El Ghassim Wane : « L’opération de retrait de la MINUSMA a été complexe et difficile »

Entamé le 1er juillet dernier, le processus de retrait de la MINUSMA est presque bouclé. Après 10 ans de présence, la mission onusienne quitte le Mali, où elle a longtemps été décriée par une grande partie de la population, qui regrettait son inefficacité et son inadaptation face à la complexe crise malienne. Le Mauritanien El Ghassim Wane, nommé le 15 mars 2021 et arrivé au Mali en mai de la même année, aura passé un peu plus deux ans comme chef de la mission. Dans cette longue interview exclusive, il revient sur la rétrocession des bases, les polémiques dans la région de Kidal, l’après 31 décembre 2023, le rapport sur Moura, l’avenir de l’Accord pour la paix et fait un bilan des 10 années de la MINUSMA.

La MINUSMA a organisé une cérémonie de clôture à son quartier général le 11 décembre pour marquer le départ de la mission. Quelle appréciation faites-vous du processus de retrait ?

La cérémonie qui a eu lieu le 11 décembre était destinée à marquer symboliquement le départ de la mission du Mali, à la suite de la demande faite à cet effet par les autorités de la Transition et de l’adoption subséquente par le Conseil de sécurité de la Résolution 2690. Dans les faits, nous avons déjà fermé les dix bases qui devaient l’être d’ici au 31 décembre 2023. Les trois restantes (Bamako, Gao et Tombouctou) seront converties en sites de liquidation à partir du 1er janvier 2024. Mais, même s’agissant de ces dernières emprises, nous avons déjà procédé à une rétrocession partielle aux autorités maliennes de la base de Gao et nous transfèrerons celle de Sénou, à Bamako, d’ici la fin du mois. Pour Tombouctou, tout est fait pour accélérer la cadence et assurer la remise de l’emprise au plus tard en février de l’année prochaine. Plus des deux tiers de nos personnels civils et en uniforme ont déjà quitté le Mali. Tous les personnels restants, à l’exception de ceux qui seront impliqués dans la liquidation de la mission, auront quitté le Mali d’ici la fin de l’année. Nous sommes évidemment satisfaits des résultats obtenus. Réussir le pari d’un retrait dans les délais fixés était loin d’être acquis, compte tenu de l’environnement sécuritaire, de l’envergure de la mission, de l’immensité de notre théâtre d’opération et d’autres contraintes, y compris logistiques.

Les Nations unies craignaient que le délai prévu pour le retrait ne soit trop court. Finalement, le défi a été relevé ?

Il est évident que le délai prescrit pour le retrait est exceptionnellement court. C’est une réalité ! Dans une situation normale, une opération de retrait de cette envergure prend beaucoup plus de temps. La question n’est pas que logistique et sécuritaire, il s’agit aussi d’assurer un transfert adéquat des tâches entre la mission qui part et les autorités du pays hôte et, le cas échéant, avec l’équipe-pays des Nations unies, qui regroupe les Agences, Fonds et Programmes de l’organisation, et d’autres acteurs, de manière à ce qu’il y ait une certaine continuité dans l’effort. Il faut, dans toute la mesure du possible, éviter des vides qui seraient préjudiciables à la stabilité du pays. Une fois que le délai fut déterminé, notre responsabilité était d’œuvrer à la réalisation de l’objectif fixé en préservant par dessus tout la sécurité de nos personnels. C’est ce qui a été fait, grâce au dévouement et au professionnalisme des personnels nationaux et internationaux de la MINUSMA, qui ont travaillé d’arrache-pied et fait montre d’une résilience et d’une créativité remarquables pour surmonter les difficultés rencontrées. Il a fallu aussi une bonne coordination avec notre siège à New York, qui nous a apporté tout le soutien nécessaire, ainsi qu’avec les pays contributeurs de troupes et de personnels de police. Il est crucial de relever que, dès le départ, des mécanismes de coordination ont été mis en place avec les autorités maliennes, tant au niveau national que local, avec pour objectif de faciliter un retrait ordonné et en toute sécurité. Il y a eu indéniablement des difficultés, mais je me réjouis de ce que l’objectif commun d’un retrait d’ici à la fin de l’année soit maintenant sur le point d’être réalisé.

La mission a dénoncé des contraintes dans son processus de retrait, notamment des autorisations de vols non accordées. Cela vous a-t-il obligé à vous adapter ?

On ne le dira jamais assez : le retrait de la MINUSMA est une opération d’une très grande complexité et les délais prescrits sont sans précédent pour une mission de cette envergure. Il a donc fallu s’adapter continuellement, en gardant à l’esprit l’impératif du respect du délai convenu, que nos partenaires maliens, et c’est parfaitement légitime, ont régulièrement rappelé, et celui de la sécurité de nos Casques bleus, qui revêt une importance d’autant plus grande que nous sommes la mission la plus dangereuse jamais déployée par les Nations unies. Oui, il y a eu des difficultés et nous nous en sommes ouverts à nos interlocuteurs maliens, dans le cadre des mécanismes de coordination mis en place pour faciliter le retrait, en plus des discussions que notre siège à New York a régulièrement eues avec la Mission permanente de la République du Mali auprès des Nations unies. En tant que partenaires devant œuvrer ensemble et en bonne intelligence à l’exécution de la Résolution 2690, il était important que nous puissions échanger en toute franchise sur le processus, sur nos préoccupations respectives et sur les difficultés rencontrées pour essayer de trouver les solutions les plus idoines.

Certains Maliens ont dénoncé une trahison de la part de la mission. Les autorités ont évoqué un non-respect de la résolution des Nations unies, notamment pour la rétrocession des bases de la région de Kidal. Pourquoi avoir fait le choix de partir sans cérémonie de rétrocession ?

 Je voudrais tout d’abord souligner que dans la très grande majorité des cas (Ogossagou, Douentza, Goundam, Ménaka, Mopti, Ansongo, entre autres), la fermeture de nos emprises et leur rétrocession se sont très bien passées, à la satisfaction et du gouvernement malien et de la MINUSMA. Cela dénote d’un degré élevé de coordination et de collaboration. Pour revenir plus directement à votre question, il importe d’abord de rappeler qu’avant le début du processus de retrait  nous avons élaboré un chronogramme tenant compte de plusieurs facteurs, notamment logistiques et sécuritaires. Ce plan a été partagé avec les autorités maliennes et, lorsque des ajustements ont dû être opérés du fait de contraintes totalement indépendantes de notre volonté, ceux-ci furent également communiqués, dans l’esprit du partenariat qui sous-tend la bonne mise en œuvre de la Résolution 2690. La fermeture des bases de la mission a été exécutée dans les périodes prévues. Cela n’a pu être le cas à Kidal, où la période envisagée a dû être réaménagée du fait d’impératifs sécuritaires. Je l’ai dit, et le Conseil de sécurité l’a souligné, la sécurité de nos Casques bleus est une préoccupation primordiale. Dans un contexte marqué par l’absence d’un mandat substantif à la suite de la demande de retrait et de la résolution du Conseil, la réduction drastique de nos capacités à nous protéger et l’augmentation très significative des risques sécuritaires, nous avions la responsabilité, l’obligation, de ne pas mettre la vie de nos personnels davantage en danger. Que ce soit lors des retraits de Ber, dans la région de Tombouctou, ou des bases situées dans la région de Kidal, nous avons fait face à des attaques et sommes, à plusieurs reprises, passés tout près de la catastrophe. Nous devons tous être soulagés qu’aucun Casque bleu n’ait perdu la vie dans ces opérations, même s’il y a eu des blessés nombreux : c’est un motif de satisfaction pour la mission, pour les pays contributeurs de troupes et de personnels de police, ainsi que pour les familles et proches des Casques bleus, et pour l’ensemble des États membres des Nations unies, étant donné que la mission a été mandatée par le Conseil de sécurité en leur nom.

Les autorités de la Transition étaient-elles informées de votre départ précipité de Kidal et de l’intention de ne pas faire de cérémonie de rétrocession ?

Comme indiqué plus haut, nous avons établi avec les autorités maliennes des canaux de communication multiples et à différents niveaux pour assurer une exécution aussi efficace et efficiente que possible du retrait de la mission. Dans ce cadre, nous échangeons régulièrement et dans le détail sur tous les aspects du processus de retrait, son évolution et nos préoccupations respectives.

Je crois que tous les acteurs concernés avaient conscience qu’un retrait dans des délais si courts, quelle que soit par ailleurs la bonne volonté des uns et des autres, ne pouvait être sans difficultés, d’autant qu’il est intervenu à un moment où le processus de paix était paralysé. Il peut y avoir des appréciations divergentes de ce qui s’est passé. Mais nous pouvons tous nous féliciter de ce qu’il est maintenant certain que le délai convenu pour le retrait sera respecté.

Une impression générale s’est dégagée, celle d’avoir favorisé les groupes armés, notamment la CMA, en agissant ainsi. Que répondez-vous ?

L’opération de retrait de la MINUSMA a été exécutée dans des conditions dont on ne soulignera jamais assez la complexité et la difficulté. Dans des situations de ce type, il n’est pas rare que des critiques soient entendues de la part des parties. Il ne vous a pas échappé que nous avons aussi fait l’objet de critiques de la part des Mouvements signataires. Notre unique objectif était d’assurer la bonne exécution de la résolution 2690. Et, dans cette entreprise, nous ne nous sommes jamais départis des principes qui gouvernent le fonctionnement des opérations de maintien de la paix des Nations unies. Oui, il y a eu des incompréhensions et des questionnements, mais tout ceci est maintenant derrière nous. L’important, c’est la poursuite du processus de stabilisation, de paix et réconciliation et, pour cela, le Mali, qui appartient à la famille des Nations unies, pourra toujours compter sur le soutien indéfectible de l’organisation. La MINUSMA part, mais les Nations unies, à travers leurs Agences, Fonds et Programmes, restent pour continuer et renforcer la coopération existante.

Après cette phase de retrait, une nouvelle, dite de liquidation, va débuter le 1er janvier 2024. En quoi consiste-t-elle ? Comment de temps va-t-elle durer ? Quels personnels sont prévus à cet effet ?

Cette phase est mise à profit pour faire transporter hors du Mali les matériels et équipements, notamment ceux appartenant aux contingents qui n’ont pu être rapatriés avant la fin du retrait, ainsi que pour gérer tous les autres aspects, administratifs, financiers et autres, liés aux activités de la mission, et disposer de ses biens. Il importe de s’assurer que tout est en bon ordre.

L’expérience des Nations unies montre que ce type d’activités requiert normalement 18 mois pour être mené à bien. Mais mes collègues qui gèrent ce dossier ont la détermination de faire en sorte que ce travail soit accompli dans les délais les plus courts qui soient. Celui-ci mobilisera des personnels civils, avec le soutien d’effectifs limités de personnels de garde pour protéger les équipements encore au Mali et assurer la sécurité intérieure des sites de liquidation.

Combien d’agents de la MINUSMA auront quitté le Mali d’ici le 31 décembre 2023 ?

Plus des deux tiers de notre personnel sont déjà rentrés dans leurs pays respectifs. L’ensemble des personnels civils et en uniforme de la mission qui ne sont pas impliqués dans la phase de liquidation quitteront le Mali au plus tard le 31 décembre. Les personnels en uniforme – dont le nombre sera très limité – qui resteront au Mali seront ceux des unités de garde déployées sur les sites de liquidation, pour en assurer la sécurité intérieure, étant entendu que la sécurisation du périmètre extérieur de ces sites sera assurée par les autorités maliennes. Nous espérons nous accorder rapidement avec les autorités sur le détail des arrangements à mettre en place. Aux unités de garde s’ajouteront des éléments, également en nombre très réduit – post-curseurs laissés sur place par les contingents dont les équipements n’auront pu être rapatriés d’ici la fin de l’année

La MINUSMA employait de nombreux nationaux et avait des contrats avec des sociétés maliennes. Était-il prévu dans votre plan de retrait une indemnité pour ces personnes et entités ?

Le retrait est intervenu de façon abrupte et a dû être exécuté dans des délais on ne peut plus courts, apportant donc son lot de complications administratives et autres. Nous nous sommes employés à atténuer, dans le cadre strict de ce que permettent les règles des Nations unies et les règles contractuelles en cause, son impact pour nos personnels nationaux et internationaux et les entités avec lesquelles nous avons travaillé. Mais il est évident qu’il y a des limites à ce que nous pouvons faire.

Le Mali, par la voix de son ministre des Affaires étrangères, a le 16 juin dernier demandé le retrait sans délai de la MINUSMA. Vous étiez présent à cette réunion du Conseil de sécurité de l’ONU. Quel était le ressenti général après cette demande ?

Comme vous le savez sans doute, le Secrétariat des Nations unies, dans le rapport soumis au Conseil de sécurité pour sa session de juin 2023, avait recommandé que le mandat de la MINUSMA fût renouvelé pour une année supplémentaire. Et des consultations informelles avaient déjà commencé entre les membres du Conseil de sécurité sur un projet de résolution. Tel est le contexte dans lequel la demande de retrait a été faite. Les opérations de maintien de la paix, qui, même dans les conditions les plus favorables, sont d’une grande complexité, sont déployées avec le consentement de l’État hôte. Et il est évident qu’en l’absence d’un tel consentement il est quasiment impossible de mener à bien un mandat. La Résolution 2690 a tiré les conséquences de cet état de fait.

Avant que le Conseil n’entérine la fin de la MINUSMA, le 30 juin dernier, y a-t-il eu des discussions pour essayer de faire changer d’avis les autorités maliennes ?

Tout ce que je peux dire est que dès lors que le Mali a annoncé sa demande de retrait, l’attention s’est portée sur les conditions et les modalités de ce retrait, culminant avec l’adoption unanime de la Résolution 2690. Celle-ci constitue le guide commun, pour les Nations unies et pour le Mali, en vue de la réalisation du retrait demandé par les autorités maliennes.

Qu’est-ce qui a, selon vous, motivé la décision des autorités maliennes de réclamer le départ de la mission ?

Le Mali a exposé ses raisons devant le Conseil de sécurité le 16 juin 2023, lors d’une séance ouverte.

Le rapport de Moura, dont la publication avait été retardée, est très mal passé auprès des autorités. Pensez-vous que cela a eu un impact sur leur décision ?

Il n’appartient pas à la MINUSMA de spéculer sur les motivations d’une décision prise par les autorités d’un pays souverain ou de les commenter. Notre rôle, à ce stade, est de mettre en œuvre la résolution du Conseil de sécurité et c’est ce à quoi nous nous sommes attelés depuis le 1er juillet 2023.

La MINUSMA était très importante dans le processus de mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation.  Avec la reprise des hostilités, la prise de Kidal et votre départ, estimez-vous l’Accord enterré ?

Aucune des parties signataires n’a, à ma connaissance, dénoncé l’Accord, qui constitue un cadre de sortie de crise important pour le Conseil de sécurité des Nations unies, ainsi que cet organe l’a, du reste, souligné dans le préambule de la Résolution 2690.

L’appui à la mise en œuvre de l’Accord de paix était la première priorité stratégique de la MINUSMA. Et, conformément aux résolutions du Conseil mandatant la mission, celle-ci a joué un rôle crucial, tant en termes de bons offices que de soutien opérationnel. Les Nations unies, en tant qu’organisation, restent bien sûr engagées en appui au Mali dans sa quête d’une paix durable, en prenant en compte les besoins et priorités de l’État malien.

La MINUSMA était également engagée dans le processus de transition, notamment sur le plan électoral. Quid après votre départ ?

Le mandat de la MINUSMA a pris fin le 30 juin 2023, date de l’adoption de la Résolution 2690 du Conseil de sécurité des Nations unies. Dans le cadre de l’accompagnement de la Transition en cours au Mali et des cycles électoraux précédents, la MINUSMA s’était fortement impliquée, et de multiples manières. Elle a assuré la présidence du Comité local de suivi de la Transition, comprenant la CEDEAO, l’UA et la MINUSMA; apporté un soutien technique, logistique, financier et sécuritaire pour la bonne tenue des élections; œuvré à la participation des femmes et des jeunes aux élections et au renforcement de leur rôle dans la gouvernance locale et nationale; mobilisé le soutien de la communauté internationale, etc. Tout ceci a été fait dans un esprit d’excellente coopération avec les autorités maliennes compétentes. Le rôle de la MINUSMA était d’appuyer les efforts du gouvernement du Mali, et non de se substituer à l’État, qui continuera donc à mettre en œuvre ses objectifs de transition. Évidemment, les agences compétentes des Nations unies continueront, dans le cadre des priorités des autorités, à appuyer le processus électoral.

L’heure du départ est également celle des comptes. Après 10 ans de présence, quel bilan chiffré faites-vous de la MINUSMA ?

Il est impossible de faire un bilan exhaustif des 10 ans de la mission en peu de mots. Mais, pour le bénéfice de vos lecteurs, il me semble d’abord important de rappeler les conditions dans lesquelles la mission a été déployée et a opéré au Mali : le contexte sécuritaire, marqué par l’omniprésence du terrorisme, une menace asymétrique pour le moins inhabituelle pour le maintien de la paix; la taille de notre théâtre d’opération, avec une présence tant au centre que dans le nord du Mali et l’attente forte et bien évidemment légitime des populations quant à l’amélioration rapide de la situation sécuritaire et à la matérialisation des dividendes de la paix. À tout cela il convient d’ajouter la fragilité des processus politiques que nous étions mandatés à soutenir. Je peux dire avec certitude que l’action de la mission a eu des effets très bénéfiques et j’ai pu l’observer de mes propres yeux lors des très nombreux déplacements que j’ai effectués à l’intérieur du Mali. Nous avons aidé à la stabilisation des centres urbains dans les zones où nous étions déployés; exécuté des centaines de projets socio-économiques qui ont bénéficié aux populations, notamment dans le centre et le nord; réhabilité de nombreuses infrastructures aériennes, y compris à Gao, Tessalit et Kidal, ainsi que d’autres infrastructures tout aussi importantes tels des ponts  situés entre Sévaré et Bandiagara, le long de la route dite du Poisson qui conduit au Burkina Faso; protégé des civils dans nos zones de déploiement; soutenu de façon multiforme la réconciliation au niveau local; apporté un appui aux forces de défense et de sécurité, y compris en conduisant à leur demande des évacuations sanitaires et médicales et en finançant la construction d’infrastructures; facilité l’acheminement de l’aide humanitaire et appuyé les efforts de promotion et de protection des droits de l’Homme, y compris à travers un programme soutenu de renforcement des capacités. Nous avons aussi, comme je l’ai souligné tantôt, soutenu la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la Transition, en plus du processus d’élaboration d’une stratégie malienne de stabilisation des régions centrales du Mali.

Estimez-vous que la mission a été accomplie et les objectifs atteints ?

L’on ne peut dire, s’agissant d’une opération aussi complexe, que les objectifs ont été complètement atteints. La quête d’une paix durable est une entreprise de longue haleine. Elle repose fondamentalement sur la volonté et les efforts des acteurs nationaux. Dans le cas d’espèce, le rôle de la MINUSMA était de les accompagner et d’appuyer leurs efforts, sans préjudice de la responsabilité première qui est la leur.

De ce point de vue, il me semble que nous avons joué notre rôle. Et il est notable que, dans les zones où nous étions déployés, notre action a eu un effet tangible indéniable et était appréciée. Bien sûr, il y a eu des critiques, et cela est normal, car aucune œuvre ne peut être parfaite. La nôtre encore moins, car dépendant de beaucoup de variables multiples et complexes.

Nous nous sommes constamment employés à renforcer l’efficacité de notre action, y compris en restant à l’écoute des autorités, des autres acteurs concernés et de la population, d’une manière plus générale. Et nous nous sommes dépensés sans compter pour la cause de la paix, de la sécurité et de la stabilité au Mali. L’engagement des personnels de la mission fut tout simplement remarquable, surtout au regard de l’omniprésence et de la gravité du risque sécuritaire. Le nombre élevé des pertes que nous avons subies et de blessures infligées à nos Casques bleus en est une claire et tragique illustration.

Permettez-moi de saisir cette occasion pour, en mon nom et au nom de l’ensemble de mes collègues, remercier le gouvernement et le peuple maliens pour leur collaboration et soutien au cours de cette décennie et de formuler les vœux les meilleurs pour l’année 2024 et, au-delà, pour l’avènement d’un Mali en paix, stable et prospère.

COP 28 : un rendez vous crucial pour la planète

La Conférence des Parties à la Convention – Cadre des Nations Unies sur les Changements Climatiques (COP 28) se tient du 30 novembre au 12 décembre 2023 à Dubaï. Pour les Nations Unies, l’action climatique ne peut plus attendre, car les températures de la planète ont atteint des niveaux records et que les phénomènes météorologiques extrêmes perturbent un peu partout la vie des populations. C’est donc « une opportunité unique de rectifier le tir », en accélérant le rythme des mesures à prendre.

La COP 28 fera le bilan des actions entreprises depuis l’Accord de Paris de 2015 et planifiera les actions à envisager. Selon les données scientifiques, pour préserver un climat vivable, la production de charbon, de pétrole et de gaz doit diminuer rapidement et la capacité mondiale d’énergies renouvelables (éolienne, solaire, hydraulique et géothermique), doit tripler d’ici 2030. Dans le même temps, le financement de l’adaptation et les investissements pour la résilience doivent augmenter.

Rencontre cruciale

La Conférence de Dubaï ne peut pas être une conférence de plus. Elle doit être un tournant où les pays se mettront d’accord sur les mesures strictes à adopter en faveur du climat, mais aussi sur la manière dont ces mesures seront mises en œuvre, et évalueront les progrès réalisés pour l’atteinte des objectifs de Paris en termes d’atténuation, d’adaptation et de financement.

À Dubaï se conclura le premier Bilan mondial, débuté à Glasgow lors de la COP 26. Le processus doit permettre aux pays de mesurer ce qui reste à faire et les inciter à des plans d’action climatique ambitieux et accélérés. Les enjeux sont la santé et le bien-être de notre planète, alerte l’ONU.

« La banquise de l’Antarctique est à son plus bas niveau. De nouveaux chiffres montrent qu’en septembre elle était inférieure de 1,5 millions de kilomètres carrés à la moyenne de la période de l’année, une superficie à peu près égale à la taille du Portugal, de l’Espagne, de la France et de l’Allemagne réunis ». Mais le monde entier  est concerné, « parce que ce qui se passe là-bas a des impacts à des milliers de kilomètres », relève le Secrétaire général de l’ONU. Plus d’un siècle d’utilisation non rationnelle des énergies et des terres a donc entraîné un réchauffement de 1,1°C par rapport aux niveaux préindustriels. Chaque augmentation du réchauffement est susceptible d’aggraver les phénomènes météorologiques extrêmes, comme la chaleur et les inondations, et entraîner des changements climatiques irréversibles.

ONU : la Russie bloque une résolution sur le Mali

Témoignant de son soutien à Bamako, la Russie a bloqué mercredi une résolution du Conseil de sécurité de l’ONU qui aurait prolongé le mandat d’experts ayant rendu des conclusions accablantes pour la junte malienne et ses  » partenaires de sécurité étrangers « .

Le texte prévoyait de prolonger d’un an le régime de sanctions mis en place en 2017 contre des individus mettant en danger l’accord de paix de 2015, et le mandat du comité d’experts chargés de les surveiller. Elle a recueilli 13 voix en faveur, une abstention (Chine) et une voix contre, celle de la Russie qui dispose d’un droit de veto.

La Russie était d’accord pour prolonger les sanctions, mais seulement pour la dernière fois, et voulait surtout dissoudre le comité d’experts dont elle conteste, avec Bamako, l’objectivité. Sa résolution en ce sens a été rejetée, avec une voix pour, une contre (Japon) et 13 abstentions.

Les sanctions  » ne doivent pas être utilisées comme un moyen d’influence étrangère au Mali, et c’est ce que le comité d’experts faisait « , a justifié l’ambassadeur russe Vassili Nebenzia, estimant que le projet de résolution préparée par la France et les Émirats arabes unis  » n’aurait pas aidé le processus de paix  » mais aurait  » encore plus opposé les parties « . Dans son dernier rapport publié la semaine dernière, le comité d’experts dénonçait des violences contre les femmes perpétrées de façon  » systématique et organisée  » par les forces armées maliennes et leurs  » partenaires de sécurité étrangers « . Le régime de sanctions sur le Mali (gel des avoirs ou interdiction de voyage), qui expire le 31 août, avait été mis en place en 2017 et concernait huit individus, notamment des responsables de groupes signataires de l’accord de paix de 2015 accusés de le mettre en péril.

MINUSMA : le conseil de sécurité se penche sur le processus de retrait

Le conseil de sécurité des Nations Unies s’est réuni hier lundi pour évoquer la situation au Mali ainsi que le processus de retrait de la MINUSMA. Dans son allocution, le chef de la MINUSMA a tenu a signalé des difficultés constatées dans ce processus de retrait, spécifiquement celui du camp de Ber marqué par une attaque contre les casques bleus qui a fait 4 blessés. « Clôturer une mission bâtie sur une décennie en l’espace de six mois est une entreprise complexe et ambitieuse », a ajouté le chef de la MINUSMA. Concrètement, cela implique le rapatriement de 12.947 personnels en uniforme, la séparation de 1.786 personnels civils, le rapatriement et/ou la relocalisation d’un chargement d’environ 5.500 conteneurs maritimes de matériel des contingents et appartenant à l’ONU et de près de 4.000 véhicules, ainsi que le fermeture et remise de 12 camps et d’une base opérationnelle temporaire aux autorités civiles maliennes.

La 2e phase du processus de retrait du personnel et des bases de la MINUSMA se déroulera jusqu’au 15 décembre 2023 affirme le chef de la MINUSMA. Il se concentrera sur la fermeture de 6 bases (Tessalit, Aguelhok et Kidal, au Nord, Douentza et Mopti, au Centre, et Ansongo à l’Est). Le personnel, les équipements et matériels concernés seront redéployés dans les super camps de Tombouctou, Gao et Bamako, avant d’être rapatriés dans leurs pays respectifs. Une phase qui sera très complexe prévient le chef de la MINUSMA.

Pour sa part, le Mali regrette les incidents intervenus dans le retrait de la MINUSMA de certain camp et tient au respect strict du calendrier établi pour le retrait de la MINUSMA au plus tard le 31 décembre 2023. « Je tiens à rappeler que le Gouvernement du Mali n’envisage pas de prolongation du départ de la Mission » a assuré Issa Konfourou, ambassadeur représentant permanent du Mali auprès des Nations Unies.

Moura : le gouvernement réfute et décide d’ouvrir une enquête contre l’ONU

Dans un communiqué lu à la télévision nationale le samedi 13 mai, le gouvernement de transition a dénoncé un «rapport biaisé, reposant sur un récit fictif ».  Les autorité de la transition réagissaient à la publication d’un rapport du Haut Commissariat des Nations unies pour les droits de l’homme faisant suite à une enquête menée dans le centre du pays. Ce document accuse l’armée et des combattants « étrangers » d’avoir tué plus de 500 personnes.

Le Colonel Abdoulaye Maïga, ministre d’Etat, ministre de l’Administration territoriale et de la Décentralisation, porte-parole du gouvernement, a affirmé qu' »aucun ressortissant civil de Moura n’a perdu la vie pendant l’opération militaire », insistant sur le fait que les morts ne concernaient « que des combattants terroristes ». Dans le rapport, la mission d’établissement des faits a assuré avoir utilisé des images satellites. Le Colonel Maiga a expliqué « qu’en aucun moment, ni la Mission Multidimensionnelle Intégrée des Nations Unies pour la Stabilisation au Mali (Minusma), ni le Haut Commissariat aux Droits de l’Homme ne lui ont adressé une demande d’autorisation pour prendre des images de Moura grâce à des satellites », soulignant qu’« en utilisant des satellites pour obtenir des images, sans autorisation et à l’insu des autorités maliennes, la Mission d’établissement des faits a effectué une manœuvre clandestine contre la sécurité nationale du Mali ». Par conséquent, « le Gouvernement décide d’ouvrir immédiatement une enquête judiciaire contre la Mission d’établissement des faits et ses complices pour espionnage, atteinte à la sûreté extérieure de l’Etat, des crimes réprimés par le code pénal (Article 33 et 35), ainsi que de complot militaire, un crime réprimé par le code de justice militaire (Article 130), sans préjuger de la qualification des autorités judiciaires »

Moura : l’ONU accuse les FAMa et du personnel militaire étranger d’avoir tué plus de 500 personnes

Dans un rapport publié ce vendredi 11 mai 2023, le Haut-Commissariat aux droits de l’Homme des Nations unies, accuse l’armée malienne et des combattants « étrangers » d’avoir exécuté entre le 27 et le 31 mars 2022 au moins 500 personnes lors d’une opération de traque de terroristes à Moura.

Le rapport de la mission d’établissement des faits du Bureau des droits de l’homme des Nations Unies a conclu qu’il y’a de fortes indications que plus de 500 personnes aient été tuées par les soldats maliens et du personnel militaire étranger en mars 2022 au cours d’une opération militaire dans le village de Moura. D’après l’ONU, le rapport est le résultat d’une vaste mission visant à établir des faits menés durant plusieurs mois par le personnel des Nations Unies au Mali. Le rapport précise que les demandes d’accès au village ont été refusées par les autorités maliennes. La méthodologie se base sur des entretiens avec des victimes et des témoins, ainsi que des sources d’informations médico-légales et autres telles que l’imagerie satellitaire. Les Forces Armées Maliennes ont toujours démenti les informations portant sur des exactions commises sur des civils à Moura. C’est une opération assure-t-elle antiterroristes qui a permis de neutraliser au moins 203 terroristes. Dans le rapport publié ce vendredi, les pages 18 à 21 sont consacrées au déroulement de l’opération militaire menée par les Forces Armées Maliennes, avec des éléments des forces spéciales et appuyées par des personnels militaires étrangers. Pour Volker Türk Haut-Commissaire de l’ONU aux droits de l’Homme, la tragédie de Moura pourrait constituer un crime de guerre.

Sur la BBC le 17 avril 2022, le ministre des Affaires étrangères Abdoulaye Diop qui invite à dépolitiser la question des droits de l’homme a assuré qu’il n’y avait pas eu de massacre à Moura, fustigeant une « propagande occidentale ».

La question de Moura cristallise les tensions entre les autorités de la transition et plusieurs pays occidentaux. Quelques jours après l’opération, des ONG de défense des Droits de l’homme ont accusé l’armée d’exactions sur les civils. Mais des organisations locales se sont désolidarisés de certains des rapports produits dénonçant la méthodologie. « Nous nous sommes désolidarisés du communiqué de la FIDH, car nous avons des antennes à Mopti à Douentza et à Bandiagara et aucune ne nous a saisi pour des soupçons d’exactions de l’armée sur les populations civiles » a explique Me Moctar Mariko, président de l’association malienne des droits de l’Homme.

Le gouvernement n’a pas encore officiellement réagi au rapport de l’ONU mais ce nouveau document pourrait porter un coup dur aux relations entre les autorités et la MINUSMA alors que le renouvellement du mandat de la mission sera débattue le mois prochain.

Maintien de la paix : l’ONU très présente en Afrique

Sur les 12 missions de maintien de la paix de l’ONU en cours dans le monde, 6 sont déployées en Afrique. En plus du Mali (MINUSMA), elles sont présentes en RDC (MONUSCO), en Centrafrique (MINUSCA), au Sahara occidental (MINURSO), au Soudan du Sud (MINUSS) et à Abiyé, au Soudan  (FISNUA).

Elles tirent leur légitimité du Chapitre 7 de la Charte des Nations unies, qui stipule qu’en en cas de menace à la paix le Conseil de sécurité peut autoriser l’usage de tous les moyens, y compris coercitifs. Et visent donc très souvent à faciliter le processus politique et l’organisation d’élections libres, à aider au désarmement, à la démobilisation et à la réintégration des anciens combattants et à protéger les civils.

La Mission de l’organisation des Nations unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo (MONUSCO) a remplacé le 1er juillet 2010 la MONUC (Mission de l’organisation des Nations unies en République démocratique du Congo). Ce changement reflétait la nouvelle phase dans laquelle le pays était entré en application de la Résolution 1925 du Conseil de sécurité du 28 mai 2010. La nouvelle mission est autorisée à utiliser tous les moyens nécessaires pour s’acquitter de son mandat.

En République Centrafricaine, c’est dans un rapport, le 3 mars 2014, que le Secrétaire général a recommandé au Conseil de sécurité d’autoriser le déploiement d’une opération de maintien de la paix multidimensionnelle, dont la priorité première serait la protection des civils. Ainsi naissait la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation en République Centrafricaine (MINUSCA), en remplacement de la Mission internationale de soutien à la Centrafrique, sous conduite africaine (MISCA), déployée dans le pays en 2013.

Créée par la Résolution 690 du 29 avril 1981, suite à l’acceptation des propositions de règlement par le Maroc et le Front Polisario le 30 août 1988, la Mission des Nations unies pour l’organisation d’un référendum au Sahara occidental (MINURSO) est la plus vielle mission de maintien de paix sur le continent. Le 29 avril 2016, alors que le différent persistait, le Conseil de sécurité a adopté la Résolution 2285, demandant aux parties de continuer à faire preuve de volonté politique afin d’engager des négociations résolues et axées sur le fond.

La Mission des Nations unies au Soudan du Sud (MINUSS) a été créée par la Résolution 1996, le 9 juillet 2011, après l’indépendance du pays. Auparavant, l’ONU avait mis en place une Force intérimaire de sécurité pour Abiyé (FISNUA), pour répondre à l’urgence dans cette zone du Soudan réclamée par les deux pays.

Autorisée à faire usage de la force pour protéger les civils et les travailleurs humanitaires, la FISNUA contrôle cette zone et facilite l’acheminement de l’aide.

ONU : le Mali récuse le statut de porte plume de la France

Dans une lettre adressée le 1er mars à Pedro Comissario Afonso, président en exercice du Conseil de sécurité, le gouvernement de transition récuse le statut de porte-plume de la France sur toutes questions examinées par le Conseil de sécurité concernant le Mali. Les portes plumes sont chargées de rédiger les projets de résolution et de déclaration auprès du conseil de sécurité. D’après le document, la France a porté la plume sur tous les sujets concernant le Mali au Conseil de sécurité depuis décembre 2012. Au sein du conseil de sécurité, ce rôle est généralement dévolu à la France, le Royaume-Uni et les Etats-Unis. En août 2022, le Mali a porté plainte auprès du Conseil de sécurité pour actes d’agression, de subversion, de déstabilisation et de violation de l’espace aérien malien par des aéronefs des forces armées françaises.

Aminata Dramane Traoré : « l’ONU est aux ordres des membres du Conseil de sécurité et non à l’écoute des peuples souverains »

Sociologue, écrivaine, militante altermondialiste, Aminata Dramane Traoré a plusieurs cordes à son arc et autant de combats à mener. Depuis toujours, ou presque, elle questionne le pré-établi, pousse l’analyse et dénonce au besoin. Ses prises de position vont de la dénonciation de la politique française en Afrique au néolibéralisme ou encore aux questions des droits des femmes. Toujours avec l’intensité qui la caractérise, l’ancienne ministre de la Culture répond à nos questions.

Le Mali célèbre ce 14 janvier la « Journée nationale de la souveraineté retrouvée ». Estimez-vous que nous le pays a vraiment recouvré sa souveraineté ?

J’ai pris part à la mobilisation du 14 janvier 2022 parce qu’indignée par les sanctions infligées à notre pays par la CEDEAO et l’UEMOA. C’est un combat d’avant-garde, en raison de l’importance stratégique des enjeux de souveraineté de nos jours. Ils sont politiques, géopolitiques, militaires, sécuritaires, mais aussi économiques, sociaux, culturels et écologiques. Un jalon important vers l’affirmation de notre souveraineté a donc été franchi ce jour-là. La souveraineté étant une quête de tous les jours, les acquis doivent être entretenus et consolidés. Tel est le sens à donner à la « Journée nationale de la souveraineté retrouvée ».

Dans cette quête de souveraineté, les autorités de la Transition ont pris de nombreuses décisions qui ont créé des tensions avec certains partenaires, notamment la France ou certains voisins. Cette quête doit-elle être aussi conflictuelle ?

La conflictualité de cette quête ne dépend pas que du Mali. Elle rend compte de la volonté de puissance de la France dans ses anciennes colonies d’Afrique, ainsi que des failles dans la coopération sous-régionale, bilatérale, multilatérale et internationale. Notre pays est un véritable cas d’école.

Le Mali redéfinit ses alliances dans une période très polarisée, notamment par la guerre en Ukraine. Comment tirer son épingle du jeu dans cette situation ?

La guerre en Ukraine jette une lumière crue sur les buts des guerres des temps présents, dont celle qui a été imposée au Mali au nom de « l’anti-terrorisme ». Je n’ai pas cessé, dès 2012, de contester et de déconstruire ce narratif français à la lumière de ce que je sais des interventions militaires étrangères. J’ai exprimé mon désaccord en ayant à l’esprit ce qui s’était passé en Irak et surtout en Libye. Alors comment choisir son camp entre des puissances qui s’autoproclament « démocratiques » et les autres (Chine, Russie, Turquie), qu’elles considèrent comme autocratiques parce qu’elles n’adhèrent pas à leurs principes politiques ? C’est le non alignement qui nous sied le mieux pour nous frayer notre propre voie, conformément aux besoins de nos peuples qui n’en peuvent plus des fausses promesses de développement, de démocratie et de gouvernance.

Vous avez symboliquement été candidate au poste de Secrétaire général de l’ONU. Selon vous, pourquoi la réunion demandée par le Mali en août dernier concernant un soutien présumé de la France aux terroristes n’aboutit-elle pas ?

Permettez-moi de rappeler d’abord que cette candidature symbolique au poste de Secrétaire général des Nations-Unies, auquel les femmes étaient invitées à se présenter, était l’occasion pour moi de rappeler que la crise de la démocratie libérale est stratégique. Le fait d’être homme ou femme à ce poste ne fait pas de différence dans l’ordre congénitalement injuste et violent du capitalisme. L’ONU est aux ordres des membres du Conseil de sécurité et non à l’écoute des peuples souverains.

Il n’y a de ce fait rien d’étonnant au mépris avec lequel la demande du Mali a été traitée au sujet d’une réunion autour d’une question qui fâche la France et perturbe ses alliés occidentaux. C’est pour cette raison que je souligne dans la vidéo que je consacre à l’ONU que la réforme dont elle a besoin va bien au-delà de la représentation de ses membres au Conseil de sécurité. Sa mission est à repenser à la lumière des crises qui s’amoncellent et s’aggravent, du fait de la loi du plus fort qui est la règle du jeu.

L’affirmation de la souveraineté du Mali ou d’un nouveau narratif du pays ne passe-t-elle pas aussi par la rupture des relations diplomatiques avec la France, accusée par les autorités de soutenir les terroristes ?

Ces relations sont à repenser et à refonder en se respectant et en s’écoutant mutuellement sur tous les sujets, y compris ceux qui fâchent comme le soutien de la France aux terroristes. En s’y refusant, Paris conforte l’idée selon laquelle elle est au-dessus du droit international, qu’elle prétend défendre, et aggrave la crise de confiance qui remonte aux premières heures de l’Opération Serval, suite à l’interdiction de l’accès à Kidal aux FAMa.

Qu’avez-vous ressenti à l’annonce du départ des soldats français du pays ?

Bien entendu un sentiment de fierté. La guerre dite « anti-djihadiste » étant sous nos cieux une nouvelle étape de l’impérialisme et de la recolonisation par l’intervention militaire.

Mais la situation sécuritaire ne s’est guère améliorée depuis…

Il en est ainsi parce le diagnostic est erroné. Les conséquences sont érigées en causes. Nombreux sont les analystes avisés qui rappellent que le terrorisme est un mode opératoire et non un ennemi spécifique. Le phénomène prend de l’ampleur au fur et à mesure que les mécanismes du pillage de nos richesses, du délitement du lien social et de la destruction de l’environnement s’accentuent au profit des banques, des grandes entreprises et de leurs actionnaires. L’ennemi principal est, en somme, le néolibéralisme, que nos élites s’interdisent de nommer pour ne pas scier la branche de l’arbre sur laquelle elles sont assises.

Des discours anti politique française se font de plus en plus entendre au Sahel, mais dans des pays qui ont en commun d’être dirigés par des militaires. Cette dynamique pourra-t-elle être maintenue après le retour à l’ordre constitutionnel ?

Les discours anti politique française ont largement contribué à l’éveil des consciences et à la libération de la parole. Ils ont également alerté la France sur l’impérieuse nécessité de changer son fusil d’épaule. Les dirigeants qui succéderont aux militaires se rabaisseront aux yeux de leurs concitoyens et des opinions publiques en jouant au béni-oui-ouisme.

Selon certains analystes, les raisons profondes de la crise au Mali sont d’abord économiques. Partagez-vous cette analyse ?

Ces analystes ont parfaitement raison. Je dis la même chose sans pour autant être sur la même longueur d’onde que la plupart d’entre eux, parce qu’il y a économie et économie. Pour moi, il ne s’agit pas d’approfondir les politiques néolibérales au nom d’une prétendue intégration dans l‘économie mondiale. Il s’agit, à la lumière des inégalités entre Nations et à l’intérieur de chaque pays, de réinventer l’économie afin qu’elle devienne une réponse à la faim, à la soif, à la peur et à la haine. L’état actuel des vieux pays industrialisés, comme celui des émergents, en pleine tourmente, invite à méditer sur ce que « développer économiquement » veut dire.

Pour atteindre notre souveraineté, nous avons donc besoin de transformer notre économie ? Par quoi cela passe-t-il selon-vous ?

C’est une excellente question dont nous devons nous saisir toutes et tous et à tous les niveaux. La tâche est colossale et exaltante. J’abonde dans le sens de Kako Nubukpo, Commissaire de l’UEMOA, qui plaide pour la révision de fond en comble des accords de libre-échange entre l’UE et les ACP (pays d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique), du néoprotectionnisme et du « juste échange ». Il faut dans cette perspective (la liste n’est pas exhaustive) : une pensée économique et politique autonome, nourrie des enseignements de ces 62 ans d’essais de développement, la confiance en nous-mêmes et en les autres, la solidarité, dont le patriotisme économique est l’une des clés. On achète et on consomme Malien et Africain au lieu de continuer à importer tout et n’importe quoi, dont les restes des consommateurs des pays « émergés » ou « émergents ». Il faut une intégration sous-régionale basée non pas sur la compétition à mort mais sur la conscience de notre communauté de destin et des valeurs que nous avons en partage. Les femmes et les jeunes doivent être les fers de lance de cette quête d’alternatives.

Le Mali est aussi un pays de paradoxes, « une population pauvre assise sur des richesses ». Est-ce à cause des politiques menées depuis l’indépendance, qui n’étaient pas assez ambitieuse ?

Les régimes successifs n’ont pas manqué d’ambition. Ils ont rarement eu les marges de manœuvre nécessaires. La Première République a été torpillée et farouchement combattue par la France parce que le Président Modibo Keita avait opté pour la souveraineté en vue d’un développement conforme aux intérêts supérieurs des Maliens. Les régimes suivants ont été contraints et obligés par les institutions de Bretton Woods à désétatiser, en faisant du secteur privé, dont les tenants et les aboutissants échappent totalement aux Maliens ordinaires, le moteur du développement. L’immense majorité de nos élites refusent d’admettre que le capitalisme malien et africain gagnant est sans issue.

Vous menez aussi depuis plusieurs années un combat pour les femmes. Que pensez-vous du mouvement féministe au Mali, qui semble se développer ?

Le mouvement de libération des femmes africaines, dont les Maliennes, souffre, à bien des égards, comme le processus de développement, des mêmes stigmatisations, du mimétisme et de la volonté de rattrapage de l’Occident. Le prix à payer est considérable aux plans économique, social, culturel, politique et écologique. Nous sommes de grandes consommatrices d’idées, de biens et de services. La question des postes et des places dans un tel système est, de mon point de vue, secondaire. Hommes ou femmes, notre capacité d’analyse des faits, de propositions d’alternatives et d’anticipation est défiée comme jamais auparavant.

D’où vient votre engagement pour tous les combats que vous menez ?

Ma mère, Bintou Sidibé, m’a marquée par sa conception du monde et des relations humaines. C’est ce qui me pousse à m’emparer de tout ce qui peut contribuer à les améliorer au niveau local (le pavage de mon quartier, la conception d’un marché malien des produits faits main), à investir dans la défense des droits des migrants et des réfugiés (Migrances) et dans celle de notre pays et de l’Afrique, partout où l’on tente de nous piétiner, de nous humilier.

Minusma : renforts logistiques en vue

Alors que plusieurs pays se sont retirés ou ont annoncé récemment leur intention de se  retirer de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA), l’Inde, le Bangladesh et le Pakistan vont y déployer une unité d’hélicoptères utilitaires d’ici à mars 2023, a annoncé Farhan Haq, Porte-parole du Secrétaire général des Nations Unis, António Guterres, lors de son point de presse régulier il y a quelques jours au siège de l’ONU à New-York. « Ces hélicoptères  fournissent un soutien indispensable à nos forces et sont essentiels pour l’alerte précoce et la réponse rapide afin de protéger les civils », a-t-il souligné. À l’en croire, l’ONU continue de discuter avec les États membres du déploiement de nouveaux moyens au sein de la MINUSMA et prévoit de combler les lacunes de plus longue date de la Mission, en plus de celles résultant des récentes annonces de retraits.

Soumaïla Lah : « Je ne vois aucun pays membre, permanent ou non, convoquer la réunion »

Alors qu’a débuté la 77ème session de l’Assemblée générale des Nations Unies à New-York, quelles chances a la plainte du Mali contre la France d’y être débattue ? Soumaïla Lah, Secrétaire permanent du Centre d’études et de réflexions au Mali (CERM) répond.

Pensez-vous que la réunion d’urgence demandée par le Mali à l’ONU pourra aboutir ?

Je ne vois pas la plainte déboucher sur une réunion d’urgence pour diverses raisons. La première est qu’aucun membre du Conseil de sécurité ne la convoquera. Si la Chine, qui avait la présidence au moment de l’introduction de la plainte, ne l’a pas fait, ce ne sont sûrement pas la France, les États-Unis ou la Grande Bretagne qui le feront. De surcroît, maintenant la France assure la présidence.

La Russie, considérée comme un allié stratégique du Mali, ne le fera pas pour des raisons diplomatiques. Et elle sent qu’on la soupçonne d’être derrière la plainte. Les pays membres non permanents ne demanderont pas la convocation de la réunion pour des raisons diplomatiques et stratégiques. La plupart n’ont pas de liens assez forts avec le Mali pour froisser une puissance comme la France ou ses alliés.

Deuxièmement, le Mali a introduit cette plainte, en sachant qu’il y avait très peu de chances qu’elle aboutisse, plus dans une dynamique de dénonciation et d’attaque ciblée. Elle tend à décrédibiliser l’action ou la présence militaire française dans le Sahel. C’est une pression et de la communication pour attiser le sentiment anti français.

La France assure la présidence tournante du Conseil de sécurité. Est-ce une entrave ?

Oui et non. La France ne va pas faciliter les choses puisque la plainte est faite contre elle mais chaque pays membre permanent a la latitude de demander cette réunion. Chaque pays s’inscrit dans une ligne géopolitique et géostratégique particulière, il pèse le pour et le contre. Mais la France n’a pas la latitude de bloquer la réunion.

Le Mali peut-il étaler à l’ONU les preuves qu’il dit détenir ?

C’est une possibilité, mais pour des questions aussi sensibles, je ne le vois pas étaler ses preuves dans un discours. L’objectif stratégique est de porter la discussion dans un cadre très restreint, au Conseil de sécurité. C’est un pari risqué, parce que l’autre partie va forcément vouloir produire des contre-preuves. Et, de fil en aiguille, on va se retrouver avec des escalades sans fin et une crise diplomatique qui finira par faire atteindre aux différents protagonistes le point de non retour. Des propos très forts seront tenus à l’encontre de la France, mais étaler des preuves, je ne le pense pas.

CEDEAO : réunion extraordinaire ce jeudi sur la situation au Mali et en Guinée

En marge de la 77ème Assemblée générale des Nations Unies à New York, aux Etats-Unis, la CEDEAO tient ce jeudi 22 septembre une session extraordinaire délocalisée. A l’ordre du jour de ce sommet exceptionnel, initié officiellement par le président Bissau-guinéen et président en exercice de l’organisation sous-régional, Umaro Sissoko Embalo, sont inscrits, entre autres, la question des 46 soldats ivoiriens interpellés à Bamako et l’évaluation de la transition en Guinée et au Mali. En plus, des dirigeants des Etats de la CEDEAO, prendra part à cette réunion, le médiateur de la crise guinéenne le Béninois Boni Yayi. Ce sommet se tient alors que le président de la transition guinéenne, le Colonel Mamady Doumbouya est à Bamako depuis hier mercredi pour prendre part aux festivités du 22 septembre, marquant le 62ème anniversaire de l’accession à l’indépendance du Mali.

77ème assemblée générale de l’ONU : un programme riche pour le Mali

Nommé le 21 août dernier, le Premier ministre par intérim, le colonel Abdoulaye Maïga, va représenter le Mali à la 77e session de l’Assemblée générale des Nations unies, à New York. Le chef du gouvernement aura un agenda chargé avec notamment plusieurs questions relatives au Mali qui y seront débattues.

Le Premier ministre par intérim prononcera une allocution à la tribune des Nations Unies, le mercredi 21 septembre 2022, au cours de laquelle il présentera la situation du Mali et l’engagement du pays en faveur des thématiques importantes, notamment la sécurité internationale, les droits de l’homme et les changements climatiques. Et également nous souligne-t-on, dans un langage diplomatique, le Colonel Abdoulaye Maiga pourrait se prononcer sur la saisine du Mali du Conseil de sécurité de l’ONU par le Mali en date du 15 août 2022. Abdoulaye Maïga prêtera une attention particulière aux différentes réunions qui vont se tenir en marge de l’Assemblée générale, pour parler notamment du Mali. Il devrait aborder les défis et enjeux du processus de sortie de crise en cours.

À New York, une autre réunion d’importance se tiendra : celle des pays membres de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao). Par un communiqué, le Mali a déjà fait savoir ne pas être concerné par une réunion de la CEDEAO qui se penchera sur la question des militaires ivoiriens.

Le Premier ministre aura également un entretien avec le Secrétaire Général des Nations Unies, Antonio Guterres. À cette occasion, le chef du gouvernement et son hôte évoqueront probablement la crise ivoiro-malienne marquée par la détention à Bamako de 46 soldats ivoiriens. Ces derniers jours, la tension est montée d’un cran entre les deux pays, après que le Mali a conditionné la libération des militaires ivoiriens qualifiés de « des mercenaires » à l’extradition de personnalités maliennes se trouvant en Côte d’Ivoire.

 

ONU : une 77ème session de l’assemblée générale mouvementée

En prélude à la 77e session de l’Assemblée générale des Nations Unies, qui se tiendra du 12 au 27 septembre 2022 à New-York. Un sommet extraordinaire de la CEDEAO sur le Mali, la Guinée et le Burkina Faso sera organisé au siège de l’ONU entre les chefs d’Etat de l’organisation sous régionale. Au même moment, la prochaine bataille de la guerre diplomatique qui oppose Français et Maliens se jouera-t-elle à New York ?

Les dirigeants de la Cédéao vont se réunir une fois encore, lors de la 77e session de l’ONU à New York, lors d’un sommet extraordinaire. Ils doivent débattre de la situation des trois pays membres de la CEDEAO, qui traversent une période transition dirigée par des militaires. Selon une source proche de la représentation de la CEDEAO au Mali, ce sera aussi l’occasion de se pencher sur la saisine du Mali du Conseil des sécurité de l’ONU en date du 16 août 2022, afin de réclamer une réunion d’urgence sur la situation au Mali. En effet, un bras de fer entre le Mali et la France se poursuit à New York, au siège des Nations unies. Bamako a saisi le Conseil de sécurité de l’ONU, affirmant détenir des preuves d’un soutien de Paris aux groupes terroristes. Le ministre des Affaires étrangères du Mali, Abdoulaye Diop, a écrit le 15 août au Conseil de sécurité des Nations unies afin de réclamer une réunion d’urgence sur la situation dans son pays. Dans sa lettre, le chef de la diplomatie multiplie les accusations envers la France et ses soldats – dont les derniers ont officiellement quitté le territoire malien le 15 août, date du départ du dernier soldat français au Mali après neuf ans d’engagement contre les djihadistes.

Le Mali a officiellement demandé au Conseil de sécurité de l’ONU une réunion d’urgence pour faire cesser ce qu’il présente comme « les actes d’agression » de la France sous forme de violations de sa souveraineté, de soutien apporté selon lui aux groupes djihadistes et d’espionnage. De graves accusations qui interviennent après de longs mois d’escalades des tensions entre les deux anciens pays alliés dans la lutte contre le terrorisme au Sahel. Le Mali n’a toujours pas reçu de réponse à cette demande et depuis le 1er septembre, la France assure la présidence tournante du Conseil de sécurité. La Russie, un des soutiens du Mali s’est inquiétée dans une lettre en date du 5 septembre au secrétaire général de l’ONU de n’avoir pour l’instant reçu aucun visa des États-Unis pour l’Assemblée générale de l’ONU de sa délégation menée par le ministre des Affaires étrangères, selon l’AFP. En plus de la saisine du Conseil de sécurité par le Mali, la crise en Ukraine risque une fois encore de faire monter la tension entre la Russie et les pays Occidentaux soutenant l’Ukraine, dans cette guerre déclenchée le 24 février 2022.

 

 

Accord pour la paix : l’ONU renouvelle ses sanctions contre les personnes soupçonnées d’être une entrave à son application

Le Conseil de sécurité de l’ONU a renouvelé hier mardi 30 août 2022 ces sanctions prises en l’encontre des individus et entités soupçonnées d’être une entrave à l’application de l’Accord pour la paix et la réconciliation issu du processus d’Alger. 

Les personnes sanctionnées sont 8 au total: Il s’agit de Mohamed Ousmane Ag Mohamedoune, membre du CNT Ahmoudou Ag Asriw et Mahamadou Ag Rhissa du Haut conseil pour l’unité de l’Azawad, Mohamed Ould Mataly ex-député RPM, Mahri Sidi Amar Ben Daha  alias Yoro Ould Daha; Mohamed Ben Ahmed Mahri  alias Rougi; Houka Houka Ag Alhousseini et d’Ahmed Ag Albachar. Ces personnes sont interdites de voyager à l’extérieur du Mali, leurs avoirs sont gelés et les organisations ont l’interdiction de leur apporter du soutien. Il a été renouvelé pour une année soit jusqu’au 31 août 2023. Les 15 membres du Conseil ont également prolongé jusqu’au 30 septembre 2023 le mandat du Groupe d’experts chargé de surveiller l’application des sanctions, ainsi que la demande d’encourager la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA) à assister le groupe. Sur demande du Conseil de sécurité, le Groupe d’experts doit présenter un rapport à mi-parcours le 28 février 2023 et un rapport final avant la date limite du 15 août 2023. Le Mali qui a demandé une réunion d’urgence du conseil de sécurité de l’ONU le 15 août dernier sur ses accusations portées contre la France, notamment de soutien contre le terrorisme n’a toujours pas encore reçu de réponse quant à une éventuelle tenue de cette réunion.

MINUSMA-El-Ghassim Wane : « Notre mandat est suffisant »

Six semaines depuis son arrivée au Mali. Le nouveau Représentant spécial du Secrétaire général de l’ONU, Chef de la MINUSMA, qui a remplacé Mahamet Saleh Annadif, n’a pas chômé. El-Ghassim Wane s’est déjà rendu dans le nord du pays et trois fois dans le centre, a assisté à un nouveau coup d’État, géré des attaques terroristes contre des positions de la mission onusienne et rencontré de nombreux acteurs. Ce qui n’est pas de trop vu la profondeur de la crise et les défis immenses qui l’attendent à la tête d’une MINUSMA incomprise par de nombreux Maliens. Dans ce long entretien, le diplomate mauritanien évoque la transition, la fin de Barkhane, le mandat de la MINUSMA et la relecture de l’Accord pour la paix et la réconciliation.

Moins d’un mois après votre arrivée au Mali, le 5 mai dernier, vous avez assisté à un coup dÉtat, le deuxième en un an, et vu les troupes de la MINUSMA subir des attaques. Cela vous a mis directement dans le vif de la réalité malienne.

La réalité malienne ne m’échappait pas, parce que jai eu loccasion de travailler sur les questions liées à la situation au Mali depuis 2012, aussi bien dans le cadre de mes fonctions précédentes à lUnion africaine que dans celui des Nations unies. Je suis venu ici en 2016 et en 2017 pour faire la revue de la MINUSMA et en assurer le suivi. Javais donc une idée des réalités et des difficultés. La situation est loin d’être facile. Elle l’était déjà avant que je narrive et elle est restée difficile après mon arrivée. Je ne mattendais pas à ce que les choses changent immédiatement. Le Mali est au milieu dune crise multiforme dont le règlement va prendre du temps. Il est évident que cette complexité ne mavait pas échappé. Malheureusement, nous avons connu des développements subséquents pendant les mois de mai et de juin, y compris lattaque contre les forces de la MINUSMA. Ce n’était pas la première. Javais une claire conscience des difficultés auxquelles le Mali est confronté et auxquelles la MINUSMA est confrontée dans lexercice de son mandat. Plus que la prise de conscience de ces difficultés, ce qui compte le plus cest la volonté de la mission, la volonté des Maliens, de redoubler defforts pour que cette page soit  tournée. Cest dans cette dynamique que je minscris : faire en sorte que nous renforcions ce que nous faisons déjà et que nous ajustions nos modes daction là où cela est nécessaire, de manière à être le plus utile possible aux Maliens et aux Maliennes et les aider à clore le chapitre douloureux que le pays connait actuellement.

Vous avez pris fonction dans une période dexception pour le Mali, avec une transition en cours. La MINUSMA affirmant accompagner cette transition, comment cela se traduit-il ?

Le processus de transition dans lequel le Mali est engagé est extrêmement important. Important pour permettre au Mali de retourner dans une situation de normalité constitutionnelle, mais important également pour permettre au pays de sattaquer aux défis complexes auxquels il est confronté. La MINUSMA et les Nations unies, dune façon plus générale, sont engagées dans ce processus. Comme vous le savez, lappui à la transition est lune des priorités stratégiques de la MINUSMA et nous assistons les acteurs maliens de plusieurs manières. Nous le faisons sur le plan politique, à travers nos bons offices, à travers la participation de la MINUSMA aux activités du Comité local de suivi de la transition, à travers le dialogue régulier que nous avons avec le médiateur de la CEDEAO, ainsi qu’avec d’autres acteurs internationaux, dont l’UA. Nous le faisons aussi sur le plan technique, en appuyant un certain nombre dinstitutions maliennes, notamment celles impliquées dans la préparation des élections qui doivent couronner la transition et dont la tenue est prévue au mois de février prochain. Cest une tâche complexe, qui doit être menée dans des délais qui sont courts. Cela signifie que notre appui technique est extrêmement important pour que les institutions maliennes soient prêtes et à même d’organiser les élections dans des conditions qui en assureront la crédibilité et qui permettront au pays de surmonter la crise institutionnelle. Nous appuierons  également le processus de transition à travers le soutien que nous allons apporter pour la sécurisation des élections aux départements ministériels compétents. Notre appui ira au-delà de cela pour s’étendre aux aspects logistiques, notamment le transport du matériel électoral, et à dautres domaines. Cest un appui multiforme, de concert avec dautres partenaires du Mali, y compris les partenaires politiques que sont la CEDEAO et lUA.

La transition semble engagée sur une nouvelle trajectoire, avec de nombreux chantiers annoncés, lesquels pourraient potentiellement ouvrir la voie à un prolongement du délai imparti. La MINUSMA accompagnera-t-elle la transition si ce scénario se réalisait ?

Il a été convenu avec la CEDEAO que la transition devait se conclure au mois de février 2022. Cela a été affirmé lors du sommet dAccra, auquel jai pris part, et les nouvelles autorités de la transition, aussi bien le Président que le Premier ministre, ont également dit leur intention de conduire la transition dans le délai qui a été convenu. Je pense quil est important que ce délai soient respectés, parce quil faut sortir au plus vite dune situation comme vous le dites exceptionnelle et permettre aux autorités nouvellement élues dengager les réformes de fond. Cela ne signifie pas que la transition ne peut pas entamer un certain nombre de réformes, mais, comme cela a été souligné lors de la visite du médiateur, ainsi que par le Comité local de suivi de la transition, il faudra articuler un certain nombre de priorités pour voir ce quil est possible de faire pendant cette période, à charge pour les autorités nouvellement élues d’amplifier ce qui aura été entrepris et d’ouvrir de nouveaux chantiers. Il est important que nous fassions tout ce qui est en notre pouvoir, de concert avec les autres partenaires, pour que l’objectif dune transition conclue au mois de février 2022 soit atteint.

La communauté internationale presse pour que les élections se tiennent à date. Nestimez-vous pas que cela est une erreur, car de scrutins à la va-vite pourraient découler de nouvelles crises ?

Le meilleur antidote à une possible crise postélectorale est dorganiser les élections dans les meilleures conditions de transparence et de régularité. Un travail a été engagé à cet effet, travail que nous soutenons à travers lappui technique que nous apportons aux institutions compétentes. Le deuxième élément qu’il convient de garder à l’esprit est le parachèvement de la transition en février 2022. Cest un objectif convenu avec les Maliens, sachant que, dans un contexte de transition, il nest pas évident de sattaquer à certains problèmes structurels. Je pense que le retour à une légalité constitutionnelle donnera au Mali tous les moyens nécessaires pour sattaquer à ces problèmes de fond. Je ne crois pas que le délai en lui-même soit un problème, bien au contraire. Plus vite on retournera à la légalité constitutionnelle, mieux le Mali sera équipé pour sattaquer à ses problèmes. Les acteurs maliens se sont engagés, la CEDEAO aussi, et la communauté internationale soutient cet objectif. Il sagit maintenant de mobiliser toutes les énergies, maliennes et internationales, pour que cet objectif soit atteint et que les élections de février 2022 soient transparentes et crédibles.

Vous avez récemment déclaré au Conseil de sécurité de lONU que le temps était venu pour les « dirigeants maliens de s’élever au-dessus de la politique partisane et des intérêts personnels pour faire face à la crise ». Un message destiné aux militaires et aux acteurs politiques ?

Tout dabord, le point de départ de ma déclaration est la profondeur de la crise dans laquelle le Mali est plongé. Quand un pays connait une crise dune telle ampleur, la meilleure réponse, et la première, est celle e l’unité nationale. Nous sommes dans un contexte où le Mali a besoin du concours de tous ses fils et de toutes ses filles pour surmonter les défis auxquels il est confronté. Il est important que tout soit fait pour permettre à lÉtat malien de retrouver toutes ses forces, dexercer son autorité sur lensemble du territoire national, dassurer la sécurisation des Maliens, de mettre fin aux violences commises sur les populations civiles. Il est impératif que tous les acteurs engagés dans ce processus se mettent à la hauteur des défis. Je pense que lespoir des Maliens est que cette page douloureuse soit tournée le plus rapidement possible et quune autre, plus heureuse, soit ouverte, et cela exige un effort particulier, un effort d’élévation au-dessus des intérêts partisans dans un contexte qui est exceptionnel. Il ya des urgences qui exigent le concours de tous. Mon appel sadresse à toutes les Maliennes et à tous les Maliens. Il sagit aujourdhui de sortir de cette crise structurelle, profonde, qui affecte le pays de manière multiforme. Mettre lintérêt du Mali au-dessus de toute autre considération, tel est le sens de lappel que jai lancé.

Le Président français Emmanuel Macron a annoncé la fin de Barkhane sous sa forme actuelle. Comment accueillez-vous cette nouvelle et quelles peuvent en être les conséquences ?

Nous avons suivi lannonce de la décision de faire évoluer lopération Barkhane. Comme vous le savez, la mission et ses activités sont déterminées en fonction du mandat qui nous a été donné. Nous coopérons évidemment avec la force Barkhane et, dans un tel contexte, toute évolution de son format induira évidemment des conséquences que nous devons prendre en compte. Un travail d’évaluation est en cours. Nous nous réjouissons de lappui que la France apporte à la MINUSMA sur plusieurs plans, non seulement en mettant à disposition des personnels qui travaillent en son sein, mais aussi à travers Barkhane. Nous nous félicitons aussi de lappui de la France au Conseil de sécurité et je pense que cet appui multiforme ne va pas changer. Ses modalités pourraient évoluer, mais je suis persuadé que le soutien de la France se poursuivra et quil restera aussi efficace quil la été jusquici.

Cette annonce peut-elle changer la dynamique de la MINUSMA à quelques jours de la fin du mandat, qui en principe doit être renouvelé et que beaucoup espèrent plus robuste ?

Les discussions sur le mandat se poursuivent au Conseil de sécurité et la nouvelle résolution devrait être adoptée à la fin du mois. Nous verrons alors quel sera son contenu. Mais je pense que le mandat de la MINUSMA, et cest un aspect sur lequel  jai beaucoup insisté lors de mes visites sur le terrain et mes interactions avec les acteurs, est  robuste. Il nous donne les moyens de mener à bien les tâches pour lesquelles la mission est déployée au Mali. Jentends certains de nos interlocuteurs dire souvent qu’ils veulent un mandat plus robuste, mais une lecture de la résolution qui nous mandate convaincra chacun que le mandat est robuste et la mission s’emploie à agir en fonction de ce mandat. Cette perception vient très certainement du fait quil y a une attente, que je comprends parfaitement, pour que la mission réponde à tous les problèmes sécuritaires qui se posent, quelle apporte une protection, partout où elle est déployée, à chaque Malienne et à chaque Malien qui est en danger. Il y a des limites évidentes. La Mission ne peut pas apporter une telle protection. Nous faisons tout ce qui est en notre pouvoir pour que notre action soit la plus efficace possible. Nous pensons que le mandat qui nous a été donné est suffisant et que notre action ne doit pas simplement être appréciée à la lumière du recours à la force, ce que nous faisons quand il sagit de protéger les populations civiles. Elle doit être aussi appréciée à la lumière dun certain nombre dautres activités qui concourent à la protection des civils, qu’il s’agisse du travail fait en faveur de la réconciliation intercommunautaire ou de l’appui que nous apportons à larmée malienne, très significatif, pour laider à remplir la mission qui est la sienne et aider le gouvernement à remplir ses responsabilités, dont la principale est de protéger sa population.

Une mission de paix dans un pays encore en guerre, nest-ce pas antinomique ?

Noubliez pas que nous avons été déployés pour aider à appliquer un Accord de paix. Nous opérons dans un contexte extrêmement difficile, qui a conduit au renforcement de notre mandat en 2017, précisément pour faire face à un certain nombre de menaces. Noubliez pas non plus que nous opérons aux côtés dautres forces : les FAMa évidemment, mais aussi les opérations Barkhane, Takuba et G5, qui ont un mandat plus orienté vers la lutte anti-terroriste. Dans le cadre de notre mandat, nous faisons ce qui est en notre pouvoir. Il y a certainement des choses à améliorer. Jentends, j’écoute, jinteragis de manière fréquente avec différents segments de la population malienne et je comprends les préoccupations qui sont les leurs. Croyez-moi, nous faisons ce tout pour renforcer lefficacité de nos actions. Cela dit, nous faisons déjà beaucoup, et cela nest pas suffisamment souligné.

À Aguelhok, la MINUSMA a été récemment accusée de faire fuir les populations locales. Certains l’indexent en faisant une corrélation entre sa présence et les attaques dans la zone. Comment faites-vous face à cela ?

À Aguelhok, il y a deux éléments à prendre en compte. Le premier est que notre présence apporte la sécurité. Nous devons protéger les populations locales, ce que nous faisons. Le deuxième élément est que nous subissons des attaques et que malheureusement, dans ce contexte, des populations se sont déplacées hors de la localité. Nous faisons un travail soutenu pour renforcer la confiance avec la population locale et tout un effort de dialogue est en cours. Nous avons dépêché une délégation il ny a pas longtemps. Notre bureau à Kidal et notre représentation à Aguelhok sont en contact avec la population pour encourager ceux qui ont quitté la localité à revenir. Dans l’intervalle, les humanitaires apportent une assistance aux déplacés. Je voudrais souligner que notre présence à Aguelhok vise à renforcer la sécurité des populations et que l’insécurité qui a été notée est à imputer à ceux-là mêmes qui ont attaqué notre camp au début du mois davril.

Vous avez lancé le 15 juin le projet « 50 jours pour le Centre ». En quoi consiste-t-il et quels en sont les objectifs ?

Ce projet, appelé « An ka barokè » (Dialoguons), vise à renforcer lefficacité de notre appui aux autorités maliennes, tant nationales que régionales, pour hâter la stabilisation du centre du Mali, l’une des priorités stratégiques de la MINUSMA. Nous poursuivons trois objectifs : renforcer la cohésion sociale au regard des tensions intercommunautaires que connait la région; renforcer la confiance entre lÉtat malien et les populations locales et, en troisième lieu, fournir des perspectives socio-économiques, faire en sorte que la paix se traduise par des dividendes qui profitent à la population. Nous navons pas la prétention en 50 jours de stabiliser le Centre, il faudra, pour ce faire une action s’inscrivant dans une durée beaucoup plus longue. Ce que nous voulons, c’est impulser une nouvelle dynamique qui donne une efficacité accrue à l’appui que nous apportons aux autorités maliennes. Nous tirerons  les leçons de ce qui aura été fait pendant ces 50 jours pour élaborer une action à plus long terme, beaucoup plus ambitieuse, afin de créer les conditions de la stabilisation du Centre. Je me suis rendu à Mopti à trois reprises. Jai aussi été à Bandiagara et à Douentza. Jai échangé avec de multiples acteurs et ma conviction, forte à la suite de ces réunions, est que la stabilisation du Centre est à notre portée. Nous devons pour cela œuvrer en faveur d’une appropriation malienne, d’une mobilisation des savoirs locaux, notamment en termes de médiation, ainsi que d’un appui international mieux coordonné et renforcé. Cest ce triple objectif que nous allons poursuivre, mais d’ores et déjà nous espérons pouvoir impulser une dynamique qui sera amplifiée dans la période qui suivra.

Dans le centre du Mali, notamment le pays dogon, la défiance à l’égard de la MINUSMA est très prégnante. Comment atteindre votre but dans ce contexte ?

Il est clair que le combat pour stabiliser le Centre ne peut être gagné quavec lappui des populations. Cest pour cela que jai décidé de my rendre aussi fréquemment que possible pour nouer un dialogue régulier avec les acteurs locaux, l’objectif étant de créer le climat de confiance nécessaire à la réussite de nos efforts. Évidemment, notre bureau régional et les forces de police et militaires déployées sur place font un effort soutenu dappui à la sécurisation des populations à travers un certain nombre dopérations. Je dois vous dire que lors de ma visite à Bandiagara, la semaine dernière, jai pu discuter avec différents segments de la population et je crois avoir décelé une confiance accrue en laction de la MINUSMA. La population veut une présence plus forte de la MINUSMA, pas moins. Et si elle le souhaite, cela veut dire que l’action que nous menons est perçue favorablement. Nous sommes déterminés à améliorer notre présence et nos actions autant que faire se peut.

La mise en œuvre de lAccord pour la paix est plus que jamais aujourdhui confrontée des difficultés. Le nouveau Premier ministre a parlé dune « relecture intelligente ». Comment la MINUSMA perçoit-elle cela ?

LAccord a été signé il y a six ans. Sa mise en œuvre a connu un retard considérable, cest une réalité. Dans mes interactions avec les autorités maliennes, avec les parties signataires, jai évidemment souligné limportance daccélérer la cadence. Chaque jour de retard dans la mise en œuvre se traduit par des souffrances accrues pour les populations sur le terrain et un retard supplémentaire dans la restauration de lautorité de lÉtat. Il est donc important et de lintérêt de tous daccélérer. Je me félicite de ce que les nouvelles autorités de la transition aient exprimé leur rattachement à lAccord et leur volonté den accélérer la mise en œuvre. Jai entendu les autres signataires marquer la même volonté. Dans la période qui vient, notre intention, de concert avec le chef de file de la médiation internationale, lAlgérie, est de faire ce qui est en notre pouvoir pour aider à mettre en œuvre les dispositions encore pendantes, en réalité les dispositions essentielles de lAccord, le DDR, les réformes institutionnelles et le développement du nord. Jespère que nous pourrons faire de nouvelles avancées.

Quid de la relecture ?

LAccord comporte des dispositions pour sa révision. Si les parties sentendent pour ajuster certaines de ses dispositions sur la base du mécanisme prévu à cet effet, la MINUSMA leur apportera son appui. Mais tout doit être fait dans une démarche consensuelle, parce quil sagit dun accord qui lie différentes parties.

La MINUSMA publie périodiquement des rapports sur les violations et abus en matière de droits de lHomme au Mali. Quel regard portez-vous sur la situation actuelle ?

C’est une situation difficile et cela est parfaitement compréhensible dans le contexte sécuritaire que nous connaissons. Depuis le début de cette année, nous avons eu près de 850 cas de cas de violations et dabus, dont de nombreux enlèvements. Nous travaillons dans le cadre de notre mandat à travers les enquêtes que nous menons et tout un travail de dialogue politique avec les autorités, ainsi qu’avec dautres parties prenantes, pour nous assurer que la dimension droits de lHomme est pleinement intégrée dans ce qui se fait. Lorsque des enquêtes sont diligentées, le suivi requis est fait. Les problèmes sont connus, il ny a pas de déni de la réalité. Une action plus soutenue est requise pour queffectivement les violations soient punies. Cest un travail que nous savons complexe et pour lequel nous comptons sur la coopération des autorités maliennes.

Le Mali a-t-il besoin de la MINUSMA ?

Vous devez concevoir la MINUSMA comme une expression de la solidarité internationale envers le Mali. Elle a été déployée dans le contexte de la mise en œuvre de lAccord pour la paix. Son mandat a été ajusté pour prendre en compte dautres problématiques. Le Mali, comme dautres pays qui sont en situation de crise, a besoin de cette mobilisation internationale multiforme. La MINUSMA est un élément important de cette mobilisation, mais pas le seul. Elle se manifeste de plusieurs autres manières. Aux Nations unies, toutes les agences font un travail soutenu dans le contexte de la crise. Nous avons dautres partenaires sur le terrain. La complexité de la situation et ses implications régionales sont telles quun accompagnement international est nécessaire pour que la crise soit réglée au plus vite. LA MINUSMA a été déployée avec lassentiment du gouvernement malien et sa présence repose sur cet assentiment, car cest à sa demande du Mali que la MINUSMA est là.

Propos recueillis par Boubacar Sidiki Haidara

Cet article a été publié dans Journal du Mali l’Hebdo n°324 du 24 au 30 juin 2021

 

Journée internationale des femmes: message du secrétaire général des Nations unies

                                                  « LES FEMMES, VISAGE DE LA CRISE »

Alors que nous célébrons la Journée internationale des femmes dans le contexte d’une pandémie mondiale, le constat est sans appel : les femmes sont le visage de la crise de la COVID-19.

La pandémie creuse les inégalités déjà profondes dont souffrent les femmes et les filles et réduit à néant des années de progrès sur la voie de l’égalité des sexes.

Les femmes sont plus susceptibles que les hommes de travailler dans les secteurs les plus durement touchés par la pandémie. En première ligne, la majorité du personnel essentiel est constituée de femmes, souvent issues de groupes raciaux ou ethniques marginalisés, au bas de l’échelle économique.

Le risque de perte d’emploi et de chute des revenus est de 24 % plus élevé pour les femmes que pour les hommes. L’écart de rémunération entre les femmes et les hommes, déjà important, s’est encore élargi, notamment dans le secteur de la santé.

La charge que représentent les soins non rémunérés s’est décuplée sous l’effet des confinements et de la fermeture des écoles et des crèches. Des millions de filles pourraient ne jamais reprendre le chemin de l’école. Les mères, tout particulièrement les mères célibataires, connaissent une inquiétude et une adversité terribles.

Partout dans le monde, la pandémie a également engendré une épidémie parallèle de violence à l’égard des femmes et une explosion des violences domestiques, de la traite, de l’exploitation sexuelle et des mariages d’enfants.

Pendant ce temps, selon une étude récente, 3,5 % seulement des groupes de travail sur la COVID-19 établis dans le monde comprennent autant de femmes que d’hommes, alors même que les femmes constituent la majorité du personnel sanitaire. Ce schéma se retrouve dans la couverture médiatique de la pandémie : les expertes sont cinq fois moins consultées que leurs homologues masculins.

Cette exclusion est en elle-même un problème à régler d’urgence. Le monde doit redoubler d’efforts pour faire progresser le leadership des femmes et leur participation sur un pied d’égalité avec les hommes. Nous savons d’ores et déjà que cela profitera à toutes et tous.

La riposte à la COVID-19 a mis en évidence le pouvoir et l’efficacité du leadership des femmes. Les pays dirigés par des femmes ont enregistré des taux de transmission moins élevés au cours de l’année écoulée et sont souvent plus avancés que les autres sur le chemin du relèvement. Les associations de femmes ont mené une action essentielle en comblant les lacunes dans la fourniture d’informations et de services essentiels, en particulier au niveau local.

On le voit partout : quand les femmes gouvernent, l’État investit davantage dans la protection sociale et la pauvreté régresse plus vite. Quand les femmes siègent au parlement, les pays sont plus fermes dans leurs politiques de lutte contre les changements climatiques. Quand les femmes participent aux négociations de paix, les accords sont plus durables.

Pourtant les femmes ne comptent que pour un quart des parlementaires, un tiers des élus locaux et un cinquième des ministres de la planète. Au rythme où vont les choses, le pouvoir législatif ne sera pas paritaire avant 2063 et il faudrait bien plus d’un siècle pour trouver autant de femmes que d’hommes à la tête des gouvernements.

Pour construire un avenir meilleur, il faut corriger ce déséquilibre des pouvoirs. Parce qu’elles le font en connaissance de cause, les femmes ont tout autant que les hommes le droit de se prononcer sur les décisions qui les concernent. Je suis fier que, sous mon impulsion, nous ayons atteint la parité des sexes aux postes de direction de l’Organisation des Nations Unies.

Le relèvement après la pandémie nous donnera l’occasion de tracer une voie nouvelle, une voie d’égalité. Les mesures de soutien et les plans de relance doivent cibler spécifiquement les femmes et les filles. Il faudra notamment investir davantage dans les infrastructures de soin. L’économie formelle ne fonctionne que parce qu’elle est subventionnée par le travail de soins non rémunéré assuré par les femmes.

Lorsque nous aurons surmonté cette crise, nous devrons jeter les bases d’un avenir inclusif, vert et résilient. Je demande à tous les dirigeants et dirigeantes du monde de se concentrer sur six axes d’action :

Premièrement : veiller à une représentation égale des femmes et des hommes, aussi bien dans les conseils d’administration qu’au parlement, dans l’enseignement supérieur que dans les institutions publiques, en adoptant des mesures et des quotas ciblés.

Deuxièmement : investir massivement dans l’économie des services à la personne et dans la protection sociale et modifier la définition du produit intérieur brut de telle sorte qu’il rende compte du travail à domicile et le rende visible.

Troisièmement : faire tomber les obstacles qui empêchent les femmes de s’insérer pleinement dans l’économie, notamment en faisant en sorte que les femmes accèdent au marché du travail, à la propriété, à des crédits ciblés et à l’investissement.

Quatrièmement : abroger toutes les lois discriminatoires dans tous les domaines, du droit du travail et du droit foncier aux questions de statut personnel et de protection contre la violence.

Cinquièmement : établir, au niveau national, un plan d’intervention d’urgence afin de lutter contre la violence à l’égard des femmes et des filles et le mener à bien en mobilisant les ressources, les stratégies et la volonté politique nécessaires pour éliminer ce fléau.

Sixièmement : faire évoluer les mentalités, sensibiliser la population et dénoncer les préjugés systémiques.

Le monde a l’occasion de rompre avec des siècles de discrimination persistante et systémique. Il est temps de construire un avenir d’égalité.

 

Mali – Rapport SG de l’ONU : une situation sécuritaire toujours préoccupante

Les Nations unies ont rendu public le dernier rapport trimestriel de son secrétaire général Antonio Gutteres sur le Mali. Ce rapport qui couvre les trois derniers mois de l’année 2020 sera discuté le 13 janvier prochain au conseil de sécurité des Nations unies. Dans ce document de 21 pages, le Portugais regrette que la situation sécuritaire ne cesse de se détériorer dans le pays. « Les groupes armés communautaires ont continué de mener des attaques contre les civils dans la région, et la violence armée a gagné la région de Ségou. Dans le nord, les groupes extrémistes violents sont restés actifs » note le rapport. Sur les trois derniers mois, les Forces de défense et de sécurité maliennes ont été la cible de 17 attaques, au cours desquelles 30 soldats ont été tués et 48 blessés. Les attaques les plus meurtrières ont eu lieu le 13 octobre entre les ponts de Parou et de Songobia, à environ 25 kilomètres et 30 kilomètres respectivement au sud-ouest de la ville de Bandiagara, dans la commune de Bara Sara (cercle de Bandiagara), où trois soldats ont été tués et sept blessés, et le 6 octobre à Birga-Peulh, à 20 kilomètres à l’ouest de la ville de Koro, dans la région de Mopti, où trois soldats ont été tués.

Les civils restent les premières victimes de cette crise meme si selon le rapport, la période a été marquée par une baisse des attaques à leur encontre dû notamment à la saison des pluies. Au 1er décembre 2020, 232 événements avaient été signalés au total : 182 civils avaient été tués, 175 blessés et 163 enlevés dans tout le Mali. Les actes de violence ont donc diminué par rapport à la période précédente, durant laquelle 343 événements avaient été signalés : 375 civils avaient été tués, 450 blessés et 93 enlevés. Les civils de la région de Mopti sont restés les plus touchés avec 89 événements : on a dénombré 127 morts, 104 blessés et 46 personnes enlevées (39 % de tous les événements ayant touché des civils).

Fin de la Mission de la Commission d’enquête internationale pour le Mali

La Commission d’enquête internationale pour le Mali a soumis son rapport au Secrétaire général des Nations Unies ce 26 juin 2020, concluant ainsi sa mission après plus de 20 mois de travaux. Pour rappel, la Commission est entrée en fonction le 22 Octobre 2018.

Le rapport soumis ce 26 juin 2020 au Secrétaire général contient le résultat et les conclusions des enquêtes menées par la Commission sur les abus et violations graves du droit international des droits de l’homme et du droit international humanitaire, ainsi que les crimes internationaux commis sur le territoire du Mali entre le 1er janvier 2012 et le 19 janvier 2018, conformément à son mandat. Il contient aussi des recommandations formulées sur la base de ses constatations dans la perspective de mieux lutter contre l’impunité et de consolider la paix et la réconciliation nationale au Mali.

Dans l’accomplissement de sa mission, la Commission a bénéficié de la coopération agissante de différentes organisations et institutions, notamment le gouvernement du Mali, les autres parties signataires de l’Accord pour la paix et la réconciliation, certains Etats membres des Nations Unies, la Mission Multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation du Mali (MINUSMA) et d’autres entités du système des Nations Unies au Mali, à New York et à Genève, et de nombreuses organisations gouvernementales et non-gouvernementales. La Commission les remercie sincèrement de leur soutien multiforme. Elle remercie également les victimes et les témoins des évènements objets de ses enquêtes, qui ont accepté de partager leurs expériences avec elle, malgré un environnement empreint de menaces et de craintes parfois exprimées.

La Commission est composée de Madame Lena Sundh de la Suède (Présidente) et de Messieurs Simon Munzu du Cameroun et Vinod Boolell de l’Ile Maurice (Membres). Elle a bénéficié dans la conduite de sa mission, de l’appui d’un Secrétariat technique basé à Bamako et composé de 14 fonctionnaires des Nations Unies, dont quatre femmes, experts dans divers domaines thématiques d’intérêt pour son travail, et coordonné par Monsieur Kounkinè Augustin Somé.

 Créée le 19 janvier 2018 par le Secrétaire général des Nations Unies conformément à l’article 46 de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali de juin 2015, la Commission a reçu mandat « d’enquêter sur les allégations d’abus et de violations graves du droit international des droits de l’homme et du droit international humanitaire, y compris les allégations de violences sexuelles liées au conflit commis sur tout le territoire du Mali entre le 1er janvier 2012 et la date de son établissement; d’établir les faits et les circonstances de la perpétration de tels abus et violations, y compris ceux qui peuvent constituer des crimes internationaux ; d’identifier les auteurs présumés de tels abus et violations, et ; de soumettre un rapport écrit au Secrétaire général, contenant les conclusions de ses enquêtes et des recommandations pour la lutte contre l’impunité, à la lumière des abus et violations identifiés ».

Source: ONU

Casques bleus : Que gagnent les États contributeurs ?

Ce 29 mai est célébré la Journée internationale des Casques bleus. Pour l’occasion, nous avons choisi de faire un focus sur eux. Qui sont-ils ? Que gagnent les États qui engagent des troupes dans des missions de maintien de la paix ?

Contrairement à une idée largement répandue, les Casques bleus sont des civils, des militaires et des policiers qui travaillent ensemble, selon la définition des Nations Unies. À la MINUSMA, ils étaient 15 610 au total en mars 2020, dont 11 757 militaires, 1 748 policiers et 1 421 civils. La mission compte également des experts et des volontaires. L’ONU n’ayant pas de forces qui lui soient propres, les États membres lui fournissent, sur une base volontaire, des contingents militaires et des forces de police. Ils sont appelés « pays contributeurs de troupes » ou « pays contributeurs de police ». « Les pays contributeurs décident des effectifs qu’ils vont déployer sur un théâtre d’opérations donné, avec l’ensemble de leurs propres équipements, ainsi que tout le matériel nécessaire à la logistique des troupes, y compris le transport », précise Olivier Salgado, porte-parole de la MINUSMA. En retour, une somme forfaitaire prélevée sur le budget de l’organisation est versée (traitement des troupes, équipements ou services). 12 des 13 opérations de maintien de la paix en cours ont été financées pour environ 6,5 milliards de dollars du 1er juillet 2019 au 30 juin 2020.

Que gagnent les États ?

Il existe un barème pour chaque type de contribution. Pour le remboursement des matériels appartenant aux contingents, nous n’avons pas pu consulter le document. La rémunération des militaires est prise en charge par les gouvernements dont ils relèvent, selon leur grade dans les forces nationales et le barème applicable. Au 1er juillet 2019, les pays qui fournissaient des contingents aux opérations de maintien de la paix étaient remboursés par l’ONU sur la base d’un taux standard approuvé par l’Assemblée générale de 1 428 dollars (859 765 FCFA) par soldat et par mois. Une manne, comme le rappelait l’experte en sécurité Niagalé Bagayoko dans nos colonnes en avril, non négligeable. « C’est très important comme source de revenus pour les armées, notamment africaines ». Ce qui se vérifie aisément. 8 des 10 pays du Top 10 des contributeurs de troupes sont africains, contre 9 sur 10 pour la police. Le Bengladesh est le seul pays non africain à se glisser dans ce classement.

Boubacar Sidiki Haidara

Pau : Le sommet élargi

Les ministres des Affaires étrangères du G5 Sahel se sont réunis ce mardi à Ouagadougou pour préparer le sommet de Pau, qui se tiendra le 13 janvier. Selon Alpha Barry, ministre burkinabé des Affaires étrangères, qui a reçu ses homologues, cette rencontre s’est tenue à la demande expresse de leurs chefs d’État pour préparer au mieux le rendez-vous. Elle a permis, selon Barry, d’examiner les propositions des différentes parties afin de les soumettre aux chefs d’État avant le sommet. Il a également précisé que le sommet était élargi à l’ONU, l’Union africaine, l’Union européenne, l’OIF et d’autres institutions. « C’est une étape importante pour le G5 Sahel dans la lutte contre la menace terroriste dans notre région. Tout se passe dans un bon esprit, entre pays du G5 Sahel et entre le G5 Sahel et les partenaires », a assuré le chef de la diplomatie burkinabé à l’issue de la réunion. L’appel des chefs d’État lors de la réunion extraordinaire du G5 à Niamey, le 15 décembre 2019, semble donc avoir eu un écho favorable. Dans le communiqué final de cette rencontre, ces derniers avaient appelé la communauté internationale à les soutenir pour endiguer la menace terroriste. Un appel avait également été lancé aux autres pays de la zone pour un « renforcement de la coopération entre les services de sécurité et de renseignement dans la lutte contre le terrorisme et la criminalité transfrontalière ».

Ouverture du débat de l’Assemblée générale des Nations Unies ce mardi

Le président de la République, Ibrahim Boubacar KÉITA, accompagné de son épouse, s’est rendu à New-York, aux États-Unis, où il prend part à la 74ème Assemblée Générale des Nations-Unies.
L’Ouverture du débat général de l’Assemblée générale est prévu ce 24 septembre 2019.
Le débat de cette année a pour thème : « Dynamiser les efforts faits au niveau multilatéral en faveur de l’élimination de la pauvreté, d’une éducation de qualité, de l’action climatique et de l’inclusion ».

Mohamed Ould Mataly : « C’était une erreur d’avoir accepté ce régime de sanctions »

Le Conseil de sécurité de l’ONU a ajouté mardi 9 juillet à sa liste de sanctions cinq Maliens accusés d’entraver l’application de l’Accord pour la paix et la réconciliation. Parmi eux, l’Honorable Mohamed Ould Mataly, député élu à Bourem et responsable du Mouvement arabe de l’Azawad (MAA), membre de la Plateforme. Il est accusé de s’être opposé à des restructurations administratives à Gao en 2018 et d’être impliqué dans le trafic de drogue. Dans cet entretien, il exprime son incompréhension.

Comment jugez-vous les sanctions de l’ONU à votre égard ?

Comme on le dit chez nous, les nomades, le sel ne se dit pas salé. Je ne peux pas être défenseur du Mali et le dernier jour être contre l’application de l’Accord. J’ai été le premier à mener la résistance, même pendant l’occupation. Le premier à créer des mouvements pour lutter au compte du Mali. Comment puis-je être une entrave aujourd’hui ? Et dans quel sens ?

Elle vous accuse de vous être opposé à des restructurations administratives à Gao…

Mais cela n’a à rien avoir avec l’application de l’Accord. C’est une instruction administrative. Le Premier ministre et son ministre de l’Administration territoriale de l’époque avaient proposé un découpage de Gao. Nous leur avons dit de laisser cette question se discuter entre les mouvements signataires au niveau de la sous-commission institutionnelle, comme indiqué dans la Feuille de route. Le découpage doit être fait dans l’intérêt des populations, non pour les diviser. C’est ce que j’ai dit et je n’étais pas le seul.

Si le découpage est fait dans l’entente et l’harmonie c’est bien mais si c’est fait comme ils le souhaitaient c’est dangereux. C’est l’administration qui a voulu créé des problèmes entre la population et nous n’avons pas accepté.  Normalement, le découpage même  ne devrait pas se faire au Nord, mais ils ont voulu nous imposer une anarchie.

Qu’en est-il du trafic de drogue ?

Je les défie de le prouver. Ils prennent injustement des noms et comme tu ne peux pas te défendre tu es sanctionné. C’est la même chose que Barkhane fait quand ils prennent nos gens et disent qu’ils sont liés à un groupe terroriste. Après, ces gens innocents pourrissent en prison. Cette liste n’est même pas dans la forme.  Même la première liste est fausse. Mohamed Ousmane Ag Mohamedoune n’a jamais rien fait pour entraver l’accord. C’était une erreur pour le Mali d’avoir accepté ce régime de sanctions, parce que ce sont les nomades qui sont victimes de tout cela. Si nous avons empêché la paix, pourquoi ne pas venir nous le demander ? Je suis un vieux aujourd’hui et on écrit sur moi sans que je sache pourquoi. On traumatise les gens comme cela. C’est même du terrorisme.

Comment appréhendez-vous les conséquences de ces sanctions ?

Je ne sais pas et je m’en fous. Nous croyions que ces pays étaient super intelligents et démocratiques, mais là ils perdent leur crédibilité. La marche est un droit civique. C’est la population de Gao qui a marché alors que j’étais à Bamako. Les trois Arabes sur cette liste sont tous de la même famille. C’est comme si c’était dirigé contre nous. Je ne suis pas d’accord, on ne fait pas d’analyses correctes.

Vous bénéficiez du soutien des populations de Bourem, qu’est-ce que cela vous fait ?

Bourem doit même marché aujourd’hui (entretien réalisé le 10 juillet). Je n’ai pourtant appelé personne à le faire. Gao aussi veut marcher. Je comprends ce soutien parce que j’ai toujours vécu avec ces populations, pendant les moments les plus difficiles de l’occupation, pendant la libération et pendant les élections. Moi je n’ai pas fait l’aventure. Je suis victime pas de la France mais de certains éléments. Je ne sais pas lesquels.

MINUSMA : Vers un mandat « robuste » ?

Le 30 juin, le Conseil de sécurité des Nations Unies doit renouveler le mandat de la Mission multidimensionnelle des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA). Déployée dans le pays depuis 2013, elle a pour mandat principal de stabiliser les grandes agglomérations et de contribuer au rétablissement de l’autorité de l’État en soutenant la mise en œuvre de l’Accord pour la paix de 2015. Six ans après, la paix est toujours un mirage et le centre, jadis stable, est rongé par la violence des milices et des groupes terroristes.

Chaque année, et ce depuis 2013, le Conseil de sécurité de l’ONU prolonge à l’unanimité le mandat de la MINUSMA pour un an, lui fixant des priorités et résultats à atteindre. La principale mission est d’aider le pays à retrouver la paix et à affirmer son autorité, en mettant l’accent sur la protection des civils contre les violences. Avec la signature en 2015 de l’Accord pour la paix et la réconciliation nationale issu du processus d’Alger, la MINUSMA s’est investie auprès des parties signataires pour sa mise en œuvre. Mais cette signature « à l’arraché » n’a pas permis le retour de la paix. Le cycle de violences a au fil du temps gagné progressivement le centre du pays, avant que cette zone ne devienne en 2018 la plus dangereuse. Les attaques terroristes visant les forces de défense et de sécurité maliennes ainsi que les forces internationales se sont intensifiées. Les derniers massacres de civils au centre du pays ont couronné « l’impuissance de la MINUSMA » et ré ouvert le débat sur son utilité en l’état, à la veille du renouvellement de son mandat. Car restaurer la paix dans un pays en guerre semble être une mission impossible pour elle.

En conférence de presse, le vendredi 21 juin à l’hôtel Sheraton, le Représentant spécial du Secrétaire général des Nations Unies au Mali, chef de la MINUSMA reconnaissait les attentes déçues des Maliens. « Je sais depuis que je suis là que les attentes des Maliens lambda sont au-delà du mandat de  la MINUSMA. Ils estiment qu’il faut une force d’imposition de la paix pour lutter contre le terrorisme. Nous, notre mandat, c’est un mandat de stabilisation du Mali », affirmait Mahamat Saleh Annadif.  « À partir du moment où il y a ce péché originel, que j’ai toujours évoqué, et à partir du moment où nous sommes là et qu’il y a toujours des morts, considérons que nous avons tous échoué et que le premier échec est celui des Maliens d’abord », répliquait-il à une question.

Mandat robuste ou statu quo ?

Alors que les critiques visent la mission, qui a payé un très tribut en vies humaines, le gouvernement, à travers son ministre des Affaires étrangères et de la Coopération internationale, plaide depuis quelques mois auprès du Conseil de sécurité le renouvellement de son mandat. Tiebilé Dramé a demandé « une présence accrue de la MINUSMA dans les régions du centre du Mali, aux côtés des Forces de défense et de sécurité maliennes, afin de protéger les populations civiles et leurs biens, de mettre un terme au cycle de violences et de permettre le retour de l’administration et des services sociaux de base ».  En visite de « solidarité » au Mali du 19 au 21 juin, le Secrétaire général adjoint des Nations Unies aux opérations de maintien de paix, Jean-Pierre Lacroix informait du renforcement de l’action de la MINUSMA dans le centre mais sans changements majeurs. « L’effectif ne sera pas augmenté, mais notre défi c’est comment faire mieux et plus pour aider les Maliens à inverser la  tendance. L’essentiel, c’est de faire en sorte de prévenir les menaces (…) et de créer des espace de sécurité pour permettre à l’État de revenir ». Le diplomate soulignait que « la MINUSMA a été créée pour répondre aux problématiques du nord et surtout à la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation nationale ».

S’il fut un temps où ce mandat était incompris d’une frange de l’opinion malienne, aujourd’hui, il s’avère à ses yeux inadapté au contexte. « Le mandat, tel que défini, ne répond pas du tout à l’urgence du moment. Il faudrait revoir les dispositions, pas un renouvellement seulement. La MINUSMA est considérée aujourd’hui comme une force tampon, d’interposition, il faut penser qu’elle puisse aller au-delà », estime Khalid Dembelé, économiste et chercheur au Centre de recherche et d’analyses politiques, économiques et sociales (CRAPES). Selon lui, rien ne laisse présager du mandat « robuste » tant réclamé. « C’est à nous de faire en sorte que le mandat puisse aller au-delà : qu’ils acceptent ou qu’ils quittent le pays », affirme-t-il.

Dans son dernier rapport, en date du 31 mai, sur la situation au Mali, le Secrétaire général de l’ONU recommandait une augmentation en « efficacité et en efficience, en assurant une protection accrue lors des déplacements, en étant plus souple et plus agile et en adoptant une attitude proactive dans toutes ses zones de déploiement. Ce qui nécessitera la reconfiguration de certaines unités existantes et le déploiement de capacités supplémentaires ».

C’est ainsi que le camp de Diabali devrait être transféré aux FAMAs début 2020. Les responsables onusiens rappellent souvent que la MINUSMA n’a pas à se substituer à l’État, mais à l’appuyer dans ses efforts. « Il y a une nécessité de réponses maliennes à la crise du centre. Chacun a son rôle. N’essayons pas de considérer qu’il y a une baguette magique quelque part qui s’appelle MINUSMA,  EUTM ou G5 Sahel », rappelle le chef des opérations de maintien de  paix, ajoutant « il faut un renforcement des capacités de l’État, des FAMAs et des forces de sécurité ».

Même si la contribution des Nations Unies est considérable, le mal est toujours vif et le pays peine à se remettre debout. La persistance de l’hémorragie malgré l’assistance des forces internationales agace de plus en plus en l’absence de perspectives. Dr Bréma Ely Dicko, chef du département Sociologie – anthropologie de l’Université des lettres et des sciences humaines de Bamako, recommande un mandat robuste pour la MINUSMA. « C’est le minimum que les Nations Unies puissent faire, pour la simple raison qu’il permettra à la MINUSMA d’être plus efficace sur le terrain et de contribuer à la lutte contre le terrorisme, ce qui n’est pas dans son mandat actuel », souligne-t-il.

Une mission à laquelle doivent faire face, selon Abdoulaye Tamboura, Docteur en géopolitique, d’autres forces. « C’est aux Forces armés maliennes, à Barkhane et au G5 Sahel que revient cette mission ». C’est d’ailleurs dans cette lutte qu’un groupe armé terroriste a abattu mi-juin lors de combats dans le nord-est du pays un hélicoptère de la force Barkhane. Un témoignage de leur capacité de nuisance et de l’urgence à circonscrire les violences au centre.

Pour Dr Bréma Ely Dicko, le temps n’est plus au statu quo. « À quoi sert de vouloir sauvegarder des institutions si le pays sombre de jour en jour et tend vers l’inconnu ? Il est aujourd’hui plus que nécessaire de revoir la façon de faire de la MINUSMA, de la sortir de cette position de stabilisation pour être une force combattante ». Il ajoute « si l’on n’accorde pas à la MINUSMA un mandat robuste, lui permettant de combattre les groupes terroristes, elle comptera toujours ses morts et sera là pour une dizaine d’années ». 

Toutefois, le sociologue suggère qu’à défaut d’accorder un mandat offensif à la mission « ses effectifs soient réduits et de faire en sorte que l’argent qui servait à les prendre en charge soit réorienté au bénéfice du G5 Sahel, qui est une force de lutte contre le terrorisme sans moyens ».

Pour l’heure, malgré les critiques, la présence de la MINUSMA reste indispensable, tant la menace est réelle. Les Forces armées maliennes supposées prendre la relève sont  toujours en reconstruction.

Développement durable : L’Afrique peut-elle défendre son propre agenda ?

Plus de 800 délégués de 51 pays différents, dont 45 africains. 22 ministres et Secrétaires d’État. 28 événements parallèles et le lancement de nouvelles initiatives, dont le premier Forum africain sur la science, la technologie et l’innovation et le Fonds africain pour les femmes leaders. Le 5ème Forum régional africain sur le développement durable (FRADD), qui vient prendre fin à Marrakech, avait pour principale ambition de porter haut la voix unifiée du continent dans ce domaine. Mais vouloir ne veut pas obligatoirement dire pouvoir !

Les contributions régionales collectives de l’Afrique au Forum politique de haut niveau pour le développement durable, organisé sous l’égide du Conseil économique et social de l’ONU, qui se tiendra du 9 au 18 juillet prochain à New York, et au Sommet des Objectifs de développement durable (ODD) prévu dans la même ville les 24 et 25 septembre 2019, ont été discutées et adoptées, sous la forme d’une déclaration. Avec une feuille de route pour la mise en œuvre de l’Agenda 2063 et de l’Agenda 2030 pour le développement durable et ses 17 Objectifs à l’échelle régionale au cours des prochaines années. Et un credo à défendre : « Donner des moyens d’action aux populations et assurer l’inclusion et l’égalité ».

Le FRADD, fruit de la collaboration entre les organisations du Système des Nations Unies, la Commission de l’Union Africaine, la Commission économique pour l’Afrique, la Banque Africaine de Développement et d’autres partenaires et présidé par le Maroc jusqu’en avril prochain, a invité « l’ensemble des pays africains à renforcer la coopération Sud – Sud et le partage d’expériences entre les pays du continent pour relever les défis multiples et complexes et mettre en place des partenariats multipartites, des plans et programmes d’action, aux niveaux régional et sous régional, susceptibles de réaliser le développement escompté pour ne laisser personne pour compte ».

Des statistiques effarantes !

Mais il faudra aux Africains se battre et parler d’une seule voix au reste du monde pour que cela ne reste pas un vœu pieux. Car les chiffres sont effarants. Selon la Burundaise Biha Giovanie, Secrétaire exécutive adjointe de la Commission économique de l’ONU pour l’Afrique (CEA), qui s’est s’est longuement appesantie à Marrakech sur les déficits de l’Afrique en matière de développement, notamment sur les volets de la santé, de l’éducation, de l’inclusion et de l’emploi des jeunes, pour atteindre les 17 objectifs onusiens de développement socio-économique pour la période 2020 – 2030, l’Afrique a besoin d’un investissement global minimal de 600 milliards de dollars. Un rêve !

Et l’ampleur de la tâche en fait un travail herculéen. Par exemple, pour l’ODD 4, une éducation de qualité, la CEA confirme dans son rapport 2018 que la plupart des enfants quittent l’école avec des acquis insuffisants pour répondre aux besoins du marché du travail. Le continent affichant aussi la plus faible proportion d’enseignants formés, si les tendances actuelles se confirment, la part de l’emploi vulnérable restera à 66% jusqu’en 2022, le plus élevé au monde. L’objectif de l’Union africaine, à l’agenda 2063, est de moins de 41% d’ici 2023!

Mais c’est surtout la question du climat qui est la plus sérieuse entrave à la réalisation des ODD. Pour rappel, en mars dernier, le cyclone tropical Idai a touché plus de 2,6 millions de personnes et causé plus de 700 décès et des conséquences humaines et économiques graves au Malawi, au Mozambique et au Zimbabwe.

Alors que, selon les données de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), les flux financiers liés au climat en direction de l’Afrique sont passés de 615 millions de dollars en 2000 à 408 milliards en 2017. Ce qui reste extrêmement faible, peu prometteur et bien en deçà des 100 milliards de dollars par an promis par la « communauté internationale » des pays développés lors de la 15ème réunion de la Conférence des Parties tenue à Copenhague!

Accord pour la paix: Le Conseil de sécurité de l’ONU veut insuffler un nouveau souffle

Faire le point sur l’état de la mise en œuvre de l’accord pour la paix et la réconciliation, ainsi que sur celui de l’opérationnalisation de la force conjointe du G5 Sahel, telle était la mission du Conseil de sécurité de l’ONU en visite au Mali en cette fin de semaine. Lors d’une conférence de presse tenue samedi 23 mars 2019 à l’hôtel Sheraton de Bamako, les membres de la délégation, accompagnés du représentant spécial du secrétaire Général des Nations Unies au mali, ont rendu public les différentes démarches et actions menées avec l’ensemble des acteurs maliens au cours de leur visite.

Cette visite du Conseil de sécurité des Nations Unies au Mali, la quatrième dans le pays depuis 2013, s’inscrit dans un contexte particulier. Elle a été conduite par les ambassadeurs de France, d’Allemagne et de Côte d’ivoire à l’ONU et intervient 6 mois après les élections présidentielles dans le pays et trois mois avant le renouvellement du mandat de la Minusma en juin prochain. Quelques jours d’une réunion ministérielle importante du conseil de sécurité qui se tiendra le 29 mars à New York, occasion de prendre des décisions importantes sur l’avenir de l’accompagnement international du  processus de paix malien et sur le futur de la Minusma.

Accord, prioritaire                     

La délégation a rencontré l’ensemble des acteurs du processus de paix et de réconciliation, notamment le Président de la République, le Premier ministre, les membres du gouvernement, les partis politiques de l’opposition ainsi que la société civile à travers diverses associations dont, entre autres, celles des femmes.

Une réunion associant les membres du gouvernement aux côtés de ceux de la coordination, de la plateforme et des partis non concernés, s’est également tenue avec le comité de suivi de l’Accord, en plus de différentes rencontres avec les missions sécuritaires présentes au Mali et au Sahel.

Avec pour  message principal, la nécessité de donner un nouvel élan à la mise en œuvre de l’accord pour la paix et la réconciliation et d’en accélérer les différents volets, la visite a permis à la délégation du Conseil de sécurité des Nations Unies de dresser un état des lieux du processus de paix et de réconciliation au Mali.

« Nous avons salué les progrès importants qui ont été réalisés depuis le renouvellement du mandat de la Minusma en juin dernier, notamment la tenue des élections dans des conditions pacifiques, la poursuite du processus de décentralisation, le lancement d’un processus de DDR ou encore l’adoption d’un décret sur les critères d’intégration », a indiqué François Delattre, ambassadeur de France à l’ONU.

En revanche, le Conseil  a exprimé son regret  concernant plusieurs mesures prioritaires identifiées par la résolution 2423 (2018) qui n’ont pu être mises en œuvre avant l’échéance de mars. Il s’agit  notamment de  l’intégration effective de 1000 combattants au sein des FAMa, de l’opérationnalisation des autorités intérimaires et de l’établissement d’une zone de développement spécifique pour le Mali.

Les membres du Conseil ont par ailleurs marqué les attentes fortes de la communauté internationale près de 4 ans après la signature de l’Accord d’Alger.

Pour le conseil de sécurité des Nations Unies, il existe aujourd’hui un besoin de priorisation pour la mise en œuvre des principales dispositions de l’Accord. Aussi, les principaux points sur lesquels des avancées sont attendues de manière urgente sont surtout le processus de révision constitutionnelle après la tenue des consultations indispensables et la définition d’un plan global assorti d’une échéance précise pour le redéploiement des FAMa, reconstitués au nord du Mali.

Une  réunion du CSA a en outre permis  au conseil de proposer aux acteurs maliens, la présentation dès que possible d’une nouvelle feuille de route « réaliste, contraignante et centrée sur un nombre de priorités limitées ».

Réadapter la force du G5 Sahel

Concernant l’opérationnalisation de la force conjointe du G5 Sahel, la délégation du Conseil de sécurité a eu  un échange « de très grande qualité » avec le commandant de la force du G5 Sahel, le secrétaire permanent ainsi que les ministres des Affaires Etrangères du Mali et du Burkina Faso. Elle a salué la relance récente des opérations de la force ainsi que le progrès réalisé dans la mise en place du cadre de conformité en matière de droit de l’homme.

« Le conseil de sécurité a renouvelé son intention de rediscuter du soutien international à la force une fois que celle-ci  sera pleinement opérationnelle et que les premiers résultats seraient obtenus, ce qui est le cas aujourd’hui », a précisé François Delattre.

Sur la base des indications qui ont été formulées par le commandant de la force du G5 sahel et le représentant spécial du secrétaire Général des Nations Unies au Mali, le Conseil de sécurité assure examiner avec l’ensemble des membres l’accord technique existant, pour le rendre plus adapté aux besoins du terrain.

Mais, comme l’a relevé Christoph Heusgen, Ambassadeur d’Allemagne à l’ONU, « Le Mali est confronté à un défi extraordinaire et face à cela, la seule réponse militaire ne suffit pas. Il faut un contrat social élargi à toutes les composantes de la société malienne ».

« Nous avons noté les attentes que le peuple malien, dans sa grande diversité a, vis-à-vis du Conseil de sécurité et nous repartons à New York, enrichis de tout ce que nous avons vu et entendu.  L’objectif était  d’être sur le terrain, toucher du doigt les réalités et voir ensemble avec toutes les parties engagées ce qui peut être fait », a conclut Kacou Houadja Léon Adom, Ambassadeur de Côte d’ivoire à l’ONU.

11 Premières dames à New York contre le mariage avant 18 ans

Elles étaient dix Premières dames, et non des moindres, à être venues soutenir à New York, le 26 septembre, Lalla Malika Issoufou dans son effort de renversement des tendances démographiques de son pays, le Niger. « Non au mariage des enfants » : c’est le message simple et fort que les épouses des présidents de grands pays tels que l’Afrique du Sud et le Nigeria, mais aussi du Cabo Verde, Mali, Burkina, Rwanda, Zimbabwe et Comores ont délivré en marge de l’Assemblée générale des Nations unies, dans un évènement co-organisé par le NIger et le Fonds des Nations unies pour la population (UNFPA).
« La forte pression des pesanteurs socio-culturelles donne un tableau peu reluisant au Niger », a reconnu en parlant de son propre pays Lalla Malika Issoufou, Première dame du Niger. Le mariage avant 18 ans, une pratique qui touche tout le Sahel, concerne plus de 76 % des jeunes filles au Niger, et jusqu’à 28 % des moins de 15 ans. En plus de la déscolarisation des jeunes filles et de leur situation de dépendance à l’égard de leur mari, la conséquence est bien connue. Elle a pour nom « fistule obstétricale », ce dramatique déchirement d’organes qui survient lors de grossesses précoces et handicape les jeunes filles à vie si elles ne se font pas opérer. Ce problème de santé publique touche 750 filles par an selon le ministre de la Santé du Niger. Et sur 2 millions de cas dans le monde, la moitié se trouvent au Nigeria, précise Mabingué Ngom, directeur du bureau régional du UNFPA pour l’Afrique de l’Ouest et centrale.
Toujours très discrète en Afrique du Sud, Tshepo Motsepe Ramaphosa s’est levée pour rappeler qu’en tant que médecin, comme Lalla Malika Issoufou, elle ne peut pas rester insensible au sort des « filles, soeurs et mères » du continent.  Elle a encouragé toutes les femmes à se battre pour leur autonomisation et les droits des plus jeunes. D’autres intervenants sont revenus sur les « bonnes pratiques » engagées au Niger, qui ont permis de voir le taux de fécondité passer de 7, 6 à 6 enfants par femme entre 2013 et 2017, selon les Enquêtes démographiques de santé (EDS) nationales. Parmi ces expériences innovantes figurent des « espaces sûrs » qui ont déjà bénéficié à 132 000 jeunes filles, l’information plus accessible sur les méthodes de contraception, ainsi que les « écoles des maris » lancées avec le soutien du UNFPA, pour encourager les hommes à prendre les bonnes décisions concernant la santé de leur femme, en leur permettant un bon suivi médical.
L’ancien ministre éthiopien de la Santé, le Dr Tedros, directeur de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), est venu donner son appui, de même que Michaëlle Jean, secrétaire générale de la Francophonie. Mais ce sont plutôt deux hommes remarquables venus du Niger qui se sont distingués. Le premier, l’honorable Mansour Maiguizo, a pris la parole au nom de l’Association des chefs traditionnels du Niger, témoignant de leur rôle dans le changement des mentalités : « Surtout en milieu rural, a-t-il dit, pour lutter contre la pauvreté, la non scolarisation, la mendicité, la prostitution, la migration et la violence ».  Des ateliers de formation des chefs traditionnels sont organisés depuis 2015 au Niger, pour que tout le monde comprenne l’enjeu du « dividende démographique » – ce moment où la jeunesse se traduira par un essor économique, à condition de voir baisser le taux de fécondité et donc le nombre de personnes à la charge de chaque actif.
Second homme remarquable à New York, le chef religieux Cheikh Ben Salah a rappelé le rôle central de la femme dans le Coran comme dans l’islam, nombreux exemples à l’appui. « La sourate qui représente le centre du Coran porte le nom d’une femme, Mariam », a-t-il souligné, tout comme le fait que « la première personne à avoir embrassé l’islam est une femme », et que « le seul et unique exemplaire du Coran a été confié aux bons soins d’une femme ». Il a souligné le rôle que les imams peuvent jouer en encourageant la planification familiale volontaire, c’est-à-dire le nombre d’enfants qu’un couple décide d’avoir et l’espacement des naissances, pour le bien-être de tous. « Les oulémas ont été invités à jouer leur partition par les plus hautes autorités, a-t-il rappelé. Le Centre islamique national a soutenu des voyages d’étude en Egypte, au Bangladesh et en Indonésie, organisés par l’UNFPA, pour que nous puissions intégrer dans nos prêches les droits des femmes et des filles, ainsi que les sujets démographiques ». Rappelant l’importance pour tout croyant masculin de la « qualité de ses relations avec son épouse », il a encore plus ému la salle avec une citation oecuménique de Martin Luther King : « J’ai cherché mon Dieu, je ne l’ai pas vu. J’ai cherché mon âme, je ne l’ai pas saisie. J’ai cherché mon frère, et je les ai trouvés tous les trois »

73ème Assemblée générale de l’ONU : IBK plaide la cause du G5 Sahel

A la tribune de l’ONU ce mercredi, le président de la République, Ibrahim Boubacar Keita a une nouvelle fois plaidé auprès de la communauté internationale une aide plus accrue pour opérationnaliser le G5 Sahel.

Devant ses pairs, il a affirmé que la lutte contre le terrorisme au Sahel est une contribution importante à la sécurité internationale. « Nous continuons de demander au Conseil de sécurité d’autoriser le déploiement de cette force sous le Chapitre VII de la Charte, assorti d’un financement adéquat, pérenne et prévisible, y compris à travers les Nations Unies, afin de lui permettre d’accomplir durablement et efficacement son mandat ».

Il a par ailleurs invité les partenaires bilatéraux et multilatéraux qui ont fait des annonces de contributions financières à honorer leurs engagements en faveur de la force conjointe du G5 Sahel. Durant son intervention, le chef de l’Etat a également vanté « les avancées importantes » enregistrées dans la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation. « Il me plait de souligner l’absence de belligérance et d’affrontements entre les forces armées maliennes et les mouvements armés, depuis la signature de l’Accord en mai/juin 2015(…) le retour de l’Administration malienne a Kidal et dans les autres régions du Nord du pays, la présence de l’Etat dans ces régions, durement affectées par la crise, a notamment rendu possible l’ouverture des classes au bénéfice des enfants » liste-t-il. « Je sais que ces acquis sont fragiles » reconnait-il néanmoins.

Au plan national, IBK a réitéré sa volonté de placer la jeunesse au cœur de son second mandat. « J’engagerai un pacte national pour la jeunesse, à travers des investissements considérables dans la refondation de notre système éducatif et de formation, ainsi que de promotion de l’emploi » annonce-t-il. Le président IBK a assuré qu’il mettra tout en œuvre pour assurer le retour des réfugiés maliens au pays.

Sur la politique étrangère du Mali, il s’est dit profondément préoccupé par la situation en Libye qui « menace la stabilité de la région du Sahel ». Il a réaffirmé le soutien du Mali à la Palestine et appelle à une reprise des négociations entre Israël et la Palestine en vue d’une solution à deux Etats.

Pour conclure son discours, il a assuré ne ménager aucun effort pour assurer une mise en œuvre diligente et intégrale de l’Accord pour la Paix et la réconciliation.

Mali : l’ONU déçue de la mise en œuvre de l’Accord pour la paix

Le représentant spécial du secrétaire général des Nations Unies au Mali a animé ce jeudi à la maison de la presse une conférence. Le chef de la MINUSMA a présenté les innovations apportées au nouveau Mandat de la mission, mais aussi fait part de la frustration de la communauté internationale dans la mise en œuvre de l’Accord.


« Cette résolution 2423 ne fixe pas uniquement le mandat de la MINUSMA, elle adresse également un certain nombre des messages forts du Conseil de sécurité aussi bien aux Maliennes et Maliens, mais surtout aux trois parties signataires de l’Accord pour la paix et la réconciliation », a déclaré dans son introduction, le chef de la mission Mahamat Saleh Annadif.

Ladite résolution qui renouvelle le mandat jusqu’à a juin 2019, fixe en même temps, les orientations et agissements de la MINUSMA dans les domaines qui lui sont confiés. Elle intervient suite à la récente visite du secrétaire général de l’ONU au Mali et le troisième anniversaire de la signature de l’Accord.Cependant, trois ans après, c’est le désenchantement non seulement chez la CMA, la Plateforme et le Gouvernement, mais aussi chez les partenaires internationaux.


La situation au nord et au centre s’aggrave. L’accroissement des violences intercommunautaires, des violations des droits de l’homme et des attaques terroristes installent un climat de constante préoccupation. « Pour la communauté internationale, ces retards qui persistent dans la mise en œuvre des principales dispositions de l’Accord pour la paix et la réconciliation interpelle. La résolution exprime cette frustration en dépit de l’appui et de l’assistance considérable reçus de la part de la communauté internationale », rapporte le chef de la MINUSMA.


Le dernier rapport trimestriel du secrétaire général de l’ONU sur la situation au Mali et le premier rapport de l’Observateur indépendant dirigé par la fondation Carter ont souligné l’urgence d’aller aux priorités. « Les sujets centraux de l’Accord, à savoir une nouvelle architecture institutionnelle pour le Mali, une armée nationale représentative, reconstituée, et redéployée, y compris la démobilisation des anciens combattants; et une zone de développement au Nord semble avoir été délaissée au profit des éléments qui revêtent un caractère plus périphérique ou de préalable, tels que les autorités intérimaires, le MOC, et l’opérationnalisation des régions des Ménaka et Taoudéni », décris le rapport de l’Observateur. Pour le chef de la mission des Nations Unies, la dégradation de la situation au centre du pays est la conséquence du non-application de l’Accord.


C’est pourquoi, dans la nouvelle résolution, à la différence de la précédente, le conseil invite la CMA, la Plateforme et le Gouvernement « à s’acquitter rapidement de leurs obligations restantes au titre de l’Accord’’.
Désormais, il tient à des résultats, faute de quoi, le mandat de la MINUSMA cessera d’être renouvelé automatiquement. « Le statuquo actuelle ne peut pas continuer », estime le représentant spécial du secrétaire général de l’ONU. Face à l’ampleur de la déception, Annadif exprime son sentiment. « J’avoue que je suis frustré par le fait que depuis deux ans, nous avons construit au moins huit camps pour le cantonnement des combattants et que jusque-là ces camps demeurent vides », a regretté, d’un ton las, le chef de la MINUSMA.


Des sanctions imminentes
Pour la première fois, le conseil de sécurité a évoqué la possibilité de faire usage des mesures prévues dans la résolution 2374 ayant mis en place un régime des sanctions sur le Mali. Si ces mesures ne semblent pas effrayer les parties, elles s’avèrent de plus en plus possibles au regard des timides avancées dans le processus. «Je crois que maintenant les choses vont commencer à mûrir. Le Conseil de sécurité a réuni suffisamment d’éléments. Je ne serai pas surpris si bientôt quelque chose se déclare dans ce sens », avertit Mahamat Saleh Annadif.

70ème anniversaire des casques bleus : Que des sacrifices pour le Mali

Le  Secrétaire général des Nations Unies, accompagné de plusieurs  personnalités dont le Premier ministre du Mali,  a rendu hommage  le 29 mai  à Bamako aux Casques bleus. Le thème  de cet anniversaire est «  70 ans de service et de sacrifice », tout un engagement. Antonio Guterres a exprimé sa fierté à ceux de la MINUSMA pour leur sacrifice au nom de paix. La mission  reste  la plus meurtrière dans le monde.  Ainsi, 99 membres du personnel de la Minusma ont été tués et 358 autres grièvement blessés lors des attaques depuis son déploiement en juillet 2013 jusqu’à la date du 31 mars 2018. Parmi les quatre missions encours, celle au Mali demeure la plus couteuse en vie humaine.  C’est dans ce contexte des sacrifices ultime pour la paix qu’Antonio Guteress a choisi de rendre un hommage appuyé à ceux qu’ils considèrent comme ses ’’ collègues’’.  Au cours de son séjour, le Secrétaire général de l’ONU observe le jeûne en solidarité à la communauté musulmane du Mali  et du monde entier.

Il a souligné tout en exprimant son admiration au travail qu’effectuent les soldats de la paix au Mali, dans un environnement hostile et dangereux. « Vous êtes  en tant que casques bleus le symbole le plus évident  des Nations Unies elles-mêmes », a ainsi déclaré le patron de l’organisation.  Il dans ce contexte d’hommage déposé une gerbe de fleurs au mémorial de la Minusma.  Une visite dans certaines  régions de déploiement de la force  devra être effectuée demain 30 mai 2018.