Yaya Sangaré : « Organiser la présidentielle est un impératif »

Alors que les autorités n’ont toujours pas annoncé de nouvelle date pour la présidentielle, les partis politiques s’impatientent. Yaya Sangaré, Secrétaire général de l’ADEMA, répond à nos questions.

De récentes déclarations des autorités de la Transition, notamment le Premier ministre et le ministre de la Refondation, font planer le doute sur la tenue de la présidentielle en 2024. Cela vous inquiète-t-il ?

L’engagement pris par les autorités de la Transition pour fixer la date au 24 février  est souverain. Un engagement pris non seulement en accord avec les acteurs politiques, mais également avec la CEDEAO et la communauté internationale. Un moment donné, pour des raisons techniques avancées par le ministre en charge, un léger report est intervenu. Ces déclarations nouvelles, qui pourrissent l’atmosphère, doivent être analysées avec beaucoup de lucidité. Il faut comprendre que l’organisation de la présidentielle est un impératif pour deux raisons. La première est que les autorités se sont engagées à un retour à l’ordre constitutionnel qui n’est possible que si nous organisons des élections. Cela nous permettra de renouer avec le reste du monde et de freiner les conséquences d’un isolement diplomatique qu’on ne veut pas nommer. Le deuxième impératif est l’engagement. La parole donnée doit être respectée. Si l’on ne devait pas aller aux élections en 2024, cela devrait faire l’objet d’un consensus avec la classe politique et les autres acteurs impliqués. Le gouvernement fixe les dates, mais les élections concernent d’abord la classe politique et ceux qui veulent être candidats. Il ne s’agit pas de nous imposer quoi que ce soit, il s’agit de respecter la parole donnée, de respecter le pays en tant qu’État souverain et de s’engager pour un retour à l’ordre constitutionnel.

Les autorités ont-elles compris cet impératif ? 

Lorsque l’on suit certaines déclarations et que l’on analyse le fait qu’aucun cadre n’est mis en place, nous n’avons aucun élément d’appréciation sur la bonne volonté des autorités d’aller aux élections. Lorsque nous entendons des soutiens de la Transition assurer que les élections ne sont pas une priorité, nous avons peur. Nous nous disons que les uns et les autres reviendront à la raison pour comprendre que la meilleure chance que nous puissions donner au Mali est de faire en sorte que cette transition réussisse. Pour cela, il faut écouter les Maliens, de croire à leur maturité. Penser que le Président qui sera élu ne sera pas aussi patriote est une insulte aux Maliens.

Le SADI est actuellement assigné en justice pour dissolution. Est-ce un message envoyé aux formations politiques ?

C’est au niveau de la justice, difficile donc de se prononcer. Ce n’est pas un bon message, ni pour la liberté d’expression, ni pour les partis politiques. Nous nous sommes battus pour le pluralisme, nous nous sommes battus pour la démocratie, nous devons faire en sorte qu’aux questions politiques il y ait des réponses politiques. Nous ne pouvons accepter que des situations au sein des partis soient judiciarisées. Cela restreint les libertés et crée une épée de Damoclès. Ce n’est pas bon pour un pays qui traverse aujourd’hui une telle crise.

2024 : une transition à durée indéfinie

Déjà reportée à deux reprises, l’élection présidentielle qui marquera le retour à l’ordre constitutionnel au Mali devrait se tenir en 2024. Initialement prévue pour février, en accord avec la CEDEAO, elle a été repoussée sine die en septembre dernier, sans l’approbation de l’institution sous-régionale. Même si cette dernière semble dans une nouvelle posture conciliante, ses relations avec le Mali pourraient à nouveau se tendre dans les mois à venir. Les partis politiques, dans l’incertitude, doivent se préparer pour une élection dont les dates ne sont pas encore connues.

« Les dates de l’élection présidentielle initialement prévues pour le dimanche 4 février 2024 (premier tour) et le dimanche 18 février 2024 (second tour) éventuellement, connaîtront un léger report, pour des raisons techniques (…) Le Gouvernement de la Transition précise que les nouvelles dates de l’élection présidentielle feront l’objet de communiqué ultérieurement, après échange avec l’Autorité indépendante de Gestion des Élections (AIGE) », annonçait le 25 septembre 2023 le ministre d’État de l’Administration territoriale et de la Décentralisation, Porte-parole du gouvernement, Colonel Abdoulaye Maiga. Trois mois après, les autorités de la Transition n’ont toujours pas communiqué de nouvelles dates pour cette élection très attendue.

S’accorder avec la Cedeao

Alors qu’elle était attendue lors du sommet du 10 décembre dernier pour se prononcer enfin sur le report de la présidentielle au Mali, la Cedeao s’est contentée d’une réaction a minima, déplorant les « décisions prises unilatéralement en ce qui concerne la mise en œuvre du programme de transition qui avait été convenu avec la Cedeao ». L’organisation sous-régionale, après avoir levé l’interdiction de voyage qui pesait sur certaines hautes autorités maliennes, a aussi décidé d’engager une Troïka présidentielle, composée des Présidents du Nigéria, du Bénin et de la Guinée Bissau, à entreprendre d’urgence des visites au Burkina Faso, en Guinée et au Mali, en vue de renouer le dialogue avec ces trois pays pour la mise en œuvre inclusive du programme de transition.

« Cette réaction de la Cedeao signifie qu’elle a pris acte du report de la présidentielle au Mali et qu’elle va s’employer à trouver avec les autorités maliennes de nouvelles dates, qui tiennent dans un délai raisonnable », estime un analyste. « Je pense que le fait de lever l’interdiction de voyage, de décider de renouer le dialogue avec les autorités de la Transition et aussi que le Représentant permanent et Ambassadeur du Mali auprès de la Cedeao ait été reçu dans la foulée par le Président de la Commission de l’institution sont autant de signes annonciateurs d’une certaine décrispation à venir dans les relations », poursuit-il.

Pour un expert politique qui a requis l’anonymat, le seul point d’achoppement entre les deux parties pourrait être la durée d’une nouvelle prolongation de la transition. « Les autorités maliennes ont annoncé un léger report. Mais, si au cours des échanges avec la Cedeao elles proposent de nouvelles dates au-delà de 2024, par exemple, évidemment que la Cedeao ne l’acceptera pas. Elle pourrait alors brandir de nouvelles sanctions contre le Mali ». Selon certains observateurs, il n’est pas exclu que le léger report de la présidentielle soit au delà de 2024. « Les autorités pensent aujourd’hui être dans une position de force vis-à-vis de la Cedeao et de la classe politique ».

Les partis politiques dans l’expectative

Si des signes avant-coureurs sont là, des partis politiques se projettent déjà vers la présidentielle. À l’annonce du report, en septembre dernier, plusieurs formations se sont opposées et exigé la tenue de la présidentielle aux dates initiales den février 2024. Mais, à défaut de pouvoir faire revenir les autorités de Transition sur leur décision, elles se préparent pour une échéance éventuelle avant la fin de l’année 2024.

À en croire Sékou Niamé Bathily, Secrétaire à l’Information et Porte-parole du RPM tendance Bocary Treta, la préparation de la prochaine élection présidentielle a débuté dans l’ancien parti présidentiel depuis la tenue du Congrès extraordinaire, en août dernier, en démarchant dans un premier temps certaines formations de la classe politique et de la société civile. « Nous avons ensuite mis en place des commissions de travail et créé des structures pour une meilleure participation à ces élections, à commencer par une commission qui a travaillé sur la carte politique, que nous avons adaptée à l’organisation interne du parti. Nous avons créé de nouvelles sections et fédérations régionales, conformément au nouveau découpage territorial à base duquel devraient se tenir les prochaines élections dans notre pays ».

Comme le RPM, l’Adema est aussi déjà tournée vers la préparation de la présidentielle à venir. Selon Yaya Sangaré, Secrétaire général du parti, il essaye d’avoir une force politique nouvelle, de tirer les enseignements de tout ce qui a été fait ces dernières années et, en raison du contexte nouveau, d’analyser la situation pour proposer une nouvelle offre aux Maliens.

« Des actions sont déjà engagées. Nous sommes en train de renouveler nos structures à la base. Nous sommes aussi engagés depuis quelques mois à mettre en place une force politique électorale avec d’autres formations, mouvements et associations politiques », confie-t-il, assurant que l’Adema aura son propre candidat, comme recommandé lors du dernier Congrès, et que le parti travaillera à ce que ce candidat bénéficie de l’accompagnement des autres partis qui vont se retrouver dans son projet de société.

Au RPDM de Cheick Modibo Diarra, on se dit également « prêt à aller à la conquête du pouvoir à tout moment », tout comme au parti Yelema, qui va d’ores et déjà désigner son candidat au prochain scrutin présidentiel à l’issue de son 4ème Congrès ordinaire, le 23 décembre 2023.

Préparation impactée ?

Si les partis politiques sont tournés vers la préparation du prochain scrutin présidentiel, cette préparation reste particulière, étant donné que les nouvelles dates de l’élection ne sont pas encore connues. « La préparation est un peu impactée parce que nous ne connaissons pas les dates de l’élection. Dans un premier temps, notre programme de société, nous l’avons calé sur une période donnée, en nous basant sur les engagements des autorités de la Transition. Maintenant que ce délai a été repoussé, bien sûr que cela nous perturbe un peu », avoue Sékou Niamé Bathily, même si, pour lui, cette situation ne constitue pas un handicap. « Cela ne met pas un frein à ce que nous sommes en train de faire. Nous continuons à nous préparer pour être prêts lorsque le collège électoral sera convoqué », assure-t-il.

« C’est à la fois un handicap et une opportunité. Mais nous pensons qu’il est bon qu’on indique une date pour que nous puissions bien nous préparer, parce qu’une élection demande beaucoup de ressources. On ne peut pas se lancer dans une campagne indéfinie », estime pour sa part Yaya Sangaré.

Tenir l’échéance 2024

Même si la classe politique a invité le gouvernement de transition à ouvrir le dialogue en vue de trouver de nouvelles dates consensuelles pour la tenue de la prochaine élection présidentielle, elle n’a jusqu’à là pas encore été sollicitée par les autorités dans ce sens. Mais, pour la plupart des partis politiques, la tenue de l’élection ne devrait pas aller au-delà de l’année 2024.

« Nous devons tout faire pour que les élections puissent se tenir avant la fin de l’année 2024. Un léger report ne devrait pas dépasser 3 à 6 mois. Les autorités doivent mobiliser toutes les ressources, créer un cadre favorable de dialogue et régler tous les problèmes techniques pour que nous allions à cette élection pour mettre fin à la Transition », préconise le Secrétaire général de l’Adema.

C’est ce qu’estime également le RPM, pour lequel le léger report ne devrait pas dépasser 6 mois au plus. « Pour nous, cette élection peut et doit se tenir en 2024. Nous croyons en la bonne foi des autorités pour aller vers une sortie de transition honorable pour tous », appuie pour sa part Sékou Niamé Bathily. Aujourd’hui, l’interrogation porte sur les actions politiques qui seront menées si la Transition se prolonge pour une durée indéfinie. Mais nul doute que la pression pourrait être forte sur les autorités, aussi bien de la part de la Cedeao, des PTF, de la classe politique et des acteurs de la société civile.

Transition : au rythme des reports

Le spectre d’une nouvelle prolongation planait déjà sur la Transition depuis un moment. C’est désormais officiel. L’élection présidentielle, initialement prévue pour février 2024, est reportée à une date ultérieure, a annoncé le gouvernement lundi 25 septembre.

« Les dates de l’élection présidentielle initialement prévue pour le dimanche 4 février 2024 (premier tour) et le dimanche 18 février 2024 (second tour) éventuellement, connaîtront un léger report pour des raisons techniques », a indiqué le ministre de l’Administration territoriale et de la décentralisation, le Colonel Abdoulaye Maiga.

« Le Gouvernement de la Transition précise que les nouvelles dates de l’élection présidentielle feront l’objet de communiqué ultérieurement, après échange avec l’Autorité indépendante de Gestion des Élections (AIGE) », a-t-il ajouté.

Par ailleurs, a souligné le Porte-parole du gouvernement, « après un examen minutieux du chronogramme des réformes politiques et électorales (…) le Gouvernement de la Transition informe l’opinion qu’il décide d’organiser exclusivement l’élection présidentielle pour sortir de la Transition. Les autres élections feront certainement l’objet d’un autre chronogramme, qui sera établi par les nouvelles autorités sous les directives du nouveau Président de la République ».

Parmi les « raisons techniques » invoquées par le gouvernement pour justifier ce « léger report », la prise en compte des nouvelles dispositions constitutionnelles dans la Loi électorale, en particulier l’augmentation du délai entre les 2 tours de l’élection présidentielle, la prise en compte par l’AIGE des résultats de la révision annuelle des listes électorales dans le fichier électoral à partir de janvier 2024, « seul moyen d’assurer une large participation des Maliens aux prochaines élections », et la gestion de la « prise en otage » de la Base de données du Recensement administratif à vocation d’état-civil (RAVEC) par le prestataire Idemia, une société française.

Sur ce dernier point, selon les explications du gouvernement, Idemia conditionne le transfert de propriété du système aux autorités maliennes à un payement de plus de 5 milliards de francs CFA, somme restant due à la société au titre du marché.

Réactions diverses

L’annonce du report de la présidentielle de février 2024 a suscité des réactions au sein de la classe politique. À la Coalition des forces patriotiques (COFOP), la décision du gouvernement est favorablement accueillie. « Pour nous, ce n’est pas une surprise, parce que c’était déjà notre proposition. Nous avons estimé qu’en réalité la fin de la Transition c’est l’élection présidentielle. La communauté internationale ne s’intéresse pas aux communales et aux législatives. Il vaut mieux sortir de la Transition en organisant uniquement la présidentielle et laisser le Président élu organiser à son rythme les législatives et les communales », confie le Dr. Abdoulaye Amadou Sy, Président de la COFOP, soulignant que le délai supplémentaire pour l’organisation de la présidentielle ne devrait pas dépasser 3 mois.

Réaction contraire au parti Fare An Ka Wuli de l’ancien Premier ministre Modibo Sidibé, où le communiqué du gouvernement a été une surprise. « Nous, puisque nous avons pu tenir dans les conditions actuelles le référendum, qui a été salué par le gouvernement, pensions qu’après avoir été à même de se donner les moyens d’organiser ce référendum le gouvernement serait en mesure de mobiliser les mêmes ressources pour tenir la présidentielle à date », se désole Bréhima Sidibé, Secrétaire général du parti.

Dans un communiqué en date du 25 septembre et signé de son Président Dr. Youssouf Diawara, le parti Yelema, « le changement », indique que « cette nouvelle prolongation, outre qu’elle viole la Charte de la Transition, n’a fait l’objet d’aucune discussion interne entre les forces vives et ne saurait être une décision consensuelle ». « Le parti prend date devant l’histoire et met les autorités en garde sur les risques qu’elles font peser sur notre pays dans leur approche solitaire, non consensuelle, non inclusive, pour des objectifs inavoués ».

De son côté, le Parti pour la renaissance nationale (Parena) déplore également la non concertation préalable avec les acteurs politiques et de la société civile dans la prise de décision du gouvernement. Par ailleurs, pour le parti du Bélier blanc, « l’organisation d’élections est une volonté politique. Avec la volonté politique, certaines des raisons techniques invoquées pour justifier ce report pouvaient être évitées, notamment par la relecture de la Loi électorale et la gestion de la prise en otage du RAVEC ». L’Appel du 20 février, qui regroupe des partis politiques et des mouvements associatifs, et la Ligue démocratique pour le changement de Moussa Sinko Coulibaly ont également condamné l’initiative. Ce dernier dénonce une « tentative de prise en otage de la démocratie malienne ». Le RPM tendance Bokary Treta s’est dit surpris et a exprimé sa profonde inquiétude.

D’autres enjeux ?

Au-delà des raisons techniques avancées par le gouvernement de transition pour justifier le report de l’élection présidentielle, d’autres enjeux pourraient également être à la base cette décision.

Dans un contexte actuel de reconquête du territoire, avec l’occupation des anciennes emprises de la MINUSMA par l’armée malienne, y compris dans les zones qui échappaient au contrôle de l’État, notamment dans le nord du pays, le report de la présidentielle pourrait être une garantie de sa tenue plus tard sur toute l’étendue du territoire national dans de bonne conditions sécuritaires, constituant un gain politique pour les autorités de la Transition.

« Aujourd’hui, il faut constater que la récupération du territoire est en cours. C’est une guerre qui est déclenchée avec la CMA. Tenter de faire des élections sur l’ensemble du territoire en ce moment serait un peu hasardeux », pense l’analyste politique Boubacar Bocoum. « Je pense qu’une fois que la MINUSMA va partir, nous serons dans une crise maliano-malienne. Soit on fait la guerre, soit on se parle. Si c’est la guerre, il faudra la faire et ensuite passer aux élections. Si c’est se mettre d’accord dans l’esprit de réviser l’Accord ou de faire sa relecture intelligente, nous allons nous retrouver dans une posture où un dialogue sera établi. Sur la base de cela, on pourra passer aux élections », analyse-t-il. Toutefois, le gouvernement n’a pas mentionné la situation sécuritaire pour motiver son report, ce qui surprend plusieurs observateurs.

Sur un autre plan, la candidature du Président de la Transition à l’élection présidentielle de fin de la période transitoire n’étant pas exclue, certains observateurs estiment que le report de l’échéance initiale de février 2024 pourrait avoir été décidé pour lui donner le temps de démissionner éventuellement de l’armée, de se préparer et de se présenter à ce scrutin.

Boubacar Bocoum n’est pas de cet avis. Pour lui, les enjeux sont au-dessus de la personne du Président de la Transition et ne sont que d’ordre organisationnel. « La classe politique aujourd’hui ne peut pas battre le Colonel Assimi Goïta s’il décide de se présenter. Donc je ne pense pas qu’il ait besoin de retarder des élections en raison de sa candidature », tranche-t-il.

Nouvelles sanctions de la CEDEAO en vue ?

Avant le coup d’État au Niger, lors de son sommet du 9 juillet dernier à Abuja, la CEDEAO avait sommé les différents pays en transition, le Burkina Faso, la Guinée et le Mali, de respecter les chronogrammes établis, n’excluant pas la prise de nouvelles sanctions. L’organisation sous-régionale s’apprêtait d’ailleurs à envoyer le Président béninois Patrice Talon dans les trois pays pour relancer le dialogue au plus haut niveau avant qu’un nouveau putsch ne survienne au Niger, laissant l’initiative sans suite.

Avec l’annonce du report de la présidentielle au Mali, la CEDEAO pourrait envisager de prendre de nouvelles sanctions et de durcir le ton, envoyant par la même occasion un message aux autres pays en transition dans la sous-région. Pour l’heure, elle n’a pas encore officiellement réagi. Adama Ben Diarra, dit Ben le Cerveau, leader du mouvement Yerewolo Debout sur les Remparts, avait en août alerté sur les conséquences d’une nouvelle prorogation, assurant que les Maliens ne pourraient plus supporter les effets de nouvelles sanctions. Cette sortie médiatique hors des clous lui a valu des poursuites judiciaires et une disgrâce. Il est aujourd’hui en prison et n’est plus membre du CNT.

Toutefois, pour certains, la posture actuelle de la CEDEAO dans la crise nigérienne la fragilise et elle ne pourra plus se dresser véritablement contre la nouvelle prolongation de la transition au Mali. « Aujourd’hui, la CEDEAO est une organisation qui se cherche. Je ne pense pas qu’elle constitue encore un élément qui pèse dans les décisions des autorités actuelles », glisse un analyste.

Présidentielle de février 2024 : les autorités annoncent un report

Devant la presse ce lundi 25 septembre, le ministre d’Etat, ministre de l’administration territoriale, le Colonel Abdoulaye Maiga a annoncé le report de la présidentielle prévue en février 2024 (4 février premier tour- 18 février second tour). Parmi les raisons, il a évoqué l’adoption d’une nouvelle constitution, la révision des listes électorales mais aussi un litige avec une société française, Idemia, impliquée selon lui dans le processus de confection de RAVEC. Le Colonel Maiga a évoqué un léger report pour la présidentielle et les « nouvelles dates feront l’objet d’un communiqué ultérieurement, après échange avec l’AIGE ». Il a également précise que le gouvernement décide d’organiser, exclusivement, l’élection présidentielle pour sortir de la Transition. Les autres élections feront certainement l’objet d’un autre chronogramme qui sera établi par les nouvelles autorités, sous les directives du nouveau président de la République. Le 8 août dernier, le ministre d’Etat avait fait le point des différentes propositions des partis politiques sur le chronogramme de la transition. Au total 17 propositions ont été faites par 81 partis politiques sur les 291 sollicités par le gouvernement, soit un taux de réponse de 27,83%. 5 principales tendances se dégageaient des 17 propositions faites, en tête desquelles celle d’une « prorogation du délai de la Transition de 3 à 18 mois afin de bien organiser les élections à venir », mise en avant par 15 partis. 14 autres optent pour l’organisation des élections conformément au chronogramme adopté par le gouvernement, 12 proposent de tenir l’élection présidentielle à la date indiquée dans le chronogramme et de coupler les autres élections, 9 préconisent l’organisation des élections en 2024 « lorsque les conditions sécuritaires seront réunies » et, enfin, 8 partis politiques proposent d’organiser les élections législatives en premier lieu puis l’élection présidentielle, les futures autorités organisant les autres scrutins.

Bart Ouvry : « j’ai toujours cherché à être à l’écoute des Maliens »

Un « ami du Mali » s’en va. Bart Ouvry, Ambassadeur de l’Union Européenne depuis 2019 dans le pays, est en fin de mission. Le Belge quitte un pays, dit-il, d’une « grande culture d’accueil et de générosité », où il a durant quatre ans été « attentif » aux aspirations de ses citoyens.

Vous êtes arrivé au Mali une année après la réélection d’IBK, qui a été marquée par une crise postélectorale. Plus tard, la situation du pays a empiré, avec les contestations du mouvement M5-RFP et les deux coups d’État qui les ont suivies. Comment avez-vous vécu ces évènements ?

Je les ai vécus de près en tant qu’observateur politique. Et je peux témoigner de la dernière année sous le Président IBK. Ça a été certainement une année difficile pour les Maliens, une année difficile pour nous aussi, communauté internationale, parce qu’il faut avouer qu’outre les contestations la situation sécuritaire posait aussi problème. Durant ces années, on a assisté à des attaques contre les FAMa, les membres des Forces de sécurité, parfois des fonctionnaires, mais aussi des représentants de la communauté internationale, qui ont causé beaucoup de difficultés au Mali. Nous avons condamné les coups d’État, mais, en nous rendant compte de la crise profonde que traversait le pays, que traverse toute la région du Sahel, nous avons continué notre collaboration.

Depuis le deuxième coup d’État et l’arrivée du Colonel Assimi Goïta au pouvoir, le pays s’est beaucoup tourné vers la Russie. Ne pensez-vous pas que cela est en partie dû à la teneur des relations entre l’UE et le Mali ?

Ce qui pour nous Européens est important, c’est de nous poser des questions sur l’efficacité de notre action. Je crois qu’il y a eu une grande impatience de la part des Maliens sur la résolution d’une situation qui, depuis 10 ans, suscite beaucoup de problèmes. C’est vrai qu’il y a lieu de se poser des questions de notre côté. Par exemple, est-ce qu’on aurait pu faire autrement dans la gestion de cet aspect ? L’une de mes réponses est probablement que nous n’avons pas suffisamment eu une pensée sur la durée. Les solutions aux problèmes ne se trouvent pas en six mois ou un an.

Mais, pour cela, à présent, pour moi, l’une des solutions est d’aller aux élections. Ce qui aura l’avantage qu’un prochain gouvernement, si les élections se passent bien, aura un mandat sur cinq ans. Cela permettra de réfléchir à des réponses structurelles, de longue durée, qui vont répondre aux enjeux. Mais c’est un questionnement légitime que vous faites. Peut-être que dans le passé nous avons été aussi trop impatients, nous Européens.

Vous avez une grande expertise en matière de communication, pour avoir été de 2008 à 2011 Porte-parole du ministère des Affaires étrangères belge. Comment évaluez-vous la communication des autorités de la Transition du Mali ? Pensez-vous que les pays européens comprennent leurs activités ? Qu’est-ce qui pourrait être amélioré ?

C’est un souci constant pour nous diplomates : expliquer à nos capitales ce qui se passe ici. Moi, dans ma communication, dans mon rapportage, j’ai toujours voulu bien faire comprendre la profondeur de la crise. La crise que vit le Mali est une crise sociétale. Et donc la réponse qui doit être donnée à cette crise ne doit pas être uniquement sécuritaire. Il faut une réponse qui permettra d’améliorer les conditions de vie des populations et le retour des services de l’État sur l’ensemble du territoire malien. Par exemple, que ce soit au Nord ou au Centre, et même au Sud du Mali, la qualité de l’enseignement est insuffisante. Au niveau des services de base, tels que la santé, il y a aussi des insuffisances. Là, notre effort est d’avoir une action effective sur le terrain pour ramener ces services à niveau. Je crois que ce message est bien compris. C’est vrai qu’aujourd’hui la Transition prend des positions qui sont parfois très difficile à admettre pour nos autorités. Par exemple, le dernier vote sur l’Ukraine, où le Mali a voté en faveur de la Russie. Je ne cache pas que cela est très mal compris de notre côté. Je n’ai pas de conseils à donner aux autorités de la Transition, mais certainement il faut un dialogue diplomatique. Moi je continue à plaider de part et d’autre pour qu’il y ait toujours des échanges diplomatiques et une coopération entre le Mali et l’UE. J’essaie toujours d’amener des collègues ici, à Bamako, et je crois qu’il est important que les Maliens fassent aussi l’effort de se rendre dans nos capitales pour expliquer leurs positions sur différents dossiers.

Quelle est actuellement la posture de l’UE à l’égard de la Transition malienne ?

Aujourd’hui, nous tenons beaucoup à maintenir notre action au profit des Maliens. Nous voulons rester aux côtés des Maliens, nous reconnaissons la profondeur de la crise et la nécessité d’y apporter une action concrète pour justement éviter la déstabilisation du pays. Cela est au cœur de notre position. Nous maintenons le dialogue, nous maintenons notre appui aux Maliens et, au final, nous espérons beaucoup que la Transition pourra respecter le calendrier convenu. Ainsi, on aboutira à des élections dont la principale, la présidentielle, est annoncée pour l’année prochaine.

Quels sont les projets-phares que l’UE a menés au Mali depuis votre venue et les  perspectives ?

Je préfère surtout parler de nos projets en perspective pour 2023. Nous avons déjà mené une consultation très large avec des services de l’État sur notre programmation. Elle porte sur les questions de l’Environnement. C’est le projet de Grande Muraille Verte qui est très important pour un pays tel que le Mali, qui a une partie de son territoire dans le Sahara. Il faut éviter la désertification. C’est un engagement très important de part et d’autre que nous voulons mettre en œuvre en 2023. Et puis il y a également la problématique de l’enseignement, de la formation et le renforcement du secteur privé. Si on veut répondre au grand enjeu qu’est l’accès à l’emploi au Mali, car chaque année, il y a des milliers de jeunes Maliens qui viennent sur le marché du travail, il faut absolument donner une réponse aux aspirations de ces jeunes, qui veulent soit trouver un emploi, soit créer une activité professionnelle. Et là nous croyons que l’amélioration de la qualité de l’éducation, de l’offre de formation et le renforcement du secteur privé sont importants. Sur ces aspects, nous sommes en consultation avec nos partenaires maliens pour apporter des solutions. Globalement, c’est un budget d’à peu près 100 milliards de francs CFA. Outre cela, nous allons aussi maintenir notre action de coopération sur des bases régionales et thématiques telles que la question de la gestion des frontières, sur laquelle nous voulons maintenir notre coopération avec l’État malien.

Le référendum prévu pour le 19 mars a été reporté sine die le 10 mars dernier. Avez-vous des craintes quant à un retour à l’ordre constitutionnel comme prévu en février 2024 ?

Je crois que c’est un engagement très clair de la Transition, même si un report pour quelques mois peut être compréhensible. J’ai bonne confiance que les autorités de la Transition vont tenir leurs engagements.

Si les élections devaient se tenir, quel serait le soutien de l’Union européenne au processus électoral?

Il y a un fonds, le Programme des Nations Unies pour le Développement, qui centralise toutes les contributions. Nous avons déjà versé notre contribution, qui est de l’ordre de 10 milliards de francs CFA. Elle devrait contribuer à l’organisation des différents scrutins au Mali.

Depuis 2015, l’Accord pour la paix et la réconciliation tarde toujours à être mis en œuvre. Et son processus est bloqué depuis près de quatre mois. Quel avenir voyez-vous à cet Accord dans le contexte actuel ?

Le Cadre créé par l’Accord est toujours là. Nous continuons notre engagement avec l’Algérie, les Nations unies et les autres membres de la médiation pour permettre à toutes les parties prenantes de revenir à la table. Nous venons récemment d’offrir un cadre de propositions qui devrait permettre à toutes les parties prenantes de revenir. C’est la seule solution. L’autre alternative c’est la violence et ce n’est pas une alternative crédible. Nous voulons absolument que les parties prenantes trouvent des solutions sans violence. Nous, nous ne nous sommes pas là pour prescrire des solutions. Nous ne pouvons qu’amener les deux parties à la table de discussion et c’est à elles de se mettre d’accord sur les solutions et les mettre en œuvre. Nous espérons que ce sera pour bientôt.

Est-ce qu’il vous a été souvent difficile de manœuvrer, avec les impératifs de Bruxelles vis-à-vis du Mali et la Transition ?

J’ai toujours eu des relations très courtoises, très positives, avec les Maliens. Nous n’avons pas tellement d’instructions de Bruxelles. On nous demande de faire l’analyse, de coordonner avec nos États membres et chercher des solutions. Depuis que je suis là, j’ai toujours cherché à être à l’écoute des autorités maliennes. Mais aussi et surtout à l’écoute de la société civile (les jeunes, les associations de femmes) et des partis politiques. Notre rôle, je le rappelle, n’est pas de prescrire, mais de faire partie de la solution. Et d’offrir un cadre de la médiation pour trouver des solutions aux problèmes. Nous n’avons pas la capacité de trouver des solutions à la place des Maliens. Ce sont les Maliens qui doivent trouver un cadre politique pour sortir de la crise actuelle. Et cette crise, elle est profonde. Je crois que tout le monde le sait. C’est une crise sociétale, comme je le disais tantôt. Si on veut contribuer au développement du pays, il faut absolument renforcer l’enseignement. Je ne connais pas un seul Malien qui conteste la crise actuelle de l’enseignement. D’ailleurs, j’ai eu un entretien il y a quelques jours avec la ministre de l’Éducation et nous travaillons ensemble là-dessus.

Quel souvenir garderez-vous du Mali ?

J’ai vécu ici avec mon épouse, qui m’a accompagné tout au long de ce périple de quatre ans. Je garde beaucoup de souvenirs des rencontres avec les Maliens. C’est mon troisième pays africain et c’est probablement celui qui, en termes de richesse culturelle, a le plus de profondeur, parce qu’il a une tradition culturelle millénaire et très riche. Ça m’a beaucoup marqué. Et puis le Malien est quelqu’un qui a une grande culture d’accueil et de générosité envers l’étranger. J’ai beaucoup profité de cela. C’est pourquoi j’ai toujours tenu à communiquer sur tout ce qui va bien dans le pays, sur son potentiel par exemple en matière de beautés naturelles et de richesse de sa culture. C’est une manière de rappeler aux Maliens, qui parfois sont confrontés dans leur quotidien à d’énormes problèmes, que leur pays regorge de potentialités. Au quotidien on a tendance à beaucoup se focaliser sur les problèmes, mais il ne faut pas oublier tout ce qu’il a de bien dans le pays.

Présidentielle 2024 : L’Adema face à l’épineux choix de son candidat

La question de la candidature de l’Alliance pour la démocratie au Mali – Parti africain pour la solidarité et la justice (Adema-Pasj) à la prochaine élection présidentielle suscite déjà des remous internes. Alors que la jeunesse du parti est montée au créneau fin novembre pour demander l’enclenchement du processus du choix du candidat avant février prochain, une Conférence nationale est annoncée pour le 17 décembre 2022.

Les tensions pré-congrès de 2021 au sein de l’Adema ont fini par s’estomper après l’élection de Marimantia Diarra à la tête du parti, en octobre dernier. La prolongation par la suite de la Transition avait également refroidi les remous qui s’annonçaient dans la Ruche entre les différents potentiels candidats à la candidature.

Mais, à moins d’un an et demi de la prochaine élection présidentielle, annoncée comme devant mettre fin à la Transition, la question refait surface. Et c’est la jeunesse du parti qui a donné le ton. Réuni en retraite le 20 novembre 2022, le Bureau national de la jeunesse, « soucieux de l’avenir et de la carrière politique de sa jeunesse et engagé pour la reconquête du pouvoir », a exhorté le Comité exécutif à enclencher le processus de désignation du candidat à l’élection présidentielle de 2024 d’ici le mois de février 2023.

« Le Bureau national de la Jeunesse Adema-Pasj estime que pour assurer une participation pleine, entière et satisfaisante de notre candidat à la prochaine élection présidentielle, il lui faudra un temps de préparation convenable et suffisant », souligne la déclaration des jeunes, qui disent avoir tiré toutes les leçons du « long et laborieux » processus de désignation du candidat du parti à l’élection présidentielle de juillet 2018 et de son « issue regrettable ».

Mais cette sortie du Bureau national de la jeunesse n’est pas du goût de certains membres du Bureau exécutif du parti. « C’était une sortie malencontreuse et contre-productive. Ce n’est pas l’approche indiquée et ils n’ont pas d’habilitation pour le faire », tance Yaya Sangaré, Secrétaire général de l’Adema. « La candidature de l’Adema à la prochaine élection présidentielle est une recommandation forte du 6ème Congrès ordinaire et sa mise en œuvre appartient au Comité exécutif, où les débats se tiennent », recadre l’ancien ministre.

Poser le débat

Le 17 décembre 2022 aura lieu la Conférence nationale de l’Adema. L’occasion non seulement de présenter le rapport d’activités du parti sur les derniers mois mais aussi et surtout de poser le débat sur la stratégie à adopter en vue de la désignation du futur porte-étendard du parti. « Le sujet y sera certainement discuté », confie Yaya Sangaré.

Mais le débat promet d’être long, car si l’option d’une candidature interne au parti convient à certains membres, celle du soutien de l’Adema à la candidature d’une coalition plus large de plusieurs partis et regroupements politiques n’est pas écartée par d’autres.

« L’Adema est un parti de débats. Les gens essayent d’analyser en fonction du terrain. Moi je pense qu’un parti comme le nôtre ne peut pas ne pas avoir un candidat. Mais le contexte peut amener certains à hésiter. Chacun développe ses arguments, mais à la fin nous nous entendons et nous étudions le contexte. S’il est favorable, nous y allons. Dans le cas contraire, nous examinons les autres options », tranche M. Sangaré

À l’interne, selon nos informations, plusieurs intentions de candidature sont déjà recensées mais, la procédure de désignation n’étant pas encore enclenchée, le Comité exécutif a demandé que ces potentiels candidats fassent profil bas pour l’heure et que le parti travaille d’abord à reconstruire son union et sa cohésion.

Comme pour la course à la présidence du parti, l’année dernière, plusieurs membres du Bureau exécutif sont pressentis, à l’instar, entre autres, du Président Marimantia Diarra et de Moustapha Dicko, ancien ministre de l’Éducation nationale sous Alpha Konaré et de l’Enseignement supérieur sous IBK. Les noms de Adama Noumpounon Diarra de la section de Sikasso, de l’ancien ministre du Commerce Abdoul Kader Konaté dit Empé, aujourd’hui PDG de l’Office du Niger, ou encore de Mme Conté Fatoumata Doumbia de la section de la Commune I circulent aussi. Car dans la Ruche l’option d’un candidat « bon teint » est très prisée.

Brésil : Lula da Silva élu président

Luiz Inacio Lula da Silva a obtenu 50,89 % des voix, contre 49,11 % pour le président sortant Jair Bolsonaro dimanche 30 octobre à l’issue du second tour de la présidentielle brésilienne. C’est l’écart le plus serré entre deux finalistes de la présidentielle depuis le retour à la démocratie après la dictature militaire (1964-1985). La marge est bien plus étroite que ce que prédisaient les sondages, qui avaient déjà sous-estimé le score de Jair Bolsonaro avant le premier tour. L’ancien métallo de 77 ans fera son retour au sommet de l’État le 1er janvier 2023. « Aujourd’hui, nous disons au monde que le Brésil est de retour, il est trop grand pour être relégué à ce triste rôle de paria dans le monde », a déclaré Lula dans son discours de victoire. Il s’est toutefois dit « inquiet » du silence assourdissant de son adversaire. Le président sortant Jair Bolsonaro n’a en effet toujours pas reconnu sa défaite plusieurs heures après l’annonce des résultats.

Transition : un chronogramme au ralenti

Un chronogramme des échéances électorales de la Transition, allant jusqu’en février 2024 a été dévoilé le 28 juin 2022 à la classe politique et à la société civile au sein du Cadre de concertation avec le gouvernement. 4 mois après, certains acteurs pointent du doigt une lenteur dans la mise en œuvre et s’interrogent sur la tenue à date des différents scrutins.

Dans le chronogramme électoral présenté à la classe politique et transmis à la Cedeao à la veille de son Sommet extraordinaire du 3 juillet 2022, qui allait décider de la levée des sanctions qui pesaient sur le Mali depuis le 9 janvier, les autorités de la Transition prévoient la tenue de quatre élections.

Le référendum constitutionnel est pour le mois de mars 2023, avec la convocation du collège électoral un mois plus tôt, en février. Ensuite suivra, toujours en mars 2023, la convocation du collège électoral pour l’élection des conseillers des Collectivités territoriales en juin 2023.

Pour l’élection des députés à l’Assemblée nationale, le 1er tour est fixé à octobre 2023 et le second en novembre. Pour cette élection, la convocation du collège électoral est prévue deux mois plus tôt, en juillet 2023. Enfin, l’élection du Président de la République doit se tenir en février 2024, le collège électoral étant convoqué en octobre 2023.

Retards avérés

La nouvelle loi électorale, adoptée le 17 juin 2022 et promulguée par le Président de la Transition le 24 juin, confie l’organisation des scrutins à l’Autorité indépendante de gestion des élections (AIGE). Mais la mise en place de cet organe, qui constitue la première étape dans la tenue de toutes les élections prévues sous la Transition, a pris du retard.

Le décret de nomination des membres du Collège de l’AIGE, qui était prévu pour le 13 juillet 2022, n’a été pris que le 12 octobre dernier et la prestation de serment des membres, qui devait avoir lieu le 28 juillet, n’a été effective que le 20 octobre, soit après environ 3 mois. Par contre, les coordinations de l’AIGE dans les régions, district, cercles, communes, ambassades et consulats ne sont toujours pas installées, alors que cela était prévu pour  le 2 août 2022.

Seule la révision annuelle des listes électorales, du reste comme chaque année, a débuté comme prévu le 1er octobre 2022 et se poursuivra jusqu’au 31 décembre sur l’ensemble du territoire national, à l’exception de certaines localités toujours en proie à l’insécurité.

Par ailleurs, selon le chronogramme, le projet de loi référendaire doit être examiné et adopté par le Conseil des ministres, puis transmis au Conseil national de transition (CNT) et adopté par l’organe législatif courant novembre 2022.

« Nous constatons un retard et nous pensons qu’il n’y a pas de volonté manifeste de respecter le délai. Il était prévu qu’on se retrouve chaque mois pour évaluer la mise en œuvre du chronogramme, mais du mois de juin jusqu’à maintenant le Cadre de concertation n’a pas été convoqué », s’offusque Amadou Aya, Secrétaire général de la Codem.

Yaya Sangaré, Vice-président de l’Adema-Pasj, abonde dans le même sens. Pour l’ancien ministre, le retard pris dans l’exécution du chronogramme ne s’explique pas et le gouvernement devrait revenir à la classe politique pour des échanges et explications.

« Nous avons des appréhensions, mais nous disons que nous allons juger sur pièces. Chaque fois que nous allons constater une mauvaise foi, nous allons alerter et demander à ce que nous respections nos propres engagements et menions cette transition à bon port », poursuit M. Sangaré.

Si, pour sa part également, l’analyste politique Bréhima Mamadou Koné reconnait une lenteur dans la mise en œuvre du chronogramme de la Transition, il est persuadé que cela « n’est pas de nature à être une raison de report d’une activité prévue dans ce chronogramme ou d’une élection quelconque ». « À mon avis, les autorités de la Transition sont en train de travailler d’arrache-pied pour la mise en œuvre de ce chronogramme. Il y a des éléments qui prouvent à suffisance aujourd’hui que l’ensemble des acteurs, nationaux ou internationaux, ont pris à bras le corps l’organisation des différentes élections qui sont prévues », avance-t-il.

« Je crois qu’il y a une volonté politique de respecter ce chronogramme et, s’il y a la volonté politique, tout est possible. Je pense que les choses évoluent et on sent que le gouvernement est en train de travailler », appuie Nouhoum Togo, Président de l’Union pour la sauvegarde de la République (USR)

Tenue du référendum menacée 

Le décalage dans les activités prévues dans le chronogramme fait craindre à certains acteurs de la classe politique et de la société civile la non tenue du scrutin référendaire du 19 mars 2023. « Il est bien  possible que le retard pris aujourd’hui ait un impact sur la tenue du référendum et de l’élection des conseillers des collectivités. Il est dit par exemple  que les représentations de l’AIGE doivent être installés 6 mois avant le début de la campagne électorale, mais cela n’est pas encore le cas à 5 mois de l’échéance », fait remarquer Sékou Niamé Bathily, membre du Rassemblement pour le Mali.

Mais, de l’avis de Bréhima Mamadou Koné, les deux premiers scrutins prévus peuvent se tenir dans les délais. « Ce ne sont pas des élections comme la présidentielle ou les législatives, qui coûtent extrêmement cher au pays et qui demandent assez d’efforts dans leur organisation. Ce sont des élections à un seul tour. Je pense qu’en 3 mois, l’essentiel du travail peut être fait. Le retard pris aujourd’hui n’est pas de nature à avoir un quelconque impact sur les deux premiers scrutins », tranche l’analyste politique.

À l’Adema-Pasj, pour respecter le délai de 24 mois imparti à la Transition, l’éventualité d’une modification du chronogramme, qui a été la position du parti lors des échanges du Cadre de concertation, n’est pas écartée. « Pour nous, même le référendum n’était pas important, vu que cela peut jouer sur le reste du calendrier. Nous avions dit à l’époque qu’il était difficile de tenir tous les scrutins et qu’il fallait se concentrer sur les scrutins incontournables comme la présidentielle et les législatives », rappelle Yaya Sangaré.

« S’il faut aller au référendum en mars 2023, il faut un préalable qui est non seulement  la stabilité politique mais aussi le consensus autour de l’avant-projet de Constitution, qui devra refléter les aspirations du peuple », alerte Sékou Niamé Bathily, pour lequel les autorités doivent  communiquer avec les forces vives de la Nation.

« S’il y a un consensus, tout est possible. Mais s’il y a des décisions qui sont prises sans prendre en compte certains partenaires importants dans le processus, cela pourrait amener à un blocage et, de retard en retard, on aboutira à un glissement dans le chronogramme qui pourrait aboutir à une crise », prévient t-il

Chronogramme toujours tenable ?

Le chronogramme de la Transition sera-t-il respecté pour une fin dans le délai imparti ? Du point de vue de Nouhoum Togo, qui croit « fermement qu’ensemble nous devons travailler pour relever le défi », cela ne fait pas de doute.

Bréhima Mamadou Koné soutient qu’on ne peut pas dire aujourd’hui qu’il n’y a pas de volonté politique et qu’il n’y a pas d’engagement de la part des autorités de la Transition d’aller vers l’organisation des différentes élections suivant le chronogramme électoral, qui a été élaboré de concert avec l’ensemble des forces vives de la Nation et soumis à la communauté internationale, qui suit de près l’évolution de la situation au Mali.

Amadou Aya ne partage pas cet avis. Pour le Secrétaire général de la Codem, pour lequel  les autorités de la transition « doivent poser la valise » si elles ne parviennent pas à respecter le nouveau délai, un autre chronogramme doit tout simplement être proposé, compte tenu du retard pris dans la mise en œuvre de celui du 28 juin. « Il faut revoir ensemble ce qui est faisable et ce qui ne l’est pas et abandonner certains scrutins », préconise-t-il.

Yaya Sangaré y va avec un ton plus modéré, même si le doute sur le respect du chronogramme est partagé. « Nous pensons que cela va être tenu, mais ce sera difficile. Il faut que tout le monde soit associé et que chacun soit doté d’un minimum de bonne foi et ensemble on pourra arriver à tenir le chronogramme dans le délai imparti », relativise le Vice-président de l’Adema-Pasj.

Mais, même s’il semble être trop tôt pour évoquer une possible nouvelle prolongation de la Transition au-delà de février 2024, certains acteurs craignent déjà ce scénario, dont les conséquences seraient nombreuses pour le pays. Toute la classe politique est unanime pour « l’éviter  à tout prix ».

Côte d’Ivoire : Laurent Gbagbo candidat déclaré pour 2025

Profitant de la célébration de l’AUn, le PPA-CI a annoncé dans la foulée la candidature de l’ancien Président ivoirien Laurent Gbagbo, contre toute attente, pour l’élection présidentielle de 2025.

Plus de temps à perdre pour Laurent Gbagbo. Comme il l’avait dit dès son retour en Côte d’Ivoire, en juin 2021, il ne prendra pas de sitôt sa retraite politique. Bien au contraire! Tout en organisant son parti, le Parti des peuples africains de Côte d’Ivoire (PPA-CI), il ambitionne à nouveau gouverner son pays. Une revanche, sûrement, qu’il veut prendre sur l’histoire, après un mandat perturbé par une rébellion en 2002, deux ans après sa prise de pouvoir dans des conditions difficiles. En face, il trouvera sûrement Henri Konan Bédié, qui, dépossédé du pouvoir en 1999, rumine sa vengeance, et Alassane Ouattara, son éternel rival, au pouvoir depuis 2011. Un scénario pas loin de celui de 2010 pourrait se présenter.

Pressions politiques

En désignant Laurent Gbagbo comme son candidat, le PPA-CI répond indirectement au Président de la République Alassane Ouattara, qui lui accordait une grâce présidentielle là où il s’attendait à une amnistie. Déjà, en 2020, Laurent Gbagbo avait été retiré de la liste électorale. Une grâce présidentielle compromet également sa candidature à l’élection présidentielle. L’espace politique ivoirien s’annonce houleux à un an des élections locales, véritable test après l’élection présidentielle de 2010 et annonciateur de ce que pourrait être l’élection présidentielle de 2025. Comme en 2010, la tension pourrait alors être très vive entre les trois gros poids de la politique ivoirienne, qui auront réussir à convaincre leurs partisans d’être les seuls à pouvoir porter les projets politiques de leurs partis respectifs. Mais, notent des observateurs politiques, rien n’est pour l’heure certain. Une révision à la baisse de l’âge pour être candidat à l’élection présidentielle n’est pas à écarter. En début d’année 2022, une proposition de loi avait à cet effet été déposée au Parlement ivoirien par un député, avant d’être retirée. Toutefois, tant au sein du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI) qu’au sein du Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix (RHDP, au pouvoir), des voix se font entendre en faveur d’un passage de flambeau à une autre génération, moins âgée, afin de sortir des clivages qui perdurent depuis 1993, date du décès du Président Félix Houphouët-Boigny.

Présidentielle – RPM : Bocary Tréta désigné candidat sur fond de tensions

Le Rassemblement pour le Mali, (RPM) a tenu la 3ème assise de son Comité central les 28 et 29 décembre 2021 au palais de la culture de Bamako. L’ancien parti présidentiel connaît de profondes divergences en son sein. Sur la question du candidat du parti à la prochaine élection présidentielle, il reste divisé malgré le choix porté sur le président actuel dont la date d’investiture reste encore à déterminer.

Dans sa quête de reconquête du pouvoir perdu suite au coup d’Etat du 18 août 2020, le RPM est à la remobilisation de ses troupes.

La 3ème assise du comité central convoquée dans cet esprit, avait pour objectifs entre autres, d’évaluer l’état de mise en œuvre des résolutions générales du 4ème congrès ordinaire et de la 2ème session du comité central, et de prendre toutes les mesures en vue de renforcer les capacités opérationnelles des organes centraux du parti.

Trois commissions de travail étaient mises en place, chargées de discuter respectivement  sur les questions relatives à la vie du parti, à la problématique des élections de  2022, et à l’état de la nation.

Très vite les débats des travaux auxquels ont participé les délégués des différentes sections et fédérations du parti se sont portés  sur le choix du futur candidat à l’élection présidentielle.

Le RPM reste d’ailleurs focalisé sur l’échéance initiale du 27 février 2022 pour la tenue de la présidentielle, en témoignent les propos à la séance inaugurale de l’assise, de son président, Dr. Bocary Tréta.

« Les élections générales dans notre pays sont prévues le 27 février 2022. C’est le plan dont nous disposons et celui en lequel nous croyons. Nous n’avons pas un plan B pour les élections générales de 2022 dans notre pays. Tout autre plan porterait le risque de nous engager dans une aventure politique aux conséquences  incalculables », a-t-il indiqué.

Positions tranchées

Si le parti milite pour un retour rapide à l’ordre constitutionnel, Il est loin d’asseoir une unanimité sur son porte-étendard lors du scrutin qui mettra un terme à la transition.

Entre choisir le président actuel Dr. Bocary Tréta candidat du parti ou organiser un congrès qui élira un candidat, les positions sont très tranchées.

« Pas de candidat naturel, allons au congrès pour choisir celui qui va représenter le parti », clame une déléguée.

« Tant que le président du parti est là et n’a pas désisté, la question ne se pose même pas. Il est le candidat d’office. Le président du parti a toujours été candidat du parti depuis 2002 », lui répond  un autre.

Pour l’ancien président de l’Assemblée nationale, Moussa Timbiné, aucune autre instance à part le congrès, ne peut prendre des décisions pour le parti.

« Seul le congrès est habilité à relire les textes. Tout ce qu’il y a comme failles ou insuffisances, on les constate, on prend des recommandations  pour le congrès. Le cadre actuel n’est pas un cadre habilité à investir  ni désigner  un candidat »,  a soutenu celui dont l’intervention a suscité de vives tensions entre les délégués pour ou contre sa position.

« Je ne suis pas venu en guerre. Si c’est la guerre, je ne viendrai pas ici, je peux la mener autrement.  Je suis membre fondateur de ce parti et  ce n’est pas de gaieté de cœur que je le quitterai ou le combattrai» a t-il lâché pour calmer les ardeurs.

Tréta, et après ?

Le comité central, dont les décisions sont exécutoires, a tranché après les débats. L’article 43 du règlement intérieur du parti stipule qu’il est le plus haut organe de décision du parti entre deux congrès,argument que brandissent les membres du parti favorable à une désignation du candidat par cette instance.

Sur proposition de la commission « vie du parti », le comité central a recommandé en dernier ressort de « désigner  le président du parti Dr. Bocary Tréta comme candidat à l’élection présidentielle à venir ». Une date sera choisie pour la cérémonie de son investiture.

Mais la partie opposée pourrait ne pas s’y conformer. Moussa Timbiné semble prévenir des conséquences d’une division aux sorties de cette assise.

«Sur une violation des textes, si une seule personne n’est pas d’accord, il peut faire tomber le bureau devant les tribunaux », a-t-il brandi.

Aliou Boubacar Diallo : quelles chances pour Koulouba?

Il figure parmi les potentiels candidats à la course pour la prochaine élection présidentielle. Aliou Boubacar Diallo est également l’un des plus visibles en ce moment sur le terrain, aussi bien politique qu’au-delà. Auréolé, selon ses proches, du soutien de plus d’une quarantaine de partis politiques, l’ex-député de Kayes, arrivé 3ème lors de la présidentielle de 2018, peut viser grand en 2022.

Message de rentrée scolaire, vœux de Maouloud ou encore tribune de réflexion sur la question sécuritaire, le Président d’honneur de l’Alliance démocratique pour la Paix (ADP-Maliba), Aliou Boubacar Diallo, ne rate aucune occasion ces dernières semaines de s’adresser aux Maliens.

Après sa première candidature à la magistrature suprême du Mali en 2018, où il avait terminé troisième, les dernières sorties de Diallo s’apparentent déjà à une pré-campagne. S’il y a trois ans le coup d’essai ne s’est pas transformé en coup de maître pour le natif de Kayes, il a l’occasion de frapper à nouveau à la porte de Koulouba lors du prochain rendez-vous présidentiel, qui va consacrer le retour à un ordre constitutionnel normal après la Transition.

Déjà des voix appellent à sa candidature, même si l’intéressé se refuse pour le moment à y répondre favorablement ou non. Le 7 août dernier, l’Alliance des Démocrates Rénovateurs (ADR), qui avait soutenu la candidature de feu Soumaila Cissé en 2018, a jeté son dévolu sur Aliou Boubacar Diallo, expliquant avoir été séduite par le « patriotisme », « l’expérience dans la gestion des affaires » et le « parcours politique » de l’homme d’affaires et philanthrope.

Le 6 novembre 2021, ce fut le tour de 27 partis politiques non alignés de signer une convention appelant à la candidature de l’ex-député de Kayes. Différents soutiens accueillis « avec satisfaction » à l’ADP-Maliba et que le parti compte capitaliser.

« Les partis politiques sont suffisamment structurés et chaque fois qu’ils décident de cheminer ensemble tout se fait sur la base d’un cadre de travail bien élaboré et bien ficelé. Ce cadre de travail va continuer jusqu’à la prochaine élection présidentielle », se réjouit Me Abdoulaye Sidibé, Secrétaire général de l’ADP-Maliba.

Présidentielle 2022, la bonne ?

En février dernier, un sondage réalisé par le cabinet Statix sur un échantillon de 1 520 personnes inscrites sur les listes électorales à travers le Mali concernant la présidentielle de 2022 plaçait Aliou Boubacar Diallo en tête des intentions de vote, avec 27%, devant les anciens Premiers ministres Moussa Mara, Soumeylou Boubeye Maiga, Modibo Sidibé et Cheick Modibo Diarra.

« S’il y a une force politique aujourd’hui sur laquelle il faut compter indéniablement, quels que soient les changements sur l’échiquier politique, c’est l’ADP-Maliba, avec ses différents soutiens. Et s’il y a un grand favori aujourd’hui pour la présidentielle, c’est Aliou Boubacar Diallo. », croit fermement Maitre Sidibé.

Pour lui, la « santé de fer » de l’ADP-Maliba, sa structuration, son degré d’implantation sur le territoire national et les nombreuses adhésions continuelles d’élus communaux, d’anciens députés et de conseillers régionaux, entre autres, sont des atouts importants. Le parti a toutefois dû faire face au départ de plusieurs de ses cadres jeunes, dont Amadou Thiam et Cheick Oumar Diallo.

« Aliou Boubacar Diallo est aussi dans l’humanitaire. Cela marque beaucoup les esprits. S’il continue dans la même dynamique et dans une politique de proximité, on peut sans risque de se tromper dire qu’il peut être en bonne position pour la présidentielle à venir. Il a ses chances, mais il y a un travail de fond qu’il doit faire », analyse le politologue Dr. Bréhima Mamadou Koné.

Ce dernier évoque toutefois un facteur qu’il juge indispensable pour l’élection du futur Président de la République : le soutien des militaires. Le candidat qui sera adoubé par les militaires, affirme-t-il, sera le candidat élu.

Pour sa part l’analyste politique Boubacar Bocoum insiste sur le fait que la configuration politique à l’époque de la dernière présidentielle est différente de celle d’aujourd’hui et que meme en ayant été 3ème avec un score de 8,33% des voix, Aliou Boubacar Diallo ne sera pas de facto vainqueur à la prochaine présidentielle, en l’absence de ses deux anciens challengers Ibrahim Boubacar Keita et Feu Soumaila Cissé. Qui plus est, le soutien du chérif de Nioro qui lui avait permis de réaliser ce score de 2018 ne lui serait plus garanti. De l’avis de Boubacar Bocoum, si la rupture avec l’ancien système politique est réelle, Aliou Boubacar Diallo n’a aucune chance.

Pr. Salikou Sanogo : « Nous avons l’obligation d’honorer la mémoire de Soumaïla Cissé »

Le 1er Vice-président de l’Union pour la République et la Démocratie (URD), le Pr. Salikou Sanogo, livre sa pensée sur l’actualité politique et la vie de son parti, trois mois après la disparition de son fondateur, Soumaïla Cissé.

Trois mois après la disparition de Soumaïla Cissé, comment va l’URD ?

La disparition subite de notre Président, Soumaïla Cissé, a constitué un choc terrible pour l’URD. Quand vous avez un dirigeant de cette envergure, qui a bâti pendant des années la maison URD, et que cette personne disparaît, cela est source de désarroi pour les militants. Beaucoup sont désorientés et se posent des questions quant à l’avenir du parti. Saura-t-il résister à la disparition de son leader ? Après le deuil, nous avons demandé aux militants de reprendre les activités avec courage. Nous avons l’obligation morale et politique d’honorer la mémoire de Soumaïla Cissé. Ce n’est pas pour rien que nous avons comme slogan « La force montante ».

En 2018 vous avez été deuxième de l’élection présidentielle. Avec la disparition de Soumaïla Cissé, pensez-vous pouvoir conserver ce rang ou faire mieux  lors de la présidentielle 2022?

En 2018, nous avons été officiellement deuxièmes, mais nous pensons que nous étions les premiers et nous l’avons démontré. Notre ambition est naturellement de faire mieux, de relever les défis et de faire honneur à la mémoire de Soumaïla Cissé.  Nous allons participer à toutes les élections. Et j’ai dit l’autre jour à nos militants à Ségou que toutes les élections sont à gagner.

Qui sera le candidat de l’URD à la présidentielle prochaine ?

Nous avons des procédures. Pour le moment, on ne peut pas préjuger de celui qui sera le candidat du parti.

Des informations selon lesquelles l’ancien Premier ministre Boubou Cissé serait le candidat de l’URD à la présidentielle de 2022 font de plus en plus la Une de certains médias. Cela est-il est possible ?

Pour le moment, nous n’avons pas choisi de candidat. Nous en aurons quand même un. Nous avons des procédures et, d’après nos textes, ce candidat doit être un militant de l’URD. Nous allons respecter nos procédures.

Mamadou Igor Diarra a-t-il adhéré à l’URD sous conditions ?

Il n’y a pas eu de conditions préalables. Nous avons rencontré le parti de Mamadou Igor Diarra, qui en est le Président d’honneur. Nous avons enregistré la volonté de son parti de se joindre à l’URD et nous avons accepté, compte tenu de notre philosophie de rassemblement.

Candidature d’Assimi Goïta : vraiment probable?

Le Mouvement Appel citoyen pour la réussite de la transition (ACRT) d’Issa Kaou Djim appelle à la candidature d’Assimi Goïta, Vice-président de la transition, à la prochaine élection présidentielle. Cette demande fait débat, suscitant des interrogations quant aux motivations d’Issa Kaou Djim et aux implications d’une telle candidature.

« L’imperturbable et le patriote Assimi Goïta » osera-t-il briguer la présidentielle prochaine ? C’est la grande question du moment au Mali et le vœu pieux d’Issa Kaou Djim. Cependant, l’idée de voir le Vice-président de la transition se porter candidat à la présidentielle prochaine soulève beaucoup de questions et, à la limite, fait polémique. La Charte de la transition lui interdit de prendre part aux prochaines échéances électorales. Ballon d’essai, intention inavouée des ex-putschistes ou demande unilatérale du 4ème Vice-président du CNT ? Les supputations vont bon train. « Cela ne peut pas être une demande esseulée et personnelle d’Issa Kaou Djim. C’est fortement sous-tendu par une théorie des ex-putschistes. Issa Kaou Djim est en mission, mais il faut comprendre que c’est une diversion que de dire qu’Assimi Goïta sera candidat. Et, pendant que les gens seront dans ce débat stérile, ils vont passer à autre chose. Assimi Goïta ne peut pas être techniquement candidat. Mais certainement ils vont influencer celui qui sera leur candidat pour cette période post transition. Donc il est important pour Kaou Djim et ses alliés d’être dans une dynamique de collaboration », pense Boubacar Bocoum, politologue.

Selon Ballan Diakité, cette demande pourrait être un ballon d’essai, « pour permettre à Assimi Goïta de faire un petit sondage sur une possibilité de candidature qui serait acceptée favorablement ou défavorablement ». Néanmoins, le politologue n’écarte pas la probabilité d’une candidature. « La Charte de la transition interdit à ceux qui vont la diriger d’être candidats aux prochaines échéances. Cependant, elle n’est pas la consécration de la Constitution du Mali. Donc cela laisse entendre qu’il y a de fortes possibilités que certains dirigeants de la transition dérogent aux exigences qui ont été données par la Charte de la transition », explique Ballan Diakité.

Mais il prévient qu’une éventuelle candidature du vice-président de la transition présagerait « d’un fiasco total » de l’élection présidentielle, « tant on sait bien qu’ils ont nommé des gouverneurs de région. Et les partis politiques n’accepteront pas cela ».

Abdrahamane Diarra : « Les portes de l’URD restent grandes ouvertes »

L’Union pour la République et la Démocratie (URD) s’est remis dans le sens de la marche après la disparition, il y a près de 3 mois de son leader Soumaïla Cissé. En quête de son prochain porte-étendard, le parti de la poignée de mains cristallise les attentions. Dans cet entretien, Abdrahamane Diarra, Président de son mouvement national des jeunes se prononce sur l’avenir de la formation politique.

Comment se porte le parti URD aujourd’hui ?

Le parti se relève du choc du départ brutal de son Président feu Soumaïla CISSÉ. Les responsables et les militants ont pris l’engagement d’honorer la mémoire de feu Soumaila Cissé par des victoires éclatantes aux élections prochaines. Donc je vous informe que le parti se porte très bien.

Qu´en est-il des activités du parti depuis la tenue de la première réunion post-Soumaïla  le 9 février 2021?

Le parti a repris normalement ses activités politiques comme instruit par son 1er vice-président le Pr Salikou Sanogo lors de la réunion du 09 février 2021. Comme vous avez dû le constater vous-même, depuis quelques semaines les rencontres populaires du parti se multiplient à l’intérieur du pays et dans le district de Bamako. Des rencontres qui ont également servi de cadre pour enregistrer de nombreuses adhésions de qualités. D’ailleurs je profite de cette occasion pour vous informer que mon bureau, celui du Mouvement National des Jeunes de l’URD se rendra dans les régions les jours à venir pour aller à la rencontre des militants. Donc nous menons toutes ces activités pour mieux préparer les victoires futures du parti.

Le Pr. Salikou Sanogo avait annoncé lors de cette réunion  la mise en place d´une commission auprès du Secrétariat Général du parti pour se pencher sur les enjeux et questions concernant la vie du parti. Où en est cette commission ?

C’est plutôt quatre (04) commissions. Elles ont été mises en place et elles travaillent, elles déposeront leurs rapports sur la table de la direction du parti dans les jours à venir.

Le prochain congrès ordinaire du parti doit se tenir en 2024. Mais avec le contexte actuel, est-ce qu’un congrès extraordinaire pour une réorganisation est envisagé?

Vous savez à l’URD la démocratie est une réalité, il appartiendra au parti de faire un tel choix, et auquel cas ce ne serait pas un secret et l’opinion sera informée. Entre deux congrès le parti organise une conférence nationale chaque année qui statue sur les urgences.

Le parti a enregistré l´adhésion de Mamadou Igor Diarra et de son mouvement, « Mali En Action ». Cette adhésion présage t-elle d´une candidature de ce dernier pour porter l´étendard de l´URD?

Je salue l’initiative de Mamadou Igor Diarra et de son mouvement politique d’adhérer au parti, ainsi que les nombreuses autres adhésions et je leur souhaite la bienvenue à l’URD. En ajoutant qu’à l’URD il n’y a pas d’anciens et de nouveaux militants, il y a tout simplement militants URD. Les portes restent grande ouvertes pour accueillir toutes les énergies positives qui souhaitent intégrer la famille. Mamadou Igor Diarra et le MEA  ont précisé qu’ils adhéraient sans conditions, pour le reste je vous invite à la patience, seul Dieu sait l’avenir.

Concernant justement le candidat du parti à la prochaine présidentielle, des noms circulent. Par quel mécanisme, l´URD désignera-t-il ce candidat ?

Le choix des candidats aux élections, qu’elles soient présidentielles, législatives et autres respectent un processus qui est prévu et encadré par les textes du parti. Au moment opportun l’opinion sera suffisamment édifiée.

De nouvelles alliances en vue?                                                                       

Pourquoi pas ? Notre parti a toujours privilégié le dialogue, et il est en de bons termes avec l’ensemble de la  classe politique.

 

Togo : Une présidentielle sans suspense ?

Ce 22 février 2020, les Togolais seront appelés aux urnes pour l’élection présidentielle. Sept candidats, dont Faure Gnassingbé, au pouvoir depuis 2005, sont en course pour briguer la magistrature suprême du pays.

En mai 2019, les députés togolais avaient voté une révision constitutionnelle, qui permet non seulement à Faure Gnassingbé de se représenter en 2020 et 2025, mais aussi de bénéficier d’une immunité à vie « pour les actes posés pendant les mandats présidentiels ».

Selon plusieurs observateurs, les dés pour cette élection sont déjà jetés et, sauf très grande surprise, Gnassingbé devrait être réélu pour un quatrième mandat. Et la surprise pourrait avoir pour nom Agbéyomé Kodjo.

Ancien Premier ministre et ancien Président de l’Assemblée nationale du temps de Gnassingbé Eyadéma, Agbéyomé Kodjo a basculé dans l’opposition en 2008, année où il a créé un parti politique. Ce n’est pas au nom de sa formation « le Mouvement patriotique pour la démocratie et le développement » (MPDD) qu’il est candidat, selon une mini présentation de lui sur BBC Afrique, mais porté par « la dynamique » de plusieurs partis.

Il compte surtout sur l’appui de l’Archevêque émérite de Lomé, Mgr Fanoko Kpodzro, initiateur des discussions qui ont conduit à sa désignation comme « candidat de l’opposition ».

B.S.H.

Présidentielle en Guinée Bissau: deux hommes, deux styles

Le premier, candidat du parti majoritaire, ne quitte pas son chapeau couleur paille. Le second, surnommé « le général », a fait campagne coiffé d’un keffieh arabe. Domingos Simoes Pereira et Umaro Sissoco Embalo, finalistes dimanche de la présidentielle en Guinée-Bissau, vieux briscards de la politique, ont des styles et des parcours différents.

Voici leur portrait:

Domingos Simoes Pereira, un homme du sérail

M. Pereira, que tous les Bissau-guinéens appellent par ses initiales « DSP », est né il y a 56 ans à Farim, dans le nord de ce qui était alors une colonie portugaise d’Afrique de l’Ouest.

Pour sa première candidature à une élection présidentielle, il a remporté 40,1% des suffrage lors du premier tour.

Ingénieur en génie civil de formation, M. Pereira milite depuis sa jeunesse au Parti africain pour l’indépendance de la Guinée et du Cap-Vert (PAIGC), la formation qui a mené la lutte pour l’indépendance, obtenue en 1974, dont il prend la tête en 2014.

Après la victoire du candidat du PAIGC à la présidentielle de 2014, José Mario Vaz, celui-ci le nomme Premier ministre.

Mais les deux hommes se brouillent rapidement, sur fond d’accusation de mauvaise gestion du pays et de corruption. En août 2015, M. Vaz le limoge, ouvrant la voie à un bras-de-fer qui ne connaîtra pas de répit jusqu’à la fin du mandat de M. Vaz, dont « DSP » devient le plus farouche adversaire.

De confession chrétienne, M. Pereira est marié et père de trois enfants. Il est membre de l’une des plus petites minorité ethnique du pays, les Kasanga. Il a été formé à l’université polytechnique d’Odessa (Ukraine) et à l’Université d’Etat de Californie (USA).

Avant d’être Premier ministre, il avait occupé les fonctions de ministre des Travaux publics (2004-2005), puis a dirigé de 2008 à 2012 la Communauté économique de pays de langue portugaise (CPLP).

Sous sa houlette, le PAIGC a remporté les législatives en mars dernier, mais le président Vaz a refusé de le renommer à la tête du gouvernement.

Lors d’un unique débat télévisé jeudi face à son rival Umaro Sissoco Embalo, il s’est présenté comme le candidat de la vertu et de la bonne gestion. « L’argent que vous amenez dans le pays ne passe pas par la voie légale », lui a-t-il lancé, l’accusant de faire financer sa campagne par l’étranger.

Umaro Sissoco Embalo, le général dissident

Général de brigade de réserve, ancien Premier ministre (2016-2018) du président Vaz lui aussi, spécialiste des questions de défense et géo-stratégiques, Umaro Sissoco Embalo, 47 ans, est surnommé « le général » par ses partisans.

Vice-président du Madem, parti formé par des dissidents du PAIGC, il est arrivé deuxième lors du premier tour avec 27,7% des suffrages.

Pour combler son retard de 12 points, il s’est posé en rassembleur, rappelant qu’il est un « musulman marié à une chrétienne ». Comme son rival Pereira, il est père de trois enfants.

Lors du débat face à ce dernier, il s’est exprimé en créole portugais, parlé par une très grande partie de la population.

Il peut aussi compter sur le soutien des principaux candidats éliminés au premier tour, dont le président sortant, José Mario Vaz, l’opposant Nuno Gomes Nabiam et l’ancien Premier ministre Carlos Domingos Gomes.

Né dans la capitale Bissau, ce membre de l’ethnie peule, l’une des principales du pays, a fait des études de sciences sociales et politiques en Espagne et au Portugal.

Il a demandé sa retraite anticipée de l’armée dans les années 1990 pour se consacrer à ses nombreux voyages à l’étranger et se lancer dans les affaires. Il a notamment été responsable pour l’Afrique de l’Ouest de la Libyan African Investment Company (Laico), un fonds d’investissement créé par le gouvernement de Mouammar Khadafi.

Sur ses affiches de campagne, lors de ses meetings et même pendant le débat télévisé, il portait un keffieh arabe rouge et blanc noué autour de la tête.

En octobre, le Premier ministre Aristide Gomes, membre du PAIGC, l’a accusé de préparer un coup d’Etat, ce que l’ex-militaire a formellement démenti.

« Je ne suis pas un bandit et je n’entre jamais dans des actions subversives. Ceux qui me connaissent savent que je ne suis pas violent », avait-il alors déclaré à l’AFP.

Amateur de foot –il est supporter du Standard de Liège, en 1re division belge–, il parle portugais, espagnol, français, anglais et arabe.

Umaro Sissoco Embalo juge « catastrophique » la gestion du PAIGC, son ancien parti.

Siré Sy : « Sans parrainages, nous en serions à plus d’une centaine de candidatures »

Siré Sy, Président du think tank Africa World Wide Group, répond aux questions de Journal du Mali sur l’élection présidentielle au Sénégal de février prochain.

19 candidats ont été écartés de la course pour un défaut de parrainages. Comment cela a-t-il été vécu ?

Il y’a eu une satisfaction et une acception unanime du principe du parrainage. A la sortie des législatives de 2018, tous les acteurs ont convergé de la nécessité de réguler et de filtrer le jeu politique pour une meilleure lisibilité des offres politiques mais aussi pour la soutenabilité financière et logistique dans l’organisation des futures élections. Il fallait donc trouver une solution intermédiaire avant d’aller à une nouvelle élection qui est la présidentielle de février 2019. Si il n’y avait pas ce filtre de parrainage, nous en serions à plus d’une centaine de candidatures déclarées, ce qui allait techniquement faussé le jeu électoral. L’idée du parrainage est saluée aussi bien par les politiques que par les populations. Mais, ce sont les modalités pratiques et la mise en œuvre qui font qu’il y’a eu beaucoup de choses à dire. L’opposition estime que c’est un moyen de règlement de comptes et d’éliminer de potentiels challengers à l’actuel président et candidat à sa propre succession. Vu la complexité du parrainage qui est une première au Sénégal, le gouvernement a jugé nécessaire d’associer la société civile sénégalaise qui est venue assister le conseil constitutionnel dans le depouillement des listes de parrains. Au départ, la matière n’était que réservée qu’au conseil constitutionnel, mais vu l’ampleur de la tâche, la société civile est venue en appoint pour aider et assister le conseil constitutionnel. Par la suite, cette société civile, a tenu une conférence de presse au cours de laquelle, elle a affirmé que l’idée était bonne mais qu’il y’a eu des couacs et que la loi même qui a institué le parrainage devait être revue pour plus de clarté. A l’épreuve du terrain, aussi bien le pouvoir que l’opposition se sont rendus compte que ce n‘était pas une loi la plus unanime dans sa mise en oeuvre. Il y avait beaucoup d’insuffisances et d’incorrections. Et cette loi n’est pas contestée dans son principe mais plutôt dans ces modalités pratiques. Aujourd’hui, nous avons cinq à six candidats qui sont déclarés recevables. Les Sénégalais sont heureux de cette situation pour deux raisons. La première est d’ordre politique, parce que aujourd’hui avec six candidats, en terme de choix c’est beaucoup plus clair. Et c’est aussi une aubaine pour le budget national. Plus il y’a de candidats, plus le budget de l’élection est expansif.

Les Sénégalais nourrissent t’ils  un intérêt particulier pour cette élection ?

Les Sénégalais sont fondamentalement politiques. Sociologiquement, tant que les choses n’arrivent pas à leur terme, vous avez l’impression qu’ils ne s’y intéressent pas, chacun vaque à ses occupations quotidiennes. Depuis que Maitre Abdoulaye Wade est à la retraite, nous n’avons pas dans le monde politique ce que nous pouvons appeler ‘’les bêtes politiques’’, c’est-à-dire des gens qui peuvent créer des évènements, de la surtension, de la surenchère et tenir en haleine le monde politique et électoral. Aussi, à y regarder de plus prés, il  y’a comme qui dirait un désamour entre la population sénégalaise et la classe politique classique. Même si au départ, les gens avaient plutôt voter pour sanctionner Wade que pour plébisciter Macky Sall, une partie de la population estime, avec le temps, que sur le plan économique et social, des heureuses initiatives sont prises et des actions menées, même s’il ya encore de l’espace pour apporter des correctifs à la trajectoire d’ensemble. Mais, il me semble à lecture de la température politique, les populations estiment que Macky Sall entreprend des actions pour relever leur niveau de vie, réduire les inégalités sociales, redistribuer les richesses. Même si le tableau n’est pas tout à fait orange, les populations ne se reconnaissent pas dans le jeu politique et ne souhaitent pas être les dindons de la farce du jeu politique.

L’opposition accuse Macky Sall de faire barrage à ses principaux concurrents. Qu’en est-il ?

Pour l’opposition, Macky Sall fait tout pour invalider les candidatures de Khalifa Sall et de Karim Wade. Mais pour les tenants du pouvoir et sa majorité, ils estiment être dans le registre de la loi et rien que du droit, en ce qui concerne la disqualification de Khalifa Sall et de Karim a ses joutes électorales. Tout dépend maintenant de l’angle d’approche sur la question. La revendication des tenants du pouvoir est fondée sur le plan du droit. Il y’a une procédure juridique en cours aussi bien pour Khalifa Sall que pour Karim Wade qui invalide en soi et pour le moment leur candidature. Mais, un problème se pose. Pour Karim Wade, la procédure judiciaire est arrivée en son terme. Donc de fait, il y’a ce qu’on appelle l’autorité de la chose jugée sur son dossier judiciaire. Pour le cas Khalifa Sall, nous n’avons pas encore atteint ce stade et la procédure n’est pas encore à son terme. Et dès lors, il est présumé innocent, il ne perd donc pas ses droits civiques et politiques. Dans l’intervalle de temps selon les défenseurs de Khalifa Sall où ce dernier a été condamné en première instance, il a fait appel auprès de la cour d’appel qui a confirmé la condamnation, maintenant, il se pourvoi en cassation, techniquement, d’ici au 24 février, date des élections présidentielles, la procédure du rabat d’arrêt que les avocats de Khalifa Sall ont introduit, ne pourra être vidé complètement. Juridiquement, Khalifa Sall peut être candidat même du fond de sa cellule, ce serait assez anecdotique. C’est aujourd’hui toute la bataille entre les partisans de Khalifa Sall et ceux de Macky Sall afin de savoir si, il participera ou non à l’élection présidentielle.

Quels sont les candidats qui peuvent inquiéter Macky Sall ?

Il y’a deux candidats qui à mon avis, devraient être pris très au sérieux par le camp de la majorité présidentielle. Le premier, c’est Issa Sall. Il est le candidat du parti de l’unité et du rassemblement. C’est un parti extrêmement structuré car adossé à un mouvement religieux, les Mourtachidines, d’obédience tidiane. Lors des dernières législatives, c’est le parti qui allé seul a cette élection, sans coalition et qui est sorti troisième. Il fallait le faire. Ils ont déjà une base affective et un électorat fidèle, avec les militants de cette confrérie. Celui qui représente le parti, est un acteur nouveau, un homme neuf, qui n’a jamais été du système politique. Le PUR  bat campagne là-dessus. Il essaie de se démarquer en mettant en avant le fait qu’il n’est pas un politicien professionnel, un politicien de métier. Et c’est un discours qui commence à prendre au Sénégal. Les Sénégalais en ont marre de cette classe de politiciens de métiers, ils veulent voir autre chose.

Le deuxième c’est Ousmane Sonko. Il sera un peu la coqueluche de cette élection présidentielle de février 2019. En matière politique, il y’a des dimensions subjectives, qui relèvent de l’esthétique qui aux premiers abords, peut paraitre anodins mais qui peuvent faire une grande différence auprès de l’électorat sénégalais qui est majoritairement jeune et genré. Ousmane Sonko est à la tête d’une coalition de partis et de mouvements de soutien. Il est relativement jeune (44 ans), son discours est hors cadre et tranche avec les discours de politique politicienne habituelles, selon certaines filles : il est beau. Tout ça, ce sont des critères d’identification et de marqueur social qui font que beaucoup pourraient voter pour lui rien que pour ces aspects là sans pour autant comprendre les contours de son programme. Car, fondamentalement et hélas, le vote au Sénégal et en Afrique, se fait souvent sur des bases affectives et suggestives, davantage que sur les bases de programmes et de projets de société. En Afrique et pour les élections, il faudra davantage parler et dialoguer avec le cœur que la raison et l’ordre du discours est extrêmement important. A part ces deux-là, tous les autres ont fait leur temps et les sénégalais ont déjà fini de se faire leur idée et leur opinion sur ces leaders politiques là.

Une coalition de l’opposition peut-elle voir le jour dans l’éventualité d’un second tour?

Oui absolument. Actuellement, tous les jeux sont possibles. Il y’a eu beaucoup de leaders politiques qui ont vu leurs candidatures invalidées par le conseil constitutionnel. Les recalés s’organisent afin de constituer des grands pools pour combattre Macky Sall. Ce dernier lui-même, se bat pour créer de fortes alliances autour de sa candidature. Mais vous savez le second tour d’une élection n’est la seconde mi-temps d’un match mais c’est un tout autre match. Un second tour n’est pas un deuxième tour mais une nouvelle course, une nouvelle élection. D’après nos projections, nous risquons d’aller vers une situation inédite au Sénégal, où pour la première fois dans sa trajectoire politique et électorale, un président candidat à sa propre succession, ira au second tour et finira par remporter la présidentielle. La jurisprudence politique nous enseigne au Sénégal que lorsque qu’un Président est contraint à un second tour, il le perd au bout du jeu. Cela a été le cas avec Abdou Diouf en 2000 mais aussi avec Abdoulaye Wade en 2012. D’après nos analyses, pour que le challenger batte le favori, président sortant au second tour, il faudrait que les écarts de voix entre le favori et le challenger ne dépassent pas les 15%. Mais d’après les tendances lourdes et les sondages sous nos coudes, il risque d’avoir entre 25 à 30% d’écart de points entre Macky Sall le favori et son challenger qui viendra en deuxième position et le mettre en ballotage. Ce qui est un gap assez important. Nous situons l’électorat de Macky Sall autour de 38 à 42%, donc insuffisant pour passer au premier tour. Son second, nous estimons son score entre 15% et 18%, le gap est de presque de 20 points. Avec le jeu des alliances, Macky Sall pourrait passer au second tour. En ce moment, ce sera pour les candidats malheureux, plus de l’analyse arithmétique davantage que de calcul géométrique,  en ce sens qu’ils pourront se dire que si Macky Sall, qui a déjà fait un mandat, va vers son second et dernier mandat de cinq ans. Politiquement, ils pourront se dire que ce serait plus soutenable de le voir réélit , à leur corps défendant, pour cinq ans, il fera ses cinq ans et après, les cartes seront redistribuées, que de soutenir un nouveau candidat qui s’il est élu président, a potentiellement 10 ans devant lui. Certains pourraient se dire que c’est leur propre carrière politique qui est en jeu. C’est une grille d’analyse. Nous allons vers l’élection présidentielle la plus ouverte de toute son histoire politique.

Présidentielle 2018 : Soumaila Cissé appelle à la résistance

Suite à la proclamation  lundi 20 août des résultats définitifs du scrutin du 12 août, le candidat Soumaila Cissé chef de file de l’opposition, s’est exprimé devant la presse et des centaines de ses partisans jeudi 23 août 2018 dans une salle de l’hôtel Salam à Bamako. S’appuyant sur des preuves de fraudes rassemblées et publiées par sa base, celui que les militants de l’URD acclament en tant que « Président », rejette les résultats et  appelle à un « large front pour la sauvegarde de la démocratie ».

Il sonnait 17h 29 quand Soumaila Cissé fît son entrée sur les lieux, salle pleine à craquer, accompagné de quelques membres de la Plateforme pour l’Alternance et le Changement, sous  une  « standing ovation » des centaines de  « restaurateurs de l’espoir ».

Comme pour rappeler la supériorité du vivre-ensemble de la nation malienne sur les différends politiques, l’homme fort de l’URD  a d’abord rappelé le contexte de célébration de la fête de la Tabaski 48h plutôt, décrivant la « manifestation de notre foi, qui nous élève à plus de respect en notre humanité et ouvre nos cœurs à la tolérance et à solidarité fraternelle ». S’en ai suivi des propos  discréditant formellement les résultats de l’élection validés par la Cour Constitutionnelle.

Indexations de fraudes                                             

« Force est de reconnaître que les bourrages d’urnes en particulier dans les régions du Nord, dans les zones CMDT et office du Niger sont des faits avérés qu’on ne peut plus encore décemment et ouvertement nier », indique celui que ses partisans ont surnommé « Soumi Champion ». Le prétendant au palais de Koulouba  déplore l’arrêt rendu par la Cour Constitutionnelle, qui selon lui, n’a malheureusement donné aucun signe d’apaisement à ceux qui espéraient encore une reconnaissance, même minimale, des fraudes avérées dont ils avaient été parfois témoins. Soumaila Cissé dénonce des irrégularités criardes telles que entre autres l’accès refusé de ses assesseurs dans 8750 bureaux de votes, des centaines de milliers de procurations, l’utilisation abusive des moyens de l’Etat ainsi que la partialité du gouvernement. La plateforme pour l’Alternance et le Changement, dont il est le candidat,  a en effet mis au point un document intitulé « Election Présidentielle 2ème tour 2018 : Dictature de la Fraude » dans lequel des chiffres précis sont avancés.

Rejet des résultats

Le chef de file de l’opposition, Soumaila Cissé rejette « catégoriquement et sans équivoque » les résultats proclamés par la cour constitutionnelle et ne reconnaît pas « le président déclaré élu » par elle. « Que les bricoleurs d’élections truquées sachent que leur prétendu gloire  est une illusion » met t-il en garde sur un ton harangueur, accueilli dans la salle par des acclamations. «  Il est venu le temps  de rétablir la vérité, il est temps surtout de reconnaître la victoire citoyenne, il est temps enfin de restituer la victoire volée » insiste le principal challenger du président Ibrahim Boubacar Keita.

Appel à la mobilisation

Le natif de Niafunké ne compte pas se plier devant ce qu’il qualifie de  «  victoire volée ». « J’en appelle à tous les acteurs politiques et de la société civile, aux candidats à l’élection présidentielle, aux partis politiques, aux associations de jeunes et de femmes, aux syndicats et à tous les Maliennes et Maliens  épris de paix et de justice pour la constitution d’un large front pour la sauvegarde de la démocratie », lance t-il. Pour ce faire, Soumaila Cissé incite à une grande marche pacifique samedi 25 août 2018 afin que « notre démocratie se restaure et se renforce ». « Marchons pour que votre libre choix soit reconnu, Marchons pour imposer votre victoire, Marchons pour investir en votre nom, votre candidat qui ne trahira pas vos espoirs », précise celui qui se dit attaché à la paix sociale et à la  cohésion sociale en tant que républicain et démocrate.

IBK veut placer la jeunesse au cœur de son second mandat

Réélu à la tête du pays pour un second mandat de cinq ans, IBK entend placer la jeunesse au cœur de son nouveau quinquennat. S’exprimant devant ses soutiens, après confirmation sans surprise de sa victoire par la Cour Constitutionnelle, le président a assuré prendre l’engagement de faire de son prochain mandat celui de la jeunesse. « Je sais ce que je vous dois. Je sais ce que ma génération vous doit. Je sais ce que ce pays vous doit » a-t-il martelé à plusieurs reprises. « Je consacrerai le principal de notre effort à votre épanouissement, en vous dotant des moyens nécessaires à votre formation, à votre émancipation, à votre réussite » ajoute-t-il. Affirmant avoir tiré de nombreux enseignements durant la présidentielle, il a appelé les acteurs politiques et la société civile à mener une réflexion profonde sur l’évolution des institutions pour améliorer le système démocratique. « Cette réflexion devra être conduite de manière large et inclusive, j’en serai le garant ».Dans cette toute première déclaration après sa réélection, le président s’est dit préoccupé par le problème écologique du pays, notamment la préservation du fleuve Niger, ce grand patrimoine en péril.

Main tendue                      

Alternant fermeté et message de paix durant son intervention, IBK s’est posé en rassembleur. Il a tendu la main au chef de file de l’opposition Soumaila Cissé, candidat malheureux à la présidentielle qui rejette les résultats de l’élection dénonçant une fraude. Ses partisans ont manifesté samedi dernier contre la réélection du président Keita. De nouvelles manifestations sont prévues après la fête de Tabaski. « Après la bataille électorale, il y a les retrouvailles » a tempéré IBK. « Pour bâtir un avenir de tous les possibles, le Mali doit pouvoir compter sur toutes ces filles et tous ces fils. Chacun aura sa place » assure-t-il.

 

Thomas Boni Yayi: « Il faut que nous sortions du cycle des élections compliquées en Afrique »

Président de la République du Bénin du 6 avril 2006 au 6 avril 2016, Thomas Boni Yayi s’est éloigné de la vie politique de son pays et coule « une retraite paisible », avec une pause pour venir au Mali en qualité de Chef de la Mission d’observation de l’Union africaine pour la présidentielle, dont le second tour a eu lieu le 12 août. À 66 ans, l’ancien chef d’État, qui dirigeait une équipe de personnalités de haut niveau (anciens Présidents, Premiers ministres, ministres et parlementaires, ainsi que de nombreux diplomates africains), a salué le peuple et les autorités maliens pour l’organisation à échéance du scrutin. Selon lui, les Maliens doivent maintenant se tourner vers l’avenir, avec comme priorité, parmi d’autres, la formation civique du citoyen. Dans un style bien à lui, il répond aux questions de Journal du Mali.

Comment qualifieriez-vous la présidentielle malienne en général et le second tour que vous venez d’observer au nom de l’Union  africaine en particulier ?

Je parlerai de la sérénité de tout un peuple, de toute une classe politique, d’un gouvernement, d’une société civile responsables. On peut parler également des efforts notables qui ont été faits dans le sens d’une meilleure transparence du scrutin, car, sur ce point, il y avait beaucoup de manquements et de désaccords entre le gouvernement et la classe politique. Il a fallu des discussions entre tous les acteurs pour obtenir des améliorations dans la gouvernance électorale. Je salue le respect du délai constitutionnel, s’agissant des délais du premier tour. Nous avions lancé un appel pressant pour que les gens aillent voter, pour que la jeunesse puisse utiliser ce droit citoyen, ce droit civique. Je parlerai enfin de quelques obstacles, comme les questions sécuritaires, les calamités naturelles, notamment les inondations, les crises intracommunautaires qui sont autant de menaces qui ont compliqué la tenue du scrutin. Sans oublier les djihadistes, qui ont interdit le vote ou menacé les gens qui voulaient aller voter.

Votre appréciation de ce second tour ?

Il y a de nombreux facteurs endogènes et exogènes. Le Mali vient de loin et il faut en tenir compte, tout en mettant de la rigueur dans les observations et les appréciations que nous avons eu à faire sur le processus. Les acquis que nous avons pu obtenir n’étaient pas évidents, donc je peux vous dire que le scrutin peut être jugé comme acceptable quand on intègre tous les paramètres et qu’on cumule leurs impacts. On peut le dire, le scrutin est acceptable.

Le candidat Soumaïla a annoncé qu’il ne reconnaitrait pas les résultats officiels de ce second tour. Craignez-vous une crise postélectorale ?

Je m’en tiens au délai légal et je pense que nous devons nous en tenir à ce qui est prévu comme délai constitutionnel pour les résultats. Je pense que les acteurs, je les connais, je les côtoie, sauront mettre le Mali au-dessus de tout et rester dans le cadre de la loi, même pour leurs contestations.

En avez-vous discuté avec les différents acteurs ? 

Je viens de quitter le Premier ministre (le lundi 13 août au soir, NDLR). La veille du scrutin nous avons rencontré le Président IBK. Nous étions également avec le Président Cissé ainsi que quelques candidats malheureux. Nous avons également discuté avec les partenaires que sont l’Union européenne, les Nations unies, la CEDEAO, l’OIF, etc. L’appel au calme que nous ne cessons de lancer est entendu de tous et, pour ce qui est des acteurs politiques, surtout des candidats qualifiés pour le second tour du scrutin présidentiel, je leur serai reconnaissant d’en faire une gestion pacifique, pour le bonheur du Mali, de l’Afrique de l’ouest et de tout le continent.

Quelle lecture fait votre mission du faible taux de participation ?

Il faut que nous sortions du cycle des élections compliquées en Afrique. Pour cela, il y a deux clés. Tout d’abord la formation des populations. C’est un véritable chantier à entreprendre par les dirigeants, mais aussi par les politiques. Quand vous voyez que dans un pays comme le Mali les gens ne sortent pas voter, que le taux de participation atteint difficilement les 50%, c’est qu’il y a une faible connaissance de l’importance du vote par les populations. C’est un travail d’éducation, d’information, et cela doit commencer dès le plus jeune âge, pour que les gens comprennent que le choix des dirigeants est un droit mais aussi un devoir et que la gouvernance que l’on désire ne peut advenir que si on est partie prenante. Cela prendra du temps et il faut commencer maintenant. Il faut que les politiques s’en sentent responsables et s’y investissent. La deuxième clé, c’est que ceux qui dirigent un pays sachent partir quand c’est le moment. Moi, j’ai dirigé le Bénin pendant 10 années. J’ai travaillé avec tout le monde et nous avons eu de grandes avancées sur le plan social, économique, etc. Quand l’heure est venue, j’ai passé le témoin. Cela aussi motive les électeurs.

Il faut donc inviter ceux qui sont de l’autre côté à nous rejoindre, nous les retraités (rires). Vous me comprenez. Vous avez vu dans notre délégation des anciens Présidents, des anciens Premiers ministres, des diplomates, etc. Cela veut dire que l’on peut continuer à donner, même après le pouvoir.

Au lendemain du premier tour, les Maliens ont énormément partagé une image de vous, assis dans un bureau de vote, avec comme légende : « il y a une vie après la présidence ». Parlez-nous, Excellence, de votre vie après la présidence.

Je suis surpris que vous parliez de cela. Cette image, c’est exactement cela la vie après la présidence. La vie après la présidence, c’est une vie que nous devons consacrer à nos peuples. Dans un contexte aussi important dans la vie du peuple malien, venir assister, appuyer ce scrutin, voilà une partie de cette vie après la présidence. Ma vie après la présidence, c’est toute une encyclopédie. C’est une vie heureuse, c’est une vie de partage d’expériences. Dans cette vie heureuse de retraité, nous serons heureux d’accueillir d’autres retraités. Lorsqu’on a 80 ans, c’est un tournant important, et là, vous pourriez me demander de dire « Monsieur le Président, faites appel alors à tous ceux qui ont 80 ans pour s’associer à vous ». Vous m’auriez fait une excellente recommandation ! (rires)

Présidentielle 2018 : le camp d’IBK fête la victoire

Le ministère de l’Administration territoriale et de la Décentralisation a proclamé ce jeudi matin les résultats provisoires du second tour de l’élection présidentielle. Le président IBK obtient  un score  de 67, 17% contre 32,83 pour son rival Soumaila Cissé. En attendant la validation par la cour Constitutionnelle, au QG de l’Alliance Ensemble pour le Mali, la fête bat son plein.

Après l’annonce des résultats provisoires du second tour de la présidentielle, le camp d’IBK a exulté Comme pressenti, le président IBK est sorti vainqueur de ce énième duel l’opposant au chef de file de l’opposition.

Des cris de joie, des chants, des danses, sous le majestueux immeuble servant de QG de campagne à l’Alliance Ensemble pour le Mali, le moment était festif.

« Aujourd’hui est un jour de joie.  Notre président a eu le deuxième mandat, c’est notre fierté », confie Mohamed Denon, qui participe à la célébration devant le quartier général de campagne. S’il reconnait que les cinq  premières années « n’ont pas été   facile », il croit en une transformation dans plusieurs secteurs  de la vie du pays. « Insh’Allah, il y aura des changements, l’insécurité, le chômage, tout va s’arranger », dit-il, drapeau du Mali en main.

A l’intérieur du QG, cadres et militants savourent la victoire. Des rires, des « félicitations », des accolades chaleureuses, une atmosphère bonne enfant y règne. « Il n’a pas fait tout ce que le peuple attendait de lui mais de grands chantiers ont été menés, il travaille sur la paix, le réarmement de notre armée, l’économie », souligne Alhassane Dembelé, président de l’Alliance des Nationalistes convaincus pour le Développement du Mali (ANCD Mali), un parti membre de l’Alliance Ensemble pour le Mali. Il ajoute : « Quand le président est arrivé en 2013, le pays était dans le chaos, mais aujourd’hui c’est un nouveau départ pour le Mali » dit-il, tout  enthousiaste

Même expression de satisfaction du directeur exécutif de l’Alliance EPM.  « C’est un sentiment de fierté que je ressens, parce qu’après le 1er tour  nous nous sommes mobilisés encore, et c’est  l’ensemble du peuple malien  qui a renouvelé sa confiance de Kayes à Kidal pour réélire le Président IBK », indique Mahamane Baby. Pour lui, les priorités du président sont claires. « Il s’agit de poursuivre la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation, renforcer la décentralisation, les infrastructures, réviser  certains textes… », cite-t-il, regrettant une campagne « de vulgarité » menée par les opposants. « Nous nous réjouissons de cette belle image que la démocratie malienne est en train d’envoyer au reste du monde » se félicite Jeamille Bittar, vice-président de l’Alliance EPM. Pour lui, les défis restent les mêmes. « Il faut une réconciliation des cœurs et des esprits, que tous les maliens puissent apporter leur pierre pour la construction nationale », estimant que tout est prioritaire au Mali. « L’heure est au travail bien fait », conclut-il.

«  Quand on veut juger le bilan de quelqu’un il faut regarder d’où on est parti »se défend un membre de la cellule de communication, tout en reconnaissant que tout n’a pas été rose. « L’enjeu maintenant est de consolider les acquis, amplifier les réussites mais aussi corriger les manques », préconise-t-il.

En attendant les résultats de la Cour Constitutionnelle,  l’effervescence continue chez les militants qui ont réussi à travers leur expression citoyenne à maintenir IBK au palais de Koulouba.

Louis Magloire Keumayou : « Le Mali est un pays qui a un semblant d’unité»

La période effrénée de la présidentielle malienne tend vers sa fin. Elle aura duré plus d’un mois, avec des discours enchanteurs et des grands meetings. Sur les 24 candidats du premier tour du 29 juillet, deux ont refait le jeu le 12 août. Le Président du club de l’information africaine, Louis Magloire Keumayou, a accepté de répondre aux questions du journal du Mali  sur le bilan du scrutin et l’évolution du Mali depuis l’élection de 2013. 

Quel bilan peut-on tirer de cette présidentielle ?

Le premier constat est que l’élection s’est tenue, malgré des conditions qui n’étaient pas totalement réunies pour qu’elle se tienne sereinement sur l’ensemble du territoire malien. Elle a eu lieu, tant mieux. Maintenant, avec toutes les violences qu’il y a eu sur le plan sécuritaire et verbal, il faudrait voir les suites qui seront données. Après c’est à la Cour constitutionnelle de se prononcer sur les résultats acheminés et centralisés à Bamako. Il est un peu trop tôt pour savoir si toutes les conditions ont été réunies pour qu’on parle d’une élection transparente, inclusive et réussie.

Y a-t-il eu des nouveautés par rapport à 2013 ?

La grande nouveauté est que le taux de participation, notamment dans le nord, a été plus important. Mais il ne faut pas se méprendre sur le fait que les gens croient en leur pays. Ils croient en ce que la démocratie peut encore apporter au Mali. On ne peut pas dire que les acteurs politiques eux-mêmes aient fait beaucoup pour saisir l’électorat entre 2013 et 2018. Malheureusement, ni IBK, ni Soumaila, ni les autres n’ont investi le nord, qui est quand même une partie du territoire malien, pour le rassurer, pour le reconstituer avec le sud. L’accord pour la paix, c’est quelque chose qu’il faut appliquer. Il faut que les acteurs politiques s’en saisissent et fassent en sorte que le pays revienne à un fonctionnement normal, celui qui a été le sien avant les attaques dans le nord. Il y a un autre défi qu’il faut relever, celui de sortir du tout militaire. Il faut arrêter de penser que la seule solution aux problèmes du Mali est militaire. Gagner la guerre est beaucoup moins  compliqué que de gagner la paix, et aujourd’hui même la guerre n’est pas encore gagnée. Je pense qu’il faut surtout investir le champ social et économique pour que les gens se sentent sécurisés.  C’est la mission première de l’État, protéger ses citoyens.

Est-ce que l’attachement à l’Accord au nord explique le taux favorable à IBK ?

Je ne sais pas qui doit récolter le gain de cette forte participation au nord, si ce n’est le peuple malien lui-même. Que le nord se reconnaisse dans des élections le prouve. C’est le Mali qui sort gagnant de cette forte participation.

Qu’est ce qui explique le faible engouement ailleurs ?

Ce sont les leaders politiques qui n’arrivent plus à se montrer « sexy » vis-à-vis de la population. Même dans les grandes démocraties les taux de participation baissent. Mais au Mali, en plus du fait que les politiciens soient mauvais, il y a les situations socioéconomique, sécuritaire qui sont mauvaises, l’État qui est ébranlé dans ses fondements. Malgré cela, les politiques font comme si on était dans un pays normal, qui n’a pas de problèmes de sécurité, économiques et sociaux. Je pense qu’ils déçoivent les électeurs. Malgré l’engouement qu’il y a eu dans les années 90 pour que le Mali devienne un pays de démocratie exemplaire, aujourd’hui on a l’impression que le soufflé est retombé et que les gens n’y croient plus trop.

Quels enseignements peut-on tirer de cette élection ?

Le Mali est encore un pays qui a un semblant d’unité. Même si tout n’a  pas été gagné dans la conquête du nord, on sent que tous les Maliens, du sud au nord en passant par le centre, se sentent concernés par les enjeux politiques et démocratiques. Ce qui est une bonne nouvelle. Le reste est entre les mains des politiciens eux-mêmes.

Quels sont les défis auxquels le nouveau président devra faire face en urgence ?

Il faudra qu’il réconcilie les Maliens, parce qu’un pays qui est divisé n’est pas fort. Avant on parlait d’un pays divisé en deux, aujourd’hui, il n’est pas exagéré de dire qu’il divisé en trois, puisque le nord, le centre et le sud sont soumis à des tensions très fortes. Le deuxième enjeu est celui de reconquérir la souveraineté de l’État partout où elle doit être exercée. Le troisième est de remettre les hommes au centre de la politique, parce qu’il faut que les politiciens arrivent à rendre les Maliens heureux à nouveaux.

Présidentielle 2018: Résultats définitifs du 1er tour

Les résultats définitifs du premier tour de l’élection présidentielle ont été proclamés ce mercredi par la Cour Constitutionnelle. Un second tour est confirmé, remake du duel de 2013 entre le président sortant Ibrahim Boubacar Keita et le candidat de l’URD Soumaila Cissé

Ibrahim Boubacar KEITA (41,70%)

Soumaïla CISSE (17, 78%)

Aliou DIALLO (8,03%)

Cheick Mohamed Abdoulaye Souad dit Modibo DIARRA (7,39%)

Housseini Amion GUINDO (3, 90%)

Oumar MARIKO (2, 33%)

Modibo KONE (2, 29%)

Choguel Kokalla MAÏGA (2,18%)

Harouna SANKARE (1, 80%)

Mamadou Oumar SIDIBE (1,70%)

Modibo SIDIBE (1,42%)

Kalfa SANOGO (1,22%)

Mamadou DIARRA (1,13%)

Modibo KADJOKE (0,95%)

Moussa Sinko COULIBALY (0,95%)

Adama KANE (0,82%)

Daba DIAWARA (0,72%)

Mountaga TALL (0,64%)

Dramane DEMBELE (0,59%)

Mohamed Ali BATHILY (0,55%)

Hamadoun TOURE (0,54%)

Niankoro Yeah SAMAKE (0,52%)

Mamadou TRAORE (0,49%)

Madame Djénéba N’DIAYE (0,38%)

Présidentielle 2018 : Démonstration de force d’IBK au stade du 26 mars

La campagne électorale est désormais ouverte au Mali. Le Président IBK, candidat à sa réélection a tenu meeting géant au stade du 26 mars. Impressionné par la mobilisation, il invite ses partisans  à le réélire dès le 1er tour.

Devant l’édifice, à 14 heures déjà, la mobilisation et la ferveur étaient totales. Partout, des pancartes et des véhicules à l’image du candidat.

A l’intérieur du stade, l’effervescence grandissait. La cérémonie se veut grandiose. Le Premier ministre Soumeylou Boubeye Maiga, le président de l’Assemblée nationale Issiaka Sidibé, plusieurs membres du gouvernement, des députés, des présidents de partis politiques, et une pléiade d’artistes ont donné à ce lancement un visage intimidant. Il s’agissait aussi pour la plateforme Ensemble pour le Mali qui porte le projet de la réélection d’IBK de marquer les esprits, surtout après la récente démonstration faite par le candidat de l’URD, l’honorable Soumaila Cissé, dans ce même lieu.

Alors que le public était captivé par les prestations artistiques, IBK fit son entrée dans l’édifice. Il était 16h50 . Aux éloges des artistes, qui rappellent ses réalisations dans divers domaines, celui que l’on surnomme  ‘’Boua’’, affiche sa joie. Se passant de son discours, le président IBK, dans une intervention teintée d’émotion est revenu sur ‘’les ont dit’’ dont il avait fait objet un moment. Mieux, il annonce dans la foulée, l’arrivée ce lundi de quatre avions pour l’armée malienne. Des cris de victoire émanent du public. L’hôte du jour met en avant ses capacités à rassembler les Maliens et à reconstruire le Mali. Il déclare sans détour et avec assurance  que : « Baou ta bla insh’Allah !». Repris dans la foulée par les milliers de militants.

Pour la plupart des partisans d’IBK, les chantiers entamés et la complexité de la  crise sont des motifs de lui renouveler la confiance. Comme pour dire à ceux qui le pensaient ‘’fatigué’’ qu’il a toujours de l’énergie. « Boua ta bla,  IBK a trouvé le pays dans une situation difficile mais il a géré. Aujourd’hui c’est lui seul qui peut bien armer les FAMA. Il est en train de ramener la paix  même si ce n’est pas facile », assure Moussa Koné, militant de l’Union pour la Démocratie et le Développement, membre de la plateforme Ensemble pour le Mali.

Le directeur de campagne, Dr Bocary Treta après avoir remercié  les uns et les autres, a rassuré de la victoire d’IBK le 29 juillet. Il invite les électeurs à retirer leurs cartes pour élire le « candidat de tous le Mali ».

Présidentielle 2018 : Soumaila Cissé entend restaurer l’espoir

La campagne est officiellement lancée. Soumaila Cissé, candidat à la présidence a tenu un grand meeting ce dimanche au boulevard de l’indépendance. Devant plusieurs de ses partisans et soutiens, le chef de file de l’opposition a promis de « restaurer l’espoir ».

« Nous avons un choix à faire le 29 juillet, continuer sur le chemin de l’échec, ou nous redresser » à assurer Soumaila Cissé devant ses nombreux partisans. Le principal opposant du président sortant se donne comme mission une fois élu de rendre à l’Etat son autorité, de rétablir la sécurité, de pacifier le pays du Nord au Centre ou encore de lutter contre la corruption. « J’exigerai de mes collaborateurs une probité exemplaire, je combattrai le clientélisme » promet-il.

Des combats qu’il n’entend mener seul, « nous réussirons en nous mobilisant, choisissez l’espoir » a-t-il lancé devant ses partisans. Conscient que la participation sera l’élément déterminant de cette élection, il a incité les Maliens à aller retirer leurs cartes d’électeurs. « C’est indispensable, fondamental ».

Pour gagner Koulouba, le chef de file de l’opposition s’appuie sur son programme présidentiel. Lequel programme axé sur cinq grands piliers (restaurer la paix, instaurer un dialogue entre les Maliens, mettre l’Etat au service des populations, donner aux jeunes et aux femmes la place qui leur est dû dans la société et construire une économie performante) devrait lui permettre de « remettre le Mali sur pied »

Nombreux soutiens                                             

Après le chanteur Salif Keita qui a appelé à voter Soumaila, c’est l’humoriste le plus célèbre du Mali qui a décidé d’apporter son soutien au candidat de l’URD. Habib Dembélé « Guimba » à justifier son choix par le fait que l’URD est le plus à même de faire tomber le régime en place.

En prélude du discours du candidat, son directeur de campagne Tiébilé Dramé a assuré que Soumaila Cissé bénéficie du soutien de plus de 100 associations, de plusieurs célébrités, du CDR de Ras Bath qui se sont tous donnés le mot afin d’élire le candidat malheureux de 2013 dès le 1er tour. « Ce sont des signes qui ne trompent pas, l’alternance est en marche, notre projet va remettre sur pied un pays abîmé, mettons fin à cinq années de calvaire et de souffrance » annonce t-il.

Campagne électorale : Chacun selon ses moyens

A défaut d’un budget plafond fixé par la loi électorale, les candidats à l’élection présidentielle battent campagne en fonction de leurs moyens propres. Si elle peut coûter des centaines de millions de francs CFA à certains, tous disent en minimiser les coûts en privilégiant des approches nouvelles.

Même s’il est difficile de chiffrer une campagne électorale au Mali, les candidats à l’élection présidentielle s’acquittent tous de certaines dépenses obligatoires. En effet, pour battre campagne dans un pays aussi vaste, il faut pouvoir se déplacer pour aller à la rencontre des populations. Des déplacements qui nécessitent d’importants moyens, dont des véhicules. Pour parcourir 50 cercles, il faut envisager la location de deux ou trois véhicules, selon l’importance géographique de la localité visitée. « À 75 000 francs la location journalière du véhicule, multipliée par le nombre de cercles, vous pouvez vous faire une idée du coût à ce niveau », explique Monsieur Nouhoum Togo, conseiller à la communication du candidat Soumaïla Cissé. À ces dépenses il faut ajouter « l’organisations de soirées ou de matchs de football », ajoute Monsieur Togo.

Si les nouvelles dispositions de la loi électorale, qui ont notamment interdit « les pratiques publicitaires à caractère politique et commercial (offre de pagnes, tee-shirts…) (…), les dons et libéralités en argent… », ont « allégé les coûts », il faut toujours compter avec les « Worosongo » ou prix de colas en bamanan, remis à certaines autorités coutumières pour signaler sa venue dans une localité. Les déplacements à l’extérieur du pays pour y rencontrer les Maliens de la diaspora font également partie du programme et représentent des coûts importants pour les candidats.

Pour mobiliser les ressources, les candidats misent d’abord sur leurs propres moyens, mais aussi sur des amis « qui croient en eux ». Dans un pays en proie au chômage et aux difficultés économiques, certains pensent même que la « période de campagne est l’occasion de faire part de ses besoins ».

Malgré un tel contexte, « le financement populaire » est une réalité, selon Monsieur Boubacar Traoré, porte-parole du candidat Mamadou Diarra. S’il « n’est pas question d’acheter qui que ce soit, il faut cependant pouvoir aller à la rencontre des Maliens. Ce qui nécessite une logistique lourde ». Pour réussir, il compte sur « des compatriotes riches qui sont à l’extérieur et veulent voir les choses changer. Ils n’hésitent pas à mettre des moyens importants ».

S’il compte sur ses donateurs, le candidat de l’ADP Maliba, Aliou Boubacar Diallo, fournit d’importants efforts, selon le secrétaire politique du parti, Cheick Oumar Diallo. Plutôt que de focaliser sur les chiffres, il préfère « se concentrer sur la tenue d’une campagne responsable, sans effets d’annonce mais avec un programme pour le Mali ».

Ras Bath rallie le candidat Soumaïla Cissé

C’est lors d’une conférence de presse ce 28 juin au Carrefour des jeunes que l’animateur radio et activiste Mohamed Youssouf Bathily, dit Ras Bath a annoncé le soutien de son mouvement le Collectif pour la Défense de la République au candidat Soumaïla Cissé. Une satisfaction pour ce dernier et une déception pour certains soutiens du leader du CDR.

« Après le choix du candidat Soumaïla Cissé et son parti, la deuxième phase est la plus importante. Le CDR ne veut pas d’un soutien aveugle », s’est notamment exprimé Ras Bath. Le président du CDR a expliqué que de tous les candidats, c’est celui du l’URD qui présentait le plus de points de convergence avec leurs critères. Relatifs notamment à la connaissance de l’Etat à l’intérieur et aussi des relations avec l’extérieur ainsi que de l’expérience de la gestion, c’est donc Soumaïla Cissé et son programme qui ont convaincu les membres du CDR.

Un soutien qui se veut objectif, a cependant tenu à préciser Ras Bath qui affirme, qu’ils tirent les leçons des échecs des autres associations de la société civile qui apportaient leur soutien à un candidat et appelaient juste à voter pour ce dernier. Pour Ras Bath, c’est une responsabilité partagée désormais entre le candidat et son mouvement qui doivent ensemble porter sur le terrain leurs messages.
C’est en tout cas une satisfaction, et même un motif de fierté pour Maître Demba Traoré, directeur adjoint de campagne du candidat Soumaïla Cissé. Ceci démontre selon lui que « ces jeunes ont à cœur le devenir du pays ».

« J’ai écouté avec attention et intérêt. J’ai été impressionné par la qualité du travail et les critères dégagés par ces jeunes pour le choix du candidat qui répond à leurs yeux aux besoins de changement ». Il s’agit là, selon Maître Traoré, d’une leçon que la société civile donne aux hommes politiques. « Une belle leçon de démocratie », qu’elle démontre ainsi à la classe politique et montre qu’elle veillera désormais au fonctionnement de l’Etat.
Convaincus que ce mouvement démontre ainsi qu’il « y a une autre façon de faire la politique », Maître Traoré ajoute que la démocratie qui n’est pas une fin en soi, mais une source d’épanouissement des citoyens. « Le choix libre des citoyens est la voie la mieux appropriée pour le développement », ajoute-t-il. Avant de souligner le besoin de vérité pour faire avancer le Mali.
S’il exprime le souhait de voir des échéances se dérouler en toute transparence et crédibilité, il ajoute qu’il faut rassembler, ce que son parti continuera à faire.
Ce ralliement n’est pas cependant du goût de tout le monde, notamment des soutiens de l’activiste Ras Bath. « Je continue à soutenir le combat de Ras Bath, mais je ne voterai pas pour Soumaïla », déclare Cheick Oumar Tidiane Doucouré sympathisant du mouvement de Ras Bath. Pour lui, ce ralliement n’est pas une surprise. « C’était planifié, parce que Soumaïla a une chance de battre IBK. Le vœu du CDR est qu’IBK ne soit pas réélu. Mais je pense que Soumaïla n’incarne pas le changement », conclut ce militant.

Transformons le Mali : le projet enfin dévoilé

Le mouvement Transformons le Mali a présenté le 23 juin au musée national, lors de ses assises, son projet pour la transformation du pays. Fruit d’un travail acharné de six mois, cette initiative unique aboutit à 58 stratégies proposées à l’intention des candidats à la présidentielle. 


« Il y a six mois, nous avons entamé cette belle aventure humaine et civique. Notre aspiration au changement ne suffisait plus et notre impuissance était devenue insupportable. Le confort de l’inaction était devenu dangereux et indécent », se rappelle Mahamadou Camara, coordinateur général du Mouvement. « Nous allons à la rencontre des candidats à l’élection présidentielle et de leur staff pour leur présenter notre projet et leur demander de s’engager », a souligné le coordinateur.


58 stratégies autour de 8 piliers essentiels sont désormais soumises aux candidats à la présidentielle pour enclencher une fois élu la transformation profonde du Mali. Éducation à capital humain, culture-identité et citoyenneté, diaspora, gouvernance et management public, agro-industrie et économie rurale, santé publique, infrastructure et investissement, entrepreneuriat et innovation sont les grands axes de ce bouleversement tant attendu. Une tâche ardue, qui nécessitera de la constance et de l’engagement renouvelé.

Par exemple dans le domaine de l’éducation, le projet de la transformation à soulever les insuffisances du système éducatif malien : « Inégalités persistantes entre filles et garçons, les disparités prononcées dans les zones rurales et au sein des classes sociales les plus démunies, l’inexistence d’un système de formation professionnelle fiable, l’état inquiétant des formations diplomates mais qui ne forment pas » entre autres.
Transformons le Mali propose un certain nombre de stratégies pour pallier à ces maux presque connus de tous : « Instaurer un système de formation et d’évaluation continue des enseignants ; revaloriser à la fois le statut et le métier d’enseignant à l’horizon des dix prochaines années ; lancer un vaste programme d’alphabétisation et d’universalisation de l’accès à une éducation de base qualitative ; remettre le citoyen au cœur de l’enseignement fondamental ; créer un dispositif prioritaire de facilitation du retour de la diaspora malienne exerçant dans le secteur de l’enseignement supérieur ; généraliser le recours aux méthodes pédagogiques actives et mettre l’accent sur l’apprentissage autonome :’’learning by doing’’… Avec ces différentes suggestions concrètes et réalistes, ce mouvement à la fois think tank et incubateur citoyen compte « guider efficacement l’action publique et l’engagement citoyen ».


Pour Adébissi Djogan, secrétaire exécutif et cheville ouvrière de ce mouvement, la naissance des followers forts est un préalable pour réaliser cet ambitieux changement. Il appuie son argumentation sur des exemples de pays qui hier était dans un stade embryonnaire, mais aujourd’hui sont devenus des exemples. « Si nous voulons transformer le Mali, nous devons être une nouvelle génération des followers de point zéro, transformés », indique celui qui rejette ‘’le fatalisme érigé en religion’’.


Aussi, les assises ont permis au mouvement d’exposé au public certains axes du projet pour la transformation du Mali. Des échanges qui ont suivi, animés par des professeurs, des sociologues, des chefs d’entreprise, des hommes de culture ont mis en lumière des préoccupations légitimes des citoyens. « Quoi qu’on dise au Mali, il n’y aura jamais de paix et stabilité tant qu’il n’y a pas de justice », assure le professeur Clément Dembelé, candidat de la Convergence patriotique pour le changement (CPC), un des invités à ces échanges. « La justice malienne est malade, elle doit être reformée », propose-t-il.
Après l’élection le mouvement suivra sous forme de veille démocratique les engagements qui auront été pris par celui qui sera élu. Aux candidats donc de s’approprier ce concentré de propositions pour transformer le Mali.

Mahamat Saleh Anandif, RSSG, chef de la MINUSMA : « Il faut repenser le concept de maintien de la paix »

Le Représentant spécial du Secrétaire général des Nations Unies a pris part, les 18 et 19 juin à Rabat, à la 2ème Conférence annuelle sur la paix et la sécurité en Afrique (APSACO) organisée par le think tank marocain OCP Policy Center.  

Quel intérêt présente l’APSACO 2018 sur le maintien de la paix en Afrique ?

C’est bien qu’il y ait des cadres de réflexion sur les opérations de maintien de la paix. Il y en a 13 dans le monde, 7 en Afrique, dont les 5 plus grandes, parmi lesquelles la MINUSMA. Nous sommes dans une évolution positive : des missions ont fermé au Libéria et en Côte d’Ivoire. Contrairement au passé, les coups d’État sont l’exception. Les élections se tiennent. Elles ne sont pas parfaites, mais elles ont lieu. Maintenant, il faut repenser le concept des opérations de maintien de la paix. Telles qu’elles ont été pensées, dans les années 50, elles ne sont plus adaptées. J’estime que nous sommes statiques. Au Mali, le terrain actuel, caractérisé par une guerre asymétrique et des mouvements terroristes, n’est plus le cadre classique de déploiement d’une mission de maintien de la paix. Il est extrêmement important que les Nations Unies s’interrogent et s’adaptent.

On parle d’une reprise en main des opérations sur le continent par l’Union Africaine…

L’Union africaine veut s’approprier les opérations de maintien de la paix, mais elles coûtent cher. A-t-elle les moyens d’assumer ce rôle ? Les réformes parrainées par le Président rwandais Kagamé sont en cours. J’ose espérer qu’elles apporteront des solutions.

Maintenir la paix dans des pays en guerre, n’est-ce-pas paradoxal ?

J’entends cela. On ne maintient pas une paix qui n’existe pas. Au Mali, il y a un Accord pour la paix et la réconciliation. Il n’est pas idéal, mais il existe. Comparé aux arrangements antérieurs, il apporte certaines solutions. C’est également le premier accord garanti par la communauté internationale, d’où la présence des Nations Unies, qui n’est pas négligeable.

Dans un mois, la présidentielle. Comment l’appréhendez-vous ?

Les élections sont organisées pour résoudre les conflits, comme en 2013, après le coup d’État et l’invasion du territoire. Les résultats ont été acceptés par tous les acteurs et l’ordre constitutionnel rétabli. Nous allons vers l’élection du 29 juillet 2018, qui doit démontrer que la démocratie est irréversible et que le processus fait son chemin. Il faut qu’en sortent des résultats consensuels, dans une atmosphère apaisée. Nous intervenons pour que le dialogue au sein de la classe politique malienne soit maintenu. Même si la période qui précède des élections est une période de tension, nous disons toujours que le Mali est différent, que les choses sont fragiles et qu’il faut tout faire pour ne pas revenir en arrière.

Election présidentielle : la MINUSMA appuie le processus

La Mission des Nations Unies au Mali réaffirme son accompagnement au  processus électoral en cours dans le pays. Lors de sa conférence de presse bimensuelle le 21 juin la porte-parole de l’organisation a rassuré de leur engagement aux côtés des autorités.

Toutes les attentions convergent sur la présidentielle prévue dans un mois. Malgré la volonté des autorités à tout mettre en œuvre pour la réussite de ce scrutin du 29 juillet, des difficultés d’accès aux régions du nord et le centre demeurent. C’est dans ce cadre que la MINUSMA appuie déjà le gouvernement dans l’acheminement du matériel électoral, formation des agents  et sécurisation du processus. « La MINUSMA apporte un appui à l’organisation des prochaines élections générales de 2018 (présidentielle de juillet et législatives de novembre), a déclaré Mme Myriam Dessables, porte-parole de la mission. Ainsi,  4,798 Tonnes de matériel (nouvelles cartes d’électeurs) pour les quatre  régions : Mopti, Tombouctou, Gao et Kidal.

La division des Affaires électorales de la MINUSMA a organisé le 12  et 13 juin une session de renforcement des capacités de 64 agents d’appui logistiques recrutés. « Ces agents d’appui équipés chacun d’un véhicule 4X4 et de moyens de communication (ordinateurs, cellulaires) seront déployés dans les prochains jours dans les 49 cercles du Mali y compris le District de Bamako dans le cadre de la mise en œuvre de toutes les opérations électorales y compris la distribution des cartes d’électeurs biométriques dont le lancement officiel a eu lieu ce 20 juin sur toute l’étendue du territoire national », a fait savoir la porte-parole de mission lors de cette conférence de presse.

Dans le même but, la Division des Affaires électorales de la MINUSMA a pris part aux travaux du séminaire international  ayant lieu du 19 au 20 juin à Bamako. Ladite rencontre organisée par la CENI en collaboration avec l’Organisation Internationale de la Francophonie (OIF), s’est déroulée en présence de plusieurs représentants des Institutions, du ministère de l’Administration territoriale et de la décentralisation, la Délégation générale aux élections(DGE), la Cour Constitutionnelle, les représentants des partis politiques et des experts internationaux. Objectif : échanger  sur le rôle de la CENI dans le processus électoral.

Des campagnes de sensibilisation des leaders communautaires et des médias sur leurs rôles respectifs en tant qu’acteurs dans la promotion d’une culture de paix, de la cohésion sociale et de la prévention des conflits ont également été organisées à Gao. Deux autres sont prévues  à Mopti ce 22 juin et à Tombouctou le 13 juillet. « Plus de 10 sessions de sensibilisation communautaire ont eu lieu à Bamako et dans les régions avec plus de 5000 personnes participantes », comptabilise Mme Myriam Dessables.