que dans la même temps il a besoin des paiements promis pour la gestion des migrants, vient s’ajouter aussi la pression de la société civile malienne alertée par le rôle de plus en plus contradictoire joué par le ministère des Affaires étrangères qui participe activement aux procédures d’identification pour la préparation des déportations des Maliens immigrés, en collaboration avec les ambassades.

Le 22 novembre 2016, par exemple, des migrants maliens vivant en Allemagne ont été présentés menottés à une audience collective d’identification devant le personnel de l’ambassade à Halle. Directement après, certains ont atterri dans la prison de Büren. Les fonctionnaires maliens qui ont dirigé l’audience avaient reçu des instructions du ministère malien des Affaires étrangères et de l’Intérieur.

Érosion de la liberté de mouvement Les voisins du Mali comme l’Algérie, la Mauritanie et le Niger, coopèrent avec les Européens pour appliquer ce régime répressif des flux migratoires. Déjà avant 2012, l’État algérien était notoirement connu pour expulser, impitoyablement, les migrants et les réfugiés de l’Afrique. Lorsque la guerre a débuté dans le nord du Mali en 2012, l’Algérie avait temporairement fermé sa frontière sud et il n’y avait plus beaucoup de migrants voyageant dans la zone durant cette période de crise.

L’Algérie refoule directement les migrants sur le Mali et maintenant aussi sur le Niger. La Mauritanie, qui est sortie de la CEDEAO en 2001, a adopté le contrat de mobilité. En particulier, avec l’introduction d’une carte de séjour obligatoire. Le pays a massivement resserré ses lois sur l’immigration et refoulé les populations migrantes en Afrique subsaharienne avec une grande sévérité. Pendant des années, il y a eu des refoulements au Mali au poste frontière de Gogui. Voyager à travers le Niger est devenu aussi plus difficile, car cet État est obligé par les États de l’UE à contrôler cette migration « irrégulière ». Tout cela a un impact direct sur le Mali, où de nombreux migrants traversent les frontières pour atteindre les pays voisins.

Fermeture de la frontière dans la zone de transit Les conséquences d’une politique frontalière restrictive dans la région de Gao, qui borde le Niger au nord-est du Mali, sont particulièrement visibles et perceptibles. Le Niger est le pays par lequel passent les itinéraires migratoires transsahariens les plus fréquentés actuellement.

«En plus d’Agadez au Niger, Gao, est l’un des hubs centraux pour les personnes venant des différents pays d’Afrique de l’Ouest à destination du nord », explique Éric Alain Kamden, qui travaille pour Caritas depuis 2009. C’était déjà le cas avant le début de la guerre au Mali en 2012. Aujourd’hui, selon les statistiques de l’OIM, près de 150 migrants passent par jour à Gao. Beaucoup continuent leur voyage vers le Niger.

En fait, entre le Mali et le Niger, les populations des pays membres de la CEDEAO peuvent circuler librement. Cependant, cette libre circulation est de plus en plus compromise à cause du système de contrôle des migrants. Au point de passage frontalier de Yassan, des rapports montrent que les voyageurs sont rejetés par les services de police nigérien et renvoyés du côté malien. Cela vaut d’une part pour les citoyens maliens et, dans une large mesure, pour les ressortissants d’autres pays d’Afrique de l’Ouest. Les voyageurs maliens dont le passeport est encore valable pendant au moins 3 mois doivent avoir un contact, de préférence dans la capitale, Niamey, pour entrer au Niger. Ce contact doit être appelé immédiatement et ensuite contacté par un poste de police du poste frontalier pour confirmer que ce ressortissant malien à la frontière doit bien aller voir ce contact.

Rejet malgré les passeports Les voyageurs du sud du Mali qui ont passeport en cours de validité, quelque soit la durée de cette validité, ne peuvent actuellement voyager que s’ils ont un contact du côté nigérien. Pour des ressortissants d’autres pays d’Afrique de l’Ouest, par exemple du Ghana, de la Sierra Leone, de la Côte d’Ivoire, de la Gambie, du Sénégal et de la Guinée, qui peuvent être considéré comme des migrants, « les autorités ne tiennent même plus compte des frontières », explique un commissaire du poste frontalier de Yassan.

Depuis 2016, Plusieurs voyageurs sénégalais ont vu leurs documents de voyage rejeté, bien qu’ils avaient un passeport CEDEAO en cours de validité, une carte d’identité et un passeport de vaccination, donc tous les documents nécessaires. En juillet 2016, par exemple, quatre jeunes venant du Mali, du Togo, du Sénégal et du Burkina Faso, qui devaient franchir la frontière pour mettre en place des cellules de télécommunication de l’opérateur Orange, pour un employeur nigérien, ont été arrêtés. Bien qu’ils avaient avec eux leur équipement et leurs outils et qu’il était évident qu’ils voyageaint dans le cadre de leur travail, ils ont d’abord été rejetés à la frontière et ont seulement pu continuer leur voyage quand un employé de l’ONG Caritas, Éric Alain Kamden, s’est porté garant pour eux. Ce dernier a même été menacé de perdre son permis de séjour nigérien si les quatre hommes étaient pris à Agadez durant leur voyage vers le nord.

Eric Alain Kamden rencontre ce genre de cas quotidiennement dans son travail avec les voyageurs qui sont bloqués à Gao après avoir été rejetés de la frontière. Il est certain que ces pratiques de rejet à la frontière entre le Mali et le Niger sont une conséquence directe du processus de La Valette, d’autant plus que l’action des gardes frontière nigériens s’est intensifiée depuis les mesures prises lors de ce sommet.

L’OIM, postes frontaliers Jusqu’à récemment, il était normal, selon Kamden, de franchir la frontière entre le Mali et le Niger même sans papiers valables. Les personnes qui n’étaient pas en mesure de fournir une preuve d’identité lors d’un contrôle et qui indiquaient qu’elles allaient pénétrer au Niger, devaient seulement payer une pénalité de 1500 FCFA et se voyaient accorder un laissez-passer avec lequel elles pouvaient entrer au Niger pour 24h. Aujourd’hui, c’est impossible. La liberté de mouvement qui existait en Afrique de l’Ouest, plus tôt que dans l’espace Schengen, est devenue sous les auspices de la mise en œuvre du régime d’immigration de l’UE, un privilège.

L’Organisation internationale pour les migrations (OIM), détient des postes qui traitent tous les voyageurs qui arrivent, afin de détecter ceux qui sont considérés comme migrants.

Même à Gao, cette nouvelle politique est perceptible. Beaucoup de gens démunies sont bloqués à Gao après qu’ils aient interrompu leur voyage à cause de difficultés, par exemple des vols. Quand ils vont dormir quelque part, ils sont souvent pris par des soldats et emmenés au poste de police. Surtout les personnes anglophones sont rapidement soupçonnées d’être des espions des organisations terroristes Boko Haram ou Mujao. Si ce soupçon ne peut être étayé, ils sont accusés de «conduire nocturne ». Selon Kamden, il n’y avait pas auparavant d’accusations et d’emprisonnements à Gao pour cause de «conduite nocturne ». Ces pratiques sont le résultat direct de l’intensification des pressions de la part des Européens.

«Petite corruption policière» vs liberté de mouvement Les relations entre les policiers maliens et les voyageurs ont également changées par rapport aux années précédentes. Elle sont passées d’un contrôle en douceur à des contrôles plus sévères et de la « petite corruption policière ». Souvent, les bus sont arrêtés dans le nord et les papiers des passagers sont contrôlés. Dans la région de Gao, selon Kamden, les forces de sécurité se sont particulièrement concentrées sur ceux qui sont considérés comme « candidats à la migration ». Les voyageurs ont toujours appelé ça « les frais » de voyage. Une personne du sud du Mali, qui est soupçonnée de traverser les frontières du pays, doit payer au moins 5000 FCFA. Une procédure similaire existe sur la route entre Bamako et Ouagadougou au Burkina Faso. Les résidents locaux d’Heremakono ont rapporté que même de grands groupes de voyageurs étaient régulièrement exclus du voyage et laissés aux abords de la frontière si leurs papiers n’étaient pas reconnus comme valides ou sils ne payaient pas l’argent désiré. On ne sait pas dans quelle mesure, la police aux dépens des voyageurs, est directement liée aux exigences de la politique migratoire.

Contrairement à il y a quelques années, il est devenu beaucoup plus difficile de voyager sans documents d’identité (valides), dans cette partie du monde où la possession d’un passeport ne va pas de soi pour tout le monde. Depuis le sommet de La Valette, les pratiques de contrôle restrictif ont augmenté. Il y a une véritable alliance d’intérêts entre les policiers qui reçoivent un revenu supplémentaire grâce aux «frais de voyage» et le régime d’immigration qui veut rendre la route du Nord plus difficile.

En avril 2016, de nouveaux passeports biométriques ont été introduits au Mali, équipés d’une puce pour les protéger de la contrefaçon, alors que la version précédente de passeport malien était déjà équipée d’informations biométriques. En outre, le Mali a récemment introduit une nouvelle carte biométrique d’identification du personnel CEDEAO.

Cela fait du Mali, parmi les États de l’Afrique de l’Ouest, l’un des pionniers dans la biométrie des passeports. Les autorités et le gouvernement expliquent que ces mesures permettent à la fois de lutter contre la « migration irrégulière » et d’améliorer la situation sécuritaire. Pendant longtemps, de nombreux passeports maliens et cartes d’identité circulaient entre le Sahel et le Maghreb. Parce que les citoyens maliens étaient autorisés à voyager sans visa en Algérie et à y circuler librement, pour y gagner leur vie, pour accéder à d’autres pays du Maghreb ou à l’Europe.

Le gouvernement malien tente de mettre fin à cette pratique, conformément aux exigences de la politique migratoire européenne, grâce au système de biométrie des passeports. En outre, les nouveaux passeports sont annoncés comme facilitant les voyages et comme le signe d’un État utilisant un système moderne.

En fait, de nombreux maliens se plaignent des complications majeures et des difficultés inhérentes à ces nouveaux documents. Ainsi, la redevance pour le nouveau passeport sécurisé doit être payée à l’Ecobank, une banque privée, ce qui n’est possible qu’avec la soumission d’une carte NINA, qui était à l’origine conçue comme carte d’immatriculation des électeurs.

Cette procédure complexe a été faites, dans la pratique, pour Maliens habitant le territoire. Pour les ceux qui vivent à l’étranger, il a rendu impossible l’obtention d’un nouveau passeport très difficile et compliqué. L’augmentation des contrôles de passeport et d’identité aux frontières, signifie une perte réelle de la liberté de mouvement pour les personnes qui ne possèdent pas les documents de voyage en cours de validité pour des raisons différentes, cet obstacle affecte non seulement les gens sur le chemin de la migration, mais peut aussi avoir un impact sur la vie de certaines populations dont la vie et le travail sont fortement influencés par les voyages à travers les frontières entre les différents territoires nationaux.

Cela concerne, entre autres, les commerçants, les travailleurs migrants et les éleveurs de bétail nomades ou semi-nomades, tels que la population touareg qui a de tout temps fait des va-et-vient entre les différents territoires nationaux sans la présentation de passeports. Enfin et surtout, le passeport biométrique malien est un sujet particulièrement sensible, en raison de l’accès de l’UE aux bases de données biométriques des autorités maliennes afin d’utiliser ces données pour identifier et expulser les ressortissants maliens.

L’aéroport comme une zone frontalière À l’aéroport de Bamako, il est maintenant la norme que tous les voyageurs laissent leurs empreintes digitales à l’arrivée comme au départ. Rendant difficile de voyager avec des passeports empruntés. Cela permettait aux candidats à l’émigration de partir pour l’Europe sans risquer leur vie dans le désert et sur la mer.

En dehors de cela, un premier contrôle est effectué par la société de sécurité privée « Securicom » à l’aéroport de Bamako, en plus du contrôle régulier des passeports de la police. Selon Ousmane Diarra de l’AME, cette compagnie a la possibilité d’exclure des passagers de l’embarquement, même s’ils ont un visa en cours de validité. Pour Ousmane Diarra, Securicom, opère dans les aéroports africains comme une extension de l’agence de garde-frontières Frontex, chargée d’organiser des opérations de retour conjointes pour les États membres européens.

Vivre à l’extérieur : de rares exemples d’intégration

La sénégalaise Fatou Diome, auteur à  succès en France décrivait dans « Le Ventre de l’Atlantique » son parcours épineux, pourtant réussi, une fois arrivée en France. Mais pour nos compatriotes maliens, le chemin de l’intégration est bien plus long. C’’est le cas de Malick Coulibaly qui dans son ouvrage « Sans papiers, sans paris » publié en 2002, racontait ses pérégrinations et sa vie d’immigré, squatteur d’un immeuble sans eau ni électricité. Malick a pu néanmoins s’affirmer par la suite dans le monde de l’écriture avec deux autres romans, dont l’un publié par les Editions Cauris au Mali. Pour d’autres, l’intégration s’exprime dans le milieu artistique. Mams Yaffa, 34 ans, n’est pas vraiment un immigré mais il est arrivé en France à  l’âge de trois mois avec sa famille originaire de la région de Kayes : « Je travaille pour le label et la marque de vêtements Wati-B, bien connue des Maliens. J’ai fait mes études en province et je suis peut être mieux paré pour la vie française. Ceux qui sont arrivés dans les années 2000 ont sans doute eu plus de chances que ceux qui s’y aventurent aujourd’hui », estime-t-il, avec un regard critique sur les possibilités d’évolution des jeunes Maliens en France. D’autres comme Mamadou Cissé, 40 ans aujourd’hui, ont foulé le sol français il y a une quinzaine d’années et après bien des difficultés, ont réussi à  créer quelque chose. Une société de sécurité notamment qui emploie près d’une quarantaine de personnes dont 70% de Maliens. Si des exceptions comme l’homme d’affaires Malamine Koné, fondateur de la marque Airness, Dadia Diakité alias Dawala, producteur du label Wati be ou encore la chanteuse d’origine malienne Inna Modja, peuvent représenter des modèles pour ces jeunes qui veulent tenter leur chance en Europe ou ailleurs, l’issue de l’aventure reste incertaine pour la plupart. Et Mams Yaffa, sans tabous, conseillerait plutôt à  ses compatriotes de développer des projets dans leur pays d’origine. Lui qui possède une agence en communication et évènementiel, se rend d’ailleurs fréquemment au Mali. Sa structure est l’incubateur de référence pour les Maliens ou franco-maliens qui souhaitent créer une entreprise au Mali. Chemin faisant…

Partir à tout prix

Sur les questions de migrants, Oumar Sidibé est intarissable. Normal, lui-même ancien migrant revenu au pays, il connait très bien les réalités de ceux qui décident de partir. « Aller à  l’aventure est culturel chez nous. Dans chaque famille, il y a quelqu’un à  l’extérieur », explique celui qui, après avoir milité au sein de l’Association malienne des expulsés, a créé il y a un an l’association Initiative migration et développement (IMIGRAD), avec des partenaires. De plus, « la dégradation de la situation socio-économique ces dernières années a accéléré le mouvement et poussé au départ de nouvelles vagues de migrants », ajoute-t-il. De son expérience d’une dizaine d’années dans le secteur, M. Sidibé tire une certitude : rien ne peut empêcher un migrant de mettre en œuvre son projet. « La migration est une nécessité aujourd’hui, on n’a pas le choix », estime-t-on au CIGEM, Centre d’information sur la gestion des migrations, mis en place en 2008 par le Mali, la France et l’Espagne pour améliorer la gestion des flux migratoires en provenance du Mali. « Les jeunes ne peuvent que tenter d’immigrer vers des horizons plus promoteurs », assure son coordinateur, M. Abdoulaye Konaté. Si dans les années 70-80, la région de Kayes pourvoyait le gros du contingent de migrants, aujourd’hui, ils partent de partout au Mali, à  l’instar de la région de Sikasso o๠les terres, usées par des décennies de cultures intensives et de mauvaises pratiques, conjuguées aux effets des changements climatiques, poussent les jeunes à  l’exil. Sur les chemins des passeurs, dans le désert saharien puis en Méditerranée, il n’est pas rare de trouver des jeunes diplômés qui quittent Bamako et une situation relativement stable pour partir. « Je me souviens de B. qui vient d’une famille aisée et qui a supplié sa mère de le laisser partir à  l’aventure en Occident, un périple qui s’est mal terminé », témoigne M. Sidibé. « Partir, aujourd’hui encore plus qu’hier, C’’est contribuer à  la valorisation de son entourage. Imaginez un jeune dont l’épouse ne peut pas faire partie de la tontine du village parce qu’il est toujours là  », justifie un chercheur pour illustrer les incidences sociales de la migration et la pression que subissent les jeunes, souvent « obligés de prendre la route ». Et pourtant, en dehors des incidences économiques, la masse d’argent envoyée par les migrants permet d’améliorer la vie dans leurs communautés d’origine, il ne faut pas négliger les conséquences négatives. Dans certains villages, il ne reste plus que les vieux et les femmes mariées aux migrants, et qui se retrouvent seules, laissées à  elles-mêmes, surtout lorsque l’aventure de leurs époux ne se passent pas comme prévu. Car ils sont nombreux ceux pour qui le voyage vers l’eldorado se transforme en cauchemar. Les images des corps échoués par centaines sur les côtes européennes sont encore présentes dans les esprits. Parmi ceux qui survivent à  la traversée du désert, aux passeurs véreux, aux balles des gardes frontières et atteignent leur destination ou un point de transit, le voyage s’arrête bien souvent aux portes du pays rêvé. Selon le CIGEM, de 2002 à  2014, ce sont officiellement 91 033 migrants maliens qui sont revenus, principalement des retours involontaires, expulsions ou rapatriements, autant d’Europe que de pays subsahariens et du Maghreb. Il faut noter que la diaspora malienne compte environ 4,5 millions de personnes dont 2,5 en Côte d’Ivoire et environ 500 000 en Europe, le reste étant réparti pour la plupart en Afrique de l’Ouest et du Centre (Sénégal, Gabon, Centrafrique ou encore Angola). La crise économique, les sentiments nationalistes et xénophobes, ont compliqué la vie des migrants, en poussant des dizaines à  demander l’aide du gouvernement ou d’autres structures pour revenir au pays. « Un retour qui a lui aussi des incidences sociales énormes. D’abord parce que le migrant a « gaspillé » l’argent de la famille (environ 1 500 000 francs CFA pour atteindre la Méditerranée), sans le faire fructifier par son travail. C’’est ensuite une vraie humiliation pour la mère dont l’enfant a échoué, quand on connait les croyances qui attribuent l’échec d’un enfant à  la conduite indigne de sa mère », explique encore M. Sidibé. De ces migrants de retour forcé, difficile d’obtenir un témoignage, le traumatisme est toujours vif et la honte en empêche bon nombre de rentrer au sein de leur famille. Faire de la migration une opportunité de développement Depuis une décennie environ, le Mali s’est penché sur ses flux migratoires et sur les moyens à  mettre en œuvre pour en tirer en meilleur bénéfice tout en protégeant les candidats au départ des pièges d’un projet mal planifié. « La plupart des migrants en situation irrégulière partent sans aucune qualification et ne peuvent donc pas espérer une intégration rapide », nous explique-t-on au CIGEM, o๠plusieurs programmes ont été menés entre 2008 et 2014 pour doter les migrants de compétences en accord avec les besoins des pays ciblés. Des expériences qui ont moyennement marché. La Politique nationale de migration (PONAM), adoptée en septembre afin de faire de la migration « une chance pour le développement », comme le déclarait le Dr. Abdrahamane Sylla, ministre des Maliens de l’extérieur lors de son lancement. Cette politique est axée sur les deux volets essentiels que sont la gestion des migrations conformément aux normes internationales, et la mise en relation de la migration et du développement. Elle porte sur un ensemble de mécanismes visant à  favoriser l’investissement de la diaspora et organiser la migration légale, améliorer la gestion des frontières, lutter efficacement contre la migration irrégulière et promouvoir la protection internationale des Maliens à  travers le monde. « Nous sommes convaincus qu’en gérant mieux la migration, elle représentera une source d’investissement culturelle et sociale par des échanges humains et économiques », assure-t-on au ministère des Maliens de l’extérieur. 5 000 emplois directs en plus des infrastructures de production et de transformation dans les localités de départ, des projets de réinsertion socio-économique à  l’endroit des Maliens de retour volontaire, ou forcé, sont ainsi prévus dans le cadre de sa mise en œuvre. Il s’agit donc avant tout d’offrir des perspectives à  la jeunesse malienne, qui trouve que l’herbe est plus verte ailleurs, à  l’instar de ces quelques 200 000 étrangers venus de Côte d’Ivoire, du Congo, du Togo ou encore de France et de Syrie (voir encadré) et qui se sont installés au Mali oà¹, comme l’avoue Boris Aké, il est tout autant difficile de s’intégrer si on n’a pas un emploi stable et qu’on ne parle pas la langue.

Lampedusa: la mort au bout du voyage

Lampedusa. Une mer de têtes…Des enfants, des femmes,des jeunes, des moins vieux, dans l’eau…C’est bien la enième fois que ces images passent en boucle sur les télévisions. Des africains qui « fuient la faim et la guerre » et qui partent à  l’assaut de leur eldorado. Traversent le désert, la mer, bravent la faim qu’ils sont censés fuir, la violence qui les chassent de chez eux, pour mourir, affamés, assoifés ou noyés… Ce n’est pas la première fois que tout le monde crie: « ce n’est plus possible! », « ça ne peut plus continuer », « l’Europe doit prendre des mesures », « l’Afrique doit pouvoir gérer »… Et puis quoi encore???? Si nous arrêtions de faire semblant? C’est normal d’être choqué devant tant de vies perdues. Mais n’est-il pas temps de se poser les bonnes questions? Aux autorités, oui d’accord. Elles doivent évidemment prendre la mesure des choses et tout faire pour améliorer la vie de leurs peuples au lieu de construire des chateaux en Espagne (ou ailleurs..). Mais à  nous mêmes aussi!!! A toi qui veut partir en exil en France, en Suisse ou en Espagne, ou ailleurs, alors que le ressortissant de ces pays ne rêvent que de venir vivre en Afrique… T’es tu jamais demandé pourquoi ils ne veulent pas te laisser entrer chez eux? Mais au delà  de ça, pourquoi choisir de partir? Ce voyage incertain qui te coûtera dix voire vingt mille euros, pour au final aller servir dans une station essence ou laver des sols de bureaux, vaut-il vraiment la peine? Tes frères et sœurs resteront au pays, à  rouler les carrosseries, pendant que, si tu parviens au bout du voyage, tu devras te priver d’au moins un repas par jour pour envoyer le western union mensuel? Cela vaut-il vraiment la peine de mettre ta vie en danger pour aller vivre comme une bête, à  ne pas pouvoir revenir au pays enterrer ta vieille mère parce qu’une fois sorti tu ne pourras plus entrer de nouveau? A sursauter quand tu croises un policier? A vivre dans une pièce sans fenêtre avec tes enfants, alors que pour le même prix, si tu avais des papiers, tu serais dans un appartement agréable? Pourquoi es-tu prêt à  tout sacrifier au nom de « pas d’avenir en Afrique »? Regardes autour de toi! Les lignes bougent. Ton eldorado est en crise, il se cherche, il jette ses fils à  la rue, comment veux tu qu’il t’accepte toi? Ouvre les yeux, enfant d’Afrique. Que tu survives au voyage, les privations et les frustrations finiront bien par avoir raison de toi.Arrêtes de voir l’herbe verte ailleurs. Ce n’est pas l’herbe, c’est de l’eau, des flots qui vont t’engloutir. A mon humble avis, pour ce que tu vas y trouver, c’est trop cher payé…

Le calvaire des Maliens en Guinée équatoriale

Dimanche 14 octobre. Terminal 2 de l’aéroport international de Casablanca, au Maroc. Une vingtaine de Maliens sont en transit. Ils rentrent au Mali après avoir été arrêtés et emprisonnés pendant plus de quatre mois en Guinée équatoriale. Ils sont déçus de quitter un pays synonyme de réussite, mais soulagés de quitter des centres de détentions inhumains pour retrouver leur pays, quelque soient les nouvelles difficultés qu’ils vont y trouver. La xénophobie au sommet de l’Etat A bord du vol Royal Air Maroc AT 523 à  destination de Bamako, Abdoulaye Traoré raconte. « En Guinée équatoriale y a trois grandes institutions : le président de la République, sa femme et son fils. Quand l’un d’entre-eux est de mauvaise humeur, il vient à  la télé et lance des propos xénophobes. Ils demandent aux forces de l’ordre de contrôler tous les étrangers. Elles se lancent alors dans une opération partiale en les arrêtant tous, qu’ils aient des papiers ou pas.» Un partenaire de malheur d’Abdoulaye Traoré assure qu’ils étaient 170 détenus dans un petit logement sans électricité ni aération, et qu’ils étaient mal nourris. Des Camerounais, des Nigérians, des Maliens, des Béninois et d’autres africains. Tous arrêtés et pour certains refoulés sans pouvoir récupérer leurs biens. Des conditions de détention épouvantables Quand l’un d’entre-eux s’évanouissait, épuisé, les gardiens ne bougeaient pas. Il fallait donc traà®ner le malheureux vers un petit trou d’aération o๠il pouvait mieux respirer et reprendre ses esprits. Ceux qui pouvaient réunir assez d’argent pour se payer l’avion du retour pouvaient rentrer. Les autres étaient condamnés à  vivre dans ses conditions, voire à  y mourir. Malgré leur calvaire, les passagers du vol rendent hommage à  l’actuel ambassadeur du Mali en Guinée équatoriale, le Général Cissé. Il aurait selon eux négocié pour que les Maliens puissent avoir accès à  leurs cartes de séjour. Au-delà  de cet acte salutaire, il s’est beaucoup impliqué dans la résolution des problèmes rencontrés par ses compatriotes. Contrairement à  certains de ses conseillers qui font des malheurs des Maliens un « business » fructueux. Arrivés à  Bamako vers 2h00 du matin, la vingtaine de Maliens ont été accueillis à  la descente de l’avion par l’ambassadeur du Mali à  Malabo. Ils ne pleuraient pas de joie. Ils n’ont absolument rien pour rentrer dans leurs familles. Le général Cissé nous a confié en bas de la passerelle qu’ils ont été refoulés pour des raisons de papiers.

Correspondances, des voix de femmes qui traversent les continents

Paris, Montreuil, Bamako, Kayes, des voix de femmes qui traversent les continents pour leurs sœurs du Mali. A travers des lettres filmées par la talentueuse réalisatrice française Laurence Petit Jouvet, un pont est crée entre femmes de la diaspora vivant en France et celle du Mali de Bamako ou de Kayes. Le vécu de ces femmes est retracé à  travers une quinzaine de lettres filmées. Dans l’une d’elles, projeté à  la conférence de presse organisée par la réalisatrice Malienne Awa Traoré, chargée de la distribution de l’œuvre, on voit une Malienne, femme de ménage à  Paris s’exprimer sur sa journée de travail. Réveillé depuis 4h du matin, elle prend le métro, le RER parisien pour se rendre à  son travail et ne rentre finalement quÂ‘à  10h du soir. Un quotidien qui se répète depuis une trentaine d’années, un labeur épuisant, et nécessaire pour vivre en Europe, mais le «Â  premier mari d’une femme, n’est-il pas son travail », répète la vieille dame ? Emouvante, cette lettre filmée qui jette un pont sur l’immigration. Pour Awa Traoré, il s’agissait de faire partager une œuvre sensible, rare, qui parle aux femmes. C’’est pourquoi, elle a organisé une projection nationale, le 8 mars, date de la journée de la femme, pour consacrer le travail de sa consœur française. «Â  J’ai été assistante réalisatrice sur toute la partie malienne du documentaire et pour moi, C’’est une œuvre digne, qui honore les femmes maliennes et je me suis dit qu’elle ne pouvait pas rester dans les tiroirs. ». Awa Traoré a également sollicité l’aide de Mme Fatoumata Siré Diakité pour l’accompagner dans son projet. Présidente de l’APDF et ex ambassadrice du Mali en Allemagne, cette pionnière du combat pour l’émancipation des femmes n’ a pas hésité un seul instant pour être la marraine de l’évènement. «Â  Si je n’avais pas dit oui au projet de Awa, je n’aurais pas été ce que je pense être, a déclaré, Fatoumata Siré Diakité, honoré du travail de distribution d’Awa Traoré. «Â  Il faut aujourd’hui une relève dans le cinéma africain et Awa Traoré représente cette relève. » La réalisatrice malienne lance donc un appel à  tous les cinéphiles pour venir voir l’œuvre «Â Correspondances » au cinéma Babemba le 8 Mars 2012 : «Â On ne valorise pas assez notre cinéma, la séance ne coûte que 2000 francs. Les Maliens ne vont pas assez au cinéma mais mettent beaucoup d’argent dans les Sumu et autres cérémonies, mais pour le cinéma, ils hésitent. Et pourtant, le cinéma est basé sur une économie, il accompagne aussi le changement social. ». Rendez-vous le 8 mars 2012, journée internationale de la femme au Cinéma Babemba à  Bamako.

Emigration clandestine : Le drame continue en plein désert

l’émigration clandestine, malgré tous ses dangers et risques, continuent à  attirer foule. Douze ressortissants de plusieurs nationalités africaines, ont trouvé la mort dans le désert en voulant rallier l’Europe via l’Algérie. Les victimes étaient maliennes, ivoiriennes, camerounaises, sénégalaises, gambienne et guinéenne. Au départ, il y a avait 14 personnes dont le chauffeur et son apprenti. Selon le conducteur du camion, ils auraient quitté Kidal (nord Mali) en direction de l’Algérie oà¹, ils réussiront à  pénétrer illégalement. Cependant, le véhicule tombe en panne à  Tamanrasset oà¹, ils ne trouveront ni eau, ni nourriture pour vivre et survivre. Les malheureux triment durant des heures et des heures sans rien se mettre sous la dent. La faim et la soif finiront par avoir raison d’eux. Ils meurent finalement les uns après les autres jusqu’au dernier. Par ailleurs, l’on ne sait par quel miracle le chauffeur et son apprenti ont réussi à  rebrousser chemin et à  retourner au Mali. Parcours du combattant Un chauffeur très connu dans le transport de clandestins, explique que les victimes étant privées d’eau et d’électricité et n’ont pas survécu à  ce périple dans le désert. Malgré les difficultés, le trajet entre le nord Mali et l’Algérie, reste l’une des routes les plus convoités par les candidats à  l’émigration clandestine vers l’Europe. Le président de l’Association des initiatives de développement au Mali, Mamadou Diakité explique qu’il y a eu un relâchement dans les activités de prévention contre la clandestinité. Il faut selon lui, offrir une alternative à  ceux qui prennent le risque de partir. Le désert est la voix la plus prisée par les migrants parce que C’’est une vaste étendue o๠le contrôle est extrêmement difficile. Malgré des centaines et des centaines de décès chaque année, les candidats ne rechignent devant rien. Des mesures tardent à  être prises pour freiner ces dérives qui font perdre au continent, des milliers de bras valides. Inciter les jeunes à  rester sur le continent Des observateurs nationaux estiment que les Etats africains doivent mettre sur pied de meilleurs politiques de gouvernance et développer des stratégies de rétention des jeunes talents. Cela devrait se faire aussi bien dans le secteur formel qu’informel. Créer des initiatives en faveurs des jeunes et femmes qui constituent la majorité des candidats à  l’émigration.

Dérive sécuritaire dans l’Hexagone, quel avenir pour les Français d’origine… Africaine ?

Il semble qu’en France, il y ait deux sortes de Français, ceux d’origine Africaine comme les concernés se plaisent eux-mêmes à  se définir, et les français de souche, ceux qui ne viennent pas d’une ascendance africaine ou maghrébine. Gare à  la première catégorie, de vouloir se considérer au même titre que la deuxième, car Nicolas Sarkozy, le tout puissant chef de l’état français, et hongrois d’origine, né d’un père apatride, se plaira à  vous remettre à  votre place et à  coup de matraques. l’incident qui vient de se produire en France à  La Courneuve est significatif sur la place des Noirs en France. * comme le chantait Charles Trenet. Une belle chanson au demeurant, mais la déception est immense pour ceux qui aiment la France, qui n’y sont pas nés mais l’aiment quand même et voient leurs frères molestés de la sorte. «Â On abà®me davantage l’image de la France », s’exclame Ivana une citoyenne française d’origine yougoslave… Dérive sécuritaire Dérive sécuritaire, risque d’être déchu de votre nationalité, si en plus vous faà®tes de la délinquance, alors avis à  vous les immigrés africains, maghrébins, turques, qui avez été parqués dans des cités dortoirs, qui avez été confinés en marge de la société parce que malgré la diversité, malgré la France Black, blanc, beur, vous restez des ETRANGERS. Votre précieux sésame est menacé et surtout, évitez de vous trouver sur le chemin des forces de l’ordre. Elles apparaissent aujourd’hui comme une catégorie d’êtres humains supérieurs à  la moyenne des cités de banlieue… En 2007, Nicolas Sarkozy s’était plus ou moins fait élire sur le terreau de l’insécurité, après un avoir un ministre de l’Intérieur, aux méthodes musclées, aux discours presque xénophobes, répondant aux inquiétudes d’une frange de la population française, qui en avait marre des «Â racailles». Alors Nicolas le hongrois avait promis de les nettoyer «Â au Karcher »Â… Manipulation politico-médiatique Manipulation de l’opinion, indignation à  son comble, détourner l’attention des français sur le scandalo politico-médiatique de l’affaire Woerth, certains estiment que plus personne n’est dupe sur les dérives sécuritaires du président Sarkozy. A quoi bon opposer une résistance aux forces de l’ordre lorsqu’on a aucune chance d’être traité comme un être humain. Même le front national de Lepen trouve ça inefficace. La force, la politique spectacle pour émouvoir et servir le lit de la manipulation médiatique. Sarkozy a t-il réussi son coup ? En Septembre, les lois sur l’immigration et la sécurité seront à  nouveau discutése à  l’Assemblée Nationale. Quel sera le rôle et la parole de ces leaders d’opinion qu’on dit issus de la Diversité en France… Et pourquoi nos chefs d’états Africains ne s’émeuvent jamais de ce genre de rixes, alors qu’ils préfèrent déguster du champagne frais dans les couloirs dorés de l’Elysée un 14 Juillet… Une date déjà  oubliée dans les mémoires collectives…

Débats de femmes aux « Voix de Bamako » : les langues se délient

Ca se passe sous l’arbre à  palabres du Palais de la culture Amadou Hampaté Bâ de Bamako, pas loin sur les berges du fleuve du Niger, les artistes se préparent à  investir la scène, dès la tombée de la nuit. Mais avant, les femmes sont là  pour débattre ! Exploitation, immigration et leurres Premier thème, les femmes et l’immigration mais aussi l’exploitation dans le mariage. Autour de Mme urbain, présidente de l’association APAFE Muso Dan Be, elles évoquent leur quotidien de femmes, le rôle des aides ménagères dans leur vie : ces filles qui viennent de la brousse et investissent les demeures de la capitale : s’en suivent contrariétés, filles enceintes, et problèmes familiaux, maladies, infections au VIH SIDA. Les violences sexuelles sont aussi évoquées, l’exploitation de cette main d’oeuvre, bon marché, payées pour certaines 7500 francs CFA le mois et qui travaillent non stop ! Pour certaines, le fait d’employer ces filles, vient combler le vide laissé par les maris, partis à  l’aventure. Tout est lié. Une femme seule sans ressources, un homme absent, une fille à  tout faire. On s’interroge sur la manière d’encadrer ces jeunes filles : « effrontées parfois », juge une malienne qui se plaint d’avoir deux bonnes enceintes sous son toit ! ». Mme Urbain réplique :  » Nous sommes là  pour encadrer, aider, former les aides ménagères, leur inculquer des bases, et une organisation sociale. En matière de contraception, leur parler des méthodes, du planning familial etc.. » Lady Ngo Mang, journaliste à  3A Télésud et venue de Paris s’insurge :  » Comment aider ces filles, alors qu’on se connaà®t mal soi même, en tant que femmes ! Pourquoi ne pas utiliser les siens, la famille, les cousins, pour aider à  faire les tâches domestiques, au lieu d’amener ces filles du village à  la capitale ? » .  » C’est ainsi depuis longtemps au Mali », ajoute une autre.  » Oui mais bonjour les dégâts. Dégâts seulement ? Pour certaines, venir dans la capitale permet de travailler pour retourner l’été en famille et préparer leur trousseau de mariage. Cependant, la ville et ses leurres ont raison de certaines. On parle alors de sensibilisation, de campagnes d’information.  » C’est aussi à  ça que sert le festival Voix de Bamako, un festival Au féminin, réplique Fantani Touré, afin d’informer, de mettre en contact et de motiver à  faire des projets, outre le fait d’encourager les artistes. L’immigration et ses conséquences dans le foyer Cette fois, c’est Fantani Touré, la princesse de Bozola, qui anime la débat avec la réalisatrice Malienne Kadiatou Konaté. Sujet : l’immigration qui agit sur les familles, laisse une femme seule avec l’éducation de ses enfants. Les migrations internes, celles d’une progéniture qui s’en va orpailler ou fuir vers l’eldorado européen. Autant de phénomènes qui brisent des ménages, fragilisent des femmes, livrées au lévirat, à  la solitude ou à  la polygamie. De l’autre côté, pour celles qui ont atteint l’europe, survient l’exclusion, le manque d’intégration et l’enfermement entre quatre murs, d’une cité perdue de Champigny sur Marne :  » Je ne peux que témoigner de ce que je vois dans mon quartier en france. Ces femmes dépendantes de petit boulot, d’aides sociales et livrées à  elles mêmes », raconte Françoise Parent, présidente de l’association des femmes du quartier Mordacs. Mais le débat glisse vers les enfants. Ces jeunes Maliens, Africains, issus de l’immigration et dont l’avenir est menacé, l’éducation gâchée : » J’ai vu des jeunes dire non à  leurs parents, des enfants insulter leurs mères sans aucun remords dans le métro ! Est-ce que vous avez vu ça en Afrique ? », clame Fantani. Pour Mme Sanogo, résidente d’une banlieue française, il s’agit d’un manque de structuration, d’associations pour sensibiliser ces femmes immigrées et qui ne connaissent pas leurs droits ! « En France, la loi est stricte! », ajoute Fantani, moi j’ai un pied ici au Mali et là  bas, et je peux vous dire que ce n’est pas gai la vie Française! ». « Si tu ne sais pas o๠tu vas, sache au moins d’o๠tu viens, ajoute Kadiatou Konaté car il vaut mieux galérer ici qu’en France. » Pour une autre jeune fille, élève à  l’INA (l’institut National des Arts), c’est parfois le manque de modèles, la désillusion qui pousse les uns à  partir, à  envisager l’ailleurs, l’autre rive. Souleymane, jeune associatif, parle lui de projets pour retenir les migrants, le rôle de l’APEJ, pour promouvoir l’emploi des jeunes. Raviver l’espoir, promouvoir le rôle actif des femmes Mais surtout, ce qui ressort de ces deux jours de débat, c’est de réliser à  quel point ces femmes sont fortes quelque soit leur quotidien, celui de Oumou Coulibaly, veuve et vivant sous un toit qui tombe en ruine, trimant pour assurer la survie de ses sept enfants, ou encore Awa, jeune chef d’entreprise dans les BTP et qui cherche des marchés. Ou encore Lalla de l’INA, qui veut assurer la relève des comédiens Maliens, dans un institut o๠le théâtre n’est plus tout à  fait encouragé. Elles, ces femmes, ces jeunes filles, ont pris la parole pour dire leurs envies, leurs rages de vivre. Un proverbe dit que le Paradis se trouve aux pieds de la mère, qui éduque l’enfant, en fait un homme de substance, un homme du monde. Bob Marley chantait, . On ne le répètera jamais assez, la femme a toute sa place dans l’édification d’une nation, dans l’avenir d’une jeunesse en marche pourvu qu’elle s’en donne les moyens et l’envie, en dépit des contraintes sociales ou économiques. , affirme un leitmotiv… Samedi, au festival, Les Voix de Bamako, le dernier débat plus lourd sur l’excision, un phénomène qui touche les femmes Maliennes, aura lieu sous l’arbre à  palabre !

OFII – Mali : 9 taxis pour insérer des migrants de retour

« Montrer les potentiels énormes de la Diaspora malienne » Bien plus qu’une simple remise de clé, C’’est un événement symbolique qui a été célébré hier au siège de l’OFII. Il souligne des liens forts de codéveloppement entre la France et le Mali. Et avant tout, la volonté d’accompagnement vers l’autonomisation des migrants Maliens à  leur retour au pays. « La migration est une réalité humaine et forte » a indiqué Michel Reveyrand De Menton, Ambassadeur de France au Mali. Une question délicate et complexe, qui mérite des « accords symboliques » et des « projets nouveaux à  la hauteur de cette dimension économique ». Dans cette optique l’opération Taxis Neufs a été lancée hier midi par Stéphane Darmas, Directeur de la Représentation de l’OFII, leurs partenaires locaux l’ANPE Mali, le CIGEM et la cellule de codéveloppement du Ministère de l’Industrie, des Investissements et du Commerce. Pour Makan Sissoko, Directeur de l’ANPE Mali, il s’agit d’ « assurer une mobilité dans les meilleures conditions possibles ». Un dispositif d’information sur la mobilité des migrants a été d’ailleurs été mise en place avec le Centre d’information et de Gestion des Migrations (CIGEM), organisme malien basé à  Bamako. l’OFII s’inscrit dans cette démarche en facilitant l’insertion des migrants au pays par l’exercice d’une activité économique. Faciliter l’insertion des migrants de retour au pays Après le FIDIMA, ayant mis en avant le potentiel d’entreprenariat de la Diaspora Malienne, la cérémonie qui a eu lieu hier midi au siège de l’OFII, à  Bamako a montré une nouvelle fois la volonté des Maliens de retour à  participer au développement de leur pays par l’exercice d’une activité économique. Pour les appuyer, l’OFII a mis en place depuis 1998, un Programme d’Appui aux Initiatives des Migrants (PAIM) avec des financements sur la base de projets allant de 4000 à  7000 euros (environ 2,6 à  4,6 millions de Fcfa). L’opération « taxis neufs » a été initiée sur Dans le cadre de ce programme, 9 taxis neufs de marque Suzuki et un tracteur ont été remis hier midi à  leurs bénéficiaires. l’opération « Taxis neufs » a été menée grâce à  un partenariat technique entre la Cellule du codéveloppement du Ministère de l’Economie et des Finances de France, le Ministère des Maliens de l’Extérieur et l’Agence nationale pour l’emploi (ANPE) du Mali. Les véhicules ont été exemptés de droits de douane et de taxes de transport. Enthousiastes de renouer avec une vie professionnelle dans leur patrie, les bénéficiaires de ces véhicules, se sont dit satisfaits et fiers de rester chez eux afin de s’y rendre utiles. Un dispositif de réinstallation clé en mains pour les migrants l’OFII à  travers le PAIM examine en effet de nombreux projets de réinstallation à  l’initiative de migrants de retour au Mali depuis moins de 6 mois. La structure d’accompagnement comprend un comité franco-malien composé de la représentation de l’OFII, de l’Ambassade de France au Mali, de l’OFII, de l’ANPE Mali, de la cellule technique de codéveloppement des Ministères maliens de l’Economie, des Investissements et des Finances et des Maliens de l’Extérieur. Le programme fait appel à  deux opérateurs locaux, le Collectif Ingénieur Développement Sahel (CIDS), l’Association pour la formation, l’insertion et le développement rural en Afrique (AFIDRA) pour les autres régions du Mali. Elles assurent l’accompagnement au montage sur le terrain (étude de faisabilité, aide à  la mise en œuvre et suivi pet de suivi du projet pendant un an sur le terrain (étude faisabilité, aide, à  la mise en œuvre et suivi pendant un an). « En 2009, de nouveaux projets ont été facilités, notamment des projets de nouveaux véhicules neufs servant de taxis ». Selon Marion Dessombz, coordinatrice du Programme d’appui aux initiatives économiques de migrants (PAIM), l’aide au démarrage de l’activité représente un montant global d’environ 425 millions de F CFA pour 137 projets financés en 2008. La dynamique de codéveloppement a de beaux jours devant elle, aux migrants de saisir l’opportunité.

Maliens du Gabon : quel avenir dans l’après Bongo?

Le Mali est considéré comme le pays à  plus fort taux d’émigration en Afrique de l’ouest. A partir des années 1970, Les maliens ont souvent choisit le Gabon du fait d’opportunités économiques nées de l’exploitation pétrolière. La majorité exerce dans le domaine du commerce, mais de nombreux ressortissants maliens pratiquent des métiers que les gabonais rechignent à  exercer, tels que le transport (taxis), aux côtés des béninois, le bâtiment (manoeuvres), et l’exploitation forestière (ouvriers). Cela dit, comme au Congo voisin, les tout premiers expatriés maliens se sont installés au pays de feu El Hadj Omar Bongo pour intégrer la fonction publique, o๠l’un des rares métiers qui leur était ouvert était celui de l’enseignement. Ils jouissaient ainsi de salaires confortables, et étaient bien acceptés par la population autochtone. Pendant ses 41 ans au pouvoir, le président Bongo, décédé le 8 juin à  73 ans dans un hôpital de Barcelone suite à  un cancer abbdominal, a toujours considéré les maliens comme des citoyens à  part entière. Ces derniers contribuant au développement socio-économique du pays, ils représentaient la communauté la plus importante et faisaient le commerce transfrontalier, les marchandises coûtant moins chères dans cette zone. Ils représentent aujourd’hui entre 10 à  15% de la population totale du Gabon (1,2 million d’habitants), une main d’œuvre non négligeable. Sidi Diarra, un jeune malien de 22 ans résident au Gabon témoigne : « mon père s’est installé au Gabon en 1978 et aujourd’hui, il est professeur dans un lycée de Libreville. Je suis né et J’ai grandi ici. Durant toute notre vie, nous n’avons avons aucun problème avec les gabonais. J’ignore ce que nous allons devenir après Bongo, mais C’’était un homme bon qui a toujours défendu notre cause. » l’après Bongo Un grand nombre d’expatriés maliens du Gabon affirme que ce pays reste un modèle de stabilité politique, et tous espèrent que ce climat perdure après la mort du président, malgré les spéculations qui vont bon train sur les éventuelles querelles de succession. l’incertitude règne au sein de cette communauté qui n’a connu qu’un seul régime durant quatre décennies. Quelle sera désormais la politique adoptée par les nouvelles autorités du pays envers les expatriés qui contribuent à  l’économie du Gabon ? Difficile à  dire, alors que la crise économique a accentué les difficultés des gabonais, et exacerbé les réflexes xénophobes envers les étrangers parmi certaines catégories de la population. Toutefois, le président ATT se rendra ce mardi à  Libreville, pour participer, parmi une vingtaine de chefs d’Etat et de gouvernement francophones, aux obsèques d’Omar Bongo Ondimba. Comme à  l’accoutumée, il profitera de son séjour pour rencontrer les membres de la diaspora lors d’une assemblée générale au gymnase d’Olouni, dans la capitale. Une occasion de rassurer ses compatriotes sur leur avenir en terre gabonaiseÂ